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Vendredi 4 avril 2025, retrouvez Silvain Vernaz (Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles, Université de Haute-Alsace), Jean-Vasken Alyanakian (Avocat au barreau de Paris et médiateur) et Hassan Ben Hamadi (Co-fondateur, Cabinet Adlane Avocats) dans LEX INSIDE, une émission présentée par Arnaud Dumourier.

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Transcription
00:00Bonjour, je suis ravi de vous retrouver pour un nouveau numéro de Lex Inside, l'émission
00:27qui donne du sens à l'actualité juridique. Du droit, du droit et rien que du droit.
00:32Au programme de ce numéro, on va parler de la privatisation de la norme au prisme du
00:37droit comparé. Ce sera dans quelques instants avec Sylvain Vernaz, maître de conférence
00:43en droit privé et sciences criminelles et co-directeur de l'ouvrage sur cette question.
00:48On parlera ensuite des enjeux d'assurance pour les infrastructures industrielles face
00:54aux sinistres climatiques. Ce sera avec Hassan Benhamadi, avocat associé au sein
01:00d'Adelane Avocat. Et enfin, on parlera comment résoudre efficacement les conflits
01:05entre actionnaires avec Jean-Basquen Alianakian, avocat au barreau de Paris et médiateur.
01:12Voilà pour les titres Lex Inside, c'est parti !
01:25On commence tout de suite ce Lex Inside, on va parler de la privatisation de la norme
01:29au prisme du droit comparé avec l'un des co-directeurs de l'ouvrage, Sylvain Vernaz,
01:37maître de conférence en droit privé et sciences criminelles à l'Université de Haute Alsace.
01:43Bonjour Sylvain. Bonjour Arnaud, merci pour votre invitation.
01:46Le développement de codes de conduite, charques thétiques ou encore programmes de conformité
01:52s'observent partout dans le monde. Nous verrons ensemble que la privatisation de la
01:57norme est un phénomène qui se produit dans des domaines variés. Pour commencer, pourquoi
02:03un ouvrage sur cette question de la privatisation de la norme au prisme du droit comparé ?
02:09Vous venez de l'expliquer en réalité puisque c'est un phénomène que l'on constate
02:14un petit peu dans tous les secteurs, toutes les branches du droit et qui est dans tous
02:19les pays en réalité. C'est un bousculement, un bouleversement puisque jusqu'à présent
02:24on considérait qu'il y avait essentiellement la norme publique, étatique, que l'on arrivait
02:30facilement à identifier et dont la valeur, la force était assez facilement identifiable.
02:36On pense à la pyramide de Kelsen. Et puis apparaissent de nouvelles règles, de nouvelles
02:40normes qui ont un effet dans la pratique, des normes qui viennent d'acteurs privés.
02:46On s'est donc demandé un petit peu quels étaient leurs rôles. Pour vous donner simplement
02:52un petit exemple, on a des règles qui peuvent émaner par exemple des réseaux sociaux,
02:57donc d'un acteur privé, qui vont avoir un véritable impact sur des millions voire
03:03milliards d'utilisateurs. La question qui se pose c'est finalement ces règles sont
03:08décidées par la société à l'origine du réseau social. Et finalement il n'y a pas
03:13eu de processus démocratique pour les déterminer. Elles vont avoir une grande marge de manœuvre
03:17ce qui va impacter tout le monde. Et on a donc eu cette idée d'essayer d'appréhender
03:21ce phénomène et d'essayer d'en synthétiser certains aspects. Et à ce titre je voudrais
03:27simplement remercier les trois laboratoires qui nous ont permis de faire et de mener ce
03:32travail, de nous financer à savoir le DRESS, le GREJ et le CERDAC qui nous ont donné une
03:39totale liberté pour nous interroger sur ce phénomène.
03:43Alors on n'en sait plus sur l'objectif de cet ouvrage, mais à qui est-il destiné ?
03:48Alors on peut dire qu'il est destiné avant tout aux chercheurs en droit et puis d'une
03:54manière générale à un public averti de juristes qui s'intéressent au phénomène
03:59de privatisation de la norme. On peut également dire que c'est un ouvrage qui va être intéressant
04:06aussi pour les comparatistes, notamment les doctorants, parce qu'on a une approche je
04:10pense qui est aussi un peu originale du droit comparé.
