Mardi 22 avril 2025, retrouvez Pierre-Yves Dugua (Correspondant américain) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.
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00:00Le dernier quart d'heure de Smartbourg, chaque soir c'est le quart d'heure thématique, les marchés européens en tout cas étaient fermés hier lundi de Pâques.
00:11Nous avons donc la chance d'avoir notre quart d'heure américain décalé à ce mardi et nous retrouvons ainsi Pierre-Yves Dugas à distance en visio avec nous.
00:20Bonsoir Pierre-Yves, merci beaucoup. Oui, l'Europe était fermée hier, c'est pour ça qu'on se retrouve aujourd'hui avec vous.
00:25En revanche, les marchés américains, eux, étaient bien ouverts, prêts à répondre aux dernières attaques de Donald Trump contre Jérôme Powell.
00:34Vous dites, Donald Trump n'est plus dans la disruption, il est presque dans le sabotage des marchés américains.
00:40Écoutez, ça y ressemble tout de même, étrangement, sabotage délibéré quand on s'acharne comme ça sur ce pauvre Jérôme Powell qui de toute façon ne sera plus là l'an prochain.
00:55Et qu'on l'insulte de cette manière pour exercer une telle pression sur la réserve fédérale, alors qu'on est dans un climat précisément déjà de défiance à l'égard du papier américain,
01:10d'inquiétude sur le bouleversement de tous ces systèmes d'équilibre et de contrôle qui faisaient la merveille du système politique américain, ça ressemble à du sabotage.
01:23Je ne vous parle même pas des droits de douane qui changent toutes les cinq minutes. Le mois d'avril, alors aujourd'hui ça va mieux, mais on verra de quoi demain sera fait.
01:32Le mois d'avril va se terminer, c'est le pire mois d'avril boursier depuis 1932.
01:37Le dollar s'effondre, l'or qui établit de nouveaux records tous les jours, le dollar a perdu depuis le début de l'année face à un grand panier de devises 9%.
01:48Donc dans ce contexte-là, mettre en question l'indépendance de la politique monétaire américaine ressemble, de mon point de vue et du point de vue de beaucoup d'autres, à du sabotage.
02:04En outre, c'est complètement contre-productif. Imaginons une seconde, le scénario délirant où Thomas, Jérôme Pao, soit limogé.
02:17Il va saisir immédiatement les tribunaux. On va s'engager dans un bras de fer juridique qui va intervenir dans un effondrement des marchés obligataires et des marchés d'action.
02:27Et imaginons qu'il emporte la bataille. Combien de temps ça va prendre ? Plusieurs semaines d'incertitude qui s'ajoutent à l'incertitude.
02:39Imaginons qu'il perde cette bataille. Qui pourrait succéder à Jérôme Pao dans un état de sérénité pour faire un travail constructif de lutte contre l'inflation ?
02:50Tout ça est complètement absurde et ressemble à une espèce de sabotage aveugle.
02:55Oui, toujours la même question que je me pose. Et bon, des gens ont dû expliquer à Donald Trump quand même que c'était un risque de saper comme ça la crédibilité d'une banque centrale, Pierre-Yves.
03:10Quel est l'intérêt pour lui de mettre autant de pression sur Jérôme Pao ?
03:14Dans l'émission juste avant, une des explications qu'on a trouvées, vous l'avez dit vous-même, c'est la baisse du dollar de quasiment 10% maintenant face à un ensemble de devises depuis l'arrivée de Donald Trump au pouvoir en janvier dernier.
03:26Alors, c'est une explication. Je pense que c'est une explication qui inquiète énormément Scott Besant, qui fait tout, nous l'avons déjà dit au cours de nos derniers échanges,
03:40pour être le dernier adulte dans la pièce et expliquer au président Trump que l'indépendance de la politique monétaire américaine, c'est un joyau,
03:49qu'il est parfaitement dans l'intérêt bien compris de l'administration Trump de faire baisser les taux d'intérêt à long terme
03:59et de ne pas s'obséder avec les taux d'intérêt à court terme. Or, cette espèce de sabotage est en train de faire grimper les taux d'intérêt à long terme
04:08et que le dollar modé de réserve internationale, c'est un autre joyau que l'Amérique doit absolument préserver.
