Revalorisation des retraites : où trouver l'argent ?
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00:07 Bienvenue dans les informer de l'écho sur France Info avec le cercle des économistes.
00:11 Chaque samedi, notre débat autour des sujets qui marquent l'actualité économique et sociale.
00:16 Avec vous, Fanny Guinocher, bonjour.
00:17 Bonjour.
00:18 Nos invités aujourd'hui, Nathalie Chusseau, économiste, professeure à l'université de Lille,
00:22 et Philippe Trénard, membre du cercle des économistes, professeur au CNAM.
00:26 Bonjour, merci d'être avec nous.
00:28 On va parler retraite aujourd'hui, des retraites mieux revalorisées que le travail, Fanny,
00:33 et ça soulève forcément des questions.
00:34 Effectivement. Alors cette semaine, les partenaires sociaux, syndicats et patronats
00:38 se sont mis d'accord pour revaloriser les retraites complémentaires,
00:42 c'est-à-dire de l'Agir Carco, à hauteur de 4,9%.
00:46 Alors les pensions complémentaires, on le rappelle, c'est en général 30 à 60% des pensions des salariés du privé.
00:52 Et puis cette annonce, elle fait suite aussi à une autre annonce, quelques jours auparavant,
00:56 du gouvernement de revaloriser les retraites de base à 5,2% à partir du 1er janvier.
01:03 Alors on peut se poser la question, est-ce que la France a les moyens de soutenir ainsi
01:07 le pouvoir d'achat de ses retraités dans un budget qui est, en tout cas on nous le présente comme tel, contraint ?
01:13 On va écouter Sylvain Maillard, c'est le président des députés Renaissance à l'Assemblée.
01:18 Voilà ce qu'il disait du budget.
01:20 D'abord, moi je veux dire que c'est un budget qui est important, c'est un budget courageux.
01:25 On a un très bon budget, mais en même temps, on va être raisonnable, parce que vous l'avez dit,
01:31 on rentre dans une situation économique plus difficile, il nous faut un budget de désendettement aussi,
01:36 et donc nous allons avoir une trajectoire sérieuse.
01:39 Nous sommes des gens sérieux et on travaille sérieusement.
01:41 Alors on va avoir une trajectoire sérieuse, c'est ce que nous dit le président des députés Renaissance, Sylvain Maillard.
01:48 Mais c'est vrai que cette revalorisation, en tout cas pour les retraites du régime de base,
01:54 c'est estimé, dans ce propre budget 2024, à 14 milliards d'euros.
01:58 Alors on peut se poser la question, est-ce que ce budget est aussi sérieux ?
02:04 Est-ce qu'on a les moyens de payer cette indexation, cette revalorisation des retraites ?
02:11 Nathalie Chussot, est-ce qu'avec un budget aussi restreint, il fallait revaloriser ses pensions à cette hauteur ?
02:16 Alors d'abord, deux choses.
02:17 La première chose, c'est que c'est inscrit dans la loi la revalorisation des pensions sur l'inflation,
02:23 mais on n'avait pas d'obligation de relever d'abord toutes les pensions.
02:27 Et là, on les relève du niveau de l'inflation tel qu'elle est estimée par l'INSEE sur cette année.
02:34 Donc premier élément.
02:36 Deuxième élément, 14 milliards, c'est probablement un peu sous-évalué, on sera peut-être plus proche de 20 milliards d'euros.
02:43 Et donc si on peut penser trouver normal, je dirais, de soutenir le pouvoir d'achat des retraités,
02:51 mais dans ce cas-là, on aurait pu faire un choix, par exemple, et favoriser davantage les retraités qui sont les moins aisés,
02:57 les plus modestes et les plus frappés par les questions inflationnistes que les autres.
03:01 Et la question qui va se poser, c'est comment financer ces 14 ou ces 20 milliards,
03:05 sachant qu'on voit bien qu'on a déjà du mal à financer les mesures, les différentes réformes de la retraite,
03:11 les coups de pouce qui ont été obtenus sur les carrières longues, sur les minima contributifs, etc.
03:18 Donc on a déjà du mal à trouver les financements.
03:20 Philippe Trénard, cette revalorisation à cette hauteur-là, vous la comprenez, vous ?
03:24 Oui, mais comme l'a dit Nathalie, elle se comprend, on regarde des règles qui sont applicables
03:29 et qui ont été appliquées les années précédentes et qui sont appliquées cette année.
03:33 Alors, deuxième point, peut-être faut-il avoir un point de vue juste un tout petit peu modéré.
03:38 On dit c'est plus rapide et plus rapide que les salaires.
