• il y a 2 mois
En France, près de 9 millions de personnes se sentent seules et en souffrent. Or, selon l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), la solitude est aussi néfaste pour la santé qu'un tabagisme quotidien, une forte consommation d'alcool, ou encore l'obésité. L'isolement peut augmenter les risques de dépression, d'anxiété, de maladies cardiovasculaires ou de démence. Les maux de la solitude sont-ils suffisamment pris au sérieux ? Comment mieux accompagner les personnes isolées ? Nous poserons ces questions à notre invité, le psychiatre Bertrand Lièvre.

La santé figure au premier rang des préoccupations des Français et au coeur de tous les grands débats politiques et sociétaux.
L'organisation des soins, le service public hospitalier, mais aussi le mal de dos, les allergies, la bioéthique ou encore la nutrition... Sur LCP-Assemblée nationale, Elizabeth Martichoux explore chaque mois un thème de santé publique.
Entre reportages, interviews de professionnels de santé, de personnalités politiques mais aussi de patients, ce rendez-vous aborde tous les maux d'une problématique de santé, ses enjeux, les avancées et les nouveaux défis pour mieux vivre demain !

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Transcription
00:00LCP Assemblée Nationale, en partenariat avec MGEN, première mutuelle des agents du service public, présente État de santé.
00:30LCP Assemblée Nationale, en partenariat avec MGEN, première mutuelle des agents du service public, présente État de santé.
00:40En France, une personne sur dix est en situation d'isolement total, et un Français sur cinq se sent régulièrement seul.
00:48Malgré les idées reçues, la solitude touche tout le monde et en priorité les jeunes.
00:53Pendant l'été par exemple, ou lorsque c'était mon anniversaire, pendant les fêtes de fin d'année aussi,
00:58c'est des moments où on s'attend à se réunir.
01:02Et quand on voit qu'on ne peut pas combler ce besoin, ça peut rendre triste.
01:07Déprime, idées noires, la solitude est néfaste pour la santé mentale.
01:12Mais elle augmente aussi le risque de développer des maladies cardiovasculaires et neurodégénératives.
01:18Alors, pour certains professionnels de santé, rompre l'isolement fait partie intégrante du soin.
01:24Quand il y a quelque chose qui ne colle pas chez moi, je me confie à eux.
01:29Mais en avons-nous tous conscience ? Les mots de la solitude sont-ils trop souvent ignorés ?
01:34C'est le thème de ce nouveau numéro d'État de santé.
01:41Bonjour à tous et bienvenue dans ce nouveau numéro d'État de santé.
01:45On va parler de la solitude, parce que c'est devenu un des problèmes de santé majeurs de ce 21e siècle.
01:51La solitude, ça n'est pas nouveau, évidemment.
01:55Mais il est de plus en plus admis qu'elle a un impact réel sur la santé physique, pas seulement mentale.
02:03Alors, qu'est-ce que c'est exactement la solitude à propos ?
02:06Et puis, comment y remédier ? C'est une question passionnante qu'on va aborder avec vous.
02:11Bonjour Bertrand Lièvre, merci beaucoup.
02:13Dans un instant, on verra quel est votre parcours.
02:16Vous êtes psychiatre.
02:17Alors d'abord, il y a une bonne solitude, parce que chacun a besoin,
02:22chaque individu a besoin de moments de solitude dans une vie trépidante.
02:27Oui, ce qu'on pourrait appeler la solitude choisie et qui ne confine pas la tristesse.
02:32Et la solitude leur subie, c'est le fait de se sentir seul, alors que parfois on n'est pas forcément isolé.
02:40Absolument. Ce qu'on repère dans notre pratique clinique, c'est qu'il y a des gens qui sont peu isolés,
02:47qui sont massivement seuls, parfois même avec des solitudes ingérables,
02:51et des personnes qui, alors qu'elles sont assez isolées, ne ressentent pas de sentiment de solitude.
02:56La solitude, c'est avant tout, j'allais dire, un éprouvé, un sentiment personnel.
03:00C'est quelque chose d'universel, comme vous le disiez, qu'on traverse tous.
03:03Mais il y a deux types de solitude. Il y a la solitude choisie,
03:06ou la solitude qui confine parfois la tristesse, mais qui reste gérable.
03:10Et puis, il y a des solitudes que j'appellerais ingérables, qui vont générer des troubles sévères parfois,
03:14des sentiments d'abandon, des angoisses d'abandon, parfois des angoisses de mort,
03:19qui confinent la personne à ressentir comme un effondrement psychique.
03:23Et c'est là que nous, nous allons les rencontrer dans notre pratique,
03:26puisque c'est invivable et qu'il y a des troubles psychiques à ce moment-là.