04:17Scott Besant n'est pas du tout dans la ligne maga, déglingo, il ne peut rien nous arriver, nous sommes les plus puissants.
04:25Bon, malgré tout, pour le moment, Scott Besant reste en place, il est là pour faire ce qu'il peut.
04:34Combien de couleuvres va-t-il devoir avaler avant de se poser des questions sur les raisons de sa présence en tant que secrétaire au Trésor ?
04:43Oui, Scott Besant qui répète régulièrement que la politique du dollar fort, strong dollar policy, est intacte du point de vue de l'administration Trump aujourd'hui.
04:53Donc, ça reste en tout cas une politique active et valable, y compris sous cette administration.
05:00Qu'en est-il de l'opinion publique après bientôt 100 premiers jours de Donald Trump ?
05:04Comment est-ce que les choses évoluent pour lui de ce point de vue-là, Pierre-Yves ?
05:07Alors, je trouve que c'est très inquiétant, c'est très inquiétant, non pas au premier degré, c'est-à-dire que ça n'est pas très inquiétant pour Donald Trump.
05:19Et du coup, c'est inquiétant parce que le recul de la popularité de Donald Trump et de ses politiques, qui est évident, et nous allons en parler,
05:27il n'est pas spectaculaire et il n'est pas encore large.
05:34C'est-à-dire que la politique extrêmement agressive de Donald Trump dans tous les domaines a achevé assez rapidement de convaincre les Européens que Donald Trump était quasiment un fou furieux,
05:47mais les Américains, eux, n'en sont pas encore convaincus.
05:50Du coup, je trouve cela très inquiétant parce que, précisément, si Wall Street n'arrive pas à convaincre Donald Trump qu'il faut qu'il arrête de faire n'importe quoi,
06:00peut-être que les sondages vont le faire et ça n'est toujours pas le cas.
06:03Je vous donne quelques exemples.
06:05Le taux d'approbation du travail général du président des États-Unis, on est tombé à 44% d'approbation, 51% critique.
06:1844%, je connais beaucoup de chefs d'État et de gouvernement qui seraient contents d'y être aujourd'hui.
06:26En ce qui concerne l'économie, 55% désapprouvent.
06:32Indiscutablement, il y a une inquiétude qui grandit.
06:34Enfin, il y a quand même encore 43% qui sont contents.
06:37Et là où je trouve que c'est vraiment inquiétant, c'est que, d'abord, la politique relative aux immigrants,
06:44aux fermetures de la frontière, aux expulsions muselées, alors ça, c'est très populaire.
06:48Alors ça, on est à plus de 53% de popularité pour cet aspect-là de la politique.
06:54Et puis, 57% des Américains sont déjà convaincus que soit la récession est là, soit qu'elle va arriver.
07:03Et ça, cette espèce de cycle négatif, cette espèce d'effet pervers risque de s'enclencher,
07:1349% seulement des Américains désapprouvent la politique de droit de douane.
07:19On pourrait penser que, dans le contexte de leur conviction que l'inflation va s'aggraver,
07:25que leur pouvoir d'achat va diminuer en raison de cette loi de douane, ils seraient critiqués.
07:28Eh bien non, 49% approuvent encore cette politique.
07:33Et la Chine reste, et de manière bipartite, tant chez les Républicains que chez les Démocrates,
07:38un ennemi épouvantable qu'une grande partie de l'opinion américaine souhaite voir punir.
07:4749% de désapprobation pour les droits de douane, seulement 35% approuvent.
07:52J'aurais pensé que la désapprobation des droits de douane serait déjà proche de 60%.
07:57Bon, entre le garde-fou des marchés et des marchés obligataires, notamment,
08:03qui arrivent quand même à faire réfléchir Donald Trump de temps à autre,
08:08qu'on fait la séance du 9 avril dernier, et le capital politique,
08:13alors qui n'est pas totalement intact, mais qui reste quand même important pour Trump,
08:17à travers les sondages que vous citez, comment est-ce qu'on sort de ça, Pierre-Yves ?
08:22Alors, d'un point de vue boursier, je vais commencer par dire des choses un peu désagréables.
08:28J'observe avec grand intérêt, j'écoute avec grand intérêt les intervenants qui viennent avant que je n'apparaisse sur la caméra.
