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Pierre de Vilno reçoit le philosophe Bernard-Henri Lévy dans #LeGrandRDV, en partenariat avec Europe 1 et Les Echos

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00:00Bonjour, bonjour à tous, bienvenue sur le plateau du Grand Rendez-vous Europain, c'est
00:04News Les Echos.
00:05Bonjour Bernard-Henri Lévy.
00:06Bonjour.
00:07Et merci d'être avec nous.
00:08C'est votre Grand Rendez-vous ce dimanche, un dimanche particulier qui intervient la
00:12veille des 80 ans de la libération du camp d'Auschwitz mais aussi au lendemain de la
00:18libération de quatre otages israéliennes, libération au prix fort contre 200 prisonniers
00:24palestiniens condamnés pour la plupart à la perpétuité pour avoir commis des attentats
00:29en Israël.
00:30La question d'Israël, comme beaucoup d'autres d'ailleurs, hante vos nuits et justement
00:35au travers comme au-delà de Nuit Blanche, votre dernier récit chez Grasset, vous êtes
00:42indissociable de ces questions, la paix dans le monde, la paix entre les peuples, le refus
00:46de la guerre.
00:47Nous évoquerons aussi l'arrivée de Donald Trump qui se pose justement en maître des
00:52horloges sur ces sujets au détriment des dirigeants européens qui paraissent bien
00:57faibles face à lui.
00:58Pour vous interroger ce matin, Stéphane Dupont des Echos, bonjour Stéphane.
01:01Bonjour.
01:02Et Mathieu Bocoté.
01:03Bonjour Mathieu.
01:04Bonjour.
01:05Hier, quatre soldats israéliens ont donc retrouvé leur famille, toujours aucune nouvelle
01:08des enfants otages, Kfir Bibas deux ans, Ariel Bibas cinq ans, Israël pleure et se
01:15réjouit à la fois, paye le prix fort, 200 prisonniers palestiniens accueillis comme
01:21les nouveaux héros de la Palestine, je viens d'y décrire, ces 200 prisonniers palestiniens
01:27pour la plupart très dangereux, qu'est-ce que cela présage ?
01:29D'abord, joie, les otages israéliens n'ont pas de prix, au sens propre du terme, et ça
01:43c'est une constante de la société israélienne, une constante de la pensée juive, des otages
01:50n'ont pas de prix, la vie humaine n'a pas de prix, élément de base.
01:57Après, c'est vrai que c'est très cher payé, c'est-à-dire que remettre dans la nature
02:04200 criminels de sang, terroristes d'énorme calibre, c'est extraordinairement dangereux,
02:17au point d'ailleurs que, comme vous le savez, certains sont à Gaza, d'autres sont en Juillet
02:25et Samarie, et d'autres en Corse ont été expulsés dans d'autres pays, tant le danger
02:31est perçu comme...
02:32Certains en Cisjordanie et d'autres, effectivement, en Jordanie ou en Égypte.
02:35Ou à Doha.
02:36Ou à Doha.
02:37Voilà.
02:38Donc on est entrés dans une zone très dangereuse, ce n'est pas des enfants de cœur.
02:43Nous avons voulu assister à une mise en scène très particulière, le Hamas a voulu faire
02:49preuve de sa force retrouvée, qu'est-ce que ça vous a inspiré ?
02:52Ça m'a inspiré beaucoup de dégoût, cette mise en scène, cette mise en scène voulue
02:59par le Hamas, ce simulacre de victoire, cette torture ultime, cette façon de faire monter
03:08ces quatre jeunes femmes sur cette estrade improvisée, avec ce bureau absurde, ces gestes
03:19dont on ne sait pas très bien encore ce qu'ils signifient, est-ce qu'elles levaient
03:22le poing à destination de leurs frères, sœurs, pères et mères israéliens, est-ce
03:29que c'était un autre message, je ne sais pas, mais il y avait quelque chose là, voulu
03:33par le Hamas, de particulièrement obscène.
03:37Et puis ça m'a inspiré une autre réflexion, c'est que pour Israël, pour le monde libre,
03:49pour tous les hommes de bonne volonté, il y a deux objectifs, la libération des otages
03:56et puis la défaite sans condition du Hamas.
03:59On en est loin là Bernard-Henri, parce que Benjamin Netanyahou nous avait promis d'éradiquer
04:06le Hamas, bon le Hamas, il a été décapité, mais il renaît de ses cendres.
04:10Il est en train de se reconstituer.
04:11Il est en train de se reconstituer parce qu'on lui en fait le cadeau.
04:16Moi je crois qu'Israël est au bord d'accomplir ses deux buts de guerre, y compris le deuxième.
04:25Le Hamas n'est pas seulement décapité, je crois qu'il est vraiment au tapis, mais
04:30c'est vrai.
04:31Quand vous dites on lui a fait le cadeau, qui fait le cadeau ?
04:32Israël, bien sûr, parce qu'encore une fois Israël est pris dans cette contradiction
04:41intenable, ces deux buts de guerre dont on sait depuis le premier jour qu'ils sont
04:46quasi inconciliables, c'est-à-dire Israël est confronté à un choix tragique, la tragédie
04:52c'est ça.
04:53C'est quand on a deux objectifs qui ne sont pas conciliables, qui ne sont pas directisables.
05:01Et puis il y a eu aussi des pressions sur Israël, constantes, ça fait quinze mois
05:06que ça dure.
05:07Mais de la dépression particulière, c'est-à-dire qu'on comprend à tout le moins à demi-mot
05:10que Donald Trump, parmi les premiers éléments de sa victoire annoncée, sa prise de pouvoir
05:15voulait peser sur la question des otages.
05:16Est-ce que de ce point de vue les Américains n'ont pas forcé Israël à faire une entente
05:21qui vous l'avez dit permet de sauver quelques otages, mais de l'autre côté affaiblit
05:25structurellement Israël ?
05:26On le saura, on le saura assez vite.
05:31Si c'était le cas, ce serait une lourde responsabilité.
05:35Parce qu'encore une fois, les otages, cent fois les otages, enfin quatre-vingt-dix fois
05:42les otages et les enfants bi-basses, mais pour Israël, pour la région, pour la Jordanie,
05:48pour le monde, il est essentiel que le Hamas soit détruit, pas affaibli, détruit, comme
05:56les nazis après la seconde guerre mondiale.
05:58C'est possible ça ?
05:59Bien sûr que c'est possible.
06:01On a détruit Daesh à Mossoul et à Raqqa, on a détruit Al-Qaïda en 2001.
06:07Oui, mais après il y a eu l'État islamique, il y a eu d'autres mouvements qui se sont
06:11reformés.
