Journée de l'Europe : tandis que Emmanuel Macron signe un traité d'amitié et de coopération renforcée, Vladimir Poutine promet la journée "la plus grandiose" jamais orchestrée pour les commémorations de la victoire sur l'Allemagne nazie. Regardez l'interview de Benjamin Haddad, Ministre délégué à l'Europe , est l'invité de Thomas Sotto.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 09 mai 2025.
Regardez L'invité de RTL avec Thomas Sotto du 09 mai 2025.
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00:00RTL Matin
00:02Et tout de suite c'est l'invité d'RTL Matin, Thomas vous recevez aujourd'hui,
00:07Benjamin Haddad, le ministre délégué chargé de l'Europe.
00:09Bonjour et bienvenue sur RTL, Benjamin Haddad.
00:11Bonjour.
00:12Abbé Mouss Papam, le nouveau pape a été élu hier en fin de journée,
00:14c'est donc un américain, l'américain Robert Francis Prévost, devenu Léon XIV.
00:19Le mal ne gagnera pas, nous devons être unis, a-t-il dit.
00:22Est-ce qu'il peut devenir un allié diplomatique dans ce monde tendu et compliqué, le pape ?
00:27Est-ce que vous le souhaitez ?
00:28Je crois qu'il aura un rôle fondamental à jouer dans ce moment de guerre, de tension géopolitique,
00:33d'être une voie pour l'espérance, pour l'universalisme, pour la paix.
00:37Vous savez, c'est intéressant de parler de ça le 9 mai,
00:40parce que les fondateurs, journée de l'Europe, 75 ans de la déclaration Schumann,
00:45la déclaration du ministre des Affaires étrangères Robert Schumann,
00:47dans le salon de l'horloge du Quai d'Orsay pour créer la communauté du charbon et de l'acier,
00:52l'ancêtre de l'Union Européenne, les pères fondateurs de l'Union Européenne.
00:56On l'oublie parfois, Robert Schumann, Adenauer, de Gasperi,
01:00étaient profondément imprégnés de pensées catholiques, de démocratie chrétienne,
01:05et d'ailleurs inspirés aussi de l'encyclique Rerum Novarum sur la justice sociale de Léon XIII,
01:11dont manifestement s'inspire le nouveau pape.
01:13Et à l'époque, la démocratie chrétienne était aussi vue comme une forme de troisième voie
01:19entre les nationalismes de la Seconde Guerre mondiale,
01:21entre le communisme aussi sur le continent européen,
01:24et donc un facteur de réconciliation pour mettre la dignité humaine,
01:28la paix au cœur de notre continent.
01:30C'est la vision optimiste, sauf que ce 9 mai, c'est aussi un jour de grand défilé pour les Russes,
01:34qui officiellement célèbrent les 80 ans de la capitulation de l'Allemagne nazie,
01:37mais qui là, aujourd'hui, vont surtout célébrer la guerre en Ukraine,
01:41leur guerre en Ukraine, visiblement, avec Xi Jinping, le président chinois,
01:45qui sera aux côtés de Vladimir Poutine.
01:48Est-ce que c'est un problème, cette présence de Xi Jinping ?
01:51Est-ce que la Russie vous fait peur aujourd'hui ?
01:53Vous savez ce que ça démontre, et d'une certaine façon,
01:56c'est ce qu'on a déjà vu dans cette guerre depuis trois ans,
01:59avec les missiles iraniens qui sont utilisés par la Russie,
02:02les troupes nord-coréennes sur notre continent face à l'Ukraine.
02:05Il y aura des soldats chinois qui vont défiler à Moscou aujourd'hui.
02:07C'est que, vous savez, cette guerre d'agression de la Russie contre l'Ukraine,
02:12ce n'est pas, contrairement à ce que parfois certains ont pu dire,
02:15un conflit territorial, local, juste une affaire de quelques régions en Ukraine.
02:20Il y a une dimension profondément européenne et globale.
02:24Et nos adversaires, comme la Russie...
02:27L'ennemi, c'est quoi aujourd'hui la Russie ?
02:29La Russie, c'est une menace.