04:13Alors on n'en sait plus sur cette privatisation de la norme, mais quels avantages offrent
04:22le droit comparé pour observer ces phénomènes transnationaux de privatisation de la norme ?
04:27Alors il faut savoir que les trois co-directeurs de l'ouvrage sont des comparatistes également
04:34et qu'habituellement quand on fait du droit comparé on essaye de comparer des systèmes
04:38pour voir finalement les avantages et les inconvénients dans tel ou tel système, pour
04:43apporter des éléments de solutions innovants dans notre système ou éventuellement pour
04:49proposer une harmonisation des normes au niveau européen. Ici ce n'était pas possible
04:54de procéder comme ça puisque c'est un phénomène qui est difficile à appréhender
04:58et que les différents droits n'ont pas encore complètement saisi. Donc nous avons
05:02eu la logique justement inverse de se dire mais finalement pour pouvoir appréhender
05:06un phénomène qui est universel, qui se retrouve dans plein d'ordres juridiques,
05:10nous avons absolument besoin de ne pas regarder seulement notre ordre juridique français
05:15mais de regarder dans plusieurs pays comment ce phénomène évolue et de voir si finalement
05:20il y a des tendances communes, notamment parce qu'on l'a dit il y a des effets communs
05:24dans tous les pays par certaines de ces normes. Et c'est pour ça qu'on a demandé à nos
05:31contributeurs de systématiquement étudier le phénomène non pas sous l'angle de leur
05:35seul pays mais de deux ou trois pays au minimum. Et ainsi on a réussi à couvrir 16 pays au
05:41total, le droit de 16 pays, ce qui permet donc d'avoir aussi un recul sur la question
05:46de ce phénomène. Alors dans votre ouvrage vous comparez les
05:51normes privées à de la matière noire, en quoi les normes privées peuvent-elles être
05:57comparées à cette matière noire dans l'écosystème juridique contemporain ?
06:00Oui, alors c'est une métaphore parlante qu'on a voulu utiliser pour imager les choses.
06:05Dans l'univers, certaines observations ne peuvent pas être expliquées par la matière
06:10visible, c'est-à-dire nos normes étatiques. Et pour comprendre ces phénomènes, les scientifiques
06:16postulent l'existence de la matière noire, qui est une matière difficile à appréhender
06:22mais qui permet d'expliquer certains phénomènes explicables où on voit les conséquences.
06:27Pour nous c'est un peu la même chose finalement, on voit que ces normes, elles ont un impact,
06:31elles ont un effet sur notre ordre juridique, mais on a du mal à les appréhender. Donc
06:38la comparaison c'était simplement pour donner une image et comprendre que finalement
06:41elles sont peut-être plus importantes qu'il n'y paraît, ces normes privées.
06:45Alors au-delà de ça, de ce que vous venez d'expliquer, quels sont les domaines qui
06:50sont concernés par la privatisation de la norme ?
06:53Alors les domaines sont très variés. On a justement fait le choix de balayer différents
06:58domaines de manière assez large, ce qui fait que chacun peut trouver aussi un intérêt
07:03dans un chapitre ou dans l'autre. Pour en citer quelques-uns, on a notamment traité
07:08du droit médical, des normes relatives à internet, du monde des affaires, des normes
07:13de RSE, mais encore des normes développées par les sociétés pétrolières ou encore
07:19de compliance. Autant dire que les secteurs sont très larges et que c'est peut-être
07:25un des intérêts justement de cet ouvrage de pouvoir aller piocher, selon notre domaine
07:29de compétence, la partie qui nous intéresse aussi.
07:32Peut-être pour bien comprendre, vous pouvez illustrer ce type de normes par des exemples,
07:37par exemple dans le domaine de l'environnement. Oui, alors typiquement on va avoir toutes
07:42les normes de responsabilité sociale et environnementale des entreprises qui vont beaucoup se développer.
07:47L'exemple encore que je vous ai donné des réseaux sociaux, où là je crois que tout
07:52un chacun voit l'impact dans sa vie personnelle des règles qui vont être de modération
07:57de la parole, qui vont aller parfois au-delà de la règle étatique. Voilà, pour vous donner
08:02deux exemples. Alors on va revenir sur un autre aspect, la
08:06valeur de ces normes. Quelle est la valeur de ces normes privées ? Quelle est leur force
08:11contraignante ? Alors leur force contraignante, elle est variable.
