Jeudi 16 janvier 2025, MANAGER L'ODYSSÉE reçoit Mathilde Durie (Directrice, Groupe Norsys)
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00:00Bienvenue dans Manager l'Odyssée, votre rendez-vous hebdomadaire sur BeSmart for Change,
00:14un tête-à-tête de 28 minutes en immersion dans le quotidien d'un manager.
00:18Aujourd'hui, j'ai le plaisir de recevoir Mathilde Durie, directrice générale du groupe Norsis,
00:24une entreprise de services numériques qui a développé un modèle appelé la Perma-Entreprise,
00:29inspirée de la permaculture.
00:31Un modèle qui vise à concilier performance, respect de la planète et équité.
00:36Alors comment diriger une ETI qui met l'éthique et l'humain au cœur de sa stratégie
00:41et ce qui plus est dans un secteur aussi concurrentiel que celui des services numériques ?
00:47Nous reviendrons sur le parcours de Mathilde, ses réflexions sur le management à impact
00:52et les leçons tirées de ses expériences.
00:59Bonjour Mathilde.
01:00Bonjour Alix.
01:01Bienvenue et merci d'avoir répondu présente.
01:03Mathilde, j'aimerais qu'on revienne sur la jeunesse de votre parcours.
01:07Ça fait 17 ans que vous êtes chez Norsis et vous avez commencé en tant qu'alternante.
01:13Seulement depuis trois ans, vous êtes directrice générale.
01:16C'est pour le moins inédit, c'est une belle ascension.
01:19Est-ce que vous pouvez revenir sur la jeunesse ?
01:23La jeunesse, c'est que dans mon parcours professionnel,
01:28après avoir été diplômée de psychologie du travail,
01:31j'ai intégré un cursus de formation en gestion des entreprises GRH.
01:36Et au moment de trouver une alternance, j'ai croisé la route de Norsis,
01:40passé les entretiens et j'ai eu un refus de Norsis.
01:44Il se trouve qu'ils ont proposé l'alternance à quelqu'un que je connaissais très bien
01:48dans la promo, qui lui-même l'a décliné et qui a conseillé à l'entreprise
01:52de choisir quelqu'un qui, selon lui, était très motivé.
01:56Cette personne, c'était moi.
01:58Et puisqu'ici, on parle de management, est-ce qu'à l'époque,
02:00les managers en question, ceux qui vous avaient fait passer l'entretien,
02:03vous ont dit pourquoi ils ne vous prenaient pas de prime abord ?
02:07Alors, j'étais tellement stressée lors de l'entretien
02:11que je n'avais pas pu démontrer vraiment.
02:15Exactement. Et donc, ça m'a fait prendre déjà beaucoup de recul
02:19sur l'entretien de recrutement lui-même, les préjugés qu'on peut avoir,
02:24la mise en confiance, toute cette démarche ensuite qu'on a impulsée au sein de Norsis,
02:29au sein de ce qu'on appelle la diversité, la non-discrimination.
02:33Et alors, qu'est-ce qui s'est passé après concrètement ?
02:36Comment on passe des GRH à la direction d'un groupe ?
02:38Alors, j'arrive en 2007 dans l'entreprise.
02:41Il se trouve que dans le secteur du numérique,
02:44le sujet le plus stratégique, ce sont les ressources humaines
02:48puisqu'il y a un fort enjeu de recrutement dans ce secteur très concurrentiel
02:52et un fort enjeu de renforcer le sentiment d'appartenance,
02:55maintenir l'employabilité dans un métier très technique
02:59où les technologies bougent régulièrement.
03:02Et donc, je suis rentrée en tant que chargée de recrutement
03:05pour après me diriger sur les ressources humaines globalement.
03:09Et à l'époque, nous étions 100 collaborateurs.
03:12Donc, tout ce chemin s'est fait aussi à côté du fondateur.
03:16On a formé un binôme très rapidement et ça m'a permis vraiment
03:23d'être le couteau suisse, de découvrir beaucoup de choses
03:27au-delà des ressources humaines.
03:29Et par cette soif d'apprendre, une entreprise qui fait confiance aux jeunes,
03:34c'est comme ça que, sans qu'on s'en rende vraiment compte,
03:38les sujets avancent, on propose des choses, on refuse aucune mission,
03:45même celle où on se dit « pour le coup, je n'ai pas trop de valeur ajoutée ».
