INTROSPECTION du 16 janvier 2025
Category
🗞
NewsTranscription
00:00Jean-Philippe Courtois, bonjour. Je suis très heureuse de vous accueillir aujourd'hui
00:08dans l'émission Introspection. Vous venez de quitter Microsoft. Vous avez fait une longue
00:13carrière de 40 ans pour arriver au sommet, exécutif vice-président. Vous êtes à la
00:19tête d'une association dont on va parler, Live for Good. Qu'est-ce qui s'est passé
00:25dans votre vie ? Vous êtes arrivé d'Algérie, si j'ai bien compris, avec un papa médecin.
00:31Et là, une vie incroyable, faite de hauts et de bas, mais avec des succès significatifs,
00:39des rencontres improbables. Comment tout ça s'est mis en place ?
00:43Ça peut être très long, donc on va essayer de faire mal concentré. Je dirais que comme
00:48toujours, il y a des rencontres extraordinaires, il y a des moments, il y a des lieux. Il y
00:53a des lieux pour moi qui sont passés dans le sud. On a bien compris, je suis dans l'Algérie,
00:56c'est la dernière génération de ce qu'on appelle les Pieds-Noirs, parents de trois
01:01générations qui étaient en Algérie, donc depuis 1860.
01:03Donc, ils arrivent les mains dans les poches en France.
01:06Et donc, exactement, mon papa, docteur de profession, est arrivé littéralement sans
01:13rien, comme on dit, parce qu'il avait son cavité médicale en Algérie. Et malheureusement,
01:17pour ceux qui connaissent un peu l'histoire, tout s'est déclenché après très rapidement.
01:21Il y a eu cet exode, retour massif de tous ces Français d'irapatriés, c'était le terme
01:27utilisé. Et donc, après avoir essayé de comprendre où atterrir, mon papa a choisi,
01:32avec ma mère aussi, bien sûr, Nice, parce que déjà, il y avait la mer.
01:36Et le soleil.
01:37Et le soleil, le sud. Et puis, je l'ai vu surtout tout petit, et ça, c'est quelque
01:42chose qui est resté en moi, lutter littéralement pour exercer son métier. Parce qu'en fait,
01:47nous n'étions pas bienvenus, nous étions des émigrés. Français, mais des émigrés.
01:51Et donc, les Français...
01:53Pas un accueil, forcément, très chaleureux.
01:54Des territoires, voilà. Il y a tout un contexte politique de l'époque, etc. Je ne vais pas
01:58revenir dessus. Mais qui fait que littéralement, il s'est battu physiquement pour pouvoir ouvrir
02:02son cabinet médical contre l'avis de l'ordre des médecins locales. Il a réussi, et il a
02:08pu comme ça s'occuper de ses trois enfants, de sa maman, très âgée, qui était...
02:12Vous avez quand même été imprégnée dès votre plus petite enfance par cette force
02:17paternelle et maternelle.
02:18Oui, force paternelle, force maternelle qui est... Maman a une sérénité incroyable et
02:23un dévouement pour s'occuper de la famille. Alors, les valeurs familiales sont créées
02:27en moi depuis ses premiers jours. Et d'une certaine manière, dans le sens de la communauté.
02:33Parce qu'il y avait une communauté, évidemment, de ses pieds noirs, de Nice, d'autres villes,
02:37qui se retrouvaient entre eux pour s'entraîner. Parce que au début, c'était très compliqué.
02:41Et après, ça s'est ouvert un petit peu à l'école.
02:45Oui, après, ça s'est ouvert, évidemment. Après, je bénéficiais d'un magnifique système
02:49éducatif français, de l'école, l'école primaire, secondaire, sur Nice, dans la ville
02:55de Nice, la belle ville de Nice. J'ai ensuite... Donc, je fais une accélération dans toute
02:59l'histoire. J'ai ensuite rejoint, en fait, l'école de commerce qui s'appelait le CERA
03:05Massophia Antipolis, qui faisait partie de l'ensemble de ces écoles supérieures de
03:09commerce qu'on avait en France, où la tutelle des chambres de commerce, et qui est devenu
03:13SCEMA aujourd'hui. D'ailleurs, en raccourci, je suis devenu président du conseil d'administration
03:16de SCEMA il y a quelques années. Parce que j'ai tendance à être fidèle à des organisations,
03:20des personnes que je connais depuis des années. J'ai toujours aimé rester proche et aider
03:24mon école dans la mesure où je pouvais l'aider dans son développement.
