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Diversité, équité et inclusion : quels dispositifs pour sensibiliser et transformer les comportements ? Faut-il imposer certaines formations ? Une analyse des leviers du learning & development pour faire évoluer les pratiques managériales et culturelles.

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00:00Bonjour, Bismarck s'est invité aujourd'hui sur YouSpring, l'événement de la formation professionnelle réalisé par le groupe FICAD.
00:14YouSpring, c'est une journée d'échange, de débat, de table ronde où on parle de learning.
00:20Et pour cette première émission, on voulait aborder un sujet important qui est la formation, est-elle capable de lutter efficacement contre les discriminations ?
00:35Et pour parler de ce sujet, j'ai trois intervenants, merci beaucoup. J'ai Karine Legras qui est responsable de formation chez Microsoft.
00:45Bonjour Karine, directrice de formation. Bonjour Karine. Geoffroy Delétrange, vous êtes directeur de l'offre coaching chez Spics.
00:56Oui, bonjour. Et Bunet Levy, vous êtes formateur chez Blanchard. On n'est pas Blanchard, mais Blanchard.
01:06Alors, premièrement, ma première question c'est vers vous Geoffroy et vers vous Bunet. Est-ce que vous pouvez nous présenter votre société, déjà, rapidement ?
01:16Oui, volontiers. Spics est un éditeur dans le monde de la formation linguistique et du business coaching.
01:23Notre offre consiste à proposer une plateforme de développement des compétences qui s'appuie sur des réseaux d'experts pour développer les collaborateurs.
01:33Très bien. Et Blanchard ? Blanchard, c'est une compagnie qui se spécialise en leadership, en tant que formation et coaching aussi à niveau global, un peu partout dans le monde.
01:45Très bien. Vous voyez beaucoup d'organisations. Est-ce que sur cette question de la diversité et de l'inclusion, vous avez remarqué des terreaux plus fertiles que d'autres ?
01:59Et si oui, quels sont les prérequis ? Alors, je pense qu'il y a en fait une grande différence entre la façon de parler de la diversité et la façon de mettre en place des politiques de diversité en entreprise dans un contexte français et européen.
02:17La façon d'en parler a souvent été très influencée, notamment par ce qui se passe aux États-Unis, dans un sens pendant dix ans et là, depuis quelques semaines, dans un autre sens.
02:27Pour prendre un exemple qui m'a toujours amusé, le fait que des personnes d'origine, mettons européenne, soient qualifiées de caucasiennes.
02:36Bon, moi, je ne me considère ni arménien, ni géorgien. Pour moi, c'est ça, le caucase. Donc, j'ai toujours trouvé ça un peu bizarre.
02:45Alors que dans un contexte français et européen, les problématiques de diversité sont un mélange d'énormément de dimensions.
02:55Il y a évidemment ce qui est visible, égalité homme-femme, pyramide des âges, par exemple. Il y a ce qui est aussi visible, mais sur lesquels on n'a pas forcément beaucoup de données.
03:06Puisqu'en France, les statistiques ethniques sont interdites. Mais on veut aussi favoriser la diversité pour permettre une meilleure inclusion.
03:13Et puis, il y a tout ce qu'on ne voit pas. Par exemple, tout ce qui est handicap invisible. Ce sont aussi des problématiques de diversité.
03:20Et donc, je pense que la prise en compte est d'abord une prise en compte d'ouverture d'esprit, d'admettre que je ne sais pas forcément tous les contextes liés aux personnes de mon équipe.
03:32Et à partir du moment où on prend ce point de vue là, on peut mettre en place des politiques de diversité qui, par définition, pourront inclure tout type de diversité.
03:42Puisqu'on va chercher à mettre en avant cette idée que chacun aura une part de diversité et qu'il faut aider chacun à pouvoir s'exprimer dans son entièreté.
03:53Je pense que c'est ça qu'on voit se développer de façon très positive plutôt que des injonctions parfois bizarres qui viennent d'outre-Atlantique.
04:05Karine, chez Microsoft, est-ce que le terrain est fertile pour implanter ce type de formation ?
04:12Je dirais que c'est au-delà des formations, c'est vraiment tout l'apprentissage. Fertile, oui, au sens où le sujet de la diversité et de l'inclusion, ça fait partie des trois piliers de notre culture.
04:25Chez Microsoft, notre mission, c'est « Empower every person on the planet to achieve more ».
04:32Donc, c'est à la fois pour l'interne et c'est aussi pour l'externe.
04:41Et dans ce que nous proposons à nos collaborateurs, que ce soit en termes de formation, en termes de développement, la plupart des choses que nous produisons, c'est aussi quelque chose que l'on va mettre à disposition au public.
04:58Je prends l'exemple de Microsoft Learn, c'est une plateforme de modules de formation avec du hands-on, de la pratique technologique de différents niveaux.
