• il y a 7 mois
Il représente près de 4 millions d'entreprises, soit 2 sur 3, les artisans, commerçants, professions libérales... En ce 1er mai, jour de fête du travail, Michel Picon, le président de l'Union des Entreprises de Proximité est l'invité de RTL Matin.
Regardez L'invité de RTL avec Amandine Bégot du 01 mai 2024

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Transcription
00:00RTL 7h43, excellente journée à vous tous qui nous écoutez.
00:06Amandine Bégaud, vous recevez donc ce matin le président de l'UDP, l'Union des entreprises de proximité, Michel Picon.
00:11Michel Picon, je le rappelais, vous représentez près de 4 millions d'entreprises, 3 700 000, soit les deux tiers des entreprises françaises, des artisans, des commerçants, mais aussi des professions libérales.
00:21Et à ce titre, vous êtes la première force patronale de notre pays.
00:24Pourtant, quand on dit patronat, on pense plutôt MEDEF ou CPME.
00:28Comment l'expliquez-vous ? C'est plus dur de se faire entendre qu'on tenait une petite entreprise ?
00:33Oui, absolument, parce que les règles de représentativité qui permettent de donner la prééminence au MEDEF ne sont pas favorables aux petites entreprises.
00:43Vous le disiez tout à l'heure, deux entreprises sur trois sont des TPE.
00:47Et pourtant, avec une règle qui privilégie dans la représentativité le nombre de salariés, le MEDEF est la première organisation patronale.
00:56Ce qui ne se traduit pas dans la réalité des petites entreprises.
00:59Et nous, nous avons, bien sûr, c'est ma mission, de faire entendre mieux les petites entreprises, de faire comprendre que dans ces petites entreprises, on n'a pas de services RH, on n'a pas des staffs, comme l'on dit,
01:10et qu'il faut que toutes les normes qui s'appliquent sur les entreprises, elles soient faites au regard de ce que peuvent faire les petites entreprises.
01:17Les grandes, elles auront la capacité de s'adapter. Nous, c'est plus compliqué.
01:21Donc, oui, c'est difficile pour nous de se faire une place à côté du MEDEF, mais je m'y emploie.
01:28Et ça ne vous a pas empêché, justement, il y a quelques jours, de signer avec les syndicats un accord sur le CETU, le Compte Épargne Temps Universel.
01:35Le MEDEF et la CPME, les deux autres organisations patronales, n'ont voulu pas, et elles vous accusent d'ailleurs d'avoir été déloyales.
01:41Qu'est-ce que vous leur répondez ce matin ?
01:43Ben, ils n'ont pas raison.
01:45Oui ?
01:45Elles ont tort parce que nous avons été loyales jusqu'à la fin de la négociation.
01:49Nous avons annoncé que nous allions dans le mur, qu'on allait se scratcher, qu'il faut faire un peu des concessions.
01:54Enfin, le paritarisme, on ne peut pas dire en permanence, nous y sommes attachés.
01:58Et quand on est en négociation, on se met dans des postures où on ne lâche rien, de manière à ce que vos partenaires, évidemment, vous lâchent.
02:06Nous, au terme de cette négociation qui était terminée sur un échec, et cet échec est grave,
02:11parce qu'il emporte la réforme de l'assurance du chômage que nous avions contingentée dans un accord au mois de novembre.
02:18L'échec sur la négociation des seniors fait que cet accord que nous avions passé en novembre,
02:23qui, je le rappelle, comportait une baisse de cotisation pour toutes les entreprises, c'est mort.
02:29Et donc, nous, nous avons repris notre bâton de pèlerin.
02:32Alors, ça surprend tout le monde parce que de quoi se met l'U2P, le dialogue social ?
02:36C'est nous, MEDEF ?
02:37Bien non, il y a deux tiers des entreprises qui considèrent qu'elles doivent prendre leur avenir en main.
02:43Et nous avons conduit ces négociations, pas que sur le CETU,
02:46aussi des dispositions sur la reconversion professionnelle, la prévention de l'usure professionnelle,
02:52et puis la mutualisation des indemnités de licenciement lorsque vous recrutez un senior
02:57et qu'il est frappé d'inaptitudes professionnelles que le dernier employeur ne subisse pas les conséquences de tout cela.
03:03Vous évoquiez le dialogue social qui a été, on peut le dire quand même, sacrément malmené ces dernières années.
03:09On a entendu des critiques et du côté des syndicats et du côté du patronat,
03:14pointant souvent Emmanuel Macron, le gouvernement.
03:16Le MEDEF a aussi sa responsabilité, c'est ce que vous nous dites ce matin ?