06:12Non, non, non, quand il y a une défaite militaire cuisante, il n'y a plus d'État islamique,
06:19c'était avant 2014, avant 2015 et 2016.
06:23Quand Mossoul et Raqqa ont été pris, l'État islamique s'est effondré, il s'est effondré
06:29sur lui-même.
06:30Mais vous diriez aujourd'hui qu'il n'y a plus aucune force, entre guillemets ?
06:34Il s'est effondré, un.
06:35Deux, il a perdu son aura d'invincibilité.
06:39La force des islamistes, c'est quoi ? C'est qu'ils ont une aura et que cette aura est
06:43attractive et qu'il y a des jeunes esservelés, des jeunes cons, des jeunes salauds, appelez-les
06:49comme vous voulez, qui se disent on va s'identifier à ces gars-là.
06:53Ils sont forts, c'est des résistants, ils mettent à genoux les juifs et les croisés,
06:58on s'identifie.
06:59Mais pourquoi ? Il y a un magnétisme, il y a une force, quelle est la motivation de
07:05ces jeunes esservelés, comme vous dites ?
07:07Ils sont généralement des jeunes salauds, mais c'est la force du mal, le mal a une
07:13force.
07:14Il y a une force du mal, mais la force du mal, elle est décuplée quand le porteur
07:23de mal est un winner.
07:24Elle est décuplée aussi quand il y a des erreurs de communication, comme sur France
07:28Télévisions, quand un malheureux bandeau apparaît en disant que 200 otages palestiniens
07:34ont été libérés.
07:35Qu'est-ce que vous pensez, rapidement, sur ce quac ou peut-être pas quac ?
07:40Un, évidemment, quac, et deux, belle réaction immédiate de la direction de la chaîne qui
07:51a sanctionné, je crois, le responsable.
07:53Vous avez fait référence à la Deuxième Guerre mondiale en disant qu'il fallait
07:57écraser le nazisme tout à fait, et nous y sommes parvenus.
08:00Mais on ne s'est pas contenté en 1945 d'écraser le nazisme.
08:03Il y a eu un travail de dénazification qui a suivi la société allemande.
08:06Pour écraser le Hamas militairement, je devine que c'est possible, mais l'étape suivante
08:11est-elle imaginable ? Une déhamacisation de la société palestinienne, c'est imaginable ?
08:15Mais pourquoi ce serait moins imaginable pour les Arabes que pour les Allemands ?
08:20Évidemment.
08:21Mais il faut une défaite claire.
08:25Il ne faut pas une demi-défaite.
08:27Il ne faut pas continuer de voir des hommes cagoulés de noir tenir le haut de l'estrade,
08:34dicter leur agenda aux chaînes de télévision internationales, terroriser encore pour la
08:40dernière fois et humilier une dernière fois ces quatre jeunes filles, etc.
08:44Il faut une défaite claire.
08:46Mais vous comprenez le sens de la question ? C'est-à-dire, est-ce que finalement la
08:49Palestine a vocation de devenir à moyen terme une société démocratique parmi d'autres
08:53au Proche-Orient ?
08:54Je suppose que non.
08:55Il n'y en a pas beaucoup au Proche-Orient, mais à moyen terme, je ne sais pas ce que
08:59vous appelez « moyen terme », mais rien n'empêche la Palestine de devenir un jour
09:04une société démocratique.
09:05Les mouvements terroristes, justement.
09:06Oui.
09:07À part les mouvements terroristes, à part cette aura noire du Hamas.
09:12Ça fait combien de temps que ça dure, Bernard-Henri Lévy ?
09:14Ça fait 76 ans que ça dure.
09:16Voilà.
09:17Oui, bien sûr.
09:18Ça fait 76 ans.
09:19Donc, ce qui empêche la Palestine d'être un pays normal, ce qui empêche Israël de
09:25vivre en paix, ce qui crée le terrorisme, c'est l'entretien de ce foyer de haine
09:32et de malheur au cœur de la société palestinienne et du monde arabe, bien sûr.
09:38C'est à ça qu'on a à faire aujourd'hui.
09:42On devrait s'y atteler.
09:43Et peut-être que Donald Trump, quand il dit « on va vider Gaza », est-ce que ce sont
09:46des solutions comme ça, radicales, ou est-ce que c'est que de la communication de la part
09:51du nouveau président ?
09:52Ce n'est ni vider Gaza, ni de la communication, c'est de la politique.
09:57C'est montrer au peuple palestinien que les solutions qu'on leur a vendues jusqu'à
10:06présent, depuis 75 ans, sont des fausses solutions.
10:09C'est leur montrer qu'on leur a raconté des mensonges, que le coup de la clé au-dessus
10:14de la cheminée, la clé de la maison de Tel Aviv, qu'on leur dit un jour que ça, c'est
10:21des illusions.
10:22Mais donc, il a raison, Donald Trump, de dire ça ?
10:24De dire qu'on va vider Gaza ?
10:25De dire qu'on va vider Gaza ?
10:27Non, il n'a pas raison, mais vider le vivier idéologique, assécher la source du mensonge,
10:39oui, une révolution culturelle…
10:41Mais ce n'était pas exactement son propos, vous en conviendrez, Trump est de l'esprit
10:44plus primaire en ce matière, quand il dit « vider Gaza », on comprend qu'il parle
10:47de déplacement de population.
10:48Là, ce n'est pas Trump qui vous parle, c'est Bernard Henry.
10:50Moi, je pense…
10:52Vous l'avez compris ?
10:53Vous avez compris son propos de manière… Il ne voulait pas dire simplement un déplacement
10:56de population.
10:57Il a dit qu'il allait les mettre en Jordanie ou en Égypte, c'est ça l'idée.
11:00Oui, mais vous savez, je pense que Trump, je ne suis pas sûr qu'il ait la compréhension
11:07complexe qu'exige la situation.
11:10C'est comme quand il dit sur un autre conflit qu'il va le régler en 24 heures, on ne
11:15règle rien en 24 heures.
11:17Quand on a affaire au tragique de l'histoire, ce n'est pas une affaire de 24 heures,
11:22ce n'est pas vider, ce n'est pas remplir, ce n'est pas envoyer en Égypte, et ainsi
11:25de suite.
11:26On va en parler avec Bernard Henry Lévy, invité du Grand Rendez-Vous ce dimanche.
11:29A tout de suite.
11:31Retour sur le plateau du Grand Rendez-Vous européen, AC News, Les Echos, avec Bernard
11:35Henry Lévy qui écrit « Nuit Blanche », son dernier récit, chez Grasset.
11:40Bernard Henry Lévy, le 27 janvier 1945.
11:43L'armée rouge découvrait en entrant à Auschwitz quelques 7000 rescapés sous la
11:49neige et la boue des femmes, des hommes, des enfants dans un état plus proche de la mort
11:54que de la vie.