08:17En réalité, c'était un petit peu notre interrogation, la réception de ces normes
08:21par l'ordre juridique, par le droit d'une manière générale, était incertaine.
08:26Et on a voulu creuser un petit peu ça et se poser la question de si elles avaient une
08:30force contraignante. La définition que l'on a prise de la norme privée, c'était déjà
08:35une norme qui fait autorité de fait dans son domaine d'activité.
08:39Mais la question c'était, est-ce qu'elle est contraignante juridiquement ?
08:42Et alors, la réponse est variée selon la norme. On a vu plusieurs tendances se dégager.
08:47Elles le sont parfois pas clairement et c'est problématique parce que justement il y aurait
08:53besoin d'une meilleure reconnaissance. Dans d'autres cas, elle peut être reprise
08:58par la jurisprudence, notamment pour l'interprétation. Et dans d'autres cas, elle va permettre notamment
09:04à postériori d'enrichir la loi, de l'étayer, parce que certaines propositions vont pouvoir
09:11être reprises aussi par l'autorité publique. Et on s'aperçoit que donc il y a une synergie
09:20qui peut se créer avec la norme publique. Voilà, pour le détail ensuite, c'est toute
09:24la partie 2 de l'ouvrage.
09:25En un mot, vous pensez que cette tendance à la prolifération des normes privées va
09:31durer ?
09:32Je pense qu'elle va durer. Il y a beaucoup de raisons qui pourraient l'expliquer, mais
09:37notamment le fait que la société bouge très vite et que parfois dans certains domaines
09:41très précis, il y a besoin de pouvoir avoir des réglementations, des règles qui sont
09:46posées là où l'autorité étatique n'a pas pu encore intervenir. Elles ont l'avantage
09:53de la flexibilité et donc elles se développent. Et je crois que même si on peut contester
09:58le caractère non démocratique finalement, puisque ça intervient à l'issue d'un auteur
10:03qui va la proposer, elles existent. Et donc, il va falloir tout simplement en prendre acte
10:09et réfléchir à une bonne articulation pour qu'elles restent à leur juste place, mais
10:14en même temps qu'on puisse voir aussi le progrès qu'elles peuvent emporter grâce
10:17à leur adaptabilité.
10:18On va conclure là-dessus. Merci Sylvain Vernas d'avoir présenté cet ouvrage sur
10:23notre plateau.
10:24Merci Arnaud, à vous.
10:25Tout de suite, l'émission continue. On va parler des risques d'assurance pour les infrastructures
10:30industrielles face aux sinistres climatiques.
10:33On poursuit l'émission. On va parler des enjeux d'assurance pour les infrastructures
10:49industrielles face aux sinistres climatiques avec mon invité Hassan Benhamadi, associé
10:55fondateur du cabinet Adlan. Hassan Benhamadi, bonjour.
10:59Bonjour Arnaud.
11:00Le changement climatique bouleverse l'assurance des infrastructures industrielles. Pouvez-vous
11:05nous expliquer ce phénomène ?
11:06Oui, effectivement Arnaud, c'est un grand bouleversement. Comme vous le savez, c'est
11:15d'actualité. Beaucoup disent que c'est un risque futur, mais en réalité c'est d'actualité
11:20parce que le Global Risk Report l'a déjà classé comme l'un des plus grands risques
11:25pour le secteur assurantiel et industriel. Nous avons une multiplication des sinistres
11:33qui fait que l'indemnisation a été multipliée par deux les dernières années et les experts
11:39prévoient même une multiplication par trois dans les 15 prochaines années. Donc aujourd'hui,
11:47c'est le risque actuel et tout le monde en parle parce qu'il y a tant d'enjeux de
11:54prévention que d'enjeux d'indemnisation.
11:58Alors des enjeux de prévention, d'indemnisation, des coûts qui explosent et face à cette
12:06explosion des coûts, pensez-vous qu'il faut repenser la multiplication, la mutualisation
12:14des risques climatiques entre assureurs, entreprises et pouvoirs publics ?