03:29Et précisément, en qualité de psychiatre depuis des dizaines d'années,
03:33vous accompagnez ces personnes seules, on regarde votre parcours professionnel.
03:37Je suis le docteur Bertrand Liève, je suis médecin, psychiatre des hôpitaux.
03:41J'exerce sur les hôpitaux Paris-Est, Val-de-Marne.
03:44Je suis par ailleurs médecin coordonnateur d'une association dans le médico-social,
03:49qui s'appelle Apogéi 94 et qui gère 28 établissements et services.
03:53Et enfin, je suis engagé de longue date dans la promotion de la santé mentale,
03:58particulièrement à Santé Mentale France.
04:01Alors docteur, est-ce qu'il y a des patients,
04:04jeunes ou pas jeunes d'ailleurs, vous nous le direz,
04:07qui viennent vous voir spécifiquement pour vous parler de la solitude
04:10ou est-ce que ce n'est pas la première chose dont ils vous parlent ?
04:14Dans les consultations, qui est un lieu de l'intime, j'allais dire, on vient se confier.
04:20Et beaucoup de patients nous parlent de leur solitude
04:23et des conséquences en termes d'isolement social.
04:26Ce sont deux faits.
04:27La solitude, c'est plutôt un phénomène subjectif
04:30et l'isolement social un phénomène plutôt objectif.
04:33Donc les gens viennent nous parler de leur solitude,
04:36mais ils viennent nous en parler souvent quand ils sont impactés dans leur vie,
04:40c'est-à-dire sur le plan fonctionnel, et qu'ils vont présenter des troubles.
04:44Mais plus globalement, quand on a beaucoup de relations sociales,
04:47quand on ne souffre aucunement de solitude,
04:51ce qu'on peut dire vraiment de façon affirmative,
04:54c'est que oui, on vit plus longtemps en meilleure santé.
04:57Absolument, absolument.
04:59Une étude récente de 2023, l'étude américaine
05:02qui a amené à l'apparition dans le monde d'une tribune,
05:05montre l'augmentation des troubles de santé,
05:08physiques comme vous le rappeliez, mais aussi de santé mentale,
05:11et un impact sur l'espérance de vie,
05:13avec une augmentation dans la solitude des morts prématurées de 26 %,
05:18et dans l'isolement social, ce chiffre augmente à 29 %.
05:21Ce qui est terrible tout de même.
05:23Donc, on a des troubles.
05:25Quand on est seul et quand on souffre vraiment,
05:27quels sont ces impacts ?
05:29Infographie.
05:52Si vous l'ignoriez, ce n'est pas étonnant.
05:55Avant l'épidémie de Covid-19 et les différents confinements,
05:59peu de chercheurs s'étaient intéressés à ce sujet.
06:02L'une des premières à l'avoir prise au sérieux
06:05est la neuroscientifique américaine Julianne Holt-Lenstad.
06:10C'est elle qui a montré dès 2010
06:13que la solitude avait sa place aux côtés des facteurs de risque les plus connus.
06:17Depuis, de nombreux scientifiques ont mis en lumière
06:19les liens entre la solitude et certaines pathologies ou troubles psychiques.
06:23Mais comment les expliquer ?
06:25Plusieurs hypothèses sont avancées.
06:28D'abord, l'impact de la solitude sur notre santé mentale.
06:32Elle augmente les risques de dépression ou de suicide, par exemple.
06:36Mais moins de relations sociales,
06:39c'est aussi moins de proches qui nous poussent à aller consulter ou à mieux manger.
06:44Autre hypothèse,
06:46les personnes seules seraient davantage touchées par le stress chronique,
06:49facteur de risque de maladies cardiovasculaires,
06:52ou l'inflammation chronique,
06:54une réaction excessive du système immunitaire
06:56qui peut entraîner des pathologies comme le cancer
06:59ou des maladies neurodégénératives.
07:02Longtemps ignorée,
07:04la solitude commence à sortir de l'ombre.
07:06Mais elle n'a pas encore dévoilé tous ses secrets.
07:13Alors docteur Lièvre,
07:15revenons juste à un moment sur le Covid.
07:17Le Covid a été un moment extraordinairement inédit et particulier
07:24où beaucoup ont vécu la solitude, une solitude subie,
07:27contrairement à quelques mois avant.
07:30Mais ça a été, sur une durée de temps, donné.
07:34Ça a eu un impact au moment même du Covid.
07:38Vous voyez des patients qui viennent vous dire
07:40« je n'en suis jamais remise ».