02:31C'est une menace pour l'Europe, c'est une menace pour la France, c'est un pays...
02:33C'est un ennemi, vous diriez que c'est une ennemi.
02:35Mais c'est un pays qui nous a désigné comme ennemi.
02:37Ce qui a désigné l'Europe comme son ennemi, il ne faut pas être naïf.
02:41Quand il s'ingère dans nos processus électoraux, comme on l'a vu en France,
02:44comme on l'a vu en Roumanie, comme on l'a vu en Moldavie ou encore en Pologne,
02:47récemment avec une attaque cyber dans la campagne,
02:49comme quand il menace directement les frontières issues de la fin de la guerre froide
02:54et la souveraineté des États européens,
02:56quand il lance des attaques cyber contre nos infrastructures,
02:58contre nos hôpitaux, par exemple,
03:00on voit la menace directe que ça peut représenter.
03:03Donc, à travers l'Ukraine, c'est bien sûr la sécurité de l'Europe qui est concernée.
03:08C'est pour cela que nous nous battons non seulement pour soutenir les Ukrainiens
03:11avec le soutien militaire, avec les sanctions contre la Russie,
03:15que nous nous battons aujourd'hui avec les Américains et nos partenaires
03:18pour trouver les voies de la diplomatie, d'une paix juste et durable en Ukraine.
03:23Mais force est de constater qu'alors que les Ukrainiens ont dit depuis des mois
03:26qu'ils étaient prêts à des trêves inconditionnelles,
03:28à des concessions, des compromis aussi.
03:30Aujourd'hui, c'est la Russie qui continue quotidiennement de bombarder l'Ukraine.
03:35Vous évoquez les ingérences russes qui touchent notamment la Pologne.
03:37Tout à l'heure, vous serez aux côtés d'Emmanuel Macron à Nancy.
03:39Vous avez rendez-vous justement avec le Premier ministre polonais, Donald Tusk,
03:42pour signer un traité bilatéral entre la France et la Pologne.
03:45La Pologne qui, rappelons-le, a une frontière commune avec l'Ukraine.
03:49Ce traité, c'est quoi ?
03:50C'est une façon de dire à Vladimir Poutine,
03:51ne t'approche pas, ne t'avise pas de venir par ici ?
03:54Ça veut dire ça ?
03:55Ce traité, c'est une avancée majeure dans la relation entre la France et la Pologne.
03:59C'est ce qui nous permettra d'approfondir nos liens sur le plan institutionnel et politique,
04:02sur le plan économique, de la défense des infrastructures,
04:06avec un pays qui, vous l'avez dit, est en première ligne face à la menace de la Russie,
04:09qui est un acteur majeur de l'Europe aujourd'hui, en forte croissance.
04:13Ce traité, il est lié directement à la menace russe ?
04:16Il est lié directement.
04:17Bien sûr, il y a un contexte géopolitique et la menace de la Russie,
04:19mais plus profondément au fait que nous avons là un partenaire
04:22que pendant trop longtemps, si on se dit les choses,
04:24on a un peu négligé.
04:26On avait, je crois, raté le tournant de l'élargissement européen
04:30il y a 25 ans, avec des pays comme la Pologne,
04:32comme les Etats-Baltes, qui sont aujourd'hui,
04:34vraiment, encore une fois, des moteurs de la construction européenne.
04:37On a corrigé ça dès le premier mandat d'Emmanuel Macron.
04:40C'est le premier président à avoir fait le tour des 27 ou des 26 autres pays européens.
04:45Et là, on a vraiment, je crois, un partenaire avec qui,
04:47en réalité, on a des liens historiques, la Pologne,
04:50et on a beaucoup de choses à faire ensemble.
04:51Tout ça s'inscrit, évidemment, dans une semaine européenne très riche.
04:54Le nouveau chancelier allemand, Frédéric Merz,
04:56a fait son premier déplacement aussi en France,
04:58là aussi pour relancer ce couple franco-allemand sur les questions de compétitivité.
