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  • il y a 4 jours
Le 4 août 2024, à 21 heures, les yeux de trois milliards d'êtres humains (au bas mot) convergeront vers leurs écrans de télévisions, leurs tablettes ou leurs téléphones portables afin d'assister au 100 mètres olympique. Le rendez-vous tant attendu, l'instant où la planète entière découvre son élu le plus prompt qui, au maximum de son accélération, sera chronométré à près de 45 km/h. Plus de deux cents ans que cette curiosité s'impose. La portée du 100 mètres est sans pareil. Mais quel sont les moteurs de la vitesse ? L'inné ? L'acquis ? Les progrès techniques jouent-ils un rôle ? Et les avancées biologiques ? En s'appuyant sur les personnages les plus emblématiques de son histoire, ce film a pour ambition de rapporter le monde tel qu'il est, en constance accélération, pour le meilleur et pour le pire.
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Transcription
00:00Avant de rejoindre la piste aux étoiles, face à la multitude,
00:15il convient d'abord de faire le vide dans sa tête.
00:20A chacun son cérémonial millimétré, ses gestes privilégiés.
00:24Assouplir son corps, réchauffer ses muscles, un saut vertical, un signe de croix, un dernier étirement.
00:41La tension est palpable.
00:45A peine moins fébrile qu'une meute de lion en cage, quelques secondes encore,
00:51et les rois et reines du 100 mètres tenteront de repousser une nouvelle fois les limites de l'espèce humaine.
01:02Et toujours, ce regard qui porte au loin, jusqu'à l'extrémité d'une ligne droite aussi angoissante que familière.
01:11Concentration maximale.
01:14Silence absolu.
01:17A vos marques.
01:20Prêt.
01:21Sous-titrage Société Radio-Canada
01:51Championnat du monde de Berlin 2009.
02:20Finale du 100 mètres en main.
02:23Tous les regards sont braqués sur Usain Bolt.
02:26Triple médaillé d'or aux Jeux Olympiques de Pékin, un an plus tôt.
02:30Mystère et fascination d'une course flashée à 44 km heure, qui n'a duré que 9 secondes 58 centièmes.
02:55Autant dire, autant dire le temps de la regarder sans rien voir.
02:58Et pourtant, combien d'étapes, d'événements, accumulé le temps d'un éclair.
03:05Sous-titrage Société Radio-Canada
03:08Sous-titrage Société Radio-Canada
03:13Sous-titrage Société Radio-Canada
03:17Sous-titrage Société Radio-Canada
03:19Sous-titrage Société Radio-Canada
03:20Sous-titrage Société Radio-Canada
03:21C'est parti pour 30 mètres, c'est ma phase de drive.
03:29Il faut vraiment rester concentré.
03:31Il faut garder le haut, le haut, le haut,
03:33le haut, le haut, le haut, le haut, le haut, le haut, le haut, le haut.
03:37C'est comme ça.
03:38C'est comme ça.
03:39Le haut, les pieds, les pieds, les pieds, les pieds, les pieds.
03:4750 mètres.
03:49Je regarde le haut, le haut et les pieds.
03:51Je veux faire en sorte que je suis positionné dans la race.
03:53Je peux savoir exactement ce que je veux faire.
03:57Les gens vont se rire si quelqu'un revient à vous.
04:00Vous essayez de entendre les groupes si vous ne voulez pas.
04:03C'est quand ils sont plus éloignés.
04:04C'est quand la race se termine.
04:09C'est quand je suis un défi.
04:11Si je suis devant, vous ne me trouchez pas.
04:13Et ici, c'est là où la glorie commence.
04:21C'est quand vous passez la ligne finition, je fais ce que je veux.
04:29Pour venir à bout de ce 100 m, le plus rapide de l'histoire de l'humanité,
04:34il aura fallu bien plus qu'une petite poignée de secondes.
04:36Plutôt un siècle de compétition, de progrès et de champions traversant la Terre et son histoire.
04:51En 1896, la Grèce, pays des origines, accueille la première édition des Jeux Olympiques de l'ère moderne.
05:01À voir les concurrents de cette série du 100 m, l'art du départ est encore bien empirique.
05:06C'est l'adepte de la position la plus moderne qui sortira vainqueur de l'épreuve.
05:13L'étudiant américain Thomas Burke, premier champion olympique du 100 m, en 12 secondes précises.
05:22Et si courir vite s'avérait plus technique qu'il n'y paraît ?
05:27En France, berceau du cinéma, le chercheur et médecin physiologiste Étienne-Jules Marais
05:32s'intéresse à la décomposition du mouvement.
05:36Ses fusils et caméras chronophotographiques lui permettent de mieux examiner la locomotion de l'être humain.
05:46Dès lors, sport et progrès scientifiques ne cessent d'aller de pair.
05:50S'il en est un conscient que la vélocité a tout à gagner d'une technique sans faille, c'est bien Harold Abrahams.
06:03Harold pratique le sprint depuis son arrivée dans la prestigieuse université de Cambridge en 1919.
06:08Fils d'un commerçant juif lituanien, il n'est pas du serail dont il néglige les codes.
06:17En 1924, le jeune diplômé déroge à la sacro-sainte règle de l'amateurisme cher aux étudiants britanniques
06:24et rétribue un coach, le célèbre Sam Moussabini, chargé de faire de lui l'homme le plus rapide du monde.
06:35Il calcule déjà, au centimètre près, la distance idéale de ses appuis,
06:40afin d'obtenir une poussée maximale au départ, une meilleure projection en avant et une plus grande première foulée.
06:46Marais et le cinéma ne sont pas oubliés pour améliorer la position en course d'Harold.
06:56Quitte à se caricaturer, l'élève doit se pencher jusqu'à ne plus toucher terre,
07:02tandis que ses bras comme autant de pistons lui permettent de mieux étirer chacune de ses jambes.