07:42On a toujours des personnes qui restent impactées
07:45par les effets d'isolement, j'allais dire,
07:48plus que de solitude,
07:50parce que je crois qu'on était au-delà pendant la pandémie,
07:54particulièrement les jeunes.
07:56Les études récentes de l'IFOP retrouvent,
07:59chez les 18-24 ans,
08:01un sentiment de solitude régulier à plus de 60 %.
08:05Ça, c'est une idée reçue sur laquelle,
08:08pardon je vous interromps,
08:10on pense que ce sont les personnes âgées qui sont touchées par la solitude.
08:13Et dans cette étude d'IFOP,
08:1562 % des jeunes se sentent régulièrement seuls,
08:19entre 18 et 24 ans,
08:2137 % pour les plus de 65 ans.
08:23Est-ce que c'est aussi parce que les jeunes supportent moins la solitude
08:26que les personnes âgées ?
08:28Chez les personnes âgées, c'est ce qu'on a décrit
08:30dans le syndrome du retrait progressif,
08:32qui est une adaptation au vieillissement et à la fin inéluctable.
08:35Chez les jeunes, tous les jeunes,
08:37même si le chiffre est important,
08:39vont vivre la solitude de manière différente.
08:41Il y a des solitudes gérables,
08:43des jeunes qui sont enfermés chez eux actuellement.
08:46On a beaucoup de demandes de ce côté-là,
08:48ce qui a été appelé le syndrome de la grotte,
08:50qui se sont effondrées.
08:52En fait, on n'est pas tous égaux devant la solitude.
08:55Certaines personnes ont traversé la petite enfance
08:59avec des manques d'appui, j'allais dire,
09:02ce qu'on appelle nous l'intégration des imagos parentaux.
09:06Les imagos parentaux, c'est prendre conscience
09:10que quand ses parents ne sont pas à côté,
09:13ils sont quand même là.
09:15Et d'ailleurs, les pouvoirs publics, au départ,
09:17alors que ces jeunes criaient leur souffrance,
09:19ont augmenté les temps de sortie, les distances,
09:22ce qui n'a rien produit.
09:24Ce qui a produit, c'est quand ils ont mis en place
09:28les épiceries solidaires.
09:30Ça peut paraître étrange,
09:32mais en fait, c'est devenu un duo thérapeutique
09:34entre le jeune et cet imago parental
09:37qui était les épiceries solidaires,
09:39où on pouvait aller quand on avait besoin,
09:41mais qui n'était pas forcément intrusif
09:43et qui n'était pas à la maison.
09:45Et on voit bien que les décisions de service public
09:47dans des champs qui peuvent apparaître
09:49loin de la psychiatrie,
09:51doivent être réfléchies
09:53sous l'angle de la santé mentale,
09:55parce qu'on a tous une santé mentale
09:57et ça doit traverser l'ensemble des questionnements
09:59des pouvoirs publics dans les politiques publiques.
10:01Alors, il y a eu le Covid,
10:03il y a plus généralement aussi les réseaux sociaux,
10:05on va en parler dans un instant.
10:07Je voudrais qu'on regarde ce reportage
10:09de Marianne Cazot auprès d'une jeune femme
10:11qui a ce sentiment de solitude
10:13elle en parle très volontiers,
10:15c'est très précieux pour essayer de comprendre
10:17ce qu'il se passe, ce reportage.
10:22Moi, je trouve qu'il y a des gens
10:24qui ne se rendent pas compte
10:26de la chance qu'ils ont,
10:28si on appelle ça une chance,
10:30d'avoir plein d'amis.
10:32Parce que clairement,
10:34aujourd'hui, ce n'est pas mon cas.
10:36J'avais plein de potes
10:38quand j'étais plus jeune,
10:40je ne me suis pas présentée, je crois.
10:41Et je suis freelance.
10:43Et je suis en études de psycho aussi.
10:45J'avais quelque chose sur le cœur
10:47qui est le poids de la solitude au quotidien.
10:49J'avais envie de pouvoir en parler
10:51à des inconnus parce que
10:53autour de moi, mon cercle était restreint justement.
10:55Ça m'a fait du bien à ce moment-là
10:57d'extérioriser tout ce que j'avais sur le cœur.
10:59Et ça m'a permis aussi de prendre du recul,
11:01de me dire peut-être qu'il y a d'autres gens
11:03dans ma situation.
11:05En grandissant, j'ai eu de moins en moins d'amis,
11:07de moins en moins d'entourage.
11:09Quand j'étudie toute seule à la maison
11:11et je me rends compte qu'il n'y a personne
11:13avec qui parler,
11:15ça peut m'envahir d'un coup comme ça.