03:48Mais voilà, cette soif d'apprendre et cette posture régulièrement d'apprenant.
03:53C'est-à-dire que quel que soit l'âge, je pourrais me dire
03:57« ça fait 17 ans, ça y est, j'ai tout vu, tout lu ».
04:00Absolument pas.
04:01Vous n'avez jamais eu ce sentiment en 17 ans ?
04:04Non. Quand on sait maintenir cette posture sans cesse d'apprenant, je pense que…
04:10Ça vient de soi, cette posture d'apprenant, ou c'est un environnement qui…
04:13Non, je pense que c'est une posture de manager qu'on essaie de cultiver
04:17au sein de Nord6, c'est cette notion d'égal à égal.
04:21Oui.
04:22Aujourd'hui, je suis face à vous, Alix, vous avez l'expérience de l'interview,
04:29je me mets plutôt en posture d'apprenante parce que je suis sûre
04:33qu'en sortant de cette interview, j'aurai appris des choses par rapport à ça.
04:37Je ne viens pas en disant « je suis DG d'une boîte de 750, je ne vais rien apprendre ».
04:41Parce que vous arrivez en 2007 chez Nord6, vous êtes 100.
04:45Aujourd'hui, vous êtes 700.
04:47J'allais y venir, vous parliez de Sylvain Brozard, avec qui vous avez appris.
04:51On peut dire que c'est une sorte de mentor ?
04:53Tout à fait.
04:54C'est vrai que ce binôme, le fait de dire qu'aujourd'hui,
05:00la meilleure façon d'apprendre, c'est d'apprendre par mimétisme,
05:04en étant l'un à côté de l'autre, ce qui d'ailleurs freine aujourd'hui
05:08l'apprentissage avec le télétravail qui s'est énormément développé
05:12et que l'on prône à Nord6.
05:14Vous le regrettez personnellement ?
05:17Non, je ne le regrette pas, mais ça nécessite d'adapter
05:21pour profiter pleinement, quand on est en présentiel, du collectif
05:26et de ce transfert de compétences et de cet apprentissage par mimétisme.
05:30Justement, pour être encore plus concret,
05:32qu'est-ce que cette progression de 17 ans au sein de l'entreprise
05:36vous a apporté professionnellement en termes de manager ?
05:40Comment ça a influencé votre style de management aujourd'hui ?
05:43Je suis originaire de Dunkerque.
05:47Pendant toutes mes études, j'ai travaillé dans une boulangerie.
05:51J'étais vendeuse en boulangerie.
05:54On va dire une petite dizaine d'années.
05:58J'ai eu un déclic quand même.
06:02C'est les relations humaines.
06:06On est dans une petite ville où tous ceux qui viennent vous voir,
06:10on les connaît, on connaît leur habitude.
06:14Ça m'a permis vraiment de développer l'importance des relations humaines
06:18dans tous les métiers.
06:20Le fait d'avoir fait, en complément de mon cursus de psychologie du travail,
06:24un cursus en RH, gestion des entreprises,
06:27c'est parce que je trouvais que les relations humaines
06:30étaient déterminantes dans un parcours professionnel.
06:34Les leçons que vous avez apprises au sein de Norsis,
06:38ça s'est fait comment ?
06:42Norsis, quand je suis arrivée, avait cette vision de performance globale.
06:47Toutes les décisions que l'entreprise prenait
06:50étaient prises sous trois dimensions,
06:53qu'on appelle aujourd'hui nos trois principes éthiques.
06:55Prendre soin des humains, préserver la planète,
06:58se fixer des limites et redistribuer les richesses.
07:01Dans le prendre soin des humains,
07:04il y a des postures très fortes
07:07qui sont cultivées, une hiérarchie d'égal à égal.
07:10C'est un modèle que vous arrivez à faire durer
07:15malgré la croissance de l'entreprise,
07:17malgré le fait que vous soyez passé de 100 à 700 ?
07:19Tout à fait, avec des dispositifs bien précis
07:22qui permettent de transmettre ces choses-là par l'exemple.
07:27On n'est absolument pas une entreprise
07:29qui va afficher des valeurs à l'entrée de chacune des agences
07:33parce qu'on prend le risque,
07:35au plus elles sont affichées, au moins elles sont incarnées.