12:20Oui, assurément, c'est une très bonne question. La prévention n'est effectivement
12:25plus suffisante parce que ce qui aujourd'hui est un risque identifié ne le sera pas forcément
12:32demain ou s'accélérera et augmentera de manière exponentielle. Donc des innovations
12:39dans le secteur assurantiel climatique sont nécessaires. Parmi ces innovations, comme
12:45vous l'avez justement dit, il y a les partenariats publics-privés, donc sous le régime 4NAT
12:50qu'on connaît en France ou NFIP aux Etats-Unis.
12:54Comment ça se présente concrètement pour bien comprendre ?
12:57Le régime 4NAT en France, c'est un régime de partenariats entre assureurs privés et
13:05pouvoirs publics avec des catastrophes qui sont déclenchées généralement par décret
13:13avec une durée d'indemnisation prévue, rapide, qui est généralement de 30 jours
13:19et qui n'est en réalité qu'un régime parmi tant d'autres qui est appelé à augmenter
13:25dans les prochaines années. Vous avez par exemple, je pense très fortement à l'émission
13:31obligataire pour transférer l'indemnisation des sinistres climatiques, le risque d'indemnisation
13:36des sinistres climatiques vers les marchés financiers et les investisseurs.
13:40D'accord, comment ça marche ?
13:43Les assureurs émettent des obligations à plutôt court terme, on va dire 2-3 années
13:50avec des risques identifiés et un rendement assez élevé si ces risques n'arrivent pas.
13:55Si ces risques arrivent, c'est le jeu de l'investissement et du gain ou de la perte.
13:59Si ces risques arrivent, il y a la perte de l'investisseur.
14:02Mais ça marche plutôt bien en ce moment.
14:04Face à ce contexte, les entreprises industrielles doivent refondre leur approche assurancielle.
14:12Concrètement, quelle attitude doivent adopter ces entreprises ?
14:15En réalité, ces entreprises doivent adopter plusieurs attitudes. En premier lieu, se rapprocher
14:24de leur assureur qui va devenir un partenaire dès le début, dès le nouveau projet parce
14:29que la prévention est devenue essentielle. A la messe des assureurs qui est à l'AMREI,
14:36au dernier congrès, nous avons eu par exemple des conférences sur l'identification des
14:43risques climatiques pour les industriels qui est devenu visiblement un enjeu majeur et
14:49dont on n'a pas réussi à cerner tous les contours.
14:52Alors comment on identifie ces risques ?
14:53Il y a plusieurs méthodes, les experts utilisent plusieurs méthodes. Vous avez l'identification
14:59par des méthodes spatiales, vous avez l'identification par des mathématiques appliquées au climat,
15:09mais ça soulève aussi un certain nombre de questions, ces méthodes soulèvent un certain
15:11nombre de questions parce qu'on pourrait imaginer dans le futur que certaines zones,
15:15voire certains secteurs deviennent inassurables du fait de ces prévisions expertales.
15:20D'accord, il y a certains secteurs qui sont déjà identifiés comme potentiellement inassurables ?
15:27Pas à ma connaissance, mais ce que je peux vous dire c'est que les négociations de
15:33police d'assurance vont devenir âpres dans les prochaines années.
15:37Alors justement face à tous ces phénomènes et ces peut-être difficultés d'assurance,
15:43est-ce que les entreprises doivent-elles internaliser leurs risques via des captives d'assurance
15:49qui seraient dédiées aux risques climatiques ?
15:53Ça pourrait être une piste, ça pourrait être une bonne piste effectivement, mais
15:57le problème des captives c'est leur coût, c'est le risque, elles ne s'adressent qu'à
16:03des groupes qui seraient en capacité de financer leurs propres risques si ça dégénère.
16:08Parce qu'il faut vraiment se souvenir que le rôle de l'assureur est de prendre en
16:14charge un risque que l'entreprise ne pourrait pas prendre en charge.
16:19Donc les captives ne sont malheureusement une solution que pour les très grands groupes
16:22industriels.
16:23Est-ce qu'il y a d'autres solutions envisageables pour les plus petites entreprises face à
16:29ce type de risque ?
16:30Je vous dirais qu'à ce stade, les meilleures solutions restent toujours la prévention
16:36et l'anticipation.
16:37Il a été démontré que certaines formes de construction permettaient de résister
16:43mieux aux sinistres climatiques.