05:12C'est ce qui sert de formation pour nos collaborateurs et c'est complètement public, c'est ouvert pour les étudiants, pour les professeurs, pour les entreprises au niveau mondial.
05:24Donc, on est vraiment, je dirais, dans ce concept d'inclusivité totale pour permettre à tout le monde de pouvoir disposer, d'accéder en fait à du contenu, à de la connaissance pour se développer.
05:36J'ai l'impression que lutter contre les discriminations, ce n'est pas une matière comme les autres.
05:44Bulen, est-ce qu'il y a des dispositifs pédagogiques particuliers ? Est-ce qu'il y a des défis particuliers ?
05:51Oui, les cours de formation qu'on donne chez Blanchard, c'est toujours du leadership, donc ça demande toujours des changements de comportement.
06:03Et donc, je trouve que le sujet de diversité et d'inclusion, c'est pareil, parce que quand on demande aux gens de changer leur comportement, changer leurs idées, leurs croyances, ce n'est pas juste de l'information.
06:19Il faut les aider à découvrir des choses, il faut les aider à découvrir ce qu'ils pensent, parce que souvent, ils ne se rendent même pas compte qu'ils ont des biais inconscients, souvent.
06:33Et surtout, la formation en soi n'est jamais suffisante si les valeurs de l'entreprise ou les priorités de l'entreprise ne sont pas alignées avec le sujet de la formation.
06:49Ça arrive très souvent dans des cours de diversité et d'inclusion, de leadership, qu'on leur apprend des compétences, on les aide à découvrir des idées eux-mêmes,
07:05qu'après, dans l'entreprise, c'est des affiches dans les bureaux, mais après, jour à jour, ce n'est pas vraiment appliqué.
07:17Alors, leur équipe pédagogique sait que ça soit vraiment une priorité, une vraie priorité, et avec tout ce qui se passe en ce moment, on voit que pour certaines entreprises, ça ne l'était pas.
07:29Geoffroy, comment le coaching peut être une arme efficace pour ce changement de mentalité ?
07:35Je vois deux éléments. Le premier, qui concerne d'ailleurs aussi la formation, c'est que c'est un sujet essentiel dont il faut parler, à mon avis, de façon positive.
07:44Je ne crois pas du tout au discours qui soit culpabilisateur.
07:47Et ça, dans le coaching, c'est, je dirais, un des principes de base du coaching, puisque l'idée, c'est que la personne coachée a tous les outils en main pour se développer elle-même.
07:59Le coach n'est que là pour l'accompagner. Et donc, c'est ça qui est très, très puissant, et c'est pour ça que ça fonctionne.
08:05Et donc, dans le coaching, on peut mettre en place des objectifs qui soient en termes de prise de conscience, par exemple.
08:13Je parlais tout à l'heure de toutes les dimensions possibles de la diversité qui sont infinies.
08:18Donc, le fait effectivement de favoriser la prise de conscience et de permettre aussi, par exemple, par des méthodologies de type coaching de groupe, des échanges entre pairs pour confronter des exemples, va favoriser cette meilleure compréhension, cette meilleure prise en compte.
08:33Donc ça, cette première dimension d'aspect positif, pour moi, est vraiment essentielle.
08:38Et le deuxième, toujours en utilisant le levier du coaching, c'est l'impact comportemental.
08:46C'est accepter effectivement, comme je disais tout à l'heure, qu'on ne sait pas forcément tout.
08:51Et c'est avoir une sorte d'a priori positif, de considérer que je ne sais pas ce que je ne sais pas.
09:01Et donc, je vais essayer d'être ouvert par défaut à ce que je ne comprends pas, ce que je ne connais pas forcément.
09:08Alors, c'est peut-être plus facile dans certains cas.
09:10Si on est, par exemple, dans un contexte international, on peut tout à fait dire à une collègue d'un pays qu'on ne connaît pas, écoute, de façon transparente, je ne connais pas bien ton pays, ta culture.
09:20Donc, apprends-moi. Explique-moi si je dis quelque chose ou si je ne dis pas quelque chose qui pourrait poser problème.
09:29Je ne le fais pas exprès. Je suis là aussi pour reconnaître que j'ai besoin d'apprendre et de me développer.
09:35Donc là, le coaching va avoir cet élément positif de transparence et de changement comportemental qui sera très efficace.
09:45Merci. Karine, quelles sont les actions que vous avez menées chez Microsoft en faveur de la diversité et de l'inclusion ?
09:54Alors, elles sont nombreuses. Et par rapport à ce qui vient d'être dit, effectivement, c'est à la fois un comportement et un état d'esprit.
10:05Je reviens par rapport à ce que vous disiez. Le sujet, en fait, ça doit être insufflé, effectivement, par une direction générale.