07:38Par contre, dans notre parcours d'intégration,
07:41tout au long de la vie du collaborateur dans l'entreprise,
07:44il y a un certain nombre de dispositifs
07:46qui permettent de raconter des histoires
07:48pour que chacun s'approprie un concept.
07:52Le concept de hiérarchie d'égal à égal,
07:54le concept de permettre à chacun
07:58de trouver les leviers qui vont être source d'automotivation.
08:02À Norsis, on essaie d'avoir un panel de dispositifs.
08:06Est-ce que vous pouvez donner des exemples ?
08:08Le panel démocratique, je peux choisir
08:10de faire partie du panel démocratique chaque année.
08:13On va me solliciter 5 à 10 fois dans l'année
08:15pour pouvoir participer à des décisions de l'entreprise,
08:18pour pouvoir proposer des nouvelles impulsions,
08:21donner mon avis.
08:23Si on a envie de s'impliquer un peu plus fortement
08:25en complément de sa mission métier
08:27autour d'une gouvernance partagée d'un droit de vote,
08:30c'est possible.
08:31On a une fondation d'entreprise
08:33qui récompense des associations
08:35autour de l'injustice sociale
08:37et de la préservation de la planète.
08:39Si je suis très engagée au niveau de la société civile,
08:43je peux, au sein de mon entreprise,
08:45participer à ça et être membre du bureau de la fondation.
08:48Il y a tout un tas d'exemples dans l'entreprise.
08:51Ces idées, ces initiatives,
08:53peuvent émaner des salariés eux-mêmes ?
08:55Oui, via le dispositif d'audit
08:58que l'on pilote tous les deux ans.
09:00Vous les consultez sur d'éventuelles initiatives
09:02que vous pouvez faire émerger en interne.
09:04Exactement.
09:05Ensuite, on vote une dizaine d'impulsions
09:07tous les deux ans à donner
09:09pour continuer de faire évoluer NORCIS
09:11et les collaborateurs.
09:13Mais ça, ce sont des sortes de...
09:15Comment dire ?
09:19Dans le quotidien de l'entreprise,
09:21comment est-ce que ça se traduit ?
09:24Ça se traduit par une gouvernance partagée.
09:27Dans le modèle NORCIS,
09:29on a un certain nombre d'instances de gouvernance
09:33qui vont travailler des sujets de prospective
09:37et les mettre en œuvre.
09:39C'est-à-dire que le pouvoir
09:42ou les décisions ne sont pas concentrées
09:44sur les actionnaires.
09:46Il y a ce principe de subsidiarité.
09:49Par exemple, il y a le CODI RH.
09:52Ce sont les RH qui définissent
09:56leurs feuilles de route et les sujets
09:58qu'elles ont envie de travailler.
10:00L'année prochaine, on travaillera
10:02sur le sujet des seniors et de l'intelligence artificielle.
10:05C'est le fil rouge de l'année.
10:07Leur rôle, c'est de voir comment
10:09avancer sur ce sujet dans l'année
10:11en faisant une benchmark
10:13ou en participant à des conférences.
10:15Ensuite, via le dispositif d'audit,
10:18on fait voter une soixantaine de personnes
10:21sur ces évolutions.
10:23Cette conduite du changement,
10:25les idées...
10:27On fait en sorte de créer des dispositifs
10:29où elles émanent du terrain
10:31et qu'elles soient portées
10:33par des spécialistes du sujet.
10:35RH, éthique, nature...
10:37Ensuite, on les fait voter en collectif
10:40pour qu'elles soient incarnées
10:43et qu'elles accélèrent la conduite
10:45du changement au sein de nos territoires.
10:47Il y a combien de strates de management ?
10:49Il y a des chefs de service ?
10:51On essaie qu'elles soient
10:53la plus courte possible.
10:55C'est pour ça que je suis en direct
10:58avec le codier RH.
11:00Je suis en direct avec les membres du CSE
11:03et je pilote le comité stratégique
11:06qui se compose des directeurs d'agence.
11:09Il y a la direction générale,
11:11les directeurs d'agence,
11:13et ensuite, il y a la RH,
11:16les commerciaux.
11:18La ligne hiérarchique est assez courte.
11:21On n'a pas de N+, 6, 7, 8.
11:24C'est un point d'attention...
11:26Aucun inconvénient ?
11:28Il n'y a jamais...
