Clément Méric reçoit Maud Gatel, députée Démocrate de Paris.
Elle a d'abord travaillé dans l'ombre de Marielle de Sarnez, avant de conseiller des grands patrons sur leurs stratégies de communication. Maud Gatel se consacre désormais à 100% à la politique.
Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !
Elle a d'abord travaillé dans l'ombre de Marielle de Sarnez, avant de conseiller des grands patrons sur leurs stratégies de communication. Maud Gatel se consacre désormais à 100% à la politique.
Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
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00:00 -Dans une autre vie, elle a été une pro de la com',
00:02 mais en politique, ne comptez pas sur elle
00:05 pour faire des coups d'éclat.
00:06 Mon invité assume un style à la fois sérieux et plutôt discret.
00:10 Musique de tension
00:12 ...
00:25 Bonjour, Maud Gatel. -Bonjour.
00:27 -Vous êtes députée modem de Paris.
00:29 Votre engagement politique a d'abord été marqué par l'Europe,
00:32 une passion pour l'Europe qui remonte à loin.
00:35 Elle remonte à ça. Expliquez-nous.
00:38 -Alors, c'est l'album Panini que ma maman m'a offert
00:43 quand j'étais très jeune, je pense que j'avais 9-10 ans,
00:46 parce que j'ai développé assez tôt une passion
00:50 pour l'Europe en construction,
00:52 je pense en lien avec la chute du Mur,
00:54 qui m'avait beaucoup marquée.
00:56 -Si vous avez offert un album de footballeur,
00:59 vous seriez devenue footballeuse ?
01:00 La passion pour l'Europe a précédé l'album.
01:03 -Absolument. En tout cas, c'est comme ça
01:05 que je me souviens des choses.
01:07 C'est vrai que j'avais été très marquée
01:09 par cette réconciliation des peuples,
01:12 qui avait, chez moi, eu beaucoup d'écho.
01:17 -Et de fil en aiguille, c'est ce qui vous a amenée
01:20 à vous intéresser à la politique très jeune ?
01:23 -Alors, c'est vraiment mon engagement,
01:25 l'engagement européen, c'est l'engagement qui demeure.
01:28 J'avais un engagement pour l'environnement,
01:31 aussi, très jeune. Je me passionnais déjà
01:33 pour la question des déchets et du recyclage,
01:36 et donc, finalement, j'ai mes deux piliers,
01:38 l'environnement et l'Europe.
01:40 -Et la politique en général,
01:42 parce que je crois que dès l'âge de 9 ans,
01:44 vous êtes passionnée pour la présidentielle de 1988,
01:47 François Mitterrand face à Jacques Chirac.
01:50 Ca a continué pour vous au collège et au lycée,
01:53 sauf que vous expliquez que la politique,
01:56 c'était pour vous un spectacle
01:58 et que vous ne vous imaginiez pas forcément monter sur scène
02:01 pour être une actrice de ce spectacle. Pourquoi ?
02:04 -Je considérais que la politique, c'était pas pour moi,
02:07 c'était un intérêt très fort.
02:09 Effectivement, je m'intéressais beaucoup à l'actualité,
02:12 je me souviens très bien de ces images,
02:14 mais je voyais ça comme quelque chose d'extérieur à moi,
02:17 où je n'étais qu'une spectatrice.
02:19 -Pourquoi pas pour vous ?
02:21 C'était une forme d'autocensure
02:23 liée à, je sais pas, votre environnement social ?
02:26 -C'était peut-être une autocensure,
02:28 et en tout cas, je ne voyais pas le chemin pour moi
02:31 pour y prendre part.
02:32 -Vous pensez que c'est encore quelque chose
02:34 qui est valable pour beaucoup de jeunes ?
02:37 Cette idée que la politique, c'est réservé
02:39 à une certaine catégorie de la population ?
02:42 -J'en suis convaincue,
02:43 et je pense qu'il y a beaucoup d'autocensure,
02:46 y compris aujourd'hui, et c'est la raison
02:48 pour laquelle je travaille à ouvrir la politique
02:51 sur la société, pour donner l'envie, le goût,
02:55 mais surtout les clés pour celles et ceux qui veulent s'engager.
02:58 -Vous faites quoi, concrètement, pour ça ?