11:55Plus d'un million de Juifs auront trouvé la mort dans ce camp, sur les 6 millions tués
11:59par les nazis au cours de cette période.
12:01Cette nuit, Bernard Henry Lévy, j'imagine que vous ne dormirez peut-être pas, pas davantage
12:07la nuit prochaine, pas autant que votre grand-mère que vous citez dans « Nuit Blanche »
12:15qui vous semblait comme une noyée dans son sommeil, ce sommeil que vous redoutiez.
12:20Justement, dans quelle disposition allez-vous vivre cette journée importante de demain ?
12:26Dans le recueillement et j'espère dans la mémoire active parce que demain il faudra
12:39essayer, je crois, tous ceux qui le veulent bien, de se souvenir de ce que la Shoah eut
12:46d'absolument singulier, d'absolument irréductible à tout autre crime.
12:52Il faudra essayer demain, il faudra essayer souvent de s'en souvenir.
12:56Mais s'il y a bien un jour où il faut essayer d'y penser, c'est demain.
12:59Est-ce que cette mémoire s'estompe, la mémoire de la Shoah, dans les jeunes générations
13:03notamment ?
13:04Oui et non.
13:05C'est une chose assez compliquée.
13:07Si vous lisez, vous savez c'est un sujet dont je parlais parfois avec Simone Weil.
13:12Simone Weil disait que la mémoire de la Shoah était presque plus fragile dans sa jeunesse
13:18que dans son âge tardif.
13:20Dans sa jeunesse, c'était une mémoire en lambeaux, on n'osait pas en parler.
13:24Et puis à mesure que les décennies ont avancé, grâce à elle, grâce à Claude Lanzmann,
13:31grâce à d'autres plus jeunes, la mémoire s'est construite.
13:34Une mémoire, ce n'est pas un stock qui s'effiloche.
13:38C'est aussi un monument qui se construit pas à pas.
13:42Elle est fragile parce que les derniers témoins directs partent, mais elle est solide parce
13:49qu'il y a eu des grands travailleurs de la mémoire qui ont œuvré.
13:55Et ce que je vous disais par exemple, la singularité c'est capital.
13:58Sur la Shoah, il faut savoir et il faut dire et répéter que ça ne ressemble pas aux autres
14:03génocides pour trois raisons.
14:05C'est le seul génocide qui a été sans reste.
14:10On n'épargne personne, ni les vieillards, ni les enfandiers.
14:15C'est le seul génocide qui a été sans lieu.
14:19Il n'y avait pas un lieu au monde où les Juifs pouvaient se réfugier, où ils pouvaient
14:24échapper à la curée, à la battue, à l'Allahi mondial.
14:29Ça, c'est jamais arrivé.
14:30Les autres génocides, il y a toujours en théorie un moyen de trouver un lieu du monde
14:36où les Juifs, le plan nazi, c'était où que vous soyez, vous serez éliminés.
14:41Et puis troisièmement, c'était un génocide, et ça c'est ce qu'il a eu sans doute de
14:47plus singulier, qui se voulait sans trace.
14:50Il ne devait rester aucun humain, mais il ne devait pas rester non plus la trace et
14:55le souvenir de la chose.
14:57C'était un crime blanc, c'était un crime sans mémoire.
15:02Donc ça, c'est les trois choses, les trois éléments qui rendent cet événement absolument
15:10irréductible à tout autre.
15:12Alors, construire une mémoire, ça a voulu dire, et nous sommes quelques-uns à avoir
15:18travaillé à ça, moi j'ai passé des années de ma vie à réfléchir, à écrire sur ça,
15:24ce que je viens de vous dire là, c'est toute une œuvre, construire une mémoire,
15:30et c'est une œuvre qu'il faut solidifier.
15:33Mais est-ce qu'on n'est pas dans un moment de basculement, c'est-à-dire, l'Holocauste
15:37était le crime de référence au cours des dernières décennies, et avec la remise en
15:43question de ce qu'on appelle l'hégémonie occidentale, l'émergence de plusieurs mémoires
15:47civilisationnelles aujourd'hui, est-ce qu'on n'est pas en train d'en faire simplement
15:50un crime majeur dans l'histoire de l'Occident, mais on nous dit c'est un crime parmi d'autres
15:54parce qu'il y a aussi l'esclavage, parce qu'il y a aussi tel autre crime, est-ce qu'on
15:57n'est pas dans un moment de relativisation de la Shoah, ou d'occidentalisation, c'est-à-dire
16:02ça vous concerne, mais ça ne concerne pas le reste du monde ?
16:04Eh bien, c'est la raison pour laquelle c'est à ça qu'il faudra penser demain.
16:07D'abord, il faudra dire, demain et tous les autres jours, que quel que soit l'horreur
16:13de l'esclavage, quel que soit l'horreur d'autres génocides dont j'ai passé ma vie, moi, à témoigner.
16:21Moi, j'ai été sur le terrain au Darfour, j'ai témoigné du génocide au Rwanda.
16:26Pour les trois raisons que je viens de vous dire à l'instant, la Shoah est un génocide
16:31qui ne ressemble pas aux autres, premièrement.
16:34Et puis, deuxièmement, il faudra dire demain et il faudra se souvenir que ce n'est pas
16:39un crime occidental, c'est un crime mondial.
16:42Exemple précis, le monde arabe.
16:44Dans le monde arabe, vous avez eu des gens magnifiques, des résistants, vous avez eu
16:49des gens que le roi du Maroc, qui a décidé, lui et sa famille, de porter l'étoile jaune
16:54en solidarité avec les Juifs, mais vous avez eu aussi des nazis.
16:58Vous avez eu aussi des gens qui ont dit, mais attendez, le nazisme, c'est tellement
17:01formidable, pourquoi ce serait réservé aux Européens, on va faire notre mouvement nazi
17:06à nous ? Et ça, ça s'appelait qui ?
17:08Ça s'appelait les frères musulmans.
17:10Les frères musulmans, quand ils apparaissent à la fin des années 1920, c'est sur cette
17:15base, je rappelle ça dans mon livre, c'est sur la base, on va, nous aussi, avoir notre
17:22version arabe du nazisme, avec les mêmes uniformes, avec les mêmes slogans, etc.
17:27Et quand arrive la Shoah, pareil, vous avez le grand mufti de Jérusalem, le parrain de
17:35Yasser Arafat, vous avez des régimes, d'ailleurs, les régimes basses, vous avez une légion
17:42nazi-arabe qui est stationnée à Athènes et qui, si Rommel avait gagné la bataille
17:48du désert, devait fondre jusque sur l'Israël naissant, sur le Yishoub, pour achever la
17:55solution finale, pendant que Husseini donnait des conseils à Hitler, des conseils d'efficacité.