11:30Si toutes ces strates existent,
11:32il y a une raison.
11:34Est-ce que vous, en termes de temps,
11:37de division de vous-même ?
11:39L'impact, c'est...
11:41Quoi de mieux en management
11:44d'impliquer dès le début les personnes
11:47pour mieux conduire le changement ?
11:49L'incident, c'est plus de réactivité,
11:51plus d'agilité.
11:53Et, clairement, c'est hyper motivant.
11:56Je pense qu'il y a des études
11:59qui démontrent que participer
12:01à faire évoluer et à influencer
12:03son entreprise,
12:05c'est dans le top 5
12:07des leviers de motivation
12:09des collaborateurs
12:11après le salaire.
12:13En tout cas, c'est un enjeu
12:15de notre modèle PERMA
12:17de donner la possibilité
12:19aux collaborateurs d'influencer
12:21leur agence et le groupe NORCIS.
12:23Vous avez déjà été confrontée
12:25à des dilemmes éthiques.
12:27Oui.
12:29En tant que manager.
12:31Est-ce que vous pouvez nous raconter ?
12:33Un exemple ?
12:35Plusieurs dilemmes.
12:37Plusieurs dilemmes.
12:39On a eu des dilemmes...
12:41Je rappelle le process à NORCIS.
12:43Quand on a fait émerger
12:45notre raison d'être en 2019,
12:47on a créé un organe de gouvernance
12:49qui garante cette raison d'être
12:51qui s'appelle le Conseil d'éthique.
12:53Ce Conseil d'éthique
12:55se compose de membres internes
12:57et de membres externes.
12:59Il peut être saisi par tous les collaborateurs
13:01de NORCIS sur une problématique éthique
13:03qu'ils rencontrent.
13:05On a eu
13:07plusieurs saisines
13:09qui ont touché
13:11nos métiers
13:13et l'évolution des technologies.
13:15Est-ce que NORCIS va se positionner
13:17sur tel et tel techno
13:19qui touche
13:21à l'intégrité
13:23de la personne ?
13:25Notamment
13:27les technologies
13:29autour de la Google Home
13:31et qui nous écoutent perpétuellement.
13:33Éthique, pas éthique.
13:35On a pu être saisi là-dessus.
13:37On a pu être saisi aussi
13:39sur
13:41le secteur d'activité
13:43de certains de nos clients.
13:45On ne choisit pas...
13:47Ce n'est pas des dilemmes éthiques
13:49d'un point de vue
13:51management humain, au sens
13:53interne de l'entreprise ?
13:55Néanmoins, c'est remonté
13:57directement au manager
13:59par rapport à la mission de la personne,
14:01à son métier.
14:03Quand vous parlez de problématiques
14:05de management,
14:07vous parlez de thématiques autour
14:09de la diversité, non-discrimination,
14:11de l'égalité pro ?
14:13Non, je parlais...
14:15Oui, ça peut être ça, mais effectivement,
14:17il y a eu un impact
14:19sur un de vos collaborateurs.
14:21Ça remettait en question
14:23le cœur même de son métier, son activité.
14:25Le client...
14:27Sur les technologies, c'était plus
14:29en anticipation du domaine
14:31de clients qui allaient se positionner
14:33là-dessus. Est-ce que
14:35Collaborateur Nord 6, au regard de notre
14:37raison d'être et cette conception
14:39d'usage du numérique éthique et efficace,
14:41est-ce qu'on y va, est-ce qu'on n'y va pas ?
14:43C'était plutôt en prévention.
14:45Ensuite,
14:47il y a certains secteurs
14:49d'activité que l'on adresse
14:51et donc le collaborateur
14:53a juste titre posé la question
14:55est-ce que Nord 6 quelque part
14:57juge un secteur d'activité
14:59ou est-ce que c'est plus fin que ça,
15:01le débat éthique ? Et le débat éthique est
15:03beaucoup plus complexe que ça. Et alors comment
15:05vous avez arbitré et dans quelle mesure ce collaborateur
15:07le premier concerné, le premier impacté
15:09en interne, a été
15:11impliqué dans la prise de décision ?
15:13Comment est-ce que vous avez arbitré ?
15:15Il y a tout un processus où on interview
15:17les différentes parties prenantes
15:19parce qu'on n'est pas expert en éthique.