03:01 -C'est un peu de la politique hors les murs.
03:03 C'est montrer qu'il y a différentes formes d'engagement
03:06 qui, à un moment ou un autre,
03:08 peuvent prendre aussi une forme politique.
03:11 C'est pas à la place, mais aussi une forme politique,
03:14 et que ce milieu n'est pas fermé,
03:16 mais qu'il est le plus ouvert possible,
03:18 et je travaille à ce qu'il le soit encore davantage.
03:21 -Vous avez quand même fait les études dont vous rêviez,
03:24 à l'Université de Transpaux, à Bordeaux.
03:27 Vous avez décroché un stage auprès de Michel Barnier
03:30 à la Commission européenne, et ensuite,
03:32 Marielle de Sarnez vous a embauchée
03:34 comme collaboratrice au Parlement européen.
03:37 Quels souvenirs gardez-vous de ces sept années
03:40 passées avec elle ?
03:41 -Alors, d'abord, je garde...
03:43 D'abord, elle m'a beaucoup, beaucoup appris,
03:45 la rigueur, toujours le souci du détail,
03:48 et puis je garde aussi...
03:51 Je dis souvent que je suis un bébé du Parlement européen,
03:54 c'est-à-dire que j'ai été élevée à cette culture
03:57 du compromis, du travail ensemble,
03:59 de faire en sorte de travailler sur des majorités
04:02 autour de projets communs.
04:03 C'est vrai que parfois, j'aspirerais
04:06 à ce que l'Assemblée nationale s'inspire bien davantage
04:09 des pratiques du Parlement européen.
04:11 -Pour en revenir à M. de Sarnez,
04:13 c'était pas n'importe qui dans la famille centriste,
04:16 c'était vice-présidente du MoDem,
04:18 longtemps bras droit de François Bayrou.
04:20 Elle a été votre mentor en politique ?
04:23 -Elle a totalement été mon mentor, oui.
04:25 -C'était une figure qui était à la fois très respectée
04:28 mais qui avait aussi la réputation d'être assez exigeante.
04:31 -Très exigeante. -Très exigeante.
04:33 C'était parfois compliqué.
04:35 -Elle savait absolument ce qu'elle voulait
04:37 et elle se... Elle donnait la même...
04:39 Elle avait la même exigence pour les autres
04:42 qu'elle avait à l'égard d'elle-même.
04:44 Le niveau était très élevé,
04:46 mais je pense que quiconque l'a croisée
04:48 au cours de sa carrière de femme politique
04:51 lui reconnaît à la fois cette excellence,
04:54 cette rigueur, cette exigence pour elle-même
04:56 avant d'être l'exigence pour les autres.
04:58 -Au bout de sept ans, vous avez tourné la page
05:01 du Parlement européen et de Marielle de Sarnez
05:04 pour vous lancer dans une carrière dans la communication,
05:07 d'abord chez Tilder, puis chez TBWA,
05:09 qui sont des références dans le secteur.
05:12 Vous donniez des conseils, je crois,
05:14 à des grands patrons ou à des dirigeants d'organismes publics.
05:17 On est loin de la politique et de ce que vous faisiez avant.
05:21 Vous aviez envie de changer d'air ?
05:23 -Non, en fait, la politique m'a attrapée à un moment
05:26 où je ne m'attendais pas du tout à avoir cette opportunité.
05:29 J'ai énormément appris et apprécié
05:33 ces sept années passées à côté de Marielle de Sarnez,
05:36 mais j'ai toujours voulu avoir un vrai métier.
05:39 Pouvoir... -Gagner votre vie.
05:41 -Gagner ma vie. -Indépendamment de la politique.
05:44 -Absolument. Et par ailleurs, je considérais
05:46 que c'était compliqué d'être à la fois payée par la politique
05:50 en tant que salariée et élue,
05:52 et j'aspirais effectivement à me présenter à des élections.
05:55 J'ai toujours beaucoup apprécié la communication
05:58 et je pense qu'on peut faire aussi de grandes choses
06:01 avec les organisations, les entreprises,
06:03 et je pense avoir aussi servi l'intérêt général
06:06 à travers mon engagement auprès de certains dirigeants.