16:45Dans des zones où des ouragans en sont passés, certaines constructions datant de 2000 et
16:502010 sont restées debout, là où des constructions plus anciennes se sont effondrées.
16:55Donc l'audit des bâtiments est l'audit constant et récurrent des bâtiments parce
17:00que, encore une fois, le risque climatique évolue, s'aggrave et s'intensifie.
17:05Donc l'audit constant reste le meilleur moyen d'éviter à terme une indemnisation
17:11ou un sinistre.
17:12Les risques s'intensifient, vous venez de le dire.
17:16Quelles sont les perspectives ?
17:17Comment voyez-vous l'environnement, ses enjeux sur les risques climatiques sur les
17:25prochaines années ?
17:26On a beaucoup de rapports sur cette question.
17:28Quelles sont les tendances en général ?
17:29Oui, les rapports sont unanimes.
17:31On va assister à une multiplication des risques avec une augmentation accrue des risques à
17:39la fois d'inondation et de sécheresse qui représentent à eux deux 91% du risque climatique,
17:46ce qui est énorme, avec des mouvements de sol induits par ces risques qui créent des
17:52difficultés structurelles dans les bâtiments industriels qui peuvent être plus ou moins
17:57graves.
17:58Et on rappellera qu'un risque climatique qui crée de telles difficultés structurelles
18:02ne se limite pas à une sinistralité en matière de construction, mais aussi à une sinistralité
18:08en matière d'exploitation industrielle, c'est-à-dire que les assureurs vont devoir
18:15également chiffrer l'indemnisation de l'arrêt de l'activité pendant la remise en état
18:20du bâtiment.
18:21Donc, ce sont des risques vraiment importants sur lesquels les experts du domaine se penchent
18:27au moment où on se parle, se penchent sérieusement.
18:29Alors, vous avez parlé de prévention pour les entreprises, est-ce qu'il y a aussi
18:32un aspect de formation des cadres d'une entreprise sur ces questions ?
18:37Oui, effectivement, Arnaud, il y a un aspect de formation sur les normes ESG notamment.
18:45Il y a un aspect de prise de conscience, un aspect de formation à la réaction aux risques
18:54climatiques, à l'anticipation.
18:56Effectivement, ça va devenir le quotidien des entreprises, le risque environnemental
19:00est désormais une actualité.
19:01On va conclure là-dessus, merci Hassan Benhamadi.
19:05Je rappelle que vous êtes associé fondateur du cabinet Adelaine Avocat.
19:09Merci Arnaud.
19:10Tout de suite, on va parler de comment résoudre les conflits entre associés.
19:14Comment résoudre efficacement les conflits entre actionnaires ? On en parle tout de suite
19:29avec mon invité Jean-Vasquen Alainacan, avocat au Barreau de Paris, également médiateur.
19:36Jean-Vasquen Alainacan, bonjour.
19:38Bonjour Monsieur.
19:40Certains conflits et désaccords peuvent émerger entre actionnaires concernant les choix faits
19:46par la société.
19:47La médiation permet de gérer de façon amiable tel conflit.
19:51Pourquoi est-il beaucoup plus facile de trouver une solution par la médiation plutôt que
19:57par une négociation classique ?
19:58C'est bien résumé.
20:02En fait, une négociation classique, qu'est-ce que c'est ? Ce sont deux personnes ou trois
20:07personnes face à face, avec avocat souvent, qui sont dans des positions.
20:11Je veux ceci, je ne te donnerai pas cela, tu m'as fait ceci, non je ne t'ai pas fait
20:16cela.
20:17Donc on a un rapport de force, un rapport de position, de la pression, de la conviction
20:24et on essaye d'y arriver.
20:27On essaye et on y arrive parfois, bien entendu, mais souvent c'est très long, surtout dans
20:32les conflits entre actionnaires.
20:33La médiation, c'est infiniment plus puissant que la négociation classique.
20:38Pourquoi ? Tout d'abord, c'est un processus qui est structuré, qui est très méthodologique
20:45et qui est conduit et proposé par un médiateur, c'est-à-dire un tiers qui n'est pas avocat
20:52d'une des parties, ni des parties en général, qui n'est ni juge, ni arbitre, ni conseiller,
20:59c'est le rôle des avocats qui ont toute la confiance de leurs clients pour cela et cela
21:03rend service au médiateur, j'expliquerai pourquoi après peut-être.