15:21C'est une démarche qui
15:23ne vise pas à être dans le jugement mais à ce qu'on
15:25progresse sur la manière de raisonner,
15:27sur des grands enjeux
15:29et au regard de nos
15:31trois principes éthiques.
15:33On n'est pas à juger, à dire on ne veut plus
15:35travailler avec tel ou tel secteur
15:37d'activité, mais plutôt à dire
15:39aujourd'hui, au regard de notre métier
15:41qui est concevoir des usages du numérique,
15:43vers quel projet
15:45on a peut-être plus envie d'être sollicité
15:47que d'autres qui viseraient
15:49à ne pas décarboner une activité
15:51par exemple. Et ça a été quoi
15:53la finalité ? Et la finalité
15:55ça a été de
15:57le Conseil
15:59d'éthique va émettre un avis
16:01que je vais ensuite soumettre au comité stratégique
16:03et nous allons décider de l'appliquer ou pas.
16:05Et donc
16:07au regard de ça, il a été
16:09convenu de
16:11ne plus intervenir sur le projet
16:13mais de ne pas laisser
16:15tomber le client du jour au lendemain, mais plutôt
16:17de l'inscrire dans le temps.
16:19Puisque ce ne serait pas éthique
16:21de quitter du jour au lendemain le client.
16:23Donc, on a quelque part
16:25renoncé à du chiffre
16:27d'affaires.
16:29Donc voilà, ça peut être un impact.
16:31Je peux donner un autre exemple aussi.
16:33Là, ça a été
16:35sur le management de
16:37quelqu'un qui fait du commerce.
16:39Et donc, il a l'appel
16:41d'un prospect
16:43qui lui dit qu'il
16:45veut le faire intervenir sur un projet
16:47et en creusant
16:49avec cette personne, on découvre
16:51que
16:53les factures vont être émises d'un paradis fiscal.
16:55Et donc là,
16:57que fait le commercial ?
16:59Il dit non.
17:01Voilà, l'enjeu
17:03de ce management au regard de
17:05nos trois principes éthiques,
17:07je réitère,
17:09ce n'est pas d'avoir une position
17:11dogmatique, mais plutôt
17:13d'infuser et d'acculturer
17:15tous les collaborateurs de Norsis
17:17et tous les métiers à un
17:19raisonnement au regard de notre modèle
17:21PERMA et des trois principes éthiques.
17:23Donc, c'est une partie forte de notre
17:25management.
17:27On ne dit pas au manager, il faut
17:29répondre comme ça.
17:31Quelque part, on a des lignes directrices
17:33et chacun va
17:35l'incarner selon son métier
17:37en étant libre.
17:39Comment vous assurez que ces lignes directrices
17:41soient parfaitement
17:43plus que comprises,
17:45ressenties par la personne
17:47que vous recrutez ?
17:49Alors, comme je le disais
17:51au début,
17:53l'entretien face à face,
17:55ce n'est absolument pas une science exacte.
17:57Néanmoins,
17:59on a mis en place une procédure
18:01qui permet de limiter les biais.
18:03Donc, on pratique le CV anonyme
18:05qui fait qu'à la première étape
18:07de recrutement,
18:09on ne peut pas être déstabilisé
18:11soit par une photo, soit par
18:13un âge, soit par
18:15le lieu d'habitation, soit
18:17on enlève les expériences
18:19au-delà de 40 ans,
18:21pour que l'âge n'ait pas un influence sur
18:23« je ne voulais pas un senior sur ce poste ».
18:25Et ensuite, on forme
18:27toute l'entreprise à connaître
18:29ses préjugés et ses stéréotypes.
18:31Ce qui fait que, bien sûr,
18:33les préjugés arrivent quand on rencontre
18:35la personne face à face,
18:37mais, via cette formation,
18:39j'ai pu les détecter
18:41et réduire
18:43les biais parce que j'en ai conscience.
18:45Et ensuite, la dernière chose, c'est qu'on ne décide
18:47jamais seule de recruter quelqu'un.
18:49Et donc, on réduit...
18:51Par exemple, le processus chez Nordsis ?
18:53On essaie d'être très rapide. D'ailleurs, à un moment,
18:55on pratiquait le recrutement en une journée.
18:57D'accord. Le soir même,
18:59vous êtes pris. Le soir même, vous avez une propale
19:01ou pas. Vous avez la réponse. Voilà.