06:09 -En parallèle de cette carrière,
06:11 vous êtes restée engagée en politique,
06:13 mais pas au niveau européen, au local.
06:16 Vous avez été élue conseillère de Paris,
06:18 vous avez pris la tête du MoDem à Paris.
06:20 J'ai même lu que vous n'excluez pas
06:22 de vous présenter comme candidate à la mairie de Paris plus tard.
06:26 -J'aime infiniment cette ville
06:28 qui m'a adoptée il y a 25 ans maintenant,
06:30 et je souffre beaucoup
06:32 de voir se dégrader notre patrimoine,
06:35 qu'il soit architectural, végétal,
06:37 et de voir que chaque année,
06:40 il y a des 12 000 Parisiens qui quittent la ville
06:43 parce qu'ils aspirent à autre chose.
06:45 Je pense qu'on a besoin d'une grande ambition pour Paris,
06:49 et je continuerai à porter cette ambition
06:51 et je prendrai ma part au changement que j'appelle de mes voeux.
06:55 -Vous avez de grandes ambitions politiques,
06:57 vous occupez des fonctions importantes au MoDem,
07:00 vous êtes devenue secrétaire générale de ce parti,
07:03 mais vous êtes très discrète dans les médias,
07:05 et c'est vrai que pour une pro de la com,
07:08 ça peut surprendre. Pourquoi cette discrétion ?
07:11 -C'est pas une discrétion qui est voulue,
07:13 c'est une conviction qui, finalement,
07:16 est le fait de beaucoup de choses à faire
07:19 et d'un emploi du temps très chargé,
07:21 mais ça n'est pas revendiqué.
07:23 -Vous ne réservez aucune place dans votre emploi du temps
07:26 aux médias. -Pas suffisamment, en tout cas,
07:28 et je le compte bien. -Vous aimez pas ça,
07:31 aller sur un plateau télé ? -Si, j'aime bien ça
07:33 pour aller défendre des convictions.
07:36 J'aime beaucoup les sujets de fond,
07:38 j'aime beaucoup pouvoir débattre sur des idées,
07:41 et je devrais faire un peu plus de place
07:43 dans mon agenda aux sollicitations médias.
07:45 -Mariale de Sarnez est revenue dans votre vie en 2017
07:48 à l'occasion des législatives.
07:50 Elle vous a proposé, demandé, je sais pas,
07:52 d'être sa suppléante à l'occasion de ce scrutin.
07:55 Vous lui avez dit non deux fois, puis à la troisième,
07:58 vous avez dit oui, mais pourquoi ?
08:00 -Elle m'a proposé parce que j'étais présidente
08:03 du Modem Paris, et j'avais été candidate
08:05 sur cette circonscription cinq ans auparavant,
08:08 et effectivement, j'aspirais à poursuivre
08:10 ma carrière professionnelle.
08:12 C'était à la suite de l'élection d'Emmanuel Macron,
08:15 et j'imaginais bien qu'elle prendrait
08:17 de grandes responsabilités, et c'était pas pour moi le moment.
08:21 Mais Marielle, on lui a résisté jamais très longtemps,
08:24 et j'ai fini par lui dire oui.
08:26 -Mariale de Sarnez est décédée d'une leucémie foudroyante
08:29 en janvier 2021.
08:31 Il y a eu, évidemment, le choc, l'émotion,
08:33 et puis, très vite, le moment du choix, pour vous,
08:37 qui étiez sa suppléante.
08:38 En quelques jours, vous avez dû décider
08:41 soit de siéger à l'Assemblée en tant que députée,
08:43 soit de rester dans la communication
08:46 où vous étiez promise à une carrière brillante.
08:49 Ca a été un moment, un choix difficile à faire pour vous ?
08:52 -Ca a été un moment, d'abord, très difficile,
08:55 car quand vous perdez quelqu'un qui est aussi important
08:58 pour votre famille politique et pour vous-même,
09:01 c'est très difficile. Il n'y a pas pire manière
09:03 d'entrer à l'Assemblée nationale que d'entrer
09:06 à la suite du décès de la personne qui vous a tout appris.
09:09 Le choix a été compliqué, mais il s'est finalement
09:12 assez rapidement imposé, dans la mesure où je considérais
09:15 qu'il y avait une suite à donner au parcours de Marielle
09:20 et que mon engagement politique pouvait aussi
09:23 prendre cette forme-là.