11:17Pendant l'été par exemple,
11:19ou lorsque c'était mon anniversaire,
11:21pendant les fêtes de fin d'année aussi,
11:23c'est des moments où on s'attend à se réunir.
11:25Et quand on voit qu'on ne peut pas
11:27combler ce besoin,
11:29ça peut rendre triste.
11:42Moi, je me suis rendue compte
11:44que je n'avais personne
11:46en me disant
11:48mais si je me marie, j'invite qui ?
11:50Et je me suis fait la même réflexion,
11:52donc ça m'a fait rire.
11:54Je suis beaucoup trop épuisée au quotidien,
11:56je travaille énormément
11:58et donc cette fatigue a tué ma vie sociale.
12:00Je n'arrive plus à sortir le week-end.
12:02J'ai reçu des commentaires
12:04par milliers de gens qui disaient
12:06je vis la même chose que toi.
12:08Et j'ai aussi reçu des messages en privé
12:09où les gens se confiaient un peu plus
12:11et souhaitaient même me rencontrer
12:13pour, pourquoi pas,
12:15commencer une amitié.
12:17Ce n'était pas mon but à la base
12:19mais je me suis ouverte
12:21à cette possibilité-là
12:23et on a commencé à discuter
12:25et au final,
12:27je me suis fait ghoster.
12:29Donc c'est là où je me suis dit
12:31que parfois c'est un leurre,
12:33les réseaux sociaux,
12:35on a l'impression que les gens
12:37sont proches de nous
12:39et parfois même,
12:41ça génère un engouement éphémère
12:43où on se parle par messages.
12:45Là, j'ai reçu pas mal de likes,
12:47d'abonnements, etc.
12:49Et après, ça s'essouffle d'un coup.
12:51En tout cas, moi, c'est ce que j'ai vécu.
12:53C'est à ce moment-là qu'on voit
12:55qui sont les vraies personnes
12:57qui restent sur le long terme.
12:59Là, j'ai constaté encore une fois
13:01qu'il n'y avait pas grand monde.
13:03J'ai traversé des moments
13:05où j'étais vraiment déprimée,
13:07voire je pense que j'ai traversé
13:09des habitudes que je vivais au quotidien
13:11où je manquais d'amis
13:13pour me soutenir dans ce que je traversais.
13:15Entre les nouvelles relations
13:17qui ne fonctionnent pas,
13:19qui sont un peu étouffées dans l'œuf
13:21et me rendre compte
13:23que j'avais de l'anxiété sociale
13:25et que ça ne partait pas
13:27et trouver des solutions pour ça
13:29et en même temps rencontrer
13:31de nouvelles personnes,
13:33enfin, c'était un enfer.
13:35Et je ne dis pas que j'en suis sortie,
13:37mais j'avance sur ce chemin de guérison.
13:39C'est un chemin
13:41uniquement des amitiés.
13:43Aller s'amuser,
13:45faire un laser game,
13:47chanter.
13:49C'est que récemment que j'ai eu ce déclic
13:51et ça a super bien marché pour moi.
13:56Alors docteur,
13:58qu'est-ce qui vous frappe
14:00dans le témoignage de cette jeune femme ?
14:02Ce qui me frappe en premier en tant que psychiatre,
14:04c'est quand elle emploie le terme
14:06d'anxiété sociale,
14:07d'anxiété sociale et
14:09sentiment de solitude.
14:11Une étude américaine de Pittsburgh,
14:13en Pensylvanie,
14:15a montré le lien extrêmement fort
14:17entre les réseaux sociaux
14:19et le sentiment de solitude.
14:21Est-ce que ce sont des rencontres,
14:23elle le décrit bien,
14:24des rencontres éphémères,
14:25des impasses
14:26et le nombre ne fait rien à la qualité
14:27qui finalement...
14:29En fait, plus de deux heures
14:31passées sur les réseaux sociaux,
14:33c'est se sentir deux fois plus seul.
14:35Toutefois...
14:36On en sort plus seul
14:38qu'avant.
14:39Que si on passait moins de deux heures,
14:40absolument.
14:41Ça a été mesuré ?
14:42Oui, ça a été mesuré, oui.
14:44Pour les ouvreurs publics,
14:46l'idée, ce serait de faire en sorte
14:48que les applications virtuelles
14:50de rencontres
14:53se décalent dans le réel.
14:55C'est-à-dire que c'est en cours
14:56actuellement.
14:57Il y a des applications 3D
14:59qui permettent aux gens de se rencontrer
15:00entre amis, entre collègues,
15:02mais celles-ci, elles ont un intérêt
15:03si elles produisent des rencontres
15:04dans la réalité.
15:06Sinon, c'est l'inverse.
