Élisabeth Borne, ministre de l'Éducation nationale, était l'invitée de Benjamin Duhamel dans "C'est pas tous les jours dimanche".
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00:00Elisabeth Bande, vos premiers pas ont été marqués par une polémique à l'occasion de votre déplacement à Mayotte.
00:04Vous étiez avec le Premier ministre, notamment François Bayrou, et vous avez été interpellé par deux enseignants. On l'écoute.
00:11Une chose juste que chacun doit savoir, c'est que là, depuis 15 jours, dans tous les bidonvilles ici, Petite Terre, Grande Terre, Kauini, Kavani, personne n'est venu.
00:20Personne. Donc, vous pouvez dire ce que vous voulez aux informations, la réalité, elle est là.
00:24La réalité, elle est qu'il y a des distributions comme...
00:27Personne n'est monté. Vous pouvez dire ce que vous voulez, personne n'est monté.
00:31Et même ces distributions, personne ne les a vues.
00:33Elles existent et peut-être que les gens ne sont pas bien informés.
00:36Mais attendez, que les gens aillent au point relais. Alors les gens du lycée des Lumières, ils devraient aller au point relais, c'est la mairie de Mamoudjou.
00:41C'est 5 kilomètres, 5 kilomètres à pied d'oeuvre, en plein cagnard, 5 kilomètres retour, c'est 10 kilomètres en plein cagnard, sans eau, sans nourriture.
00:47C'est impossible, c'est infaisable. Ils diront que c'est nuante. Voilà.
00:53Voilà, on vous voit tourner les talons. Pour être très précis, il y a ici 40 secondes d'échange avec ces deux enseignants.
00:59Au total, la séquence dure précisément 1 minute et 54 secondes.
01:02Pardon Elisabeth Borne, mais comment est-ce que, quand vous êtes dans cette situation,
01:06vous pouvez ainsi leur tourner le dos, tourner les talons alors qu'ils vous crient leur désespoir, leur colère ?
01:13Comment est-ce que vous pouvez vous retourner et partir ?
01:16Attendez, je vais vous dire Benjamin Duhamel, j'ai été choqué par la façon dont quelques secondes d'un échange ont pu être exploitées sur les réseaux sociaux.
01:26C'est-à-dire exploitées ?
01:27En laissant croire que je ne serais pas conscient des difficultés de Mayotte.
01:32Il y a un peu plus d'un an, en tant que Premier ministre, j'étais à Mayotte pendant la crise de l'eau,
01:38où on a dû distribuer plus de 500 000 bouteilles d'eau par jour, parce qu'il n'y avait plus d'approvisionnement en eau.
01:45Attendez Elisabeth Borne, personne ne dit que vous n'avez pas eu à traiter le sujet de Mayotte quand vous étiez Premier ministre.
01:51Le PT c'est qu'il y a cette séquence, il y a un échange avec deux enseignants qui disent leur émotion, leur colère,
01:57et on vous voit tourner les talons et partir. Il n'y a pas d'exploitation là.
02:01Les critiques sur les réseaux sociaux, c'est le manque d'empathie, laisser croire que je ne mesurerais pas la détresse des habitants de Mayotte,
02:13laisser croire que je sous-estime la fatigue, l'épuisement de tous ceux qui sont engagés, précisément pour répondre aux difficultés qui sont mentionnées.
02:23Et si je dois partir à ce moment-là, mais vous savez bien, Benjamin Duhamel commence à organiser un déplacement de Premier ministre,
02:29il y a le cortège qui attend, il y a trois collègues qui sont en train d'attendre.
02:33Donc vous ne répondez à rien.
02:36Et je quitte cette séquence, parce que je suis attendue et je suis en retard,
02:42dans un échange que je dois avoir avec des personnels de l'éducation nationale,
02:48qui font face à des difficultés énormes, avec des organisations syndicales.
02:53Est-ce que vous reconnaissez, Elisabeth Borne à minima, une maladresse ?
02:56Oui, mais bien sûr. Moi, j'ai un regret, je n'aurais pas expliqué que je devais m'en aller,
03:01parce que j'avais des collègues à eux, des personnels de l'éducation nationale,
03:05des organisations syndicales, qui m'attendaient pour parler de sujets qui ne sont pas ceux qu'ils évoquaient là.
03:11Donc c'était une erreur de tourner les talons comme cela.
03:14Ils vous parlent là d'une critique globale, que par ailleurs, ils ont eu l'occasion de faire
03:20avant cette séquence, dans les médias, notamment l'un d'eux,
03:24sur le fait que l'État ne serait pas au rendez-vous.
03:27Moi, j'ai vu le pont aérien qui est mis en place entre la Réunion et Mayotte,
03:31j'ai vu des soignants qui se défoncent pour aller au devant des malades.
03:35Vous pouvez être en désaccord avec ce qui a été dit par ces deux enseignants.
03:38Le sujet, c'est la façon dont vous vous êtes comportés face à eux.
03:42Donc c'était une erreur de tourner les talons de cette manière.
03:44Je vous dis, ça fait dix fois qu'on me dit, le cortège doit partir, le cortège doit partir.
03:48Évidemment, c'est une erreur de ne pas leur dire au revoir.
03:51Au fond, j'ai lu votre livre, qui revenait sur ces 20 mois passés à Matignon,
03:57et plusieurs fois, vous écrivez que vous êtes agacé quand on vous met dans la case techno.
04:01Au fond, ce qu'on voit sur ces images, c'est le comportement de quelqu'un
04:06qui manque de cette empathie, de ce sens politique,
04:09qui effectivement, même si un cortège est en train d'arriver,
04:12continue la conversation qu'il a avec deux professeurs, deux enseignants
04:15qui sont en très grande difficulté.
04:17Je le redis, il s'agit notamment, pour l'un d'eux,
04:22de quelqu'un qui s'est exprimé dans une critique globale de l'action de l'État,
04:26avec laquelle j'échange pour lui expliquer que la sécurité civile,
04:31les ONG, la Croix-Rouge notamment, les soignants,
04:34sont tous mobilisés pour aller au-devant, pour aller vers toutes les populations en difficulté,
04:40que le territoire a vécu peut-être la plus grosse catastrophe naturelle
04:45que notre pays a connue depuis des décennies,
04:47et qui laisse entendre que l'État, sciemment, n'irait pas au-devant de certaines populations.
04:53Donc voilà, effectivement, je pense que l'échange aurait dû se terminer
04:58en leur expliquant que je devais y aller.
05:01Vous vous êtes entretenu avec ces enseignants,
05:03après cette séquence qui, effectivement, a tourné sur les réseaux sociaux ?
05:06Je ne me suis pas entretenu avec ces enseignants,
05:08je me suis entretenu avec tous les directeurs d'établissement
05:11qui accueillent, notamment pour certains d'eux, des personnes en grande difficulté,
05:16avec l'angoisse que ça représente pour un directeur d'établissement
05:20de répondre à une mission qui n'est pas la sienne,
05:23d'accueillir des publics en difficulté dans des conditions qui ne sont pas organisées pour,
05:28avec des enseignants qui s'inquiètent pour leurs élèves,
05:31leurs élèves avec des enseignants qui sont eux-mêmes confrontés à des grandes difficultés
05:37dont certains ont perdu leur maison,
05:39et c'est tout le temps que j'ai pu passer avec eux.