18:01Donc, tout ça pour dire que ce n'est pas un crime occidental, c'est un crime né en
18:06Allemagne, bien sûr, mais c'est un crime mondial, et c'est pour ça qu'il concerne
18:11toute l'humanité.
18:12C'est parce que le monde entier, il y a eu des nazis au Japon, le monde arabe, il y a
18:18eu des nazis partout, donc c'est un crime de dimension, de portée, de responsabilité
18:24mondiale.
18:25Vous parliez des frères musulmans qui sont très présents encore aujourd'hui, notamment
18:30dans les pensées, vous parliez tout à l'heure des jeunes esservelés qui adoptent une position,
18:37qui adoptent, pas forcément en comprenant exactement ce qu'ils font, mais qui deviennent
18:42très rapidement des terroristes.
18:44Aujourd'hui, on a 1570 actes antisémites dénombrés pour l'année 2024.
18:50Est-ce que l'antisémitisme des années 40 est encore comparable à l'antisémitisme
18:56de 2025 ?
18:57Comparable, non.
18:59Il a changé de forme.
19:01De visage ?
19:02Il a changé de visage et il a surtout changé de système de légitimation.
19:07Le problème de l'antisémitisme, enfin le problème des antisémites, c'est de marcher,
19:12c'est de convaincre.
19:14Je me mets un dixième de seconde à leur place.
19:18Le souci d'un antisémite sérieux, c'est d'arriver à ramasser du monde derrière
19:24lui.
19:25Il y a eu des époques où pour rassembler du monde, il fallait dire les Juifs sont détestables
19:31parce qu'ils ont crucifié le Christ.
19:33Là, ça marchait.
19:34Il y a eu une période à l'époque de Voltaire où il fallait dire l'inverse.
19:39Pour que l'antisémitisme marche, il fallait faire crime aux Juifs d'avoir inventé le
19:44Christ, de l'avoir enfanté.
19:46Il y a eu une époque à la fin du 19e où pour que l'antisémitisme marche, il fallait
19:50dire il y a des races pures qu'il faut préserver, sauver.
19:54Malheureusement, il y a une race impure dont il faut se débarrasser, c'est les Juifs.
19:58Aujourd'hui, le discours antisémite qui marche, celui qui arrive à drainer des foules,
20:06c'est celui qui dit les Juifs sont détestables parce qu'ils sont les alliés, les amis, les
20:10supporteurs d'un État assassin, génocidaire qui s'appelle l'État d'Israël.
20:16C'est ça, l'antisémitisme.
20:18C'est là que l'antisionisme et l'antisémitisme se rejoignent.
20:22Ce n'est pas qu'ils se rejoignent, c'est que je crois qu'il n'y a pas d'autre antisémitisme
20:33vraiment possible aujourd'hui, possible, sérieux, qui est dangereux, qui ne marche
20:38que l'antisionisme.
20:40Un antisémite qui veut avoir de l'effet sur le réel, il n'a pas d'autre instrument
20:49à disposition que l'antisionisme.
20:52Un antisémite qui viendrait demain sur la place publique dire j'en veux aux Juifs
20:58parce qu'ils ont le sang du Christ sur les mains, plus personne ne l'écoute.
21:01Donc c'est un antisémitisme islamiste, vous diriez aujourd'hui, majoritairement ?
21:05En partie islamiste, mais pas seulement.
21:08Vous avez à la France Insoumise des antisémites sérieux, ils ne sont pas musulmans, ils ne
21:17sont pas non plus islamistes.
21:19Vous dites que Jean-Luc Mélenchon et la France Insoumise est aujourd'hui un mouvement
21:23antisémite, ils sont antisémites ces gens-là ? Jean-Luc Mélenchon est-il un antisémite ?
21:27Dans votre livre, vous dites qu'ils se sont des fascistes.
21:30Il y a quelques pages de mon livre, oui en effet, où je dis qu'il y a dans ce parti-là,
21:39à LFI, des gens, un courant, qui est en effet un courant antisémite.
21:45Jean-Luc Mélenchon ?
21:46Vous dites je vomis Mélenchon, ses sbires et les antisémites qui l'entourent, et quelques
21:51lignes plus loin, vous dites alors qu'aujourd'hui cette nouvelle extrême gauche est fasciste.
21:56On va en parler dans un instant Bernard-Henri Lévy, justement, de ces phrases très importantes,
22:01après une nouvelle pause dans le Grand Rendez-Vous, à tout de suite.
22:07Retour sur le plateau du Grand Rendez-Vous Europe 1, CNews, Les Echos, avec Bernard-Henri
22:10Lévy qui est donc publié nuit blanche chez Grasset, on en était à ce passage dans votre
22:16livre, Bernard-Henri Lévy, vous dites je vomis Mélenchon, ses sbires et les antisémites
22:20qui l'entourent, la vraie question est qui a le plus changé, eux ou moi, le jeune Mélenchon
22:26et plus loin, vous dites aujourd'hui cette nouvelle extrême gauche est fasciste.
22:31Pourquoi le terme de fasciste précisément ?
22:35Parce qu'il y a une tradition qui s'appelle le fascisme.
22:42Aujourd'hui, dès qu'on prononce le mot fascisme, on vous dit point Godwin, attention,
22:47fascisme c'est un concept historique, c'est comme libéralisme, c'est comme communisme,
22:53c'est un concept qui permet de comprendre le réel.
22:56Et c'est à tort ramené uniquement à Mussolini ?
22:59Évidemment, les concepts politiques ne sont pas empaillés, ils ne sont pas au musée
23:06Grévin ou chez Madame Tussauds, c'est des concepts vivants et l'un des lieux
23:11aujourd'hui où vit cette tradition-là, malheureusement, je dis ça avec chagrin
23:17parce que c'est là que j'ai ma généalogie, mes sources politiques.
23:23C'est à l'extrême gauche aujourd'hui.
23:25Surtout que vous avez connu Mélenchon avant du temps de Mitterrand
23:28et vous dites qu'il a fait sa mue d'une certaine manière,
23:32c'est plus le même qu'avant et qu'aujourd'hui il dirige un mouvement fasciste.
23:35Oui, avec lui-même des réflexes, des réactions ou des réflexions qui sont...
23:45Mais il a dérivé par opportunisme électoral ou par conviction ?
23:49Est-ce qu'il a changé Mélenchon ?
23:51Je ne crois pas que ce soit l'opportunisme électoral.
23:53Je vais vous prendre des exemples.