03:19Oui, dans l'échec de cette négociation, oui.
03:21D'une manière générale, le dialogue social aujourd'hui, ce qu'on appelle la démocratie sociale,
03:26depuis l'arrivée du président Macron, ça a plutôt été malmené.
03:30Toute une équipe de conseillers autour du président estime que ses partenaires sociaux sont des empêcheurs de tourner en rond,
03:35de dupiquer une politique qui a été établie selon des schémas parfois un peu universitaires
03:42et dont on se rend compte dans l'application que ça ne fonctionne pas bien.
03:46Les gilets jaunes sont arrivés et puis là, on s'est dit qu'il faut quand même qu'on trouve des pompiers pour essayer de calmer tout ça.
03:52Et là, on a retrouvé un peu les vertus des partenaires sociaux, la vertu du dialogue.
03:57Et moi, je suis meurtri de l'échec de cette négociation parce qu'au fond,
04:01le MEDEF, la CPME qui ont bloqué toutes les négociations,
04:05donne raison à ceux qui disent que les partenaires sociaux, c'est un truc désuet, qui ne sert plus à rien.
04:10Et c'est le contraire que j'ai voulu démontrer,
04:13et j'ai trouvé dans les partenaires sociaux, dans l'ensemble des organisations syndicales,
04:17y compris celles qui sont réputées les plus dures,
04:20des gens avec qui on peut discuter, à condition de les écouter aussi.
04:24Et de faire quand même des concessions.
04:26Vous le disiez, ça va quand même être une contrainte pour les artisans dans ce compte épargne-temps universel ?
04:32Non, non.
04:34On rappelle le principe peut-être pour nos auditeurs,
04:36c'est-à-dire qu'on va pouvoir cumuler et mettre sur un compte un certain nombre de jours,
04:40même quand on change d'entreprise,
04:42ça va nous suivre tout au long de la vie, c'est ça ?
04:44C'est ça, c'est ça.
04:45Non, ça ne va pas être une contrainte, d'abord parce que ce n'est pas des années
04:48que l'on va pouvoir économiser sur son CETU.
04:51Même si pendant 20 ans, on met une semaine de congé payé sur son CETU,
04:56au bout de 20 ans, on aura 3 mois et demi à disposition,
04:59ce qui permettra peut-être d'aménager son temps de travail en fin de carrière,
05:03de l'adapter à ses besoins physiques,
05:05parce que plus on vieillit, plus c'est compliqué,
05:08et donc avoir une fin de carrière avec du temps aménagé,
05:11ça sera grâce au CETU.
05:12Ça ne coûte rien de plus à l'entreprise.
05:15Lorsqu'un salarié a fait des heures supplémentaires et qu'il vous dit
05:18vous ne me les payez pas parce que je n'en ai plus besoin aujourd'hui,
05:21j'ai 54 ans, mon crédit est payé, enfin j'ai plus besoin d'épargner,
05:25vous me le mettez sur mon CETU,
05:27l'entreprise qu'elle lui verse ses heures supplémentaires à lui
05:29ou qu'elle les verse sur son compte CETU,
05:32c'est exactement la même chose.
05:34C'est tout bénef pour l'entreprise, si j'ose dire.
05:36Tout bénef, c'est une petite contrainte, mais le fait de...
05:40C'est un avantage social qu'elle donne à ses salariés.
05:42Oui, le fait de gérer en disant ce n'est pas sur son bulletin de salaire,
05:46c'est sur son CETU, c'est une information à donner à ceux qui font l'AP.
05:50Moi je pense aussi, ce qui est bon,
05:52parce que les grandes entreprises elles ont un CET qui est géré par le RH,
05:56au nom de quoi ce qui est bon pour les grandes entreprises
05:58ne le serait pas pour les petites ?
06:00Moi j'ai des problèmes de recrutement.
06:02J'ai des tas de métiers qui sont en tension, qui n'arrivent pas à recruter.
06:05Et la plupart des métiers, des jeunes qui rentrent
06:09veulent mieux gérer leur temps,
06:10mieux conjuguer leur vie professionnelle et leur vie personnelle,
06:13le CETU est une forme de réponse et de liberté.
06:17Et puis je pense aussi qu'il y va de l'attractivité dans nos petites boîtes.
06:20Moi ça me gêne et je ne veux pas que cette situation dure,
06:24qu'un jeune qui veut se lancer dans la maçonnerie, dans le bâtiment,
06:27ben il se dit je vais chez Bouygues, pardon de citer une entreprise,
06:31un gros,
06:32parce qu'il y a des avantages sociaux que je ne vais pas trouver
06:35dans la petite entreprise de moins de 10 salariés,
06:37localement à côté de chez moi.