07:06Il a, en point de mire, le 100 mètre des Jeux Olympiques de Paris 1924,
07:19dont il sait ne pas être le favori.
07:27Depuis Thomas Burke, les Yankees ont remporté l'épreuve Rennes 5 fois sur 6,
07:32tandis qu'au stade de Colombe, la caméra s'intéresse en première ligne à Jackson Schultz et à Charlie Paddock
07:39depuis 4 années, meilleur temps mondiaux.
07:5010 secondes 6 dixièmes plus tard, le Britannique peut lever les bras.
07:54Personne ne lui est arrivé à la cheville.
07:56En avance sur son temps, Harold Abrahams peut être considéré
08:01comme le premier sprinter professionnel de l'histoire.
08:09La victoire de l'école anglaise bat en brèche l'hégémonie des cousins d'Amérique
08:14sur le sprint mondial de ce début du XXe siècle.
08:17Aux Etats-Unis aussi, dans les universités les plus prestigieuses,
08:25on pratique entre gens du même monde,
08:28dans un uniforme aussi clair que votre peau.
08:32Pas question dans ce pays ouvertement ségrégationniste
08:35qu'un Noir puisse les rejoindre.
08:38Qu'en tenait qu'il doit être dans une de ces universités pour gens de couleur
08:41complaisamment commentées.
08:43Au-delà du folklore que certains veulent donner à voir,
09:06ces institutions permettent à leurs élèves de pratiquer le sport de façon officielle.
09:17Parmi eux, il en est un aussi agile au football américain qu'il court vite.
09:22Même si au couloir numéro 1, seul Noir de la course,
09:25Edith Hollande ne s'embarrasse guère des lignes à respecter.
09:28Petit binoclard et rabelais,
09:34on lui a toujours dit qu'il n'avait pas la taille pour devenir sprinter.
09:38Tout cela le fait bien rire du bas de son mètre 66.
09:44A l'inverse d'un autre étudiant,
09:46lui aussi couloir numéro 1,
09:48dont la carrure et la gueule impressionnent,
09:50du haut de son mètre 82.
09:51Ralph Metcalf de l'université de Marquette.
10:00Les deux Noirs dominent les épreuves de sélection
10:03et sont les premiers sprinters de couleur
10:05à intégrer l'équipe olympique américaine.
10:09En 1932, au jeu de Los Angeles,
10:13ils se retrouvent en finale.
10:17Au centre, Metcalf, mal parti, revient peu à peu.
10:21Mais il est lui-même victime du rush explosif de Tolan.
10:2610 secondes, 3.
10:28Record du monde égalé.
10:30Mais lequel des Américains a gagné ?
10:34Classer les deux amis ex aequo semblerait logique,
10:38mais la règle d'alors stipule que le vainqueur
10:40est celui dont le torse entier dépasse la ligne d'arrivée.
10:45Après moult délibérations
10:47et même s'ils ont touché le fil en même temps,
10:49Metcalf, battu par le règlement,
10:52s'inclinent devant Tolan, toujours expéditif.
11:04Les Noirs US prennent la tête du sprint mondial.
11:07Une pierre importante dans le jardin de l'Amérique
11:09suprémaciste blanche et conservatrice,
11:12où le sport féminin non plus n'est pas très reconnu.
11:20Pas de quoi décourager
11:21Mademoiselle Stanislava Vazialevitch,
11:24qui s'entraîne pour ces mêmes Jeux de Los Angeles.
11:28Née en Pologne, élevée aux Etats-Unis,
11:30Stanislava, devenue Stella Walsh,
11:33jongle avec un record du monde,
11:35secondaire mais quand même,
11:36celui du 50 yards.
11:45Le problème de cette athlète,
11:47c'est sa dualité.
11:48A commencer par celle de sa nationalité,
11:50partager qu'elle est entre son pays d'accueil
11:52et son Europe natale,
11:54où elle épingle les succès.
11:55Dualité encore,
12:09dans la propension de son coach
12:11à vouloir comparer son élève au sexe fort.
12:13Certes, Stella court comme un homme,
12:39mais pas au point d'intégrer
12:40le premier véritable village olympique de l'histoire,
12:42réservé aux 1206 athlètes masculins
12:45des Jeux de Los Angeles,
12:48contre à peine 126 femmes
12:49logées dans un hôtel.
12:57Devant un public d'hommes,
13:01c'est la seconde fois seulement
13:02que le sprint féminin
13:03est admis au programme olympique.
13:05Lors de la finale,
13:12Stella, à l'extérieur,
13:14a du retard à l'allumage,
13:16mais après une remontée d'enfer,
13:18elle est la première femme
13:19à passer sous les 12 secondes,
13:2111-9,
13:22lors de ces jeux
13:23qu'elle a finalement choisi de disputer
13:24sous bannière polonaise.
13:26Quand des années plus tard,
13:43Miss Walsh est tragiquement abattue
13:44par un voyou,
13:46son autopsie dévoile
13:47des organes génitaux masculins atrophiés.
13:50Stella était un garçon,
13:52se délecte la presse à scandale.
13:54Comme si les choses étaient si simples.
13:57Malgré les polémiques,
13:59ses innombrables titres
14:00lui restent acquis.
14:02Sa vie n'aura pas été
14:03un conte de fées,
14:04mais qui mieux que cet être intersexe
14:07aura posé la contradiction
14:08d'un sport féminin,
14:10longtemps jugé antinomique,
14:12avec le très mâle, triptyque,
14:14plus vite, plus haut, plus fort.
14:20Le 5 juillet 1936,
14:23hommes et femmes
14:23noirs et blancs,
14:25tout le monde se mélange
14:26sur le pont du transatlantique Manhattan,
14:28quand la délégation US
14:30rejoint les Jeux de Berlin
14:31dans l'Allemagne
14:33du chancelier Hitler.