15:07Sinon, on est encore plus seul
15:08et plus isolé.
15:09Quand on a ce sentiment,
15:10il faut aller consulter.
15:11Il ne faut pas rester tout seul
15:12face à son téléphone...
15:13Vous savez, la psychiatrie publique,
15:15et on en parlera peut-être
15:16un peu en difficulté,
15:18ce que j'ai envie de dire,
15:19et c'est bon pour tout le monde
15:20et c'est bon pour moi
15:21parce que j'y pense souvent,
15:23c'est que d'être autonome,
15:24c'est multiplier les dépendances.
15:26Et c'est multiplier les dépendances
15:28à ce que Neuburger appelait
15:30les cercles d'appartenance,
15:31c'est-à-dire les groupes sociaux.
15:33Par exemple, il ne faut pas passer
15:34tout son temps à travailler
15:35au moment où on va tomber en retraite,
15:37ça va être une catastrophe.
15:39Il faut avoir plusieurs groupes sociaux
15:40dans lesquels on est inscrit,
15:42avec qui on a des intérêts communs,
15:44avec qui on a des valeurs communes,
15:46et ça, parce qu'on est
15:47des êtres de relation
15:49et qu'on a besoin de ça.
15:51Donc, j'allais dire,
15:52c'est assez simple,
15:53ne pas mettre tous ces œufs
15:54dans le même panier.
15:55C'est assez intéressant
15:56parce qu'on est déjà là
15:57dans comment y remédier.
15:59Juste avant,
16:00quels sont les symptômes ?
16:01Quels sont les signaux d'alerte ?
16:03Les troubles qu'on rencontre
16:05sont essentiellement
16:06des troubles dépressifs
16:07liés à la solitude,
16:08des conséquences...
16:10Déprime, puis dépression.
16:12Les troubles anxieux
16:13et particulièrement,
16:14comme le dit cette jeune femme,
16:15l'anxiété sociale,
16:16ce qui va amener
16:17à ne plus sortir de chez soi.
16:19Et puis, l'augmentation
16:20de consommation du tabac,
16:22mais aussi des psychotropes
16:23et des substances illicites,
16:24par exemple.
16:26Est-ce que la solitude
16:27est liée au lieu de vie ?
16:28Campagne, ville ?
16:31Cela semble prouver,
16:32particulièrement pour les personnes
16:33âgées,
16:34en fait, en ruralité,
16:36ce n'est pas le manque
16:37de convivialité,
16:38de soutien social,
16:39de proximité
16:40qui fait défaut,
16:41c'est en fait,
16:42le manque de commerce
16:43et de services publics
16:44de proximité.
16:45C'est aussi le manque
16:46de transport
16:47et c'est aussi,
16:48parfois,
16:49la faiblesse
16:50du réseau téléphonique.
16:52Et on voit bien
16:53que les solutions
16:55à trouver
16:56ne sont pas que
16:57dans le champ
16:58du sanitaire.
16:59Mais parfois,
17:00le champ du sanitaire
17:01est extraordinairement
17:02précieux
17:03pour rompre l'isonnement
17:04quand même.
17:05On va, par exemple,
17:06suivre ce soignant,
17:07cet infirmier libéral
17:08qui fait une tournée
17:09auprès des personnes âgées.
17:11On se dit que
17:12si lui n'existait pas,
17:13ce serait terrible
17:14pour certaines personnes.
17:15Marianne Cazot
17:16l'a suivie
17:17pour État de santé.
17:24J'aime bien aller
17:25vers les gens
17:26et j'ai toujours voulu
17:27travailler à domicile
17:28parce que j'ai l'impression
17:29de plus facilement
17:30connaître les patients.
17:31On les voit
17:32tous les jours,
17:33plusieurs fois par semaine
17:34et pendant aussi
17:35beaucoup plus d'années
17:36que si on était
17:37en service classique.
17:39Oui, ben oui,
17:40vous avez passé
17:41une bonne journée.
17:42Lors de mes études,
17:43j'avais eu des frustrations.
17:44Certaines fois,
17:45je ne connaissais pas
17:46le nom des patients
17:47que je soignais
17:48parce qu'il y avait
17:49tellement d'informations
17:50à prendre en compte,
17:51de choses à surveiller
17:52pour l'état de santé
17:53de la personne
17:54que je n'avais pas
17:55forcément le temps
17:56de discuter avec les gens.
17:57Il manquait
17:58une certaine forme de proximité.
17:59Une chose qui a toujours
18:00été importante pour moi
18:01dans le soin.
18:02Bon, ben à demain.
18:03À demain, Pierre.
18:04Merci beaucoup.