06:39Ça il faut que nous le corrigions.
06:41– Michel Picon, vous parliez justement du bâtiment.
06:43L'UDP regroupe plusieurs fédérations dont celle du bâtiment
06:46et on l'évoquait à l'instant avec François Lenglet,
06:48le secteur ne va pas bien, le nombre de permis de construire étant chute libre,
06:52moins 20% d'après les chiffres qui ont été publiés hier
06:55par le ministère de la Transition écologique.
06:58On dit souvent quand le bâtiment va, tout va.
07:00Est-ce que l'inverse est vrai ?
07:01Est-ce que vous êtes inquiet, très inquiet pour les prochains mois ?
07:04– Je suis inquiet pour les petites entreprises
07:06parce que bien évidemment cette crise du logement,
07:09elle touche toute la filière
07:11et lorsque des grands donneurs d'ordre,
07:13des grandes entreprises de la promotion immobilière
07:16arrêtent leur activité,
07:17ben derrière c'est le peintre en bâtiment,
07:19c'est le plombier qui a un petit marché,
07:21ce sont des marchés qui vont perdre.
07:22Donc oui, on va avoir,
07:25nous connaissons déjà dans la dernière enquête Xerfi que nous faisons,
07:30tous les trimestres pour connaître la situation de nos petites entreprises,
07:33on a déjà moins 1,5% de baisse d'activité dans nos petites boîtes.
07:38– On parle de 300 000 emplois menacés en 3 ans dans le secteur ?
07:41– Oui, sur l'ensemble de la filière, je pense que c'est probable,
07:44il y en a beaucoup dans les petites boîtes.
07:45– Ça veut dire beaucoup de petites entreprises qui risquent de fermer ?
07:48– Oui, bien sûr, si cette crise du logement persiste,
07:52si des moyens ne sont pas mis en oeuvre par le gouvernement,
07:55je pense que le gouvernement a sous-estimé…
07:57– Quels moyens ? Qu'est-ce qu'il peut faire le gouvernement ?
07:58– Je pense qu'il faut qu'il agisse sur les banques d'abord,
08:01qu'elles soient un peu moins précautionneuses
08:03sur leur capacité à prêter, notamment à des jeunes couples,
08:07que le taux d'endettement soit un peu revu,
08:10qu'on regarde un peu mieux le reste à charge
08:12plutôt que d'avoir une comptabilité,
08:14enfin un prêt accordé en fonction d'un dépassement de 34%,
08:19enfin il y a des tas de factures sur l'économie.
08:21– C'est le gouvernement qui peut sauver ces 300.000 emplois aujourd'hui ?
08:23C'est ce que vous nous dites ?
08:24– Il peut, il peut aussi avec un certain nombre de dispositions fiscales
08:27qui vont permettre de ramener des investisseurs
08:31sur le marché de l'immobilier.
08:33Je voudrais dire aussi qu'en termes de…
08:36le gouvernement a dans sa ligne de mire le plein emploi,
08:40mais le logement est un des freins principaux à l'emploi.
08:45Je veux dire, il y a trois freins principaux,
08:47c'est le logement, la garde d'enfants et la mobilité.
08:52Et ne pas être en pénurie de logement,
08:54c'est aussi ne pas permettre à des gens de se déplacer
08:58d'un lieu où il n'y a pas d'emploi
08:59vers un lieu où il y a de l'emploi,
09:00parce que où je vais habiter si j'accepte ce travail ?
09:04Et donc il faut que le gouvernement pilote ces deux sujets,
09:07sinon on va vers les difficultés,
09:09et ce qui va être dans un certain nombre de professions,
09:12où on va avoir une accentuation des difficultés de recrutement.
09:17Donc d'un côté, on va perdre des emplois
09:20parce que la filière logement va s'effondrer,
09:22et de l'autre côté, il y a des entreprises
09:24qui vont rechercher des collaborateurs
09:26et qui ne pourront pas les trouver
09:27parce que les gens ne pourront pas se déplacer par carrière.
09:30Donc si on ne reste pas ces trois piliers ?
09:32Là, vous l'avez dit, quand le bâtiment va, tout va,
09:35et il faut absolument que le gouvernement mette
09:37un grand plan de reconstruction de logement.
09:39Merci beaucoup Michel Picon d'avoir été avec nous ce matin.
09:42La paix de Michel Picon sur RTL.
09:44Vous restez avec nous puisque vous êtes dans l'oeil de Philippe Cavre-Rivière dans un instant.

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