14:37Le boycott intents envisagé
14:39s'efface derrière l'unité de circonstance
14:42qu'affectent tous les membres
14:43de la délégation.
14:46L'un d'eux est mis en avant,
14:48un certain Jesse Owens,
14:50sur lequel le pays compte
14:51pour remporter un maximum
14:53de médailles.
15:01Comme il doit paraître lointain,
15:08son Alabama natal,
15:10à ce petit-fils d'esclave,
15:11issu d'une famille
15:12nombreuse et misérable,
15:14avant que ses qualités physiques
15:15ne le mènent à l'université de l'Ohio,
15:17où il devient le meilleur sprinter d'Amérique.
15:24Mais cet été 36,
15:26Owens sait-il seulement
15:27qu'il débarque dans le pays
15:28le plus raciste du monde ?
15:31À Berlin,
15:35les sprinters noirs
15:36doivent fournir à Hitler
15:37l'occasion de faire valoir
15:38ses théories sur la supériorité arienne.
15:41Mais le rêve de l'Allemand
15:55vire au cauchemar.
15:57Pas tant parce qu'Owens
15:58écrase la concurrence,
16:00mais à cause de la manière
16:01dont il le fait.
16:04Dès les séries du 100 mètres,
16:06le voir courir est une merveille.
16:11Son petit 39 de pointure
16:14renforce la délicatesse de ses appuis
16:16et lui confère
16:18une légèreté surnaturelle.
16:21Courir, la tête haute,
16:23le buste droit,
16:25bien équilibré
16:25pour un maximum d'efficacité
16:27est chez lui une évidence.
16:28Rien ne peut arrêter
16:42cette superbe mécanique
16:43chez un homme
16:44qui maîtrise
16:45à ce point son sujet.
16:46Le track est très fort.
16:54Il commence à rainer.
16:57Ma lane sera très solide.
17:03Metcalfe a été waiting
17:04pour 4 ans pour cette chance.
17:06En 1932,
17:08il a gagné un gold medal
17:09par inches
17:09et un photo finish.
17:12C'est ça.
17:14Un lifetime de train.
17:16pour juste 10 secondes.
17:17C'est parti !
17:19Owen, c'est sacré.
17:34Metcalfe, son dauphin,
17:36passe une nouvelle fois
17:37à côté de son destin olympique,
17:39barré par un véritable dieu du stade.
17:41Le charme de Jesse
17:47conquiert le public berlinois.
17:49Sa finesse en remonte
17:50à Hitler et sa clique.
17:52À lui seul,
17:54il perturbe
17:54la machine de propagande nazie.
17:58La suite du programme
17:59est moins limpide.
18:02Pour le 4x100 m,
18:03les responsables US
18:04choisissent deux blancs
18:06et deux noirs.
18:07Apparemment,
18:09l'Amérique ne fait pas
18:09de différence entre ses enfants.
18:14Sauf que,
18:15contre toute logique sportive,
18:17ce sont Owens et Metcalfe,
18:19pourtant les plus rapides,
18:20qui débutent la course.
18:27Laissant les deux derniers relais
18:29et le privilège de l'arrivée
18:31à leurs camarades blancs.
18:41America first,
18:43certes,
18:44mais d'abord blanche.
18:45à son retour à New York,
18:54le héros de Berlin
18:55aux quatre médailles d'or
18:56est dignement fêté
18:58sur Broadway Avenue.
19:05Mais le président démocrate
19:07Franklin Roosevelt,
19:08qui brigue un deuxième mandat,
19:09ne daigne ni le recevoir
19:10à la Maison Blanche,
19:12ni même le féliciter.
19:13Il est vrai qu'Owens
19:19s'apprête à soutenir
19:20son adversaire républicain,
19:21Al London,
19:23désireux de s'attirer
19:24les votes afro-américains.
19:29Au-delà de son cercle restreint,
19:31l'opinion noire
19:32ne comprend guère ce choix.
19:33L'étoile d'Owens décline.
19:40Il en est bientôt réduit
19:40à courir les cachets.
19:42Comme ici,
19:43à la Havane,
19:44où en échange
19:44de quelques 2000 dollars,
19:47il accepte d'affronter
19:48Julio,
19:49pur sang de son état,
19:51qui, paniqué par le coup de feu,
19:52coupe à travers champ.
19:54Un vrai cirque.
19:55Jesse Owens a marqué de son empreinte
20:02les années 30.
20:04Sa retraite précède la fin
20:05d'un monde
20:06qui sombre bientôt
20:07dans le chaos.
20:08Au sortir de la Seconde Guerre mondiale,
20:16l'Europe s'engage
20:17dans une ère nouvelle,
20:18moins martiale.
20:20En tout cas,
20:21à voir la façon
20:21dont Jan Blankers,
20:23entraîneur national
20:24de l'équipe néerlandaise,
20:25dirige ses athlètes,
20:27parmi lesquelles son épouse,
20:29Fanny Blankers-Kuhn.
20:34Déjà présente
20:35à 18 ans
20:35aux Jeux de Berlin,
20:36Fanny fait partie
20:38de ces championnes
20:39auxquelles la guerre
20:41a volé leurs plus belles années.
20:45Depuis,
20:46dans une période
20:46de forte natalité
20:47où les femmes participent
20:48au redressement
20:49de leur pays,
20:50Madame Blankers-Kuhn
20:52a eu deux enfants
20:53sans renoncer
20:54à son rêve olympique.
20:58Quand elle se présente
20:59aux Jeux de Londres
20:59en 1948,
21:01elle a déjà 30 ans.
21:04C'est...