18:05Bonne soirée.
18:06Nous avons une bonne partie
18:07de nos patients
18:08qui vivent un contexte
18:09un peu d'isolement.
18:10Pour la plupart,
18:11ils ont quand même
18:12une famille qui est proche.
18:13Ils ont aussi des aides
18:14à domicile.
18:15Bonsoir.
18:16Mais nous avons aussi
18:17des patients qui connaissent
18:18un isolement
18:19un peu plus important
18:20avec une famille
18:21qui est certes présente
18:22par le téléphone,
18:23par d'autres choses,
18:24mais qui reste éloignée
18:25et du coup,
18:26les intervenants extérieurs
18:27comme nous
18:28trouvent toute leur place
18:30Ils vont à la pharmacie
18:31pour moi.
18:32Ils vont tout.
18:33Il m'a posté
18:34deux lettres hier.
18:35Je vais devoir écrire
18:36mes cartes aussi
18:37pour l'Angleterre
18:38donc il y en aura d'autres.
18:43Bonsoir.
18:46La journée s'est bien passée ?
18:47Bon, c'est long.
18:48C'est long, oui.
18:50Oui, ben oui.
18:51Vous n'avez pas vu
18:52grand monde ?
18:53Non.
18:55J'ai vu l'année d'affaires,
18:56papa.
18:57Ce matin, oui.
18:59Et puis vous ?
19:00Oui, ben nous, oui.
19:01C'est mon collègue Florian
19:02qui est passé.
19:03Parfois, nous sommes
19:04les seuls intervenants extérieurs
19:05ou les seules personnes
19:06qui croisent
19:07dans leur journée
19:08et on sent
19:09que c'est un moment
19:10un peu privilégié
19:11donc c'est à nous
19:12d'être vigilants,
19:13de leur accorder
19:14toute l'importance
19:15à ce moment-là en fait
19:16et pas juste
19:17on arrive chez eux,
19:18on fait le soin
19:19et on repart.
19:20On voit beaucoup de monde.
19:21Des fois, on a des tournées
19:22où on voit 40 personnes
19:23dans la journée
19:24donc c'est dur
19:25d'être attentif à chacun
19:26mais on a quand même
19:27cette responsabilité-là
19:28Je considère que ma journée
19:29est réussie
19:30si j'ai l'impression
19:31d'avoir fait mon travail
19:32correctement
19:33mais également
19:34que j'ai été à l'écoute
19:35des gens,
19:36que j'ai pris le temps
19:37avec les gens
19:38et pas une sensation
19:39d'avoir été tout le temps
19:40toute la journée
19:41très vite.
19:42Il fait noir ici.
19:43Ah ben, c'était bien aujourd'hui.
19:44Je me retrouve toute seule.
19:45Heureusement que je l'ai laissée.
19:46Le capteur, il est.
19:47Quand il y a quelque chose
19:48qui ne colle pas chez moi
19:49et que je n'ai pas le droit
19:50de l'envoyer,
19:51c'est quand même
19:52un moment
19:53où je me dis
19:54qu'il y a un problème.
19:55C'est quand même
19:56un moment
19:57qui ne colle pas chez moi
19:58et bien,
19:59je me confie à eux
20:00et puis,
20:01j'ai eu un moment difficile.
20:02Il y a six mois,
20:03j'ai perdu mon frère
20:04de la maladie de Sarko
20:07et ça a été très dur
20:09pour moi de le voir partir
20:12et ils étaient là
20:14et ça m'a aidée.
20:15On est là aussi
20:16pour entendre ces choses-là,
20:17pour les soutenir
20:19et j'ose l'espérer
20:20que c'est important
20:21pour les gens
20:22ces marques d'affection,
20:23que ça nous touche,
20:24qu'on n'est pas juste
20:25une personne
20:26pour les soigner
20:27mais qu'on est aussi
20:28un humain
20:29et qu'on est aussi là
20:30pour les aider.
20:31Il y a la relève.
20:32Il y a la relève.
20:33C'est sûr,
20:34il faut que ça plaise aussi.
20:35C'est comme d'être médecin,
20:36c'est pareil,
20:37c'est une vocation.
20:48Docteur Bertrand-Liev,
20:49ce reportage-là,
20:50cet infirmier,
20:51c'est un bienfaiteur
20:52en même temps que c'est un soignant.
20:53Enfin, il est formidable
20:54heureusement qu'il est là.
20:55Il est engagé
20:56et heureusement
20:57qu'il y en a encore.
20:58On est en difficulté
20:59pour trouver des infirmiers
21:00libéraux
21:01pour faire du domicile.
21:02Vous pensez que de ce type
21:03de profil,
21:04il y en aura de moins en moins ?