23:55Quand un homme politique vous dit que tous les malheurs qui lui arrivent,
23:59c'est à cause du kriff, ou que les malheurs qui arrivent à son copain anglais,
24:04Jérémy Corbyn, c'est à cause du kriff, que c'est le kriff qui complote
24:08contre son ami Corbyn et qui a précipité sa chute.
24:11Qu'est-ce que c'est sinon un recyclage des vieux thèmes antisémites
24:15Édouard Drumond, de la tentacule juive et du pouvoir juif ?
24:21Quand on dit des Juifs comme le fait, alors sinon Mélenchon,
24:26d'ailleurs Mélenchon aussi, mais un certain nombre de ses sbires,
24:30qu'ils sont génocidaires.
24:32Quand on dit que les gens qui viennent manifester à Paris
24:36contre l'antisémitisme et contre le 7 octobre,
24:40quand on dit le parti génocidaire et de sortie,
24:44qu'est-ce qu'on fait sinon mettre une cible sur la tête
24:48de ceux qui vont se rassembler, c'est-à-dire des Juifs ou de leurs amis ?
24:53Et qu'est-ce que c'est ça sinon ? Ce n'est pas de l'opportunisme.
24:56Quand on ose cette phrase-là, rappelez-vous, c'était en novembre 2023,
25:00quelques semaines après le 7 octobre, il y a des Français,
25:03pas tous Juifs, qui écoeurés, indignés, voulant montrer leur solidarité,
25:07ils descendent dans la rue et ils disent le parti du génocide et de sortie.
25:12C'est un mot extraordinaire et ce n'est pas pour draguer l'électorat des banlieues,
25:17ça vient malheureusement des tripes.
25:21Est-ce qu'il n'y a pas une certaine facilité chez vous à utiliser le terme fascisme
25:24en toutes circonstances ? Je m'explique.
25:26L'antisémitisme à gauche est antérieur au fascisme.
25:28Je pense au livre de Marc Rapaël, La gauche antisémite.
25:31Le fascisme n'existait pas, une certaine gauche était déjà antisémite.
25:35Et par ailleurs, Staline n'était pas fasciste et était parfaitement antisémite à sa manière.
25:39Est-ce que vous n'avez pas la tentation quelquefois de tout ramener à ce concept
25:43alors que la gauche, par son propre chemin et sans passer par le fascisme,
25:46est parfaitement capable d'être antisémite ?
25:48Mon cher ami, je suis un peu historien des idées.
25:50Ça m'arrive aussi.
25:51Ça vous arrive aussi, moi aussi, je suis depuis bien longtemps,
25:55parce que là je suis plus âgé que vous,
25:58et je sais faire la différence entre les filiations idéologiques.
26:04Et malheureusement, ou heureusement,
26:07parce que ce n'est pas mieux d'être un antisémite canal stalinien.
26:11Ce n'est pas mieux.
26:12Mais l'antisémitisme de celui qui dit de Mme Braune-Pivet,
26:16quand elle va exprimer la solidarité du peuple français avec les endeuillés du 7 octobre,
26:22l'antisémitisme qui dit qu'elle va camper à Tel Aviv,
26:25ce n'est pas celui de Staline, c'est celui de Drummond.
26:28Et Drummond c'est qui ? C'est l'un des précurseurs.
26:32Le fascisme n'existe pas encore comme tel,
26:34mais c'est l'un des précurseurs du fascisme européen.
26:36Donc si on fait de l'histoire des idées, il faut en faire sérieusement.
26:40Et en tout cas ce qui est incontestable,
26:42c'est que cette extrême gauche d'aujourd'hui,
26:46hélas son cœur battant, il est peut-être un peu encore du côté de Staline,
26:52mais il est beaucoup du côté de Drummond.
26:55J'entends parler qu'il y a une grande quête dans votre vie,
26:57qui est tout à fait compréhensible, c'est la lutte contre le fascisme.
26:59Vous l'avez cherché, combattu, ces dernières traces,
27:03mais peut-être, est-ce qu'on n'est pas aussi devant quelque chose d'autre
27:05qui ne relève pas de ce combat historique que vous avez mené
27:07au temps de votre livre « L'idéologie française » ?
27:09Moi j'ai trois combats dans ma vie.
27:12Combats contre le colonialisme, d'accord ?
27:16Aujourd'hui Poutine et la Chine.
27:18J'ai un combat contre le totalitarisme,
27:22ça c'est peut-être même le combat de ma vie.
27:24Combats contre les staliniens autrefois,
27:26combats contre les responsables de l'Europe captive,
27:31comme disait Milan Kunera dans les années 80,
27:33combats pour les dissidents.
27:35Deuxième combat.
27:36Et j'ai un troisième combat,
27:37qui est le combat contre le fascisme,
27:39par héritage familial,
27:41et parce que c'est l'autre horreur du XXe siècle, majeure.
27:46En tout cas, vous parlez également des partis politiques
27:48qui concernent les Français.
27:49Vous dites « Cinq accords suffisent »,
27:51dites une croyance Stoltec pour détacher l'âme d'un corps.
27:54Cinq lettres ici suffisent,
27:56celles de LFI et du RN,
27:58et c'est l'âme de la France qui se détache.
28:02L-F-I-R-N.
28:04Vous mettez LFI et RN sur la même position ?
28:08Du point de vue du détachement de l'âme de la France, oui.
28:11Je pense que le RN, si c'est ça votre question,
28:14ce n'est pas l'âme de la France.
28:16Donc vous mettez Marine Le Pen, Jordan Bardella
28:18au même rang que Rima Hassan, par exemple,
28:22qui a voté une résolution au Conseil européen
28:25contre la libération de Boalem-Sensal.
28:29On ne va pas mélanger.
28:30Rima Hassan ne mérite pas sa place.
28:34Elle ne la méritait déjà pas d'ailleurs.
28:36Mais avoir refusé de voter pour la libération de Boalem-Sensal.
28:39D'ailleurs, vous savez sur quel argument ?
28:41Argument extraordinaire.
28:42Il n'est Français que depuis quelques mois.
28:46C'est ça qu'a dit Mme Hassan.
28:47Français de papier, d'accord ?
28:50Retrouver l'argument des Français de papier
28:52chez Mme Hassan ne manque pas de sel.
28:56Donc ça, c'est indigne.
28:58Ne pas s'être associé au soulagement collectif,
29:05à la libération des otages est indigne.
29:08Et ainsi de suite.
29:09Demander la libération de Georges Ibrahim Abdallah est exprès.
29:12Vous n'avez pas fini votre phrase.
29:13Elle n'a pas sa place où ?
29:14Au Parlement.
29:15Au Parlement, oui.
29:16Bien sûr.
29:17Elle déshonore le Parlement.
29:19Mais là, on parle d'autre chose.
29:21Je réponds à votre question précise.