21:04de sa foulée impériale,
21:13Fanny écrase
21:13sa demi-finale
21:14comme pour mieux démentir
21:16ceux qui auraient préféré
21:17l'avoir restée chez elle
21:18avec ses brompins.
21:27À Wembley,
21:29signe que les temps changent,
21:30les femmes sont venues
21:31et les nombreuses assistées
21:32à la finale.
21:3720 ans après ses débuts
21:39sur les cendrées,
21:40la lumineuse Fanny
21:41tient enfin sa couronne.
21:45Elle y gagne un surnom,
21:46la ménagère volante.
21:49Comme quoi,
21:50au seuil des années 50,
21:52ciel, mariage et famille
21:53vont bien ensemble
21:55chez une reine de la vitesse.
21:5612 années encore
22:05et les Jeux de Rome
22:06donnent le la
22:07des années 60.
22:10Vilma Rudolph,
22:1220 ans à peine,
22:13est aussi déjà mère,
22:14mais pas mariée.
22:16Le secret est bien gardé,
22:18surtout ne pas rompre
22:20le charme
22:20de cette jeune Américaine
22:21qui semble avoir conquis
22:23le village olympique
22:24tout entier.
22:26Lors de sa finale,
22:30transmise pour la première fois
22:31en Eurovision,
22:33les spectateurs
22:34n'ont Dieu
22:34que pour elle.
22:40Ce qui éblouit
22:41chez Vilma,
22:42ce sont l'élégance
22:43et la prestance
22:44de ses foulées.
22:46Chacune paraît
22:46une victoire
22:47sur elle-même
22:48pour celle qui pesait
22:49moins de 2 kg
22:50à la naissance
22:51avant d'être atteinte
22:52par la poliomyélite,
22:54puis de se lancer
22:55pour contrer ses séquelles
22:56dans la pratique assidue
22:58du sport de haut niveau.
23:03Celle qu'on appelle ici
23:04la Rudolph
23:05entrevoit la première,
23:07le mur des 11 secondes
23:08aux 100 mètres.
23:09Mais son record
23:10ne sera pas homologué
23:11à cause d'un vent
23:12légèrement favorable.
23:15Qu'importe,
23:16la très édifiante Vilma
23:17remporte aussi
23:18le 200 mètres,
23:20puis sous le regard
23:20toujours plus énamouré
23:21du public,
23:23le 4 x 100.
23:27Elle fait aussi bien
23:27que son aîné Fanny,
23:31deux magnifiques triplés
23:32pour les plus éclatantes
23:33championnes
23:34des 30 glorieuses.
23:37Mais signe aussi
23:38que le sprint féminin
23:39n'a pas encore exploré
23:40les voies de la spécialisation,
23:43source d'accélération
23:44des performances.
23:45Au même moment,
23:50chez les hommes,
23:53frappe un jeune Allemand
23:54très pressé.
23:58Depuis deux années,
24:00sous l'œil des juges,
24:01Armin Harry se cogne
24:02à quelque chose d'énorme.
24:05Atteindre enfin
24:05le mur des 10 secondes,
24:07jugé infranchissable.
24:10Depuis qu'il existe,
24:11le record du monde
24:12progresse à la vitesse
24:13infime d'un dixième
24:15par décennie.
24:18L'introduction
24:20des starting blocks
24:20après-guerre
24:21aide ce virtuose
24:23du départ
24:23à tirer meilleure partie
24:25de son explosivité naturelle.
24:28Sa spécialité,
24:30anticiper l'ordre du starter
24:31pour mieux réduire
24:32son temps de réaction
24:33et démarrer,
24:35pile au coup de feu.
24:41Avec comme récompense ici
24:42un titre de champion d'Europe
24:44en 1958.
24:48Mais à trop vouloir jouer
24:50avec le feu,
24:52on prend le risque
24:55d'un faux départ.
24:56le 21 juin 60,
25:05au meeting de Zurich,
25:06l'ami Harry au centre
25:07est comme toujours
25:09prêt à bondir.
25:10à l'arrivée,
25:21le Graal,
25:2310 secondes,
25:24pile.
25:27L'As,
25:28l'Allemand
25:29aurait encore une fois
25:30devancé son départ.
25:32après de longues tractations,
25:36il obtient de recourir.
25:38Seuls deux adversaires
25:39acceptent.
25:40à nouveau 10 secondes.
25:53Cette fois,
25:53Harry est officiellement
25:55le premier être humain
25:56à atteindre
25:56cette marque symbolique,
25:58même si le chronomètre électrique,
26:00non encore reconnu,
26:01a compté
26:02quelques centièmes de plus.
26:04Harry a battu ce jour-là
26:05et a atteint le premier,
26:06le terme des 10 secondes,
26:08mais il était admis
26:10que ce temps
26:11qui était chronométré
26:12à la main
26:13était un temps
26:13qui avantageait
26:14grandement Harry
26:15car les chronométrages
26:16automatiques donnaient
26:17eux 10, 15 centièmes,
26:19je crois.
26:20Parfois,
26:20dans ce jour-là,
26:21Harry a été crédité
26:21de la première performance mondiale.
26:24Il a pu être cité
26:25comme la tête
26:25la plus rapide
26:26du monde
26:28mais néanmoins,
26:29il n'était peut-être pas.
26:31Foin des spéculations.
26:33Cet été 60,
26:34Monsieur Dixgonde
26:35est la première attraction
26:36des Jeux de Rome.
26:38Sa réputation
26:39de forbant
26:40des départs
26:40l'accompagne
26:41mais Harry n'en a cure
26:43et compte bien
26:44enfoncer le clou.
26:47En face,
26:49le starter,
26:50l'homme à qui rien n'échappe.
26:52Avec l'allemand,
26:53mieux vaut prendre
26:54ses précautions,
26:55deux pistolets
26:56plutôt qu'un,
26:57le premier pour sonner
26:58le départ,
26:59le second
26:59pour l'annuler.