10:12C'est important. Nous, Satya Nadella, notre PDG chez Microsoft, il aime à dire que nous sommes une « learn-it-all company », pas une « know-it-all ».
10:23Nous ne sommes pas des sachants, nous sommes des apprenants. Et en plus, j'ai dans l'industrie dans laquelle nous sommes,
10:30on doit apprendre et se renouveler assez souvent et de façon continue. Le continuous learning est vraiment très important.
10:37Et donc, comportement et état d'esprit, quand on parle de « growth mindset », c'est une ouverture à l'autre, c'est une curiosité,
10:46c'est le respect des autres et se poser les bonnes questions, voir le prisme des autres. C'est ça qui est vraiment très important.
10:56Et donc, c'est aussi par rapport à votre question, le sujet c'est aussi de pouvoir proposer des manières d'apprendre, des apprentissages divers.
11:06Là, on vient de parler du coaching, c'est extrêmement puissant. Nous, on voit qu'effectivement, les apprenants sont différents,
11:14les gens apprennent aussi différemment. Et ce côté de diversité et d'inclusion, il est aussi dans l'offre d'apprentissage que l'on peut proposer.
11:24Donc, ce peut être du mentoring, du coaching. Nous, on aime aussi beaucoup proposer du shadowing.
11:32Qu'est-ce que c'est ?
11:33Shadowing, c'est de pouvoir aller observer le travail de quelqu'un d'autre pour éventuellement évoluer vers ce nouveau rôle par exemple
11:44et de voir vraiment un peu le vie-ma-vie d'un métier. Donc, il y a d'une part étoffer l'offre d'apprentissage avec des contenus variés,
11:57des manières variées d'apprendre. Et puis après, effectivement, sur des choses beaucoup plus particulières, on a des programmes d'empowerment au féminin.
12:08En France, il y a des législations, il y a des lois. Donc, il faut mettre des programmes pour y répondre. C'est important au-delà du quotidien.
12:20On a aussi des programmes, par exemple, pour les seniors. Mais je ne dirais pas que pour les seniors, pour juniors, seniors.
12:30Parce qu'on se rend compte finalement que quand on est jeune ou qu'on est moins jeune, on va dire sur les moins de 30, plus de 55, il y a énormément de choses similaires.
12:40Les sujets d'agisme, en fait, on les retrouve. Donc, on a créé un programme qui rassemble ces personnes-là et on est sur un pilote.
12:50Il y a énormément d'autres choses qui sont proposées pour accompagner la diversité. Mais je reviens sur le fait que ce qui est important, c'est aussi d'avoir une offre ultra diverse
13:03pour permettre à tout le monde de se retrouver dans un processus d'apprentissage.
13:08Excellent. Je me posais la question sur Microsoft. C'est une entreprise internationale. Est-ce que l'interculturalité est un atout ou est-ce que c'est une contrainte supplémentaire dans ce type de formation ?
13:24Effectivement, ça peut être un petit peu les deux. Effectivement, quand on va travailler sur des projets transverses, ce qui est vraiment notre cas, en France, on peut être sur des projets transverses européens.
13:39On peut travailler avec la corporation des États-Unis, travailler avec l'Asie. On peut avoir des rôles où on va être sur plusieurs plaques géographiques. C'est hyper enrichissant. C'est extrêmement enrichissant.
13:52Maintenant, effectivement, énormément de programmes sont, je dirais, corporate et vont être les mêmes pour l'ensemble des géographies et l'ensemble des pays. Mais on a aussi des activités locales qui permettent justement de développer des choses plus locales.
14:11En France, par exemple, on a développé des activités par rapport à la Loire-X1. Donc ça, c'est quelque chose qui n'existe pas en Asie ou aux États-Unis. Enfin, il existe d'autres choses. Mais voilà, on est à la fois, je dirais, global et local. On est local. C'est important. Et ça permet justement de bien gérer cette interculturalité.
14:31Bülent, est-ce que vous faites une distinction, vous, parce que vous vous intervenez dans différents pays aussi ? Est-ce qu'il y a une distinction dans les formations entre les pays ?
14:42Non. En fait, Blanchard, c'est une compagnie américaine, donc c'est un modèle américain. Et souvent, la doute, c'est « mais c'est trop américain, ça ne va pas marcher ». Mais moi, ça fait 19 ans que je donne ces cours un peu partout. Et c'est des cours de leadership, donc c'est des interactions humaines.
15:02Et j'écoute les mêmes soucis, les mêmes challenges un peu partout. Une fois, en fait, j'étais en Suède avec une compagnie de production de musique, avec des producteurs de musique qui m'ont raconté leurs soucis avec leurs équipes.
