Jeudi 10 avril 2025, retrouvez Pierre-Yves Dugua (Correspondant américain) dans SMART BOURSE, une émission présentée par Grégoire Favet.
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00:00Le dernier quart d'heure de Smartbourg chaque soir c'est le quart d'heure thématique et ce soir
00:08c'est un quart d'heure américain spécial en milieu de semaine parce qu'on s'adapte au calendrier de
00:13Donald Trump pour évoquer cette actualité avec Pierre-Yves Dugas bien sûr correspondant américain
00:18installé dans son bureau à Washington. Bonsoir Pierre-Yves, bonjour chez vous en l'occurrence
00:25merci beaucoup d'être avec nous. Qu'est-ce qui vous a marqué dans cette séance ou cette séquence hier ?
00:32J'ai compté il a fallu moins de 14 heures entre le moment où les tarifs dits réciproques sont entrés en application
00:38à minuit le 9 avril et le moment où Donald Trump a décidé de les retirer pour une période de 90 jours.
00:46On ne s'ennuie pas avec Donald Trump, grosse ambiance, grosse ambiance.
00:52Les pires ennemis du président Trump au Capitole, notamment le sénateur Schiff de Californie,
00:58prétend qu'il y a peut-être délit d'initié, enfin manipulation de marché puisque certains dans l'entourage du président Trump
01:07auraient pu être au courant de ce revirement qui avait été télégraphié par des déclarations de Donald Trump
01:13assez sibyllines lorsqu'il avait levé les bras alors qu'il était devant son bureau de la Maison Blanche,
01:18devant le bâtiment de la Maison Blanche, en disant c'est un bon moment pour devenir riche quelques heures après,
01:24effectivement, on aurait pu faire de jolis coups.
01:29Rappelez peut-être quand même ce qui est le plus évident pour les gens qui nous écoutent
01:33et qui ne sont pas nécessairement de gros institutionnels,
01:36mais quand les marchés rebondissent aussi, de manière aussi spectaculaire,
01:44ce n'est pas nécessairement l'indication qu'on approche de la fin, qu'on est en train d'attraper le bottom,
01:52c'est plutôt fréquemment l'indication de la nécessité de couverture d'urgence de la part de spéculateurs
02:03qui se retrouvent à découvert et qui doivent racheter donc des actions qu'ils ont promis de livrer
02:07à un prix qui ne va pas du tout être celui qu'ils anticipaient,
02:11d'où ces énormes coups d'accordéon, et ça se vérifie ce matin, le marché repique du nez.
02:18Les problèmes fondamentaux n'ont pas été réglés, d'abord parce qu'il n'y a pas de suspension
02:22de la guerre commerciale par Donald Trump, même pas à l'égard de l'Europe.
02:25Les sanctions sur l'acier, les sanctions sur l'automobile, bientôt des sanctions sur la pharmacie, semble-t-il,
02:33sont en place, même si c'est moins violent que ce que l'on avait craint,
02:38puisqu'on a retiré pour 90 jours les sanctions dites réciproques,
02:43la guerre commerciale continue, et la Chine, cela nous a été indiqué tout à l'heure par la Maison-Blanche,
02:51et frappé à hauteur de 145%. Maintenant, ça commence à faire.
02:57Alors, Donald Trump a changé d'avis, en tout cas pour le moment,
03:01parce que d'abord, on avait eu une semaine de massacre sur les marchés,
03:04et en particulier sur le marché obligataire.
03:07C'est très important de suivre le marché obligataire,
03:09parce que Scott Besson, le secrétaire au Trésor, a bien dit qu'un des objectifs prioritaires
03:14de l'administration Trump était de faire baisser les taux d'intérêt à long terme,
03:18et quand il remonte, alors que la situation économique se détériore, c'est doublement grave.
03:24Et ça, c'est un très très mauvais signal qu'a envoyé les marchés,
03:27et je pense que Scott Besson a su employer les mots avec une grande habilité
03:32pour convaincre Donald Trump de reculer un peu par rapport à ses certitudes.
03:36Je pense que le statut de Scott Besson comme secrétaire au Trésor,
03:40qui est le dernier adulte dans la pièce, qui est capable de parler
03:43et de faire entendre raison au président Trump, ce statut-là a grandi.
03:51D'autre part, forte pression des milieux d'affaires, pas simplement de Wall Street,
03:59par téléphone, à la télévision, dans les journaux.