27:00première tentative,
27:10la ficelle est si grosse
27:11que le starter
27:12n'a même pas le temps
27:13de tirer.
27:21Deuxième essai,
27:22plus subtil.
27:22mais pas assez
27:28pour échapper
27:28à la vigilance
27:29de l'homme au pistolet.
27:34Troisième départ,
27:36Harry met
27:36tout le monde
27:37sous pression,
27:38certains prêts
27:39à demander grâce.
27:44La quatrième fois
27:45est la bonne.
27:48Et le roublard
27:50prouve qu'il est aussi
27:51le meilleur.
27:57Dans cette finale,
27:59la plus disputée
27:59de l'histoire,
28:01gagnée en 10 secondes
28:02d'eux,
28:02les six hommes
28:03sont séparés
28:03par moins d'un mètre 50
28:04à l'arrivée.
28:07L'allemand victorieux
28:08met fin à une hégémonie
28:09américaine de 28 années.
28:13Avec son 10 de Zurich
28:14et son or romain,
28:16il entre dans
28:17la légende
28:17du 100 mètres.
28:19Sans échapper
28:20pour autant
28:20à sa nature.
28:23Il a couru
28:24en Puma.
28:26Mais avant
28:26la remise de médailles,
28:28Armin,
28:29toujours roué,
28:30les remplace
28:30comme si de rien
28:31n'était
28:31par des Adidas.
28:34Sa fédération
28:35n'est pas dupe
28:35qui le suspend,
28:37l'accusant
28:37d'avoir touché
28:38des émoluments
28:39de la part
28:39des deux équipementiers.
28:40à 23 ans,
28:54Harry met fin
28:54à sa carrière,
28:56mais le filou
28:56n'en reste pas
28:57moins populaire
28:58chez lui.
29:00Où ses adversaires
29:01peuvent toujours courir
29:02pour le rattraper.
29:03En 1964,
29:13l'Amérique
29:13est de retour.
29:15Quant aux Jeux Olympiques
29:15de Tokyo,
29:16un typhon déferle
29:18sur les séries.
29:20Bob Hayes
29:21mesure quasiment
29:22la même taille
29:22qu'Harry,
29:23mais il pèse
29:2414 kilos de plus.
29:28Le jour de la finale,
29:30Bob a dû emprunter
29:31les chaussures
29:31d'un ami
29:32après avoir oublié
29:33les siennes
29:34au village.
29:39Il est handicapé
29:40de surcroît
29:41par sa position
29:41à la corde,
29:43labouré la veille
29:44par les coureurs
29:44de fond.
29:52Détail que tout cela.
29:55Dès le départ,
29:55ses cuisses d'haltérophile
29:57et ses épaules
29:57de déménageur
29:58peinent à contenir
29:59un tumulte musculaire
30:00jamais vu
30:01dans le mètre 22
30:02de son couloir.
30:12Sans ses lunettes,
30:13il ne voit rien.
30:14Détail encore.
30:19Plus que contre des records,
30:20c'est d'abord
30:20contre des adversaires
30:21que ce puncher se bat.
30:22sa victoire par KO
30:31est plus nette
30:32que son temps.
30:339-9 manuel,
30:3410-0-1 électrique
30:36et finalement,
30:37cote mal taillée,
30:3810-0 au tableau d'affichage.
30:45Une chose de sûre,
30:46le 100 mètres,
30:47le 100 mètres lancé
30:48de Bonnet Bob
30:49lors de la finale
30:50du 4x100 chronométré
30:51en 8 secondes 6
30:52demeure aujourd'hui encore
30:54le plus rapide de l'histoire.
30:59Après une fulgurante carrière
31:00de trois années,
31:02Hayes ne résiste pas
31:03au pondeur du football US
31:05que lui offrent
31:06les Dallas Cowboys.
31:07Celui qui n'a jamais
31:09été battu sur 100 mètres
31:10connaît la gloire
31:11d'un sacre au Super Bowl
31:13avant de regagner
31:14sa Floride natale
31:15où ce colosse
31:16en réalité timide
31:17et modeste
31:18s'éteint discrètement
31:19à 59 ans.
31:23100 mètres,
31:24homme,
31:25final,
31:26100 mètres.
31:28En 68,
31:29au jeu de Mexico,
31:30déjà 8 ans
31:31que le public attend
31:32la chute
31:32du mur des 10 secondes.
31:37Au sol,
31:39les organisateurs
31:40ont déroulé
31:40un nouveau tapis rouge,
31:42le tartan,
31:43sur lequel les rois
31:44de la vitesse
31:44pourront mieux fuser
31:46et rebondir.
31:51À ce stade de développement,
31:54comment se fier encore
31:55à l'approximation
31:55d'un homme
31:56et à son impulsion manuelle
31:57sur le bouton
31:58d'un chronomètre
31:59pour désigner
32:00le plus rapide
32:01de la planète ?
32:04À Mexico,
32:07pour la première fois,
32:08les mesures déclenchées
32:09directement par le pistolet
32:11du starter
32:11et une cellule laser
32:12à l'arrivée
32:13permettent
32:14au franchissement
32:15de la ligne
32:16d'officialiser le temps
32:17au centième près.
32:23Dans une ville
32:24située à 2200 mètres
32:25d'altitude
32:26où la pression
32:27atmosphérique réduite
32:28favorise les performances,
32:30l'américain Jim Hines,
32:32revenu à la hauteur
32:33de ses adversaires
32:34à 50 mètres de l'arrivée,
32:36redémarre de plus peine.
32:41Dans cette première finale
32:42100% noire
32:43de l'histoire des Jeux,
32:47mission accomplie.
