80e anniversaire de la victoire du 8 mai 1945 : quel est l'état de notre armée ? Sommes-nous prêts en cas de guerre ? Écoutez l'interview du Colonel Michel Goya, ancien officier des troupes de marine et docteur en Histoire contemporaine.
Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin avec Jérôme Florin du 08 mai 2025.
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00:00RTL au coeur de l'actu
00:30Depuis 3 ans, depuis la guerre en Ukraine
00:31Bonjour colonel Michel Goya
00:33Bonjour
00:34Merci d'être avec nous sur RTL, vous êtes consultant militaire
00:38Ma première question, elle est très simple
00:40Si on doit faire la guerre demain, est-ce qu'on est prêt ?
00:43C'est tout prêt, ça dépend avec qui on fait la guerre
00:47Et contre qui on fait la guerre
00:49Je rappelle qu'on a quand même mené un certain nombre d'opérations militaires
00:53Qui étaient déjà des guerres contre les organisations armées
00:56Notamment au Sahel
00:59Ou en Irak
01:01Là c'était des opérations extérieures
01:03Je parlais d'une confrontation avec la Russie par exemple
01:06Oui bien sûr, alors là on est évidemment dans une toute autre échelle
01:09Mais si vous voulez, notre armée française dispose d'abord d'une force de frappe nucléaire
01:14Il ne faut quand même pas l'oublier
01:15Qui au moins nous met à l'abri
01:17Par la dissuasion, nous met à l'abri d'une attaque nucléaire
01:21Et neutralise d'une certaine façon cette capacité russe
01:26Et ensuite pour le reste, on a des forces conventionnelles
01:30Qui au moins le mérite d'être professionnelle, d'être compétente
01:33Et d'être plutôt bien équipée techniquement
01:35Mais qui ont globalement un énorme défaut
01:38Qui est la faible masse en réalité, la faible quantité
01:42Faible quantité d'effectifs et de matériel ?
01:45Oui, c'est-à-dire très concrètement
01:46Voilà un scénario dans lequel que vous évoquiez
01:49Il faut rappeler que la France stratégiquement est une île
01:52Donc si on devait dissuader au moins la Russie d'attaquer
01:56Ce serait la dissuader d'attaquer des pays d'Europe de l'Est, d'Europe orientale
02:00Et donc il faudrait déployer des forces sur place, ça c'est conséquent
02:05Or, notre capacité de déploiement maximale de forces
02:11Pour un engagement dit de haute intensité
02:13Ou d'engagement majeur
02:15C'est au grand maximum 20 000 hommes
02:17Donc on est capable de déployer un corps d'armée avec des états-majors
02:2120 000 hommes, une quarantaine d'avions de combat
02:24Qui seront très bons
02:26Mais 20 000, c'est quand même pas beaucoup
02:28On se souvient des propos d'un sénateur il y a quelques années
02:32Disant en cas de guerre, la France tient 15 jours
02:34C'est toujours vrai aujourd'hui
02:36Alors que la France a considérablement augmenté son budget militaire quand même
02:40Alors d'abord, on ne l'a pas considérablement augmenté
02:44On l'a augmenté très certainement
02:45En réalité, le retournement de situation est en 2015
02:49C'est à partir de ce moment-là
02:51Qu'on a arrêté de diminuer notre effort de défense
02:54Qu'on a commencé à le remonter
02:55Mais pendant 25 ans, on l'a diminué
02:58On est passé, en termes de pourcentage du PIB
03:00On est passé pratiquement de 3% à 1,5%
03:04Et maintenant, depuis cette époque, on est à 2%
03:06Donc si vous voulez, on remonte la pente
03:08Mais on n'est pas revenu à la situation
03:14Dans laquelle on était à la fin de la guerre froide
03:15Michel Goya, est-ce qu'il faut rétablir le service militaire obligatoire ?