21:06Et ce tiers qui est le médiateur, il est indépendant, il est neutre, il est impartial.
21:13Indépendant, cela veut dire qu'il n'a pas de rapport financier ou moraux ou d'intérêt
21:18quelconque avec une des parties.
21:20Neutre, cela veut dire qu'il n'a pas d'avis sur la solution, quelle qu'elle soit,
21:26il ne va pas pousser vers une solution plutôt qu'une autre.
21:29Et l'impartialité est absolument clé pour le médiateur.
21:32L'impartialité, c'est ne pas pencher, même involontairement, vers l'un ou vers l'autre,
21:37favoriser involontairement l'un ou l'autre.
21:40L'impartialité, c'est être toujours avec tout le monde et bien mesurer la perception
21:47chez chacun de cette impartialité.
21:49C'est essentiel.
21:51Et alors ce processus, pourquoi est-ce qu'il réussit ?
21:54Parce qu'il est d'abord focalisé sur l'établissement d'une bonne communication.
22:01Une communication respectueuse, une communication apaisée et une communication efficace.
22:08Donc ça c'est important la communication.
22:11On va essayer d'aller un peu plus loin.
22:13Quels sont les avantages d'une solution obtenue grâce à une médiation
22:18par rapport à une négociation classique ?
22:20Alors justement, en médiation, on passe des positions, j'expliquais tout à l'heure,
22:25des positions et des émotions, des émotions, qui par la bonne communication
22:29vont permettre de faire place aux intérêts et aux besoins
22:33et à leur compréhension mutuelle par chaque partie.
22:36C'est un effort, c'est un processus, mais ça marche dans plus de 70% des cas.
22:40Et on va arriver à une solution.
22:42En décision, lors d'une décision judiciaire, d'abord c'est long, ça coûte cher
22:49et en plus c'est très aléatoire.
22:52Il y a des chances de succès indéniables ou des risques d'échec
22:57qui vont aussi pousser à vouloir faire une négociation ou une médiation,
23:01mais globalement c'est assez inconfortable par rapport au temps de l'entreprise,
23:05par rapport à l'appétence des actionnaires pour la sécurité,
23:08pour la fiabilité, pour la rentabilité.
23:12Un contentieux, c'est très mauvais pour l'intérêt social.
23:15Les actionnaires n'aiment pas le contentieux.
23:17Ils le font parce que ça permet de démontrer une position de force,
23:21d'embêter l'autre, mais en réalité il n'y a pas d'actionnaire
23:25qui souhaite découper la société au terme d'un beau contentieux.
23:29Donc ça va sauvegarder l'intérêt social, la médiation,
23:33pour les actionnaires en particulier ou pour les familles.
23:37L'autre chose, c'est que la médiation va préserver les relations.
23:43La dernière chose, on touche à l'idée de justice.
23:47Il y a des décisions de justice qui ne peuvent pas trancher réellement des litiges.
23:52Encore une fois, l'argent ne fait pas tout.
23:55L'exécution forcée d'illigence matérielle ne fait pas tout.
23:58Alors que la médiation va faire venir autour de la table,
24:01grâce à cette communication et à cette créativité,
24:04cette créativité que la liberté et la confidentialité vont permettre aux partis
24:09de réaliser avec l'invitation et les questions du médiateur,
24:13d'un processus maïotique,
24:16cette méthodologie va permettre de faire venir autour de la table
24:20des éléments, des besoins, des choses extérieures,
24:24mais qui vont permettre de rétablir l'équilibre entre les parties,
24:27entre les attentes mutuelles, et de créer un équilibre
24:31et de donner une solution 360 degrés
24:34qu'aucun juge ne pourrait donner dans beaucoup de cas de figure.
24:37Pour parvenir à une solution 360 degrés, comme vous l'indiquez,
24:41le rôle du médiateur est crucial.
24:44Comment concrètement il aide les partis à clarifier leurs besoins et intérêts
24:50pour parvenir à un accord ?
24:54D'abord, il faut que les règles soient claires.