29:23Dans mon livre, je dis, en effet, que l'âme de la France,
29:28la grandeur de la France, la France que j'aime,
29:30la France que je défends, la France que je défends
29:32parfois en payant de ma personne,
29:34en allant plaider sa cause et parler sa langue
29:37dans des latitudes lointaines,
29:39je ne trouve pas qu'elle soit exprimée
29:41par le Rassemblement national.
29:42Le Rassemblement national de Marine Le Pen
29:44par rapport au Front national de son père Jean-Marie Le Pen,
29:46vous voyez une différence ?
29:47Ou c'est la même filiation ?
29:48C'est la même idéologie ?
29:49C'est la même chose ?
29:50Page 126.
29:51Les gens du Rassemblement national
29:53qui prétendent avoir changé.
29:54Oui.
29:55Ils prétendent avoir changé.
29:57Donc ils n'ont pas changé.
29:58Ils ont peut-être un peu changé.
30:00Mais moins qu'ils ne le disent.
30:02Et en tout cas, c'est la même filiation.
30:04Et excusez-moi, je n'ai rien voulu dire
30:06pendant la période de deuil,
30:07parce que je suis un garçon bien élevé
30:09et que je respecte les morts.
30:11Mais enfin, cela a été dit dans les dernières semaines,
30:15que le lien n'était pas rompu.
30:17J'ai lu, je crois que c'est dans le JD News,
30:21j'ai lu que Marine Le Pen a dit
30:24qu'elle ne se pardonnerait jamais
30:26l'exclusion de son père.
30:28Mais qu'elle n'avait pas d'autre choix.
30:30De l'avoir blessée comme père,
30:31comme chef de police.
30:32Elle ne se pardonnerait jamais.
30:34C'est une phrase ambiguë,
30:35ce qui veut dire à la fois
30:36qu'elle ne se le pardonne pas comme fille
30:38et comme fille est pleurée.
30:39Mais cela veut dire aussi
30:40qu'il y avait d'autres solutions.
30:42Bref, la question est,
30:44justement, elle dit qu'elle n'avait pas d'autre choix.
30:46D'accord.
30:47En tout cas, est-ce qu'il y a une filiation ?
30:49Me demandez-vous.
30:51A l'évidence, il y a une filiation.
30:53Vous savez, j'ai eu déjà...
30:55Il n'y a pas eu de rupture,
30:56c'est ça que vous voulez dire.
30:57Il n'y a pas eu de changement.
30:59Il n'y a pas de rupture.
31:01Et quand on demande aux responsables
31:03du Ration nationale,
31:04je ne veux pas entrer dans le détail,
31:05ça me vaut un procès
31:06que va plaider bientôt
31:08maître Patrick Klugmann,
31:10que maintenant,
31:11un des responsables du RN.
31:13Mais quand on leur demande
31:15est-ce que vous vous inscrivez
31:18en rupture radicale du vivant
31:21de Jean-Marie Le Pen
31:22avec le fondateur de votre parti,
31:24leurs réponses sont souvent très ambitieuses.
31:26Vous avez évoqué avec raison
31:27la marche contre l'antisémitisme,
31:29c'était en 2023,
31:30fin 2023, je crois.
31:31De mémoire, vous me corrigerez peut-être,
31:33le RN voulait s'y joindre
31:35pour participer à l'Union nationale
31:37contre l'antisémitisme
31:39et plusieurs voulaient l'en chasser
31:40en disant vous n'avez pas votre place
31:42dans cette lutte contre l'antisémitisme.
31:43Donc c'est compliqué pour eux,
31:44ils veulent se joindre au combat
31:45contre l'antisémitisme,
31:46ils se réclament des valeurs de la démocratie,
31:48on dit on ne veut pas de vous là-dedans,
31:49c'est une Union nationale,
31:51111 millions de Français
31:52et on ne veut pas de vous
31:53dans la lutte contre l'antisémitisme.
31:54Moi ce n'est pas ils,
31:55moi c'est moi
31:56et moi en tout cas,
31:57je n'ai jamais été partisan
31:58de chasser personne,
31:59de nulle part d'ailleurs,
32:00et en tout cas pas d'une marche
32:01contre ça,
32:02donc ça ne me concerne pas.
32:04Moi je n'ai pas voulu chasser
32:06qui que ce soit.
32:07Mais quand on s'est rendu 11 millions
32:13L'âme de la France,
32:14ce n'est pas la France,
32:15c'est deux choses,
32:16vous êtes un peu gaulliste.
32:17Ça m'arrive,
32:18avec conviction.
32:19J'ai cru comprendre,
32:20une certaine idée de la France,
32:22il y a la France et il y a son idée.
32:24Donc un parti par exemple
32:26qui manifeste des indulgences
32:28pour Vladimir Poutine,
32:31un parti dont certains cadres
32:32ont manifesté des indulgences
32:34pour ce grand humaniste
32:38et grand ami de la France
32:39qui était Bachar el-Assad,
32:41ce n'est pas l'âme de la France.
32:43Pardonnez-moi,
32:44ce n'est pas l'âme de la France.
32:46Ce n'est pas la certaine idée de la France
32:48dont je vous ai entendu
32:49parfois vous réclamer.
32:51C'est la raison pour laquelle je dis,
32:53en effet,
32:54comme dans les accords Toltec,
32:56ces cinq lettres-là font que
32:58l'âme de la France
32:59menace de se détacher.
33:00Oui, je le crois profondément.
33:02Moi je crois à la droite libérale,
33:04je crois à la gauche libérale,
33:05je crois qu'il y a
33:06une grande France magnifique
33:08et que ce n'est pas chez ces gens
33:10qu'elle se trouve.
33:11Bernard-Henri Lévy
33:12et l'invité du grand rendez-vous
33:14Europe 1C News Les Echos,
33:15dans un instant on parlera de Donald Trump,
33:17mais aussi d'Emmanuel Macron
33:19qui visiblement dort aussi peu que vous.
33:21Bernard-Henri Lévy, à tout de suite.
33:26Dernière partie du grand rendez-vous
33:27Europe 1C News Les Echos
33:28avec Bernard-Henri Lévy
33:29qui signe nuit blanche chez Grasset.
33:32Cette semaine a bien entendu été marquée
33:34par l'arrivée de Donald Trump,
33:36le retour de Donald Trump
33:38à la maison blanche.
33:40Il s'est mis au travail immédiatement
33:41pour acter les promesses de campagne,
33:43promesses axées aussi sur la fin du waukisme
33:46aux États-Unis.
33:48Alors vous dites vous dans votre livre
33:50que le waukisme c'est pas si débile
33:53mais que s'il dérape,
33:55les waukises deviennent des fachos.