32:49Hines devient
32:50le premier homme
32:51à faire tomber
32:52la barrière
32:52des 10 secondes
32:53un supersonique
32:559-95.
32:56En cette fin des années 60,
33:03les progrès matériels
33:04ont ouvert au sprint
33:05le domaine
33:06de la technologie.
33:10Au-delà même
33:11de leurs talents,
33:12ceux qui sont appelés
33:13à gagner
33:13doivent désormais
33:14intégrer les méthodes
33:15modernes
33:16de préparation
33:17et d'entraînement.
33:19Surtout au pays
33:20du matérialisme scientifique
33:22où dans cette période
33:23de guerre froide,
33:25l'homo soviéticus
33:26s'apprête
33:27à sortir du bois.
33:31Derrière la solitude
33:32apparente du sprinter,
33:34en URSS,
33:36c'est tout un système
33:36étatique
33:37qui se met en place.
33:40Depuis que Valéry Borzov
33:42a commencé
33:43à faire des étincelles
33:43en 1968,
33:44ce jeune coureur
33:48repéré
33:49dans son village
33:49natal d'Ukraine
33:50a rejoint
33:51en deux ans à peine
33:52le club
33:53des Messieurs
33:5410 secondes.
33:59Son entraîneur
34:01attitré,
34:01Valentin Petrovski,
34:03soumet son élève
34:04à un programme physique
34:05et scientifique
34:05millimétré,
34:07le plus sophistiqué
34:08jamais mis au point
34:09au service
34:09d'un athlète.
34:10Avec ses apprentis
34:15sorciers de doux poils,
34:16médecins physiologues
34:17et autres biomécaniciens,
34:19le gagarine du sprint
34:21profite
34:22des meilleures innovations
34:22du moment.
34:27Des pieds à la tête,
34:29ne rien négliger.
34:31Pas même une batterie
34:32de tests
34:32pour confirmer
34:33un mental d'acier
34:34propice à l'exploit.
34:36En 1972,
35:00lors des Jeux Olympiques
35:00de Munich,
35:02c'est au niveau mondial
35:03que Borzov
35:03doit faire ses preuves.
35:06Au couloir 2,
35:11la course du soviétique
35:12est un modèle du genre.
35:26À l'arrivée,
35:28pas un sourire.
35:30Sans doute a-t-on oublié
35:31de l'inscrire au programme
35:32de ce 100 mètres
35:32que Valéry aura
35:34implacablement remporté
35:35en 10 secondes 14.
35:46La propulsion
35:47de la fusée Borzov
35:49est parfaitement graduée
35:50pour ne pas briser
35:52sa cadence.
35:54Une fois redressée,
35:55pas de vraie phase
35:56d'accélération.
35:58Il avance
35:58sur le même tempo,
36:00avec une efficacité
36:01que les machines
36:02qui l'ont programmée
36:02avait largement anticipée.
36:11Pas de décélération
36:12non plus,
36:14telle que la connaissent
36:14la plupart des coureurs
36:15à l'approche
36:16de la ligne d'arrivée.
36:18Que Borzov passe
36:19comme il se doit,
36:21le buste en avant,
36:22puisque c'est lui
36:23qui compte
36:23pour la photo finish.
36:24décidément,
36:30l'unique médaille
36:31d'or
36:31de l'histoire
36:32du sprint soviétique
36:33est parfaitement cadré
36:35dans son époque.
36:39Paré de toutes les qualités
36:41de l'homme nouveau socialiste,
36:43le camarade Valéry
36:44devient le modèle
36:45à suivre
36:45pour tous les petits
36:46pionirs
36:47de la nation.
36:48La parfaite mise en orbite
36:55de Borzov
36:56par le grand frère soviétique
36:57a incité
36:58les nations satellites
36:59à marcher
37:00d'un même pas.
37:06Si en URSS,
37:07le sport n'était
37:08qu'un domaine
37:08de propagande
37:09parmi d'autres,
37:11dans la petite Allemagne
37:12de l'Est
37:12des Rikonecker
37:13et de son tout-puissant
37:14ministre des Sports
37:15Manfred Evald,
37:17les champions
37:17de demain
37:18sont la preuve
37:19la plus sûre
37:20de l'existence
37:20du pays.
37:27En matière
37:28de sprint féminin,
37:29la RDA
37:30possède un atout maître
37:31en la personne
37:32de Horst Dieter Hiller,
37:34un entraîneur
37:35de haut vol
37:35qui règne
37:36dans son club
37:37laboratoire
37:37de Yéna.
37:43A la fin
37:44des années 60,
37:46il a méthodiquement
37:46concocté
37:47un modèle
37:48d'un nouveau genre,
37:50Renat Stécher.
38:01Loin des gracieuses
38:02championnes d'après-guerre,
38:03un vaincu
38:04quatre années du rang,
38:05Renat domine
38:06de la tête
38:06et surtout
38:07des épaules
38:08le sprint féminin.
38:09avec en point d'orgue
38:12le 100 mètres
38:13des Jeux
38:13de Munich 72
38:14où sa puissance
38:16s'impose.
38:23Après la retraite
38:24de Stécher
38:25quatre ans plus tard
38:26et pour multiplier
38:27les chances de médaille,
38:29Hill travaille
38:30désormais en groupe.
38:30terminées
38:38les carrures
38:38de déménageuses.
38:41Le gourou
38:42au pistolet
38:42dégaine
38:43une équipe
38:43de charme
38:44dont Marlise Goeur,
38:46petit gabarit
38:46d'un mètre soixante-six,
38:48première femme
38:49à descendre
38:50sous les onze secondes.
38:51En juin 1983,
39:03quand Marlise
39:04se présente à Berlin
39:05au départ
39:05de ce nouveau 100 mètres,
39:07elle a déjà battu
39:08deux fois
39:08le record du monde
39:09de sa spécialité.