15:19Après, j'ai pris l'avion, j'ai volé au Népal, au Kathmandu, pour donner le même cours avec une compagnie de téléphones. Et c'était absolument les mêmes soucis, les mêmes challenges. La culture, bien sûr, ça a un rôle, mais je pense que c'est superficiel. Quand on parle des relations humaines, au cœur, on est tous pareil.
15:47L'autre question que je me posais, c'était sur la mesure d'impact. Dans les formations, on mesure toujours l'impact. Comment est-ce qu'on mesure l'impact de ce type de formation sur la lutte contre les discriminations ? Est-ce que c'est possible ?
16:03Un des éléments, ce n'est pas le seul, mais c'est de l'ancrer dans le quotidien et dans la réalité du terrain et du business. Je voudrais prendre l'exemple d'un de nos clients en Espagne qui avait un programme d'échange avec sa filiale aux Émirats.
16:18On a travaillé avec eux sur un programme qui combinait déjà une formation linguistique, bien entendu, ce qui est l'ADN de Spics, ainsi qu'une formation interculturelle et du coaching. Cette combinaison permettait à la fois de donner des clés pour favoriser les échanges, mais aussi de rajouter cet élément humain et comportemental.
16:41Le fait que ce soit réellement ancré dans le quotidien et dans des projets réels permet une mise en application totalement naturelle et intuitive. Je pense que c'est peut-être ça qui va le mieux marcher, c'est de dépasser peut-être des injonctions et d'être vraiment dans le concret, le quotidien, l'humain, le relationnel.
17:05Karine, chez vous, vous mesurez l'impact de vos dispositifs ? Est-ce que ça se mesure ?
17:11Oui, ça se mesure. On mesure la satisfaction, la participation, etc.
17:21Mais sur le changement de mentalité ?
17:23On le voit beaucoup plus sur le quotidien, l'humain, la capacité de travailler ensemble, d'avoir de la transversalité au niveau des équipes. On a des enquêtes de satisfaction de nos employés, deux fois par an.
17:43On prend la température et c'est important, c'est un bon baromètre. Mais oui, c'est surtout au quotidien, de le vivre au quotidien et de le vivre de façon humaine.
17:55J'avais encore une autre question pour vous Geoffroy et Bulen. Est-ce que vous avez observé une évolution dans la demande des entreprises sur le sujet de l'inclusion et de la diversité ? Des thématiques qui sont devenues plus prioritaires que d'autres ces derniers temps ?
18:16Spics aura un tropisme plus axé dans le domaine interculturel, de par notre historique, notre formation en langue. C'est plutôt sur ces sujets-là que nos clients viennent voir Spics.
18:30Sur la partie coaching, c'est un sujet qui sera plutôt inclus dans d'autres thématiques. Par exemple, dans une thématique leadership, il y aura un aspect de comment je fais en sorte que toutes les personnes de mon équipe se sentent incluses, reconnues et valorisées.
18:49Mais ça ne sera pas spécifiquement une thématique diversité. Cette thématique diversité seule, pour l'instant, est finalement assez peu demandée. Ce sera plus ancré dans d'autres thématiques.
19:02Et chez vous, Bulen ?
19:03Le cours qu'on a sur ça, qui s'appelle le courage de l'inclusion, ce n'est pas sur une diversité spécifique. C'est assez général et ça dépend un peu du contexte. Chaque groupe, chaque personne est différente.
19:19Mais de plus en plus, j'entends un concept qu'en Europe, on n'avait pas trop entendu. Ça vient des États-Unis. C'est la neurodiversité, la neurodivergence. Ce sont des façons différentes d'apprendre, d'aborder des problèmes.
19:36Il y a peut-être un an, c'était tout à fait nouveau en Europe. Personne n'avait entendu parler de ça. Et maintenant, de plus en plus de compagnies, même quand on planifie des formations, ils nous posent la question de si c'était pensé pour des différentes neurolearning, des façons d'apprendre différentes.
20:02Je ne sais pas si scientifiquement on peut dire, mais c'est ce que j'ai observé.
20:08On n'a pas abordé un point. En fait, diversité et inclusion, ça peut être extrêmement large. C'est-à-dire qu'on pense à l'égalité homme-femme. On pose à l'inclusion des personnes en situation d'handicap. On pense aux discriminations à l'embauche en fonction de la race, etc.
20:28Karine, est-ce qu'il y a des sujets plus prégnants que d'autres chez Microsoft ?
20:38Il n'y a pas de sujet plus prégnant que d'autres. Nous, on a effectivement ce qu'on appelle des ERG, des Employees Resource Group sur de nombreux sujets. On peut citer par exemple aussi tout ce qui est attrait à la famille, aux aidants. Il n'y a pas un sujet plus important que l'autre. Le sujet est important.
20:58Très bien. Ce sera le mot de la fin. Merci beaucoup à vous trois d'être venus sur notre plateau. Je vous souhaite une excellente journée. Merci beaucoup.

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