04:02Une interview donnée sur Fox News dimanche par Jimmy Diamond,
04:07le patron de J.P. Morgan Chase, a été écouté avec attention par Donald Trump
04:13et semble-t-il a un petit peu ébranlé également le président Trump dans ses convictions.
04:17Jimmy Diamond disant, attention, cette guerre commerciale,
04:19il ne faut pas que ça dure très longtemps parce qu'on est en train de tout casser
04:22et que le scénario de la récession est maintenant probable.
04:25Et il disait explicitement, effectivement, sur Fox News, Fox Business,
04:31c'est maintenant qu'il faut annoncer des deals.
04:34C'est-à-dire que là, ça suffit.
04:35Il faut maintenant avancer, move on et annoncer des deals.
04:39Et c'était fait, effectivement, quelques heures ou quelques jours après
04:42par Pierre-Yves Dugas, par Donald Trump.
04:46Qu'est-ce qu'on en conclut ?
04:47Parce qu'encore une fois, moi, je suis toujours estomaqué de voir comment Trump peut...
04:51Alors, c'est assez rassurant d'une certaine manière.
04:54Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis.
04:55Il peut très vite rétro-pédaler.
04:58Mais dans le même temps, je n'ai toujours pas compris ce qu'il obtenait dans la négociation.
05:03Alors, ça a commencé très doucement avec la Colombie au tout début de son mandat.
05:07Il y a eu le Canada et le Mexique.
05:09Et puis là, il supprime tous les tarifs réciproques pour 75 pays,
05:15sans contrepartie, sans aucune concession obtenue.
05:19Bon, qu'est-ce que ça nous dit de sa fonction de réaction pour la suite ?
05:23Je pense que, contrairement à la légende qui essaye d'entretenir tous les gens qu'il emploie pour faire sa communication,
05:31il joue aux échecs sans penser au deuxième ou au troisième coup d'après.
05:35C'est beaucoup d'improvisation.
05:36Et c'est inquiétant.
05:40Mais parfois, ça a de bon côté.
05:42Parce que quand il constate qu'il fait une erreur, il est capable de faire un pas en arrière, si ça n'est pas trop tard.
05:46Les pays qui ont été les moins virulents publiquement, et probablement encore plus en privé dans les consultations,
05:59qui essayent d'amorcer des négociations, parce qu'il n'y a pas vraiment de négociations pour le moment.
06:03Il y a eu des consultations et des demandes de négociations qui ont été formulées, notamment par les Européens,
06:08qui ont envoyé une délégation à USTR, et le patron du USTR leur a dit « Vous savez, moi, je n'ai pas de mandat pour négocier avec vous.
06:17Quand j'en aurai un du président Trump, on pourra discuter ».
06:20Donc, les pays qui ont donné l'impression de se soumettre, comme le Mexique, comme le Japon,
06:30semble-t-il, semble-t-il, sont ceux qui ont le moins agacé le président Trump et qui sont susceptibles de mieux s'en sortir.
06:41Ceux qui ont très vite crié très fort, vous allez voir ce que vous allez voir,
06:45soit parce qu'il y a une forte tension entre le Canada et les États-Unis, entre M. Trudeau à l'époque, et Donald Trump,
06:53et maintenant que le Canada est en situation électorale, c'est très compliqué, bien sûr, pour le candidat du Parti libéral canadien.
07:01Ces pays-là qui sont montés au créneau « Nous allons produire des mesures de rétorsion »,
07:07ceux-là se font aligner, si j'ose dire.
07:11Je pense qu'à la fin du compte, les Britanniques, les Japonais ou les Mexicains ont de meilleures chances de s'en sortir
07:18dans des négociations qui finiront par s'engager que les pays qui ont voulu bomber du torse et dire
07:23« Vous allez voir, les Américains, nous aussi, nous avons de quoi nous défendre ».
07:27Et les Européens doivent être très prudents. Ils doivent être très prudents dans cette affaire parce que la négociation
07:33ne se fait pas simplement sur des thèmes commerciaux. Ne l'oublions pas, Donald Trump adore mélanger les genres
07:39et il a fortement l'intention d'utiliser des thèmes qui n'ont rien à voir avec les affaires commerciales
07:47comme l'aide à l'Ukraine, la présence militaire américaine en Europe pour dissuader une agressivité des Russes,
07:53comme des éléments importants de sa négociation sur les tarifs douaniers, sur la TVA et sur d'autres choses.
08:00Et là, les Européens sont vulnérables.