09:25 -Vous l'avez dit, vous avez fait vos débuts à l'Assemblée
09:28 dans des conditions difficiles, liées avant tout
09:31 au décès de Marielle de Sarnez, mais c'est aussi cette idée
09:34 que vous avez dû monter dans un train en marche
09:37 sur une législature qui était engagée depuis trois ans.
09:40 Comment ça se passe, concrètement, quand on débarque comme ça,
09:43 alors que tout le monde est déjà rodé ?
09:45 -Quatre ans, même. -Quatre ans, oui.
09:47 -On essaye de faire sa place
09:49 en restant sur ses propres fondamentaux,
09:54 et j'ai eu la chance d'être merveilleusement bien accueillie
09:57 par mon groupe et par Jean-Louis Bourlange,
10:00 président de la commission des affaires étrangères,
10:03 et j'ai reçu un rapport souhaité par Marielle de Sarnez
10:06 sur l'autonomie stratégique de l'Union européenne,
10:09 qui est effectivement un domaine de compétences
10:12 et une passion pour moi,
10:15 et donc je me suis...
10:17 J'ai fait ma place aussi avec un sujet que je connaissais bien
10:20 et qui m'intéressait particulièrement.
10:23 -Vous avez été réélue en faisant campagne
10:25 sur votre propre nom et plus en tant que suppléante.
10:28 Vous menez aujourd'hui de front trois engagements différents,
10:32 députée, présidente du groupe MoDem au Conseil de Paris
10:35 et secrétaire générale du MoDem.
10:37 Vous, qui vouliez garder un travail pour ne pas vivre de la politique,
10:41 c'est un peu raté, là.
10:42 -Alors, c'est un peu raté, effectivement.
10:45 C'est un peu raté, mais c'est le moment.
10:47 J'ai vraiment envie de m'engager complètement,
10:50 et quand j'essaie de faire les choses, je les fais à fond.
10:53 Ca demande une organisation assez militaire
10:56 pour faire en sorte de mener à bien ces trois missions
10:59 qui me tiennent toutes les trois extrêmement à coeur.
11:02 -On va passer à notre quiz, à présent.
11:04 Vous allez devoir compléter les phrases que je vais vous proposer.
11:08 Vous avez droit à un quiz spécial pro de la com.
11:11 C'est comme ça.
11:12 Vous êtes prêtes ? C'est parti.
11:14 Pour déstabiliser Rachida Dati dans un débat, il faut...
11:18 -Il faut...
11:20 C'est pas si compliqué. -Ah oui ?
11:24 -Oui. -Vous l'avez fait ?
11:26 -Elle a une répartie extraordinaire,
11:28 mais on peut la déstabiliser. -Mais comment ?
11:30 -En rappelant des prises de position passées, de sa part.
11:37 -En matière de com, tous les députés
11:39 devraient prendre exemple sur...
11:41 -Sur la technique de com, malheureusement,
11:45 sur la France insoumise, la technique, la forme.
11:48 -Vous estimez qu'il y a une performance
11:50 de leur part dans ce domaine ?
11:52 -Qui est ancienne, qui remonte à extrêmement longtemps,
11:55 avec la création de toutes ces communautés
11:57 qui datent de 2012.
11:59 Aujourd'hui, on voit...
12:00 -Leur présence sur les réseaux sociaux.
12:02 -Le travail mené depuis longtemps
12:06 porte ses fruits aujourd'hui.
12:07 -Pour s'imposer en politique,
12:09 Maud Gatel devrait...
12:11 Là, c'est la conseillère com face à Maud Gatel.
12:14 -Donner plus de temps dans son agenda aux médias.
12:17 -Ah, donc, vous le reconnaissez.
12:19 J'ai une dernière question avant de terminer.
12:21 Je m'adresse à nouveau à la pro de la com.
12:24 Quel conseil avez-vous donné à Maud Gatel ?
12:27 -Euh...
12:29 D'essayer de répondre le plus...
12:32 De manière la plus courte possible.
12:34 -Merci, Maud Gatel, d'être venue. -Merci à vous.
12:38 ...