05:01Oui, parce que, Benjamin Haddad, on pourrait penser et croire
05:03que l'Europe est plus forte et plus unique jamais,
05:05sauf qu'on parlait du défilé au Kremlin tout à l'heure à Moscou.
05:09Il y aura le premier ministre slovaque, Robert Fico, qui sera là-bas.
05:12Est-ce que ça, c'est une faute de sa part ?
05:13Est-ce que c'est un défaut de loyauté pour un premier ministre européen,
05:17de l'Union européenne, d'aller parader un plein cœur de Moscou ?
05:20Je crois que ce n'est pas la place aujourd'hui d'un dirigeant européen
05:22d'être à Moscou dans ce déplacement.
05:25Mais encore une fois, je veux voir ce moment
05:28qui est quand même un moment d'unité et de force des Européens.
05:31Mais est-ce qu'il faut sanctionner, Robert ?
05:34Est-ce que l'Union européenne doit dire
05:35non, ta place n'est pas là-bas, tu es dans les 27,
05:38tu ne dois pas aller parader avec Vladimir Putin ?
05:39Non mais sanctionner, vous savez, chaque État après est souverain
05:42et en particulier sur les questions de politique étrangère et de défense,
05:45vous savez que c'est des sujets qui se prennent à l'unanimité.
05:48Et on a su, ces trois dernières années,
05:51même avec la Slovaquie ou la Hongrie,
05:53on a su renouveler tous les six mois les sanctions,
05:55on a su continuer notre soutien à l'Ukraine
05:57et maintenir un dialogue permanent avec tous les membres de l'Union européenne.
06:00Mais moi, je voudrais quand même revenir sur ce qui s'est passé cette semaine,
06:02qui a été aussi une semaine de succès diplomatique et européen pour notre pays.
06:05On peut en être fier avec le chancelier Merz qui se rend à Paris
06:10et là, on a vraiment, je crois, une ambition très haute
06:12pour relancer la compétitivité de l'Union européenne,
06:14simplifier nos textes, investir dans la croissance
06:17pour avoir une ambition forte aussi sur la défense,
06:20pour défendre nos frontières face à l'immigration illégale.
06:22Il faut que l'Allemagne puisse bénéficier du parapluie nucléaire,
06:25autrement dit de la protection des deux puissances françaises et anglaises.
06:30Qu'est-ce que vous lui répondez ? C'est ok ? C'est bon ? On va le faire ?
06:32Mais vous savez, ce qui est très intéressant dans ce débat
06:34qui relève des prérogatives du président de la République,
06:37c'est que les thèmes qu'on porte depuis 2017,
06:40la nécessité pour les Européens de se prendre en main,
06:43d'investir dans leur autonomie stratégique,
06:44de ne plus être dépendant des autres,
06:45en particulier des Américains, sur le plan militaire.
06:49À un moment, on était un peu seul à le dire.
06:50Et aujourd'hui, vous avez un nouveau chancelier allemand
06:52qui, le lendemain de son élection, dit
06:54l'Europe doit être plus indépendante.
06:56Et on doit être capable d'investir collectivement dans notre défense,
06:59d'avoir une vraie industrie de défense européenne.
07:01Encore une fois, ça c'est des sujets
07:03que vous pourrez voir directement avec le président de la République.
07:08Mais nous, on a dit depuis des années
07:10qu'on était prêts à voir ce débat avec nos partenaires allemands
07:14qui avaient bien sûr une dimension européenne
07:17dans les intérêts vitaux de la France.
07:18Le président l'avait dit, Jacques Chirac l'avait dit à l'époque,
07:20ce n'était pas un débat nouveau.
07:21Aujourd'hui, ce qu'on constate, c'est qu'on a,
07:23et moi je le vois dans mes échanges avec mes homologues européens,
07:25de plus en plus d'Européens qui nous disent
07:27l'Europe doit être plus souveraine,
07:29doit être plus autonome, doit investir dans sa défense,
07:31doit investir dans sa compétitivité.
07:32Au fond, doit s'affirmer comme puissance
07:34entre les Etats-Unis et la Chine
07:36et non pas laisser les autres écrire notre histoire à notre place.