08:03Quel avenir pour Peter Navarro ? Parce que tout le monde enquête sur qui a été dans la pièce
08:10au moment où Donald Trump a pris la décision de la formule.
08:13Alors tout se couvre. Scott Bessin dit « Moi, j'y étais pas ».
08:16Je crois que Stephen Myron, pareil, dit « Non, non, moi, j'ai participé aux discussions,
08:20mais sur la décision finale, j'étais pas là ».
08:23C'était quelqu'un d'autre dans la pièce, donc tout le monde imagine que ça puisse être Peter Navarro
08:27qui s'est fait traiter de con en direct sur Aix par Elon Musk,
08:31qu'il surnomme désormais Peter Retardo.
08:34C'est le conseiller économique spécial de Donald Trump pour le commerce.
08:40Ma femme avait l'habitude de dire que ce n'est pas le couteau le mieux aiguisé dans le tiroir à la cuisine.
08:46Économiste de deuxième zone qui a inventé des noms, curieusement d'ailleurs utilisant les propres caractères
08:56de l'alphabet de son nom de famille pour se mettre en valeur, dont des ouvrages qui sont passés inaperçus.
09:04Un mercantile, un anti-libre-échangiste, un protectionniste qui affirme que tout pays
09:13qui a un surplus commercial avec les États-Unis, par définition, est un pays qui triche.
09:18Donc, M. Peter Navarro a un énorme avantage sur tous les autres conseillers commerciaux, économiques
09:27qui tournent autour de Donald Trump.
09:2820 mois de prison pour Donald Trump.
09:33Ça, c'est une forme de manifestation de loyauté qui est compensée par le président Trump.
09:39Elon Musk n'a peur de rien.
09:41Et c'est une bonne chose d'avoir à côté de soi quelqu'un qui est capable de vous dire des énormités
09:44et des choses qui ne vous feront pas plaisir.
09:46Peter Navarro, c'est le dernier qui fera ça parce qu'il veut surtout rester dans les bonnes grâces de Donald Trump.
09:53Elon Musk, lui, c'est l'autre parti du mouvement Maga.
09:57C'est celui qui est pur et dur capitaliste, libertarien, très agressif, très anti-fonctionnaire,
10:03mais pro-libre-échange, qui veut commercer avec la Chine,
10:07qui veut commercer avec les Européens sur une base de disparition complète des droits de douane.
10:12Ce sont deux pôles tout à fait opposés dans les conseils économiques que l'on peut prodiguer à Donald Trump.
10:19Et je pense que les Européens qui ont pris Elon Musk en grippe se trompent.
10:24Elon Musk est beaucoup plus favorable au vu qu'il défendrait les intérêts de l'Europe.
10:29Et Donald Trump a la capacité politique à tenir les deux bouts de la corde du mouvement Maga ?
10:38Il ne faut pas qu'on ait une récession.
10:41Dès que, si on a une contraction de l'économie, alors là, ça va devenir très très compliqué.
10:45J'ai été frappé de voir que le représentant Kennedy de Louisiane,
10:51qui, comme souvent les personnalités politiques de Louisiane a un langage très très imagé,
10:56était assez prudent sur l'efficacité de la méthode des droits de douane pour servir les intérêts des ouvriers américains.
11:04Il a dit « Oui, je pense qu'à la fin du compte, Donald Trump va obtenir ce qu'il veut en utilisant ses droits de douane. »
11:10Et à la fin du compte, le problème, c'est qu'on est tous morts.
11:14C'est une façon de soutenir cette démarche, mais quand même avec beaucoup de questionnements et beaucoup d'inquiétudes.
11:20Bon, avec des gros sujets qui arrivent quand même pour le Congrès,
11:23la question du plafond de la dette, la question de la réconciliation budgétaire, etc.
11:28Tous ces dossiers sont encore très chauds devant nous.
11:31Merci beaucoup, Pierre-Yves Dugas, avec nous pour ce quart d'heure américain spécial suite aux annonces de Donald Trump
11:39et à ce nouveau revirement, cette nouvelle capitulation de Donald Trump sur la vague de tarifs dits réciproques
11:45entrée en vigueur il y a à peine deux jours maintenant.
11:49Pierre-Yves Dugas, correspondant américain, qui était avec nous en visioconférence depuis Washington
11:53dans Smart Bourse sur Bsmart for Change.
12:01Smart Bourse vous a été présenté par Silex.
12:08Conseils en investissement, produits structurés, gestion d'actifs, technologie.