03:41 Bon, les salaires évoluent actuellement à plus de 4,7%.
03:46 On parle de 5,2%, le ministre a parlé de 5,2%, on n'est pas à un point de plus, deux points de plus.
03:52 Donc on est un petit peu là pour le coup dans l'épaisseur du trait.
03:56 Cependant, il y a quelque chose de très intéressant.
03:58 Les salaires évoluent donc, comme je le disais, à 4,7%.
04:01 Il y a une petite perte de pouvoir d'achat du salaire réel, c'est lié au salaire réel,
04:07 qui est en baisse de l'ordre de 0,6% sur les deux premiers trimestres, sur la première moitié de l'année.
04:13 Mais il faut bien voir que c'est quelque part lié à autre chose.
04:16 C'est lié au fait que la productivité elle-même est en baisse, -0,3% sur les premiers mois de l'année.
04:21 Et quelque part, un régime par répartition de retraite est un régime qui vous fait participer à la fortune des salariés,
04:31 à la bonne ou mauvaise fortune des salariés.
04:33 Et là, bien évidemment, on s'attendrait que quand il y a un petit peu de mauvaise fortune,
04:37 il participe aussi à la mauvaise fortune.
04:39 L'idée n'est pas d'enrichir les retraités au dépens des salariés.
04:43 Fanny ?
04:44 Alors, peut-être pas d'enrichir, mais effectivement, la question de où on trouve l'argent reste.
04:48 Et on l'a vu aussi cette semaine, j'évoquais la revalorisation,
04:53 enfin le compromis trouvé par le patronat et les syndicats autour des retraites complémentaires.
04:59 Là, c'est un régime qui est géré par les partenaires sociaux.
05:03 Et c'est vrai que là, il y a de l'argent que le gouvernement convoite, justement, peut-être pour payer les retraites de base.
05:12 Et c'est vrai que le gouvernement, et ça fait débat, on va en parler,
05:16 envisage de ponctionner entre 1 et 3 milliards d'euros, on ne sait pas trop,
05:22 sur le régime de l'Agir Carco, avec cet argument de dire
05:27 "Bien écoutez, comme on a fait une réforme des retraites qui allonge la durée du travail,
05:31 puisqu'on passe de 62 à 64 ans, ça va aussi profiter au régime de base, donc c'est normal,
05:36 c'est la solidarité nationale que ce régime complémentaire profite aux retraites,
05:42 donc c'est normal que vous donniez entre 1 et 3 milliards d'euros au régime, au système de base."
05:50 Et c'est vrai que cette ponction, elle fait débat, on l'a vu cette semaine,
05:55 parce que vous avez un certain nombre d'acteurs qui disent "Non, non, cet argent, nous, on l'a bien géré,
06:02 on n'a pas du tout envie de participer et de se faire ponctionner."
06:06 – Alors vous allez nous dire les informés si vous êtes d'accord justement sur cette question,
06:09 Philippe Treynard, est-ce que le gouvernement a raison de piocher
06:12 dans le système des retraites complémentaires ?
06:15 – Je suis horrifié, pour tout dire, à cette idée-là.
06:18 Non, je pense d'abord, il est vertueux que ces régimes mettent des réserves de côté pour le chaos,
06:25 et qu'ils ne se retournent pas en cas de problème conjoncturel,
06:29 et nous savons que la volatilité de l'économie est devenue plus grande,
06:33 et qu'elle va s'accroître si la fragmentation du monde se poursuit,
06:37 et donc il est très sain d'avoir des réserves de côté.
06:40 – Ce que font les régimes à Jacquard-Court.
06:41 – Ce que font les régimes à Jacquard-Court.
06:43 Alors à l'idée d'aller ponctionner un prétendu surplus qui n'est jamais, au fond,
06:48 qu'un coussin de sécurité, je pense que c'est une très mauvaise idée.
06:53 Deuxièmement, il ne faut quand même pas oublier que si les revenus augmentent,
06:57 si les salaires augmentent, les recettes fiscales augmentent aussi.
07:00 Et donc c'est à partir de cette augmentation des recettes fiscales
07:03 et des cotisations sociales qu'il faut se financer,
07:06 et pas en allant piocher dans des réserves.
07:10 Il est clair en revanche qu'il y a des économies à faire,
07:13 mais ces économies doivent être faites du côté de la sécurité sociale
07:17 et du côté de l'État sur la base de leur propre budget,
07:20 sans aller taper dans les réserves bienvenues des régimes à Jacquard-Court.
07:25 – Nathalie Chussot.