03:20Ça dépend pour quoi faire, en réalité
03:22Je rappelle que le service, comme son nom l'indique, c'est un service rendu à la nation
03:26Donc il faut que ça serve à la nation
03:27Donc l'idée d'un service militaire, ça sert à former des unités, des soldats
03:34Qui soient capables d'être engagés au service de la France
03:38Au service de la défense de la France
03:40Or, on a un petit problème avec nos soldats appelés
03:44Nos soldats conscrits
03:45C'est qu'on ne les engage pas dans les opérations
03:48Traditionnellement, on ne les engage pas dans les opérations au loin
03:50Or, comme je disais tout à l'heure
03:52Si on doit s'engager, on faudra combattre au loin
03:54Donc la question est la suivante
03:56Former des unités, de nouvelles unités de régiments d'appelés
04:00Comme j'ai connu, moi, au début de ma carrière
04:02Bon, très bien, alors ça coûte très cher
04:04Il faut les équiper, il faut les encadrer
04:05Donc c'est un effort colossal
04:07Si c'est pour les envoyer éventuellement en Pologne
04:11Ou dans les Pays-Baltes pour dissuader une attaque russe
04:15Et éventuellement la contrer, très bien
04:17Là, effectivement, on aura accru notre capacité
04:20Si c'est pour les maintenir simplement en France
04:22C'est l'interdiction de le déployer au loin
04:26En réalité, on aura affaiblit nos capacités
04:28Parce que tout ça aura absorbé énormément de ressources
04:30Et de cadres au détriment du reste
04:32Il y a un regain de patriotisme chez les jeunes
04:34Il y a eu une étude l'an dernier qui disait
04:36Que plus d'un jeune sur deux, 57%
04:39Était prêt à s'enrôler sous les drapeaux
04:41En cas de guerre
04:42Vous, le militaire que vous êtes, Michel Goya
04:45Vous constatez ce regain de patriotisme
04:48Dans les jeunes générations ?
04:50Je le sens en tout cas beaucoup plus
04:52Qu'il y a quelques générations
04:56Ou au début de ma carrière militaire dans les années 80
04:59Ça, c'est certain
05:00Oui, mais après, c'est souvent affaire de contexte
05:05On est dans un contexte où d'abord
05:07On a été agressé sur notre sol
05:09Par des attentats terroristes importants
05:12Par des organisations armées
05:13Qui sont venues nous attaquer
05:15Donc ça, déjà, ça a changé quand même
05:17Un certain nombre de perceptions
05:18Et puis ensuite, oui, il y a quand même
05:20Le sentiment d'une menace
05:22Une menace forte extérieure
05:24D'un monde qui est effectivement
05:25Beaucoup plus dangereux
05:26Et là, oui, le réflexe patriotique, je dirais
05:29Enfin, ou plutôt le patriotisme
05:31Revient un petit peu par réflexe
05:33Maintenant, voilà
05:34Il faut que ça se traduise concrètement
05:36Par peut-être plus d'engagement
05:38Plus d'engagement dans les réserves
05:40On parle des services militaires
05:42Autant, je pense que c'est peut-être
05:44Un peu compliqué, on va dire
05:46À mettre en œuvre
05:47Peut-être un pouvoir un peu lisoire
05:48En revanche, l'engagement dans des réserves
05:50Réservistes ou dans l'engagement, bien sûr
05:52Dans l'armée
05:53Ça, oui, c'est quelque chose
05:54Qu'il est possible
05:55Et qui nous permettrait
05:56D'augmenter nos capacités
05:58En quelques mots, pour conclure
05:59Notre armée française
06:00Aujourd'hui, en 2025
06:01Vous la qualifieriez comment ?
06:04C'est une force nucléaire
06:06Plus une excellente force expéditionnaire
06:10Avec ce que la suppose
06:12D'excellence
06:13Mais aussi de limites
06:15En termes de capacité
06:18Et de volume
06:19Mais avec un effort
06:21Suffisant de la nation
06:23Dans quelques années
06:24On peut retrouver un rang
06:26De grande puissance militaire
06:27Merci beaucoup
06:28Colonel Michel Goya
06:30Merci d'avoir été avec nous ce matin
06:31Sur eux
06:32Merci beaucoup
06:33Merci beaucoup