03:27Et vous saviez que vous étiez attiré comme ça par l'informatique ? C'est le hasard
03:32complet ? Non, alors, hasard ou pas, j'étais très
03:36curieux. Et pendant ma deuxième année, en fait, au CERA Massochema, à Sophia Antipolis,
03:43j'ai découvert l'Apple II. Apple II, il y a plein d'auditeurs qui ne sont même
03:47pas nés. C'était l'ancêtre du micro-ordinateur qui est sorti avant le fameux IBM PC. Et sur
03:53l'Apple II, j'ai découvert la puissance de logiciels. Les premiers, c'était le
03:57contrôle de gestion physique. C'était le premier tableur qui existait, avant même
04:01qui est Excel, Microsoft, plus tard, beaucoup plus tard. Et j'ai pu travailler dans une
04:05société niçoise, une start-up qui s'appelait Memsoft.
04:08Déjà une start-up. Oui, c'est une start-up. Et j'ai commencé
04:11à travailler littéralement à mi-temps pendant mes études années 2, 3 et 4, après mes
04:14études aussi avec un copain de promo qui restait un ami très, très proche, à coder
04:20et développer un logiciel de comptabilité pour des PME et PMI. Et donc, ce qui était
04:25formidable, on ne s'en rend pas compte aujourd'hui parce qu'on a accès à tout sur son téléphone,
04:29sur son laptop. À l'époque, la comptabilité des boîtes, des PME grandes boîtes, c'était
04:35des tonnes de listings de papier. C'était fait par un travail, comme on dit, à façon
04:39par des sociétés de services qui vous facturaient des montants énormes. Et on commençait à
04:45démocratiser pour la première fois l'accrétion de votre comptabilité pour votre PME.
04:49Donc là, vous étiez presque entrepreneur parce que vous étiez accompagné d'une
04:54petite structure. Oui, on était un peu entrepreneur.
04:55Totalement. En fait, d'ailleurs, on avait un contrat d'indépendant. On était payé
04:58sur royalties. J'ai appris à mes dépens après que j'étais un peu naïf sur le
05:01contrat de royalties. Ça ne me nourrissait pas trop, mais ce n'est pas grave. Mais
05:05on a appris énormément. On était deux. On était un duo un petit peu entre le produit
05:09qu'il développait. Il était un développeur. Moi, je faisais un peu de basic, mais il
05:12était vraiment un développeur dans l'art. Et vous avez vendu.
05:15Et moi, la partie vente marketing. C'est votre point fort.
05:17On a lancé ce produit en France, dans d'autres pays. Je me rappelle du Package. J'ai toujours
05:21d'ailleurs une boîte que j'ai gardée dans mes archives de même seule comptabilité
05:24où il y a un très beau palmier rouge parce qu'on était littéralement la rue Meyerberg
05:28sur la promenade des Anglais. Et donc, dans les journées qui finissaient à minuit, deux
05:33heures, on essayait d'aller faire une demi-heure à la plage quand même au soleil. Et il y
05:37avait ce palmier qui était sur le Package.
05:40D'accord. Et vous sentiez une âme d'entrepreneur à l'époque ou c'était juste une expérience
05:45où vous disiez je serais salarié d'un groupe ?
05:47Non, sincèrement, la notion d'entrepreneuriat à l'époque, il faut se replacer en 1983,
05:54ce n'était pas quelque chose d'abord du tout de discuté, de connu, de populaire
06:01maintenant qui est quelque chose d'assez incroyable dans le pays. J'en suis réjoui.
06:04Mais en fait, j'avais plongé dans la vie d'une entreprise avec un statut un peu à
06:09part. Mais à l'époque, je me disais oui, je vais peut-être continuer dans le monde
06:14d'une entreprise. Je n'avais pas nécessairement percuté à me dire pourquoi pas être moi-même
06:18un entrepreneur finalement.
06:20Et c'est là où Microsoft arrive dans votre vie, parce que vous avez passé 40 ans.
06:25Oui, c'est là où Microsoft arrive. C'est-à-dire qu'un jour, un de vos homologues, une chasseuse
06:29de tête à l'époque qui a chassé pendant au moins 10-15 ans, je lui rends hommage,
06:33Joëlle Dujour qui est une grande dame de la chasse dans la tech de l'époque et qui
06:39m'a recruté pour Microsoft. Alors qu'en fait, au départ, on voulait me faire vendre
06:43des produits hardware pour Thomson. J'ai dit l'hardware, je n'y crois pas. On a cette
06:48petite boîte de soft qui démarque en France depuis un peu moins d'un an qui s'appelle
06:51Microsoft qui est à la zone de courte à boeuf aux Ulysses. Moi qui montais de Nice
06:54comme on dit en train, c'était la zone de courte à boeuf, j'ai appelé le jet-trou
06:57déjà. Et j'ai trouvé surtout des personnes, des leaders incroyables.
07:01On va en parler. On va faire une petite pause et on va rentrer dans le poumon de Microsoft
07:07et votre ascension extraordinaire. A tout de suite.