19:05On essaie de ne pas faire les entretiens
19:07à rallonge. Par contre,
19:09pour revenir sur la question initiale,
19:11pendant l'entretien, le premier
19:13entretien, il est ciblé « ressources humaines »,
19:15« culture d'entreprise ».
19:17On ne valide pas les compétences
19:19techniques en premier.
19:21Donc ça, déjà, c'est un signal fort.
19:23C'est à dire que...
19:25C'est de l'ordre du ressenti.
19:27Et on va raconter...
19:29On va raconter...
19:31Déjà, on va partir
19:33de la personne pour savoir ce qui l'intéresse
19:35parce qu'on a plein de choses à raconter sur différents sujets.
19:37Et en fonction
19:39de son intérêt, on va lui raconter des histoires
19:41pour qu'elle aussi,
19:43elle essaie de rentrer dans notre monde.
19:45Qu'est-ce que vous entendez par « raconter des histoires » ?
19:47Vous dites « raconter des histoires », mais je ne comprends pas bien
19:49ce que ça veut dire.
19:51Des moments de norcis.
19:53Si on parle de la diversité et non-discrimination,
19:55on va lui raconter comment ça a été construit.
19:59On ne va pas faire
20:01une présentation marketing qui dit
20:03autant de chiffres d'affaires...
20:07Voilà, exactement.
20:09C'est pour ça qu'on part de l'autre
20:11et après...
20:13On ne peut pas définir vraiment des valeurs norcis.
20:15Elles sont inhérentes au modèle même.
20:17On peut dire qu'aujourd'hui, les valeurs norcis,
20:19c'est notre modèle parment-entreprise
20:21et nos trois principes éthiques.
20:23Ce qu'il faut retenir, c'est que
20:25ce premier entretien, à la fin,
20:27on est capable de se dire
20:29« Est-ce que tu te projettes
20:31dans ce type d'entreprise ? »
20:33Avec les avantages
20:35et les inconvénients que ça pose.
20:37Je ne suis pas en train de dresser le portrait
20:39d'une entreprise parfaite.
20:41J'aime bien dire qu'on est
20:43parfaitement imparfait.
20:45On cherche à tendre vers
20:47un futur plus viable
20:49en adaptant notre modèle d'entreprise
20:51et surtout notre management.
20:53Parce que c'est ça, c'est le cœur du réacteur
20:55d'une entreprise.
20:57Vous évoquiez l'inclusion
20:59tout à l'heure.
21:01Une inclusion durable, ça ne peut pas
21:03uniquement passer par des quotas.
21:05Il faut une transformation plus profonde.
21:07Quelles sont les initiatives
21:09que vous avez mises en place, vous,
21:11chez Norsis, pour favoriser
21:13l'égalité et l'inclusion au sein de vos équipes ?
21:15Sur la thématique
21:17de l'égalité professionnelle,
21:19on l'a mise en place
21:21en 2009
21:23avec tout un tas
21:25d'indicateurs, aussi bien
21:27au niveau du recrutement.
21:29À chaque étape de recrutement,
21:31on
21:33calcule
21:35le nombre d'hommes et de femmes.
21:37Ce qui permet, s'il y a un écart de plus de 10%,
21:39on interroge les agences et on les challenge
21:41pour voir s'il y a
21:43discrimination
21:45ou pas.
21:47Aujourd'hui, vous êtes à une parfaite égalité hommes-femmes ?
21:49Aujourd'hui, à Norsis,
21:51ça dépend de ce qu'on appelle parfaite égalité.
21:53C'est un secteur où il y a une majorité d'hommes.
21:55Quand on voit
21:57les promotions
21:59en informatique autour du développement,
22:01il y a rarement
22:03une femme dans la promesse.
22:05Ce sont des ingénieurs, essentiellement ?
22:07Il y a des bacs plus 2, des bacs plus 3,
22:09il y a des écoles d'ingénieurs qui forment.
22:11Et maintenant, il y a aussi des formations très courtes
22:13puisqu'il y a une telle pénurie
22:15de compétences qu'il faut se réinventer
22:17sur les parcours. À Norsis, aujourd'hui,
22:19on a 29%
22:21de femmes.
22:23Ce qui est plutôt
22:25au-dessus de ce qu'on retrouve.
22:27En fait, ce qu'on remarque,
22:29c'est que
22:31les femmes
22:33dans certains pays font
22:35beaucoup plus de formations
22:37scientifiques.
