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Pour son interview d’actualité, Télématin reçoit Anne-Laure Gaudillat, écrivaine public.
Pour son interview d’actualité, Télématin reçoit Anne-Laure Gaudillat, écrivaine public.
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00:00Attends, que saviez-vous de ce métier d'écrivain public avant d'en devenir un ou une ?
00:07Il y a une image ou une petite mythologie autour du métier d'écrivain public.
00:12J'en avais les éléments fondamentaux qui étaient, il faut aimer écrire,
00:17il faut s'intéresser aux gens,
00:19mais j'ai quand même suivi une formation pendant un an à la Sorbonne Nouvelle
00:24pour pouvoir acquérir les techniques et les bons réflexes à avoir dans ce métier.
00:29C'est l'un des plus anciens métiers du monde, il remonte je crois au Moyen-Âge
00:34et pour le coup j'ai l'impression que c'est un métier qui n'a pas changé,
00:37c'est-à-dire qu'on aide, on écrit pour les autres.
00:41On continue à écrire pour les autres.
00:42Alors je ne prends pas mon pupitre portatif et je ne me mets pas dans la rue,
00:46sur la place devant l'église, non loin de là,
00:51mais c'est vrai que je tiens des permanences actuellement
00:55dans la mairie de ma commune et au centre social
00:58où les gens viennent sur rendez-vous pour que je leur rédige des courriers.
01:03Ça c'est une partie de mes activités, mais j'en ai d'autres
01:05parce que le mot écrivain public, il recouvre plein de métiers différents.
01:09On va en parler, mais comment êtes-vous devenue écrivain public ?
01:12Je crois que c'est une reconversion professionnelle.
01:15Absolument, j'étais arrivée à un stade de ma vie
01:17où j'ai souhaité trouver un peu plus de sens à ce que je faisais avant
01:22et je me suis dit mais qu'est-ce que je sais faire, qu'est-ce que je peux faire,
01:25qu'est-ce que j'aime faire ?
01:27Et je me suis dit je sais écrire, c'est sûr, j'aime les gens,
01:32je peux mettre ma capacité à écrire à leur service.
01:37Donc j'écris des mots sur demande, c'est le nom de ma petite entreprise.
01:40Alors vous écrivez, vous aidez à la rédaction de courriers administratifs ?
01:44Par exemple.
01:45Et quoi d'autre ? Racontez-nous ce que vous faites.
01:47Alors, quand j'accompagne les gens avec des courriers,
01:51il y a effectivement pas mal de démarches administratives,
01:54mais il peut y avoir d'autres sujets qui ont besoin d'être mis par écrit
01:59ou par écrit électronique.
02:01Beaucoup de gens sont un peu démunis quand il faut taper un message
02:04dans la boîte contact d'une plateforme.
02:06Ça, c'est une vraie question de société à l'heure actuelle.
02:10Mais par ailleurs, j'aide aussi les gens à être capables d'écrire,
02:13donc j'anime des ateliers d'écriture
02:15pour des gens qui ont envie de raconter leur vie,
02:19de témoigner, de transmettre,
02:22pour des gens qui ont eu des moments difficiles dans leur vie,
02:26des ombres, et qui se sentent bien de pouvoir les mettre par écrit,
02:30puis pour des gens qui ont envie d'écrire par plaisir et qui se disent
02:33« je sais pas, j'ose pas » et qui ont besoin du groupe pour les porter.
02:37Et qui sont les personnes qui viennent vous voir ?
02:40Est-ce qu'on retrouve toutes les générations ?
02:44Alors, il faut du temps,
02:46mais j'ai quand même essentiellement des personnes un peu âgées
02:50ou qui ont la flexibilité de leur agenda.
02:52Enfin, j'ai aussi des jeunes personnes.
02:54Là, j'ai une super jeune maman avec deux enfants
02:58qui a envie de raconter des histoires.
03:00D'accord, et donc elle vient chercher une manière de rédiger auprès de vous.
03:04Quelles sont les qualités pour être un bon écrivain public ?
03:07Alors, c'est ce que je vous disais.
03:08Il faut d'abord bien maîtriser les techniques rédactionnelles,
03:13savoir écrire dans différents registres et à différents niveaux de langage.
03:18Mais ça ne suffit pas, il faut savoir s'intéresser aux gens,
03:23il faut savoir les mettre en confiance.
03:25Parce que c'est quand ils sont en confiance
03:28qu'ils vont vraiment exprimer ce qu'ils ont envie de voir dans l'écrit, sur le papier.
03:34Parce que vous êtes aussi biographe familiale,
03:38donc là, ça veut dire que c'est vous qui rédigez.
03:40Alors, en prenant, j'imagine, le langage de la personne,
03:43qu'il faut être un peu psy, on devient un peu confident aussi.
03:49Tout à fait, c'est toujours des beaux moments et des belles rencontres.
03:52Il faut respecter la personne, il faut respecter sa personnalité,
03:59son état d'esprit et arriver à le transmettre par l'écrit.
04:04Ça veut dire qu'il ne faut pas seulement transcrire ce qu'il verbalise,
04:08mais il faut aussi l'observer, le sentir,
04:11parce qu'il y a plein de communications non verbales qui passent dans ses récits.
04:16La même phrase dite avec un grand sourire,
04:18ce n'est pas la même chose que la phrase dite avec une voix un peu tremblante
04:22ou avec des larmes au bord des yeux.
04:25Donc, il faut être attentif à ce genre de choses.
04:27Est-ce qu'il y a des histoires, des rencontres qui vous ont particulièrement marquées,
04:31qui vous reviennent à l'esprit ?
04:32Oui, il y a eu des moments très forts dans les récits de vie que j'ai pu faire.
04:38J'ai deux souvenirs particuliers.
04:40J'ai le souvenir d'un cadre dirigeant qui voulait raconter
04:44des moments particuliers de sa vie professionnelle à ses petits-enfants
04:48et qui racontait un coup d'état dans les années 70 dans lequel il avait été pris.
04:53Il avait choisi de faire ça sur un mode assez enlevé, avec un humour un peu british.
04:58Puis, au moment où il décrit le choc et l'impression de voir une personne vivante
05:02et deux minutes plus tard, la même personne sur le sol, exécutée,
05:06je l'ai vu s'agiter sur sa chaise, bouger les jambes, prendre les accoudoirs.
05:13Il y avait une tension à ce moment-là qui ne transparaissait pas du tout dans ses paroles.
05:18Et je me suis dit, là, il y a quelque chose et il va falloir que je le fasse ressortir dans l'écrit.
05:24Et puis, j'ai un souvenir très fort aussi d'une commande un peu particulière.
05:30J'ai travaillé avec une famille qui avait enregistré, il y a 35 ans,
05:34les récits du grand-père qui avait été officier dans l'armée française en 1939
05:42et qui racontait la montée des périls, ce qu'il avait fait pendant la guerre,
05:46son emprisonnement, toutes ses tentatives d'évasion.
05:49C'était sur des cassettes magnétiques.
05:51J'ai dû m'acheter un magnétophone pour pouvoir les écouter.
05:54Et puis, c'était quelque chose d'assez extraordinaire d'entendre la voix de cette personne disparue
06:01et puis de pouvoir lui donner un prolongement, un écho,
06:06quelque chose qui allait permettre de continuer à vivre, en fait.
06:09– Merci beaucoup Anne-Laure Gaudière de nous avoir fait partager votre passion
06:12et mieux fait découvrir ce formidable métier d'écrivain public.
06:17– Passion et le mot, je dois dire.
06:18– Merci beaucoup.