21:05Il y en a déjà
21:06de moins en moins.
21:07Moi qui fais du domicile,
21:08puisque ma pratique
21:09est une pratique
21:10d'équipe mobile,
21:11on a notre réseau
21:12d'infirmiers libéraux
21:13mais c'est un peu
21:14toujours les mêmes.
21:15Pourquoi ?
21:16Pourquoi on trouve
21:17moins de profils ?
21:18Alors après,
21:19il y a sûrement
21:20des questions qui m'échappent,
21:21des questions financières,
21:22des questions d'engagement.
21:23Je crois que c'est aussi,
21:24alors les infirmiers libéraux
21:25sont essentiels
21:26effectivement dans
21:27ces situations de solitude
21:28mais je pense aussi
21:29aux aides humaines,
21:30aux aux aides de vie
21:31qui font beaucoup
21:32pour ces gens très seuls
21:33et puis je pense
21:34aux bénévolats.
21:35Je pense
21:36à des associations
21:37avec lesquelles je travaille,
21:38Saint-Vincent de Paul,
21:39les Petits Frères des Pauvres
21:40qui font parfois
21:41presque des miracles
21:42puisque je ne crois pas
21:43aux miracles
21:44mais qui participent
21:45largement
21:46de l'accompagnement
21:47de ces personnes isolées.
21:48Oui.
21:49Au Royaume-Uni,
21:50il y a une initiative
21:51qui m'a un peu surprise.
21:52On prescrit
21:53des activités sociales.
21:54Ça veut dire quoi
21:55prescrire des activités sociales ?
21:56Alors en Angleterre,
21:57je crois que ce sont
21:58avant tout
21:59des prescriptions muséales.
22:00C'est-à-dire qu'ils ont
22:01mis en place
22:02des prescriptions
22:03pour aller au musée.
22:04En fait,
22:05c'est des pratiques
22:06qu'on a depuis bien longtemps
22:07dans les services
22:08de santé mentale,
22:09de psychiatrie,
22:10particulièrement
22:11sur les hôpitaux de jour.
22:12Nous,
22:13on avait mis en place
22:14des conventions
22:15avec les musées nationaux
22:16et effectivement,
22:17ça participe
22:18du programme
22:19de santé mentale
22:20et ça participe
22:21du processus
22:22de rétablissement,
22:23d'être inscrit
22:24dans la société,
22:25d'aller voir de la culture.
22:26En même temps,
22:27on ne peut pas
22:28tout attendre de ça.
22:29Ce n'est pas parce
22:30qu'on va aller au musée
22:31une fois par mois
22:32que ça va guérir
22:33la personne
22:34ou résoudre
22:35tous les problèmes
22:36qui sont bien plus larges.
22:37Donc,
22:38méfions-nous
22:39des effets d'annonce.
22:40C'est un élément important
22:41mais on est en attente
22:42d'autres choses
22:43du côté
22:44des pouvoirs publics.
22:45Il y a quelque chose
22:46sur lequel
22:47on ne s'est pas arrêté,
22:48évidemment,
22:49c'est la question sociale,
22:50justement.
22:51La précarité
22:52est un facteur
22:53d'isolement
22:54et de solitude.
22:55La Fondation de France
22:56a beaucoup travaillé
22:57puisqu'elle sort
22:58des rapports
22:59sur la solitude
23:00depuis nombreuses années.
23:01Il y a un lien fort
23:04entre la pauvreté
23:05et l'isolement social
23:07et particulièrement
23:08avec des perceptions
23:09d'isolement social
23:10très élevées
23:11chez les personnes au chômage.
23:12Donc,
23:13il y a effectivement
23:14des actions
23:15sociales
23:16à mettre en place.
23:18Vous avez voulu
23:19poser une question
23:20à un parlementaire
23:21comme on a l'habitude
23:22de le faire dans l'émission.
23:23En l'occurrence,
23:24Annie Vidal vous répond.
23:25Elle est députée
23:26pour la République
23:27de Seine-Maritime.
23:28Vous vouliez savoir
23:29s'il ne serait pas
23:31précieux
23:32de créer un poste
23:33de déléguée
23:34interministérielle
23:35à la santé mentale
23:36et la psychiatrie
23:37pour précisément
23:38prendre en charge
23:39au niveau interministériel
23:40ces questions-là.
23:41Elle vous répond.
23:46C'est le professeur
23:47Franck Bélivier
23:48qui est délégué
23:49ministériel
23:50à la santé mentale.