22:39Dès l'éducation, on leur a
22:41autorisé, si je puis m'exprimer ainsi,
22:43à se dire que les formations
22:45scientifiques, c'était pour les femmes.
22:47On a deux entreprises au Maroc
22:49et on voit que dans les promotions,
22:51il y a plus de femmes que d'hommes.
22:53Et c'est complètement
22:55l'inverse, voire beaucoup moins en France.
22:57Donc en fait, ça joue quand même
22:59très fortement.
23:01Il y a encore un plafond.
23:03Tout à fait.
23:05Et donc,
23:07au niveau de la rémunération et de l'évolution
23:09professionnelle, on a aussi
23:11beaucoup d'indicateurs depuis 2009.
23:13Alors que l'index
23:15que fixe la loi
23:17est plutôt récent. Nous, on a été
23:19vraiment en avance. Et c'est ce qui nous a permis
23:21aussi d'être plus attractifs
23:23pour
23:25des minorités moins visibles
23:27dans notre secteur.
23:29C'est multiculturel aussi. Par multiculturel, j'entends
23:31que vous avez des talents d'autres pays.
23:33Tout à fait.
23:35J'aimerais qu'on aborde l'échec,
23:37le sujet échec,
23:39un thème qui peut être un peu galvaudé
23:41parfois, dans les entreprises.
23:43Est-ce que, pour vous,
23:45il y a un bon ou un
23:47mauvais échec ou est-ce que c'est juste
23:49du storytelling ?
23:51Est-ce qu'il y a un bon ou un mauvais échec ?
23:53Donc, nous,
23:55dans les pratiques
23:57de management, en fait,
23:59on dit qu'on apprend
24:01un peu plus
24:03quand on échoue. Alors, encore,
24:05faut-il connaître le niveau
24:07de granularité d'un échec.
24:09Qu'est-ce que c'est qu'un échec ?
24:13Quelque part, quelqu'un,
24:15pour moi, il est toujours en réussite.
24:17Et nous, dans notre pratique de management,
24:19on valorise plutôt les réussites plutôt que
24:21de mettre le doigt sur l'échec.
24:23Parce que ça ne fait pas avancer les choses.
24:25Est-ce qu'il peut y avoir une forme, aujourd'hui,
24:27de culture de l'échec ?
24:29C'est un peu une condition pour générer
24:31de la performance, mais en fait,
24:33c'est...
24:35On prône le droit à l'erreur.
24:37Dans notre école du leader,
24:39il y a ce droit à l'erreur.
24:41Néanmoins,
24:43dans notre pratique de management,
24:45on met le point plutôt sur les réussites
24:47qui créent
24:49le moteur, qui créent l'envie d'avancer
24:51au collaborateur, plutôt que
24:53d'être sur le côté
24:55punitif de l'échec.
24:57Et donc, je peux peut-être parler
24:59d'un dispositif qu'on a créé qui s'appelle
25:01le miroir,
25:03qui est un peu dans ce giron
25:05du management. Le miroir,
25:07c'est quoi ? Chaque année, le collaborateur
25:09a la liberté
25:11de choisir qui il souhaite dans l'entreprise
25:13pour être son miroir.
25:15Le rôle du miroir, c'est quoi ?
25:17Il va mettre en œuvre des pratiques
25:19d'écoute active,
25:21pour interroger, reformuler
25:23et permettre aux collaborateurs
25:25de prendre du recul
25:27sur le mois écoulé ou le trimestre écoulé.
25:29Et par
25:31cette pratique d'écoute active,
25:33ça va permettre
25:35aux collaborateurs de prendre du recul,
25:37notamment sur
25:39ce qu'il a réussi ce mois-ci,
25:41ce qu'il a moins bien réussi,
25:43quelle leçon
25:45il tire. Dans ce qu'il a moins réussi,
25:47on peut y mettre
25:49une forme d'échec, mais
25:51en tout cas, tout de suite, on le transforme en positif
25:53en disant comment tu capitalises
25:55là-dessus pour que le
25:57mois prochain ou le trimestre prochain,
25:59tu puisses intégrer cette nouvelle dimension.
26:01Et vous, personnellement,
26:03vous en avez connu des échecs ?
26:05Comme tout le monde, j'imagine.