33:57Alors expliquez-moi un peu mieux.
34:00Oui, il y a un fondement théorique
34:05dans le waukisme
34:06qui n'est pas absurde.
34:08C'est vrai que les relations de domination existent
34:12et elles existent aussi par exemple dans la langue
34:17mais on ne peut pas sous ce prétexte-là
34:20censurer la littérature,
34:22interdire des livres,
34:24changer les manières de parler,
34:27et ainsi de suite.
34:28Changer de genre également
34:30quand Donald Trump dit
34:31il n'y aura désormais que des hommes et des femmes.
34:33Vous le suivez là-dessus ?
34:36Non, changer de genre.
34:39Moi je suis pour la liberté des gens,
34:43la liberté des consciences.
34:4476% des Français souhaitent qu'il n'y ait que des hommes et des femmes.
34:47Sondage CSA pour Europe 1, c'est News LJDD.
34:50Ils souhaitent.
34:51Et la biologie peut-être ?
34:52Il y a ce qu'il y a.
34:54C'est-à-dire il y a la biologie
34:56et puis il y a des hommes et des femmes
34:58qui se sentent inconfortables
35:05dans le genre que la nature leur a donné.
35:10Tout ça c'est ce qui existe, c'est du « il y a ».
35:13Stéphane Ducon.
35:14L'arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche,
35:17il fait des déclarations très truantes de façon d'habitude.
35:19On a l'impression que nous les Européens,
35:21on est tétanisés face à lui.
35:23Il nous menace de droits de douane, de sanctions
35:25si on n'augmente pas nos dépenses de défense.
35:29Quelle doit être selon vous la réaction des Européens
35:32face à Donald Trump ?
35:33Est-ce qu'il faut discuter avec lui,
35:35chercher à l'amadouer, marchander ?
35:37Ou est-ce qu'il faut assumer un bras de fer
35:39avec Donald Trump sur un certain nombre de sujets ?
35:42Un, il faut ne pas perdre de vue que c'est notre allié
35:46et qu'entre l'Amérique et l'Europe,
35:48il y a un lien de mémoire, de culture, de vie et de sang.
35:56Y compris sur l'Ukraine ?
35:58Naturellement.
35:59Les Ukrainiens luttent pour la survie,
36:05dans l'intérêt en tout cas, de l'Europe et des États-Unis.
36:09C'est une guerre existentielle pour l'Europe et pour les États-Unis.
36:12Alors il y en a qui ne comprennent pas.
36:14Donc Trump, il va changer d'avis là-dessus, sur l'Ukraine,
36:16parce qu'il avait menacé de suspendre l'aide à l'Ukraine ?
36:19Je l'espère de tout mon cœur, j'en suis pas sûr.
36:21Et c'est une des choses qui m'inquiète aujourd'hui
36:24et qui m'inquiète dans le livre.
36:26Mais il serait souhaitable qu'il change d'avis.
36:28Or l'attitude de l'Europe,
36:30c'est en tout cas pas d'être au zéro, d'être absent.
36:32C'est pas de se coucher, de tétaniser, comme elle le fait.
36:37Permettez-moi de vous dire que c'est un allié, les États-Unis.
36:40Historiquement.
36:41Mais quand Donald Trump dit
36:42« je n'exclus pas la possibilité d'une occupation militaire du Groenland »
36:46qui appartient, qui est liée au Danemark, qui est membre de l'OTAN,
36:50si je décris correctement les faits,
36:52c'est un pays de l'OTAN qui menace de s'emparer militairement
36:55du territoire d'un autre pays de l'OTAN.
36:57Que reste-t-il de l'OTAN ?
36:59Je pense que c'est un propos hautement déraisonnable
37:02et que les Européens ne devraient pas laisser passer cela,
37:06comme ils le font, comme une sorte de fou cadre.
37:09Mais il y a une étape supplémentaire.
37:10Imaginons que les États-Unis s'emparent vraiment du Groenland militairement.
37:14Est-ce que ça veut dire théoriquement que la France doit se porter
37:16à la défense du Danemark pour protéger le Groenland ?
37:19Sur le plan formel, c'est une question qui se pose.
37:21Oui, mais ça veut dire déjà qu'il n'y a plus d'OTAN.
37:23Si cela se passait, ça veut dire qu'il n'y aurait plus d'OTAN.
37:26Et ça veut dire qu'il y aurait aux commandes de l'avion occidental,
37:30du Air Force One de l'Occident,
37:33un personnage qui n'aurait plus tout à fait sa tête
37:37et qui, en tout cas, ne se conduirait pas comme le chef du monde libre.
37:41Il a toute sa tête, Donald Trump ?
37:43Ou pas ?
37:44Jusqu'à présent, je le pense.
37:45Dans l'hypothèse qu'évoque Mathieu Boquete.
37:48Ce n'est pas moi qui l'évoque, c'est lui !
37:50Dans l'hypothèse où il passerait à l'acte.
37:53Mais ça me semble inimaginable.
37:56Que l'Amérique s'intéresse au Groenland, pourquoi pas ?
37:59Qu'elle estime qu'elle est la mieux à même de mettre en œuvre
38:03les ressources, notamment stratégiques, que procure le Groenland ?
38:07Pourquoi pas ?
38:08Mais entre alliés, ça se discute, ça se négocie.
38:11On fait des joint ventures américano-danoises ou européennes.
38:18C'est comme ça qu'on fait, entre alliés.
38:20C'est-à-dire qu'il faut voir ça comme une joint venture
38:22et pas comme une conquête de territoire.
38:24Mais naturellement.
38:25Naturellement, ça va mieux en 10 ans, Bernard-Henri Lévy.
38:27Oui, quand on est des alliés, comme sont les États-Unis et l'Europe.
38:32Et quels alliés ?
38:33L'Amérique a sauvé l'Europe deux fois.
38:36Elle l'a sauvée du suicide.
38:38On a parlé de la mémoire.
38:39La mémoire est parfois un peu courte.
38:41Ce qu'on va fêter demain, tout de même, c'est la libération du camp d'Auschwitz
38:47par des forces ukrainiennes, des forces européennes,
38:54et puis l'Europe dans le paysage.
38:58C'est ça qui s'est noué il y a 80 ans.
39:02Oui, mais aujourd'hui, vous avez des pays européens
39:04qui critiquent d'autres Européens d'être trop atlantistes.
39:07Donc, vous voyez que tout le monde n'est pas d'accord sur la question.
39:10Oui.
39:11Eh bien, ça, c'est des nuances.
39:13Moi, je suis atlantiste.
39:15Je pense que je ne serais pas né sans les États-Unis.