39:21Avoir Hill à qui
39:25rien n'échappe,
39:28on devine que son élève
39:30vient de réaliser ici
39:31un nouvel exploit.
39:34Pour la troisième fois,
39:36elle bat le record
39:37de l'épreuve Rennes,
39:3810-81.
39:43Hill peut être satisfait.
39:46En onze ans,
39:47il a offert aux siennes
39:48et à la minuscule RDA
39:49six victoires olympiques
39:51trois titres
39:52de championne du monde
39:53et des records
39:54comme s'il en pleuvait.
39:58Images,
39:59ô combien sympathiques,
40:00de ce gentil papa
40:01et de ces jeunes filles
40:03toutes simples,
40:05destinées à faire passer
40:06les pilules
40:06et dissimuler
40:07un système de dopage
40:08organisé
40:09au plus haut sommet
40:10de l'État.
40:13Révélé une décennie
40:14plus tard
40:14au moment de l'écroulement
40:15du bloc de l'Est
40:16et de l'ouverture
40:17des archives de la Stasi,
40:19il sera confirmé
40:20par les aveux
40:20de l'entraîneur lui-même
40:21devant la justice.
40:23Si dans cette décennie 80,
40:48l'Américain Carl Lewis
40:50devient le porte-étendard
40:51de la lutte anti-dopage,
40:53c'est qu'il est le sportif
40:54le plus médiatisé
40:55de la planète.
40:59Lorsque déjà champion du monde,
41:01il se présente
41:01à la finale du 100 mètres
41:02des Jeux Olympiques
41:03de Los Angeles 84,
41:05difficile de ne pas tomber
41:07sous le charme
41:07de cet athlète
41:09au gabarit parfait.
41:091 mètre 88
41:11pour 80 kilos.
41:13plus que la formidable progression
41:34de sa remontée,
41:36ce sont l'élégance
41:37de ses mains dressées
41:37comme pour mieux fendre l'air,
41:39la souplesse de son délié,
41:42sa cadence millimétrée
41:43qui donne à sa course
41:44une allure de perfection.
41:47Grand sourire à l'appui,
41:49histoire de ne rien perdre
41:50de sa séduction.
41:51Tout cela rappelle
42:05un certain Jesse Owens
42:06que son père
42:07lui avait fait rencontrer
42:08à 11 ans
42:09et que le petit Carl
42:10s'était juré un jour d'égalé.
42:14Ce qu'il fait
42:15à Los Angeles
42:16en remportant lui aussi
42:174 médailles d'or.
42:18Sur le podium du 100 mètres,
42:23au pied du roi Carl,
42:25le regard mal assuré
42:26d'un petit émigré
42:27venu de Jamaïque
42:28est débarqué au Canada,
42:30un certain Ben Johnson.
42:384 années durant,
42:40les duels opposant
42:41ce taiseux brut
42:42de décoffrage
42:43et l'adonis au verbe O
42:44vont passionner
42:45le monde entier.
42:48Depuis Los Angeles,
42:51Ben Johnson
42:52a déjà pris sa revanche
42:533 fois,
42:54titre et record
42:54du monde à la clé.
42:57Des deux,
42:58c'est lui
42:58qui a le plus changé
42:59avec sa nouvelle
43:00musculature d'enfer.
43:03Mais à quelques semaines
43:04des prochains jeux,
43:05au meeting de Zurich,
43:07Carl Lewis
43:08veut remettre
43:08les pendules à l'oeuvre.
43:09L'exultation de Lewis
43:24trahit son soulagement.
43:27Tout cela augure
43:28d'un passionnant
43:29dernier round.
43:29au jeu de Séoul 88
43:36où les deux ennemis
43:37se rencontrent
43:38pour la sixième fois,
43:39l'incertitude
43:40et la tension
43:41sont à leur comble
43:42chez tous ceux
43:43désireux de savoir
43:43qui,
43:44de la version
43:45Pitbull ou Séraphic,
43:47l'emportera
43:47une fois pour toutes.
43:48Ben Johnson
44:05a beau prendre
44:06le ciel à témoin,
44:13il n'emportera pas
44:15sa victoire au paradis.
44:18Trois jours plus tard,
44:21reconnu positif
44:22au contrôle antidopage,
44:24le peu charismatique
44:25canadien,
44:26modèle parfait du paria
44:27appelé à payer pour tous,
44:29doit rendre sa médaille
44:30avant d'être renvoyé
44:31chez lui
44:32comme un malpropre.
44:37L'Américain récupère
44:38son titre sur tapis vert
44:39mais remporte surtout
44:41la bataille de l'opinion.
44:43Bien que lui-même
44:44ne soit pas tout blanc
44:45puisque déjà contrôlé
44:46positif au cours
44:47de sa carrière,
44:48ce nouveau monsieur propre
44:50témoigne maintenant
44:51devant une commission
44:52du congrès.
44:53Dans votre estimation,
44:55combien de médailles
44:56a gagné en Corée
44:56avec un résultat
44:57de l'utilisation de stéroïdes ?
44:58Je dirais au moins...
45:00Ils ont pris le bend,
45:01donc c'est un déjeuner.
45:04Je dirais au moins...
45:05Un, deux, trois...
45:08Je dirais au moins...
45:10Carl pense-t-il à sa coéquipière
45:21Florence Griffiths Joyner.
45:26À l'égal du Canadien maudit,
45:29cette sprinteuse excentrique
45:30jusqu'au bout des ongles,
45:31peut-être pour rappeler
45:32sa féminité,
45:34s'est brusquement transformée
45:35physiquement quelques mois
45:36avant les Jeux.