07:26 – Un point pour compléter ce que vient de dire Philippe,
07:30 c'est le régime des retraites complémentaires du privé,
07:32 et effectivement il y a une espèce de cagnotte,
07:35 ce régime a été bien géré, 65 milliards,
07:37 et l'argument du gouvernement n'est pas faux, puisqu'il dit
07:40 d'ici 2030 vous aurez 1,6 milliard supplémentaire
07:45 du fait qu'on fait travailler les gens plus longtemps,
07:48 donc ils cotisent plus longtemps, donc ça va rentrer dans les caisses.
07:51 Ça représente 22 milliards sur les 15 prochaines années.
07:54 Donc il y a une cagnotte, et le gouvernement pensait
07:56 qu'il pouvait utiliser cette cagnotte pour financer
07:59 notamment la hausse des minimas contributifs,
08:01 il n'a toujours pas trouvé les moyens de financer.
08:03 Sauf que les partenaires sociaux se sont entendus,
08:06 pour revaloriser les pensions de retraite,
08:09 donc à juste titre, c'est leur droit, ce sont des partenaires sociaux,
08:13 et pour supprimer d'autres éléments,
08:15 et pour donc renforcer le pouvoir d'achat de leurs retraités du privé.
08:19 Donc il n'y a aucune raison d'aller ponctionner ces retraites,
08:23 même si ce que disait Fanny Guinocher est tout à fait vrai,
08:25 il y aura une cagnotte encore supplémentaire
08:28 du fait de la réforme en elle-même.
08:29 Donc vous êtes plutôt d'accord, tous les deux ?
08:31 Alors, je...
08:32 À part que je ne qualifierais pas cela de cagnotte.
08:34 Pour moi c'est le jeu naturel des forces économiques.
08:37 Et juste un mot, c'est qu'il est question aussi
08:40 que les partenaires sociaux discutent de potentiellement financer
08:43 la revalorisation des minimas contributifs, de la retraite minimale,
08:47 pour les salariés du privé.
08:49 C'est en discussion, et ça relève,
08:50 si les partenaires sociaux le décident, eh bien pourquoi pas ?
08:53 Les informés de l'Éco, vous ne bougez pas,
08:55 on vous retrouve dans un instant sur France Info
08:56 pour la suite de ce débat,
08:58 juste après le Fil Info à 9h50 avec Diane Fershid.
09:00 La réplique d'Israël en ce moment avec des frappes aériennes
09:04 sur la bande de Gaza,
09:05 alors que la branche armée du Hamas a déclenché ce matin
09:07 son opération Al-Aqsa, des milliers de roquettes
09:09 tirées en direction de l'État hébreu.
09:11 Elles ont tué au moins une femme et blessé 15 autres personnes.
09:14 Pour le ministre israélien de la Défense,
09:16 le Hamas a déclenché une guerre contre Israël.
09:19 Au début de l'épidémie de Covid,
09:22 le stock de masques était effondré.
09:23 Après une décision de l'État, on a été incapable
09:26 de protéger les soignants et la population.
09:28 C'est ce qu'indique ce matin sur France Info
09:29 le docteur Bernard Jaumier,
09:31 aussi rapporteur de la commission d'enquête
09:33 sur la gestion de l'épidémie.
09:35 L'État a été condamné hier en appel
09:37 pour ne pas avoir fait de stock de masques suffisant.
09:40 En pleine retransmission du match de l'équipe de France de rugby
09:43 dans le Mondial, hier soir, des coups de feu à Marseille.
09:46 Un homme de 20 ans a été blessé à la cuisse.
09:48 Son pronostic vital n'est pas engagé.
09:51 Et l'euphorie des Bleus, qualifiée pour les quarts de finale
09:55 de ce Mondial, qualifiée après leur victoire,
09:57 donc 60 à 7 sur les Italiens.
09:59 Le 15 de France connaîtra ce soir son adversaire.
10:02 L'Irlande affronte l'Écosse à 21h.
10:05 Les informés de l'Éco, toujours sur France Info
10:18 avec Nathalie Chussot, économiste,
10:20 professeure à l'Université de Lille,
10:22 et Philippe Trénard, professeur au CNAM,
10:24 membre du Cercle des économistes.
10:26 Nous revenons ce matin sur les revalorisations
10:28 de pensions de retraite, mais aussi la question des salaires.
10:32 Est-ce que le travail paie suffisamment ?
10:34 En tout cas, les syndicats estiment que non,
10:36 puisqu'ils vont être dans la rue vendredi,
10:39 l'intersyndical, tous les syndicats,
10:41 pour se mobiliser et demander des hausses de salaire.
10:45 Ils estiment que les patrons, que le patronat
10:48 ne joue pas le jeu.