23:51Auprès
23:52de la ministre
23:53du Handicap,
23:54quand on parle
23:55de la santé mentale
23:57des étudiants,
23:58par exemple,
23:59forcément,
24:00il va travailler
24:01avec le ministère
24:03de l'Éducation nationale.
24:05Si on parle
24:06de la santé mentale
24:07des personnes âgées
24:08qui peuvent
24:09être en souffrance
24:10psychique
24:11du fait d'un isolement
24:12social important,
24:13ça va forcément
24:14être le ministère
24:15des Solidarités.
24:17De fait,
24:18par la définition
24:19de sa mission,
24:20il s'appelle
24:21délégué ministériel
24:22mais, finalement,
24:23il a un rôle
24:24interministériel
24:25sur le faut-il.
24:26En plus,
24:27un délégué
24:28interministériel,
24:29je ne suis pas
24:30certaine
24:31que ce soit
24:32pertinent
24:33au niveau national.
24:34Par contre,
24:35il me semble
24:36que,
24:37comme on a
24:38une feuille de route,
24:39comme on a
24:40un délégué
24:41ministériel
24:42qui doit
24:43donc
24:44s'occuper
24:45de cette feuille
24:46de route,
24:47d'avoir
24:48un référent
24:49santé mentale
24:50sur les territoires,
24:51ça me semblerait
24:52pertinent.
24:57Voilà pour la réponse
24:58à votre question.
24:59Donc,
25:00pourquoi
25:01interministériel
25:02alors qu'il y a déjà
25:03un délégué ministériel
25:04et
25:05elle évoque
25:06des références
25:07santé mentale
25:08sur les territoires
25:09qui pourraient être
25:10plus intéressants
25:11qu'un délégué
25:12interministériel.
25:13Vous êtes d'accord ?
25:14Oui,
25:15vraiment.
25:16La question de la santé mentale
25:17traverse tous les champs
25:18et tous les ministères.
25:19La délégation
25:20ministérielle
25:21est quand même plus
25:22sur le champ du sanitaire
25:23ou du handicap.
25:24Et
25:25notre attente,
25:26je parlais plus tôt
25:27en tant que
25:28membre de
25:29Santé mentale France,
25:30c'est effectivement
25:31une délégation
25:32interministérielle
25:33pour que l'ensemble
25:34des réflexions
25:35et des décisions
25:36des pouvoirs
25:37publics
25:38soient interrogées
25:39sous l'angle
25:40de la santé mentale,
25:41puisque nous avons
25:42tous une santé mentale
25:43et nous devons
25:44en prendre soin
25:45et l'État doit
25:46prendre soin
25:47de notre santé mentale.
25:48C'est
25:49une de ses
25:50fonctions,
25:51j'allais dire.
25:52C'est votre demande
25:53à la députée,
25:54plus largement,
25:55quelle serait,
25:56pour répondre
25:57à l'enjeu
25:58de la solitude,
25:59quel serait
26:00votre souhait
26:01en tant que médecin ?
26:02Je reste
26:03dans l'idée
26:04que, déjà,
26:05mettre en place
26:06une délégation
26:07interministérielle,
26:08ça me paraît important
26:09et aussi,
26:10je souhaite le dire,
26:11réenchanter
26:12la psychiatrie
26:13publique
26:14qui est dans
26:15certains territoires,
26:16dans une situation
26:17extrêmement préoccupante
26:18avec des catastrophes
26:19humaines,
26:20familiales
26:21et
26:22on ne peut pas
26:23ne pas y penser.
26:24Dernière question,
26:25avant de nous quitter,
26:26quels sont
26:27les conseils
26:28que vous donnez
26:29aux personnes
26:30qui ont un sentiment
26:31de solitude ?
26:32Si les gens ont
26:33un sentiment de solitude,
26:34c'est de se réinscrire
26:35dans des groupes sociaux.
26:36Si elles ont
26:37des conséquences
26:38psychiques de leur solitude,
26:39c'est de venir consulter,
26:40de se faire accompagner,
26:41si elles ont des troubles
26:42de santé mentale
26:43et nous attachons
26:45aussi également
26:46à la réinscription
26:47dans la société
26:48des personnes
26:49que nous accompagnons.
26:50Si vous sentez seul,
26:51ne restez pas seul
26:52parce qu'il y a
26:53des solutions
26:54pour en sortir
26:55et qui peuvent intervenir
26:56de l'extérieur.
26:57Merci beaucoup
26:58Bertrand Liève
26:59d'avoir été avec nous.
27:00Merci à tous
27:01de nous avoir suivis
27:02au cours de cette émission
27:03d'État de santé sur LCP.
27:12LCP Assemblée nationale
27:13en partenariat avec MGEN
27:15vous a présenté
27:16État de santé.

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