08:36Et depuis un mois, je constate que tout le monde est d'accord pour dire,
08:40« Ça y est, c'est le moment venu pour l'Europe, l'Allemagne nous fait du déficit, tous nos problèmes sont résolus ».
08:47Bon, il est certain que le surinvestissement dans les portefeuilles des valeurs américaines
08:55et le sous-investissement des valeurs européennes dans ces mêmes portefeuilles à la fin d'année dernière
09:00est en train de se corriger et ça provoque un effondrement côté américain et une envolée européenne.
09:06Mais pour autant, les problèmes de l'Europe que nous évoquions souvent ensemble à la fin de l'année dernière,
09:12ils sont toujours là. La Russie est toujours en problème, le manque d'innovation technologique,
09:16le morcellement réglementaire, etc.
09:20Comment sort-on de cette mauvaise phase anti-américaine de sabotage ?
09:25Peut-être qu'une nuance dans l'appréciation de ce nirvana européen va amorcer les choses.
09:34Évidemment, on en sort en employant cette analogie.
09:39Quand on est dans un trou, la première chose à faire, c'est d'arrêter de creuser.
09:43Il faudrait que Donald Trump cesse d'insulter tout le monde
09:46et il pourrait commencer par arrêter d'insulter le patron de la Fed,
09:51ce qu'il fait pour des raisons purement électorales,
09:53parce qu'il anticipe une récession et qu'il va faire porter le chapeau de cette récession à Jérôme Parrault.
09:58Pour sortir de cette crise, on arrête donc d'insulter tout le monde et en particulier Jérôme Parrault.
10:05Il faut amorcer un dialogue avec la Chine
10:08qui débouchera peut-être sur un recul de ces barrières douanières
10:14qui atteignent des niveaux grotesques
10:16qui essentiellement mettent un terme au commerce entre les deux puissances.
10:19Il faut que les deux pays se parlent à nouveau
10:23et que peut-être, peut-être, le début d'un processus de désescalade s'engage.
10:29Il faudrait aussi que l'administration Trump nous annonce un accord avec un autre grand pays,
10:37le Royaume-Uni, le Japon peut-être, l'Inde, l'Union européenne, je n'ose y penser.
10:44Mais ça donnerait un signal important qu'il y a un modèle à suivre
10:48et que ce modèle pourrait être adopté pour d'autres pays.
10:53Et il faudrait que l'on arrête de parler de commerce.
10:56C'est difficile parce que c'est très important.
10:58Mais que l'on parle fiscalité et que les Républicains montrent
11:01qu'en dépit de leur très faible majorité à la Chambre des représentants,
11:05ils sont capables de relever le plafond de la dette,
11:06de tenir une grande partie, au moins, des promesses fiscales,
11:12des promesses budgétaires de Donald Trump,
11:15en particulier la reconduction des baisses d'impôts.
11:18Si le sujet de conversation redevient fiscal dans un sens de responsabilité,
11:25peut-être que cet extrême pessimisme qui frappe les marchés américains aujourd'hui
11:29tombera d'un cran.
11:31Des actifs américains qui sont vite devenus radioactifs
11:34pour la plupart des investisseurs de la planète.
11:37Et comme le disait effectivement Jamie Dimon,
11:39je crois que c'était son interview sur Fox le 8 avril,
11:42la veille du neuf et de la mise en place des tarifs
11:45et du grand retournement de politique économique 14 heures après par Donald Trump,
11:50il est temps de délivrer des deals.
11:51Il faut maintenant que les deals arrivent.
11:53Voilà, ça c'était la recommandation de Jamie Dimon il y a une dizaine de jours.
11:57Merci beaucoup Pierre-Yves.
11:58Pierre-Yves Dugas avec nous pour ce quart d'heure américain chaque semaine dans Smart Bourse.
12:02Vous le savez, c'est d'habitude le lundi,
12:05mais aujourd'hui mardi après ce long week-end de 4 jours pour les marchés européens
12:08à retrouver de toute façon en podcast sur toutes les plateformes,
12:13vos plateformes préférées et en replay pardon sur bismart.fr.
12:17Smart Bourse vous a été présenté par Silex.
12:27Conseils en investissement, produits structurés, gestion d'actifs, technologie.