10:50 Je vous propose d'écouter Sophie Binet,
10:52 la patronne de la CGT, qui justement avait ce message.
10:56 Nous, on ira à cette conférence sociale
10:58 pour parler de tous les salaires,
10:59 parce qu'évidemment, il y a un problème de bas salaire,
11:02 mais il y a un problème de tassement général des salaires.
11:04 Et si on regarde cette année,
11:07 donc les salaires en euros constants ont baissé
11:09 parce que les prix ont augmenté plus vite
11:11 et ils ont baissé encore plus vite pour les cadres
11:13 que pour les ouvriers employés,
11:15 parce que c'est tous les salaires qui se tassent en fait.
11:17 Et c'est ça le problème aujourd'hui,
11:18 c'est que les qualifications ne sont plus reconnues.
11:21 Alors cette question des salaires,
11:22 elle est importante à tel point que le gouvernement
11:25 a décidé, Emmanuel Macron, d'organiser une conférence sociale.
11:29 Ça sera lundi 16 octobre,
11:32 donc la semaine prochaine, la semaine suivante,
11:34 pour poser cette question des classifications, des bas salaires.
11:39 Est-ce que le travail aujourd'hui paye suffisamment dans notre pays ?
11:43 C'est une question en tout cas qui mérite d'être débattue,
11:46 y compris entre partenaires sociaux et l'État.
11:48 Nathalie Chussot, est-ce qu'il y a un problème de salaire dans le pays ?
11:51 Alors, il y a un problème de salaire.
11:53 En tout cas, la bonne nouvelle, je dirais,
11:55 c'est que regardons l'état du marché du travail aujourd'hui,
11:58 qui est plutôt en bonne forme.
12:01 Il y a un pouvoir de négociation de la part des salariés
12:04 qui est beaucoup plus important.
12:05 Et donc, il faut se saisir de ce pouvoir de négociation.
12:08 Philippe Trenard l'a dit,
12:09 augmentation entre 4,7 en moyenne jusqu'à 5% des salaires.
12:14 Sauf que, évidemment, ça ne concerne pas tout le monde.
12:18 Tous les salaires, toutes les catégories socioprofessionnelles.
12:21 Et moi, je pense qu'il y a encore un peu de marge.
12:24 L'OFCE disait qu'il y avait peut-être deux points.
12:27 Sur la négociation, dans un certain nombre de secteurs,
12:29 il y a encore les moyens de négocier.
12:31 Parce qu'il ne faut pas oublier qu'il y a les salaires.
12:33 Et puis, il y a une façon pour les entreprises, je dirais,
12:37 d'amortir l'inflation en donnant des primes.
12:40 Sauf que donner des primes, c'est différent de,
12:43 évidemment, donner une augmentation.
12:44 Parce que les primes ne sont pas forcément pérennes.
12:46 Et donc, même si ça vient gonfler un petit peu,
12:49 renforcer le pouvoir d'achat des salariés,
12:52 ce n'est pas forcément l'apanacer.
12:54 Donc, moi, je pense qu'il y a encore un peu de marge
12:56 dans les négociations salariales.
12:58 Et alors, évidemment, il y a les bas salaires.
13:00 Et puis, il y a les gens qui sont payés un petit peu au-dessus du SMIC
13:02 où là, effectivement, ils ne sont pas forcément bien revalorisés.
13:07 Philippe Trenard, il y a des marges encore dans les négociations ?
13:11 Il y a certainement des marges.
13:12 Parce qu'aujourd'hui, il y a un pouvoir du salarié
13:17 sur le marché du travail.
13:18 C'est dans ce sens qu'il y a des marges.
13:19 Maintenant, est-ce que nous sommes dans une situation préoccupante ?
13:23 Ma réponse est non.
13:25 C'est le chiffre que je citais tout à l'heure.
13:26 Nous avons une baisse du salaire réel, effectivement,
13:29 comme l'a dit Mme Binet, de 0,6 %,
13:32 donc qui est une donnée de fait, n'est-ce pas,
13:34 sur le premier semestre 2023.
13:36 Mais nous avons une baisse de la productivité
13:38 qui est de -0,3 % aussi.
13:41 Et il est normal que les salaires évoluent
13:44 comme la productivité.
13:45 Alors, il peut y avoir des petits décalages temporels,
13:48 mais sur le long terme, les salaires évoluent
13:50 comme la productivité.
13:51 Et la bonne nouvelle, en contrepartie de cette,
13:57 comment dirais-je, évolution de cette baisse de la productivité,
14:01 il y a une bonne nouvelle à la clé.
14:02 C'est que l'emploi croît plus vite que le PIB.