39:18Mais je pense que les États-Unis, réciproquement, doivent se souvenir
39:23qu'ils n'existeraient pas non plus sans l'Europe
39:26être eux-mêmes leur substance, leur essence,
39:29ils la tiennent de la culture européenne.
39:32N'oubliez pas que les inventeurs de l'Amérique,
39:34les passagers du Mayflower, qu'est-ce qu'ils avaient dans les mains ?
39:38Qu'est-ce qu'ils lisaient ? Ils lisaient des livres en latin.
39:41Ils lisaient l'Enneïde, ils lisaient des livres en grec aussi,
39:44mais ils refaisaient le voyage des nés.
39:47C'est ça, l'Amérique.
39:48Donc, les Européens ne doivent pas oublier ce qu'ils doivent à l'Amérique,
39:52la dette de sang, mais les Américains ne doivent pas oublier
39:55ce qu'ils doivent à l'Europe, la dette de savoir, de culture et de mémoire.
39:59Vous dites que vous êtes atlantiste, mais Donald Trump,
40:01c'est le retour de l'Amérique sur elle-même, c'est l'isolationnisme,
40:05c'est tout le mouvement contraire.
40:07C'est la raison pour laquelle je suis inquiet du retour de l'Amérique.
40:11Mais cela dit, ce n'est pas la première fois.
40:14Si ce n'est que de l'isolationnisme, ce n'est pas la fin du monde,
40:18parce que ce n'est pas la première fois.
40:20Vous avez quatre courants politiques étrangères américaines, en gros.
40:24On ne va pas entrer dans le détail, mais vous avez en effet un courant
40:30isolationniste radical qui refuse le wilsonisme, qui refuse l'hamiltonisme,
40:36c'est-à-dire les interventions quand elles sont conformes au commerce,
40:41et qui refuse le jacksonisme, c'est-à-dire les interventions cowboy,
40:46coup de poing pour aller se venger de quelqu'un qui est venu vous chercher une oise.
40:50Vous avez cette tradition isolationniste.
40:53En général, elle ne dure pas longtemps, cette tradition isolationniste américaine.
40:58J'espère que Trump sait ça.
41:00Si en revanche, c'est vraiment la décision de construire une forteresse,
41:05de prétendre s'enrichir tout seul, de prétendre se couper du reste du monde,
41:11si vraiment ça consiste à penser qu'on peut mettre des droits de douane partout
41:16et que le commerce mondial, le doux commerce, va fonctionner comme avant,
41:20ça c'est une erreur très grave.
41:21Bernard-Henri Lévy, on parle de Donald Trump,
41:23on parle également d'Emmanuel Macron dans votre livre.
41:26Vous voyez de vos fenêtres le jeune monarque, comme vous l'appelez.
41:30Pourquoi le jeune monarque d'ailleurs ?
41:32Parce qu'on est dans un vieux pays de tradition monarchique
41:35et que le président de la Ve République garde bien des traits de la tradition monarchique.
41:41Alors qu'il ne dort pas non plus, qu'il vous répond à un texto,
41:44vous aussi, par interaction, dans le sens vous aussi, vous non plus, vous ne dormez pas.
41:49Quelles relations sont rentrées dans le détail ?
41:53Vous vous entretenez nocturne avec le président de la République ?
41:57Vous l'interrogez sur des sujets justement dont on vient de parler ?
42:01Il ne vous a pas échappé dans le livre que je n'entre pas dans le détail.
42:04En effet.
42:05Voilà.
42:06De ma curiosité, Bernard-Henri Lévy, vous aurez compris.
42:09Mais je n'en dirai pas davantage.
42:13C'est des questions tout à fait...
42:16Je ne vous demande pas d'entrer dans le détail,
42:18mais est-ce que vous avez des conversations sur la marge du monde,
42:23sur le refus de la guerre, sur...
42:25Sur la marge du monde, oui.
42:29Est-ce qu'il a changé le président ?
42:30Pas de conversation.
42:31Il m'arrive de donner mon avis, sollicité ou pas, ou plus ou moins sollicité,
42:37il m'arrive de donner mon avis, comme tout citoyen éclairé que je suis,
42:43sur des sujets que je maîtrise un peu concernant la marge du monde.
42:46Est-ce qu'il suit vos avis ?
42:49Il arrive qu'on ait le même avis, il arrive qu'on ne l'ait pas.
42:52Sur l'Ukraine, jusqu'à présent, j'ai eu le sentiment que j'avais le même avis que lui,
42:59ou vice-versa.
43:00C'est positif, pour vous ?
43:02C'est positif.
43:03Sur Israël, moins.
43:05Sur Israël, moins.
43:06C'est un livre où il y a une dimension politique, mais pas que.
43:09C'est une dimension intime, personnelle.
43:11C'est un livre consacré à l'insomnie comme problème existentiel.
43:15Pour la plupart des gens, l'insomnie, c'est une catastrophe absolue.
43:18C'est-à-dire, c'est condamné d'une forme d'obscurité, de brouillard permanent.
43:21Vous n'êtes pas loin de dire que l'insomnie, c'est plutôt paradoxal.
43:24C'est la possibilité aussi pour l'homme de vivre presque deux vies à la fois.
43:27C'est la possibilité de traverser l'existence sans jamais justement se retirer de soi-même.
43:31C'est un point de vue assez original.
43:34L'insomnie dans ce livre, d'abord, ce n'est pas mon insomnie.
43:39C'est un prétexte.
43:40C'est une métaphore, etc.
43:43Et le point de vue, est-ce qu'il est original, je ne sais pas.
43:47C'est celui d'Emmanuel Levinas, par exemple, qui dit qu'une insomnie, c'est la vigilance.
43:52Et que la vigilance, c'est l'attention à l'autre.
43:55C'est de ne pas le lâcher.
43:57C'est de ne pas le perdre de vue.
43:58C'est de ne pas le laisser tomber.
44:00C'est de ne pas le laisser dans le dénuement.
44:01C'est ça aussi, l'insomnie.
44:02Et que le sommeil, c'est au contraire une manière de prendre le congé du monde, de s'absenter,
44:07de dire le monde peut continuer comme il veut, ça sera sans moi.
44:10C'est un peu ça, le sommeil et l'insomnie.
44:13J'ai bien compris, mais de ce point de vue, c'est presque la trame.
44:16Le reste, il faut le lire, parce qu'on n'a plus eu le temps.
44:19Et puis surtout, on a dit qu'il n'y avait pas de détails personnels.
44:21Alors pour ceux qui voudront avoir quelques plus de détails, lisez Nuit Blanche de Bernard-Henri Lévy,
44:27publié chez Grasset.
44:28Merci beaucoup d'avoir été avec nous ce dimanche.
44:31Très très bonne journée sur nos deux antennes.

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