07:39Vous nous parliez du nouveau chancelier allemand,
07:41Friedrich Merz.
07:42Vous nous confirmez que vous serez
07:44avec Emmanuel Macron et lui à Kiev demain ?
07:47Je n'ai pas de commentaire à faire là-dessus.
07:51Vous savez que nous sommes toujours aux côtés des Ukrainiens.
07:55Nous le sommes depuis le début de l'agression de la Russie contre l'Ukraine
07:59le 24 février 2022 et nous continuons à nous battre
08:02parce qu'encore une fois, c'est notre sécurité qui est en jeu.
08:06C'est pour ça qu'on se mobilise dans la diplomatie avec les Ukrainiens.
08:09C'est pour ça qu'on se mobilise dans la pression qu'est mise sur la Russie
08:12pour trouver une fois de plus les voies d'une PJT durable.
08:14Vous allez à Kiev ce week-end ou pas ?
08:15Je vous ai répondu.
08:17C'est secret ?
08:17Je vous ai répondu.
08:18C'est quoi ces raisons de sécurité ?
08:19Mais encore une fois, je vous dis,
08:21nous continuerons à être mobilisés aux côtés des Ukrainiens.
08:23Bon, on verra donc demain que vous irez à Kiev avec Emmanuel Macron et le chancelier allemand.
08:29Quelques mots pour finir sur la guerre commerciale que nous mènent les Américains,
08:33les droits de douane avec Donald Trump.
08:35Est-ce que vous nous confirmez pour le coup que l'Union Européenne va taxer durement les produits américains ?
08:39On parle de 95 milliards ce matin dans la presse.
08:42Alors, sur ce sujet, nous, notre position est très claire.
08:44Déjà, les droits de douane américains sont inacceptables, injustifiés
08:48et surtout, ils n'ont aucune base sur la relation commerciale entre les Etats-Unis et l'Europe.
08:54Les Américains disent qu'on a un déficit commercial sur les biens,
08:57mais la vérité, c'est que nous, on est importateurs, consommateurs de services,
09:00notamment de services numériques américains.
09:02La Commission européenne a mené une négociation,
09:05maintenant, en ce moment, une négociation avec les Américains
09:07pour aboutir à une désescalade avec les Etats-Unis,
09:11pour reprendre, en fait, une relation commerciale normale.
09:14Nous avons des outils aussi de réponse.
09:16Donc, il y avait une suspension de 90 jours, vous le savez,
09:19par l'administration américaine.
09:22Et donc, on utilise cette fenêtre aussi pour négocier.
09:24Mais nous avons les moyens de répondre à la fois...
09:26Mais là, c'est 95 milliards, c'est vrai ?
09:28Alors, un paquet, ça fait partie, effectivement, des options qui sont en train d'être discutées.
09:31Mais à partir de quand, ça serait ?
09:32Alors, il y a, je vous ai dit, cette fenêtre de 90 jours
09:36pour pouvoir négocier une désescalade.
09:39Pour répondre, alors, il y a à la fois un paquet sur les biens,
09:42qui sera aussi, d'ailleurs, une réponse au tarif, vous savez,
09:44de 25% sur l'acier et l'aluminium de la part des Etats-Unis.
09:47Et après, on a d'autres instruments.
09:49On a d'autres instruments qu'on a développés ces dernières années,
09:51précisément pour pouvoir défendre nos intérêts collectifs
09:53et assumer un rapport de force.
09:55La présidente de la Commission européenne, vous le savez,
09:57avait évoqué, par exemple, l'utilisation de ce qu'on appelle
09:59l'instrument anti-coercition,
10:01qui permettrait de taxer les services numériques.
10:03Donc, nous, on ne souhaite pas une escalade,
10:05on souhaite revenir à une situation normale,
10:06mais on a les instruments pour se défendre.
10:07C'est le rapport de force qui se joue et qui se défendre.
10:09Exactement, c'est une négociation appuyée sur un rapport de force
10:11et la diplomatie.
10:11Merci beaucoup, Benjamin Haddad, d'être venu ce matin.
10:13Vous êtes dispo pour déjeuner...