24:56Les partis qui souhaitent entrer en médiation parce qu'elles sont éclairées,
25:00elles trouvent une petite étincelle d'envie de résoudre le litige
25:07auquel elles sont confrontées par la médiation, par la négociation,
25:10mais une négociation augmentée.
25:12Et le médiateur va déjà poser les règles de bonne communication,
25:16je l'ai dit tout à l'heure,
25:18et procéder par questionnement.
25:21Quoi ? Pourquoi ? Pourquoi ? Et encore pourquoi ?
25:26Et petit à petit, on va basculer, comme je l'expliquais tout à l'heure,
25:28des positions aux intérêts et aux besoins.
25:30Donc en fait, c'est une sorte d'accouchement intellectuel
25:34qui va donner lieu à un effort de la part des partis.
25:41Et c'est là où le médiateur doit faire preuve de beaucoup de ténacité,
25:47mais aussi d'humanité.
25:49C'est très important.
25:51Beaucoup d'écoute, justement, des positions des uns et des autres.
25:54Oui, beaucoup d'écoute,
25:56mais en même temps être intraitable sur la méthodologie.
25:59Et c'est ça qui fait que ça marche.
26:01Alors pour que ça marche aussi, il faut une bonne préparation, j'imagine, à la médiation.
26:06Comment les partis peuvent-ils se préparer efficacement à une médiation
26:10pour maximiser les chances de réussite ?
26:13D'abord, il est important que les partis aient un minimum d'informations
26:19sur ce qu'est la médiation et ce qu'elle n'est pas.
26:22Parfois, on confond médiation et négociation, méditation peut-être,
26:30même si une bonne méditation peut favoriser la bonne fluidité en médiation.
26:34Mais il faut que les partis sachent que ce n'est pas un concours de plaidoiries,
26:39ce n'est pas un rapport de force, la médiation.
26:42Le rapport de force existe, mais on va le domestiquer,
26:46on va l'entourer de plein d'autres choses,
26:48ce qui fait que le rapport de force va baisser.
26:50Les avocats aussi doivent comprendre que ce n'est pas un concours de plaidoiries,
26:54ils le savent aujourd'hui.
26:55Et donc c'est un premier élément de convergence entre les partis
27:01avec le médiateur sur la méthode attendue.
27:03La deuxième chose, il est toujours utile de faire le point sur ses intérêts fondamentaux.
27:10Et les avocats sont là, avant même la médiation,
27:14préparés à la médiation, pour aider leurs clients à dégager leurs intérêts fondamentaux.
27:21Et c'est ça qui, au cours de la médiation, va permettre d'accélérer les choses.
27:25Et le choix du médiateur est important aussi.
27:27Comment choisir le bon médiateur ?
27:30Il y a différentes manières de les choisir.
27:33En réalité, un bon médiateur, qu'est-ce que c'est ?
27:36C'est d'abord un médiateur très bien formé,
27:40qui, de manière préférentielle, a une certification.
27:43Il y a différents organismes français ou internationaux qui délivrent des certifications.
27:48À titre personnel, j'ai la certification du CMAP,
27:51où j'exerce une activité importante,
27:55parce qu'il y a une méthodologie qui est fortement élaborée et reconnue.
28:00Donc ça, c'est un premier cadrage.
28:03Le deuxième cadrage, il est plus classique.
28:06J'aimerais un médiateur dans le domaine dans lequel j'exerce.
28:11J'ai un contentieux financier, j'ai un contentieux actionnaire,
28:14j'aimerais un médiateur qui sache que c'est que la compta, que la finance,
28:18où je suis ingénieur et j'ai un brevet.
28:21En fait, il faut choisir un médiateur, me semble-t-il,
28:25qui ne soit pas éloigné, qui ait une appétence avec les domaines techniques,
28:30les domaines humains, les domaines réglementaires.
28:35Pour qu'il y ait cette confiance, qu'il soit maintenu.
28:38Si un médiateur pose des questions de définition toutes les cinq minutes,
28:42il faut un médiateur 360 degrés.
28:45On va conclure là-dessus.
28:46Merci Jean Vascon, Alia Nacquan.
28:48Vous êtes avocat au barreau de Paris et médiateur.
28:51Merci pour votre fidélité.
28:53Restez curieux et informés.
28:55À très bientôt sur Bismarck for Change.

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