45:40Cuisses et épaules
45:41hypertrophiées,
45:43elle qui avant ses 29 ans
45:44s'était toujours située
45:45autour des 11 secondes
45:46aux 100 mètres,
45:47a stupéfié la planète
45:48aux épreuves de sélection
45:49en réalisant un prodigieux
45:5110 secondes 49.
45:53record du monde
45:54jamais battu depuis.
46:00À Séoul,
46:01pareil exploit
46:01suscite quelques réserves,
46:03mais ce 25 septembre,
46:05l'endemain de la finale des hommes,
46:07tous les regards
46:08n'en demeurent pas moins
46:09braqués sur Flow Joe,
46:11comme on l'appelle désormais.
46:21Étrangement souriante
46:22au milieu d'une meute
46:23grimaçante,
46:24la bouche à peine
46:25entreouverte,
46:26Flow Joe maintient
46:27son rythme initial
46:27jusqu'au bout
46:28et l'emporte
46:32avec 3 mètres d'avance.
46:40Contrairement à Ben Johnson,
46:42Florence passe à travers
46:43les mailles du filet
46:44anti-deopage.
46:49Sur le podium,
46:51larmes de joie
46:51ou de regrets,
46:53sait-elle déjà
46:53qu'elle va bientôt
46:54se retirer,
46:55devant le risque
46:56peut-être d'être épinglée
46:57à son tour.
47:02Si se doper
47:03permet d'aller plus vite,
47:05cela peut aussi
47:05vous détruire.
47:08Florence meurt
47:08d'une crise cardiaque
47:0910 ans après Séoul
47:10à l'âge de 38 ans,
47:12laissant les siens
47:13au désespoir.
47:14depuis Séoul,
47:34le sprint mondial
47:35est devenu un véritable jeu
47:36de massacre.
47:37pratiquement tous les meilleurs
47:42performeurs du 100 mètres
47:44ont depuis été rattrapés
47:45pour dopage.
47:52Ces champions épinglés
47:53n'en font pas moins partie
47:55des 167 hommes
47:56à être un jour passés
47:57sous la barre des 10 secondes.
47:59A peu d'exceptions près,
48:03tous ces sprinters
48:04sont noirs
48:04et ont des racines
48:05parfois lointaines
48:06en Afrique de l'Ouest
48:07où l'on retrouve
48:08plus qu'ailleurs
48:08l'ACTN3.
48:12Un gène
48:13que nombre de scientifiques
48:15associent
48:15à une tolérance accrue
48:16aux efforts violents
48:18des ischios jambiers.
48:21Surnommé
48:21le gène de la vitesse,
48:23il s'intègre,
48:24quelle que soit
48:24la couleur de la peau,
48:26dans les prédispositions
48:27favorisant l'éclosion
48:28des meilleurs sprinters
48:29de la planète.
48:37Pour le champion du monde
48:38Usain Bolt,
48:39apparemment pas besoin
48:40de pharmacopée.
48:43Plutôt des chromosomes
48:44efficients.
48:46Le Jamaïcain mesure
48:471 mètre 95.
48:49A l'inverse de la moyenne
48:50des êtres humains,
48:51ses jambes sont plus longues
48:52que son buste.
48:57Faire de sa morphologie
49:02hors norme
49:02un atout,
49:04tel est le défi
49:04pour ce sprinter
49:05d'un genre nouveau.
49:09Lors de sa finale
49:10des Jeux de Pékin
49:11en 2008,
49:13il éprouve
49:13quelques difficultés
49:14à mettre en branle
49:15son infini carcasse.
49:16Mais dans un stade
49:21surnommé
49:22le Nid d'Oiseau,
49:23ce drôle
49:23d'Albatros,
49:24une fois lancé,
49:26déploie
49:26toute sa puissance
49:27et plane
49:28sur l'arrivée.
49:35A Londres,
49:36en 2012,
49:37ses pieds effleurent
49:38le tartan
49:3991 millisecondes
49:40à chaque impact.
49:41Il passe 60%
49:45de son temps
49:45en suspension
49:46dans l'air.
49:48Bolt ne court pas,
49:50il vole.
49:58En 2016,
49:59à Rio,
50:00une trentaine
50:01de prodigieuses
50:02foulées
50:02de 2 mètres 70
50:03lui suffisent
50:07pour avaler
50:07ce nouveau 100 mètres
50:08victorieux.
50:09Après 14 années
50:15de carrière,
50:17Bolt la foudre
50:18devient la référence
50:18absolue
50:19de l'épreuve étalon.
50:23Triple médaille
50:24et d'or
50:24sur 100 mètres
50:25fait unique
50:25dans l'histoire
50:26des Jeux Olympiques,
50:273 fois champion
50:28du monde
50:28et son record
50:30de 9 secondes 58,
50:32imbattable
50:32pour longtemps.
50:37Bolt est-il
50:38la quintessence
50:39miraculeuse
50:39du coureur
50:40du 100 mètres ?
50:42Le nouveau modèle
50:43morphologique
50:44du sprinter
50:44dorénavant destiné
50:45à être imité
50:46et développé ?
50:47Ou plutôt,
50:51l'avenir
50:51de l'épreuve
50:52reine sera-t-il
50:52technologique ?
50:54Pistes et chaussures
50:54permettant aux humains
50:55de mieux décoller ?
50:57à moins qu'il ne réside
51:02dans un nouvel homme
51:03bionique
51:03aux implants
51:04surajoutés,
51:05muscles greffés
51:06et puces
51:08intégrés.
51:12Plus sûrement encore,
51:14le calcul du temps
51:15pouvant être divisé
51:16à l'infini,
51:17c'est en nanosecondes
51:18que pourra se mesurer
51:19l'avancée
51:19de l'espèce humaine.
51:22Condamné
51:22à aller toujours de l'avant,
51:24sans jamais baisser les bras
51:26ni ralentir ses jambes.

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