26:07En 17 ans, est-ce qu'il y en a un
26:09de plus marquant qu'un autre,
26:11dont vous avez tiré des leçons particulières ?
26:13Est-ce que j'ai vécu un échec ?
26:19C'est pas si évident, parce qu'en même temps,
26:21vous avez un parcours
26:23plutôt exemplaire, je pense,
26:25en interne, chez Norsis.
26:27Je pense vraiment qu'en capitalisant
26:29sur plutôt ce qu'on sait
26:31bien faire, et en
26:33délégant
26:35les formes d'échecs
26:37qu'on a pu identifier
26:39tout au long de son parcours,
26:41c'est une forme de réussite.
26:43C'est vrai que spontanément...
26:45Oui, je pense que
26:47son parcours, on va
26:49identifier des échecs,
26:51qu'ils soient... Ah, j'aurais peut-être
26:53dû faire différemment, mais sur le moment...
26:55À la limite, si je peux donner un
26:57exemple, c'est que
27:01ce que j'ai beaucoup travaillé
27:03et là où j'ai pu échouer, c'est
27:05de prendre des décisions très rapides.
27:07D'être persuadée
27:09que c'était la bonne solution
27:11et d'être dans
27:13ce souci de faire très vite
27:15parce que si on le fait le lendemain, c'est trop tard.
27:17Et je vais dire que
27:19dans
27:21du recrutement,
27:23dans l'animation de collectif,
27:25quelque part,
27:27prendre le temps. Parce que
27:29prendre le temps, ça fait aussi gagner du temps.
27:31Et dans le recrutement, ça peut être un peu paradoxal
27:33parce que votre façon de recruter, c'est parfois de le faire
27:35en une journée, donc j'imagine qu'il y a une petite marge
27:37d'erreur. Oui, donc je pense
27:39que si je dois parler d'un échec,
27:41c'est plutôt celui-là.
27:43Et en fait, en plus, quand on voit l'évolution
27:45du monde, on voit que
27:47de moins en moins, on arrive vraiment à prendre le temps.
27:49Et on nous appelle
27:51plutôt à ralentir.
27:53Et je pense que
27:55si je peux
27:57répondre à cette question
27:59de cette façon-là, ça serait plutôt
28:01moi...
28:03J'ai vraiment
28:05échoué sur quelque chose.
28:07D'avoir pris des décisions
28:09trop rapides.
28:11Et
28:13on se rapproche déjà de la fin
28:15de cet entretien.
28:17Quel conseil donneriez-vous
28:19à un manager débutant ?
28:21Ok,
28:23j'en ai un tout peu.
28:25J'en ai même deux.
28:27Un manager
28:29débutant, mais même pas débutant,
28:31pour moi,
28:33il doit mettre
28:35un point d'orgue à
28:37prendre le temps d'avoir de l'intérêt pour l'autre.
28:39C'est la clé.
28:41La clé pour être un bon manager,
28:43c'est d'avoir de l'intérêt pour l'autre.
28:45Ça s'apprend ça ?
28:47Parce qu'on peut se dire que c'est inné.
28:49C'est l'empathie, c'est l'écoute.
28:51Ça s'apprend néanmoins ?
28:53On peut avoir
28:55des dispositions plus ou moins
28:57fortes, et ça peut être un critère de choix.
28:59Et pour autant,
29:01on peut s'essayer à être manager
29:03et se rendre compte qu'on ne l'est pas vraiment.
29:05En soi, ça ne sera pas un échec pour moi.
29:07Ça permet juste de mieux apprendre
29:09et de mieux connaître.
29:11Est-ce que tu as vraiment
29:13de l'intérêt pour l'autre ? Essaye de le tester
29:15et de s'amuser.
29:17Quelque part, si on ne s'amuse pas
29:19globalement,
29:21dans toutes les fonctions...
29:23En dirigeant 700 personnes, on s'amuse encore ?
29:25Carrément !
29:27Très bien. Merci beaucoup Mathilde.
29:29C'était déjà la fin de cet entretien.
29:31On a dépassé le temps.
29:33Mathilde Diory, directrice générale du groupe
29:35NORCIS, d'avoir répondu présente.
29:37C'était un échange riche et inspirant.
29:39Quant à moi, je vous dis à la semaine prochaine
29:41pour un nouvel épisode
29:43de Manager l'Odyssée.