14:05 On a eu au PIB un PIB sur la première moitié de l'année
14:09 qui a tourné autour de 1 %,
14:11 alors qu'on a eu un emploi qui a tourné autour de 1,3 %
14:14 par exemple au deuxième trimestre.
14:17 Donc je crois qu'il y a là véritablement un mélange des deux.
14:20 Et je pense, bon, c'est le travail des syndicats
14:23 de faire ce qu'indique Mme Binet,
14:25 mais je ne crois pas qu'il y ait d'un point de vue économique
14:27 une situation préoccupante de ce point de vue.
14:29 Mais Fanny, est-ce qu'il n'y a pas un risque de décrochage
14:32 avec les salariés qui, eux, pour la plupart,
14:34 ne voient pas leur salaire augmenter dans ces proportions ?
14:36 C'est la difficulté, parce qu'effectivement,
14:38 les salariés du privé, ce n'est pas une masse homogène.
14:42 Vous avez des secteurs, effectivement,
14:44 vous avez des endroits, des filières
14:47 où vous avez vraiment des pénuries de main-d'œuvre
14:49 et là où les employeurs sont prêts à augmenter considérablement
14:54 les salaires, à mettre des choses dans les packages
14:57 pour attirer les talents.
14:58 Et puis vous avez d'autres métiers
15:00 où là, vous n'avez pas beaucoup de marge de négociation.
15:03 C'est là où c'est compliqué pour les salariés.
15:06 Par ailleurs, sur la productivité,
15:08 oui, on se rend compte que la productivité baisse,
15:10 mais quand on regarde les études,
15:12 c'est aussi parce qu'on intègre plus les alternants.
15:14 Alors, est-ce que c'est à tous les salariés du privé
15:18 de perdre un peu en salaire parce qu'on intègre les jeunes ?
15:22 Vous savez, parce que les jeunes, et c'est normal,
15:24 ils sont un peu moins performants au début.
15:27 On a eu beaucoup d'apprentis, ce qui est une très bonne chose,
15:29 d'avoir beaucoup d'apprentis dans le pays.
15:33 Mais du coup, cette productivité,
15:35 c'est aussi parce qu'on garde les seniors
15:36 et on voit bien que les seniors,
15:37 c'est important d'avoir les seniors qui sont en emploi,
15:41 mais souvent, ils sont un peu moins productifs.
15:43 Donc, cette baisse de la productivité,
15:45 est-ce qu'elle doit être simplement reposée sur les salariés
15:48 ou être partagée aussi avec les employeurs ?
15:51 – On a parlé de la mobilisation sociale de vendredi.
15:53 Est-ce que vous pensez que cette question des salaires
15:55 peut donner lieu à un conflit social de grande ampleur,
15:58 chers informés, Philippe Trénard ?
16:01 – Je ne sens pas, mais alors là, c'est une opinion subjective.
16:04 Je ne suis pas particulièrement compétent dans le sujet.
16:06 Madame Binet l'est beaucoup plus que moi.
16:08 Je ne sens pas personnellement un état de l'économie
16:12 tel qu'on aille vers des conflits majeurs.
16:17 – Il y a eu des conflits avec les retraites,
16:19 parce que les Français ont encore le moyen.
16:21 – Il y a eu un conflit l'année dernière, je vois mal un conflit sur le salaire,
16:23 surtout que la situation est plus conflite.
16:25 Je crois que Fanny a en plus raison,
16:28 c'est-à-dire le paysage du marché du travail
16:31 n'est pas un paysage unitaire.
16:32 Là, on renvoie des chiffres agrégés, la réalité est totalement agrégée.
16:36 Mais attention, je crois que c'est une bonne chose.
16:38 Il ne faut surtout pas prendre la hiérarchie des salaires
16:41 comme quelque chose qui doit être rigide, elle doit se déformer.
16:45 Peut-être aujourd'hui est-il temps de laisser plus de place aux alternants.
16:49 Et donc à ce moment-là, il est normal que la rémunération des alternants
16:52 augmente plus que celle des autres secteurs, etc.
16:56 Et donc je crois qu'il y a une redistribution des salaires qui doit s'effectuer.
16:59 Malheureusement, nous n'avons plus le temps pour continuer ce débat riche en argumentaires.
17:04 Merci à vous, en tout cas, les informés de l'Eco, avec ce matin,
17:07 Philippe Trenard du CNAM, Nathalie Chussot de l'Université de Lille.
17:10 Merci au Cercle des économistes également.
17:12 Et merci à vous, Fanny Guinochet.
17:14 On vous retrouve très vite.
17:15 L'Info continue sur France Info. Bonne matinée.
17:17 ♪ ♪ ♪