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00:00A la une également le procès de l'attentat de la basilique de Nice qui s'ouvre demain à Paris devant la cour d'assises spécialement composée.
00:12Brahim Aouissaoui, un Tunisien âgé aujourd'hui de 25 ans, sera dans le box des accusés.
00:17Opéré à deux reprises, placé en réanimation, il affirme avoir perdu la mémoire, mais pour l'accusation et les partis civils, son acte a été prémédité.
00:25En tout cas, il était bienvenu en France, passant par l'Italie pour tuer, suite notamment à l'appel de plusieurs organisations terroristes à frapper la France,
00:34après la republication par Charlie Hebdo des caricatures du prophète Mahomet le jour de l'ouverture du procès de l'attentat du 7 janvier.
00:41Et c'est donc ainsi que le 29 octobre 2020, la basilique de Nice devenait le théâtre d'un acte autonome sanglant.
00:49Geoffrey de Villers et le mari de Nadine de Villers, une fidèle de 60 ans, assassinée avec une mère de famille franco-brésilienne et le sacristin,
00:57il a accepté de se confier au correspondant à Nice d'Europe 1. Frédéric Michel, écoutez cet entretien.
01:03Geoffrey de Villers, bonjour.
01:04Bonjour.
01:05Vous êtes l'époux de Nadine de Villers, assassinée avec deux autres personnes dans l'attentat de la basilique Notre-Dame à Nice.
01:13L'accusé est dans le box. Le procès qui s'ouvre demain est une étape importante.
01:19C'est important, oui. Je pense malheureusement de lui, il n'y a pas grand-chose à attendre.
01:24C'est quelqu'un qui utilisait l'amnésie pour ne pas avouer son crime.
01:29Mais le procès en lui-même est important. C'est une étape cruciale.
01:34C'est psychologiquement, si c'est important, de le voir, je pense, de lui parler.
01:41Je ne sais pas s'il va me répondre, mais moi, je lui parlerai des choses avec lesquelles j'ai l'air d'y dire.
01:46Toutes les familles endeuillées par un attentat n'ont pas pu justement s'adresser à l'accusé.
01:53Vous me direz, c'est quelque part une chance ?
01:56Une chance, oui, parce qu'effectivement, au moins, le parquet va faire son travail à ce niveau-là.
02:03On aurait plus de chances si ce n'était pas quelqu'un de lâche, excusez-moi le terme.
02:10Donc bon, on va voir comment ça va se passer.
02:13Justement, dans le meilleur des cas, qu'est-ce que vous attendez ?
02:16Au moins qu'on essaye de savoir pourquoi. Comprendre.
02:19Bien sûr, on ne lui pardonnera jamais, mais on peut essayer de le comprendre en étant très optimiste.
02:24Il y a un périple assez surprenant. Il part de Tunisie, il traverse la Méditerranée.
02:30Quelques jours après, seulement, il se retrouve à Nice.
02:33Comme s'il n'était venu que pour ça ?
02:35Je ne sais pas. On peut appeler ça peut-être le destin aussi.
02:39Parce qu'apparemment, peut-être qu'il voulait aller sur Paris.
02:43C'est vraiment, malheureusement, au mauvais moment, au mauvais lieu.
02:47Aujourd'hui, vous le faites aussi pour votre épouse.
02:49Tout à fait, oui, tout à fait. C'est un devoir de mémoire.
02:54C'est important qu'on n'oublie pas nos trois familles, Vincent, Simone et Nadine.
03:01C'était quelqu'un qui était rayonnant, qui aimait beaucoup les gens.
03:04C'est le destin qui a voulu qu'elle soit là au mauvais moment.
03:08Parce qu'on était tôt le matin et elle avait l'habitude de se rendre à la basilique.
03:13Vous habitez le quartier ?
03:14Oui, tout à fait. On est à 100 mètres de la basilique.
03:17Donc oui, régulièrement, elle y allait.
03:19Elle y allait ce matin-là, elle avait rendez-vous pour des examens médicaux.
03:23Donc, ce n'est pas étonnant qu'elle y soit passée.
03:25Elle avait cette petite habitude.
03:27Oui, tout à fait. Un petit cierge, une petite prière. C'est son espoir.
03:31Comment vous avez appris ce qui s'est passé ? Parce que vous habitez à deux parts.
03:36Tout simplement, la télé, le midi.
03:39Elle était partie pour ses examens.
03:41Moi, à cette époque-là, je travaillais justement sur la biographie qu'elle était en train d'écrire.
03:46Le midi, machinalement, j'allais à la télé pour faire la pause, pour l'attendre à manger.
03:51J'ai vu malheureusement ce drame qui s'était passé à la basilique.
03:56Tout de suite, comme j'avais essayé de la joindre auparavant, c'est la panique.
04:02J'ai essayé de la rappeler.
04:03J'ai appelé toutes nos autorités, de la police, les hôpitaux.
04:08Malheureusement, à ce moment-là, aucune information.
04:11Il a fallu que j'attende 14 heures.
04:12Comme elle avait des rendez-vous médicaux, j'ai appelé le cabinet qui devait la voir à 9 heures.
04:18Ils m'ont dit qu'elle n'est jamais passée.
04:20On n'imagine pas toujours forcément le pire.
04:22Peut-être qu'elle est blessée.
04:24Geoffrey De Villers, on constate aussi à la lecture du dossier que les autorités tunisiennes,
04:29malgré plusieurs demandes de coopération, n'ont pas vraiment joué le jeu.
04:33Tout à fait, je trouve ça dommage.
04:35Ils auraient peut-être appris des choses.
04:39On aurait peut-être compris certaines choses.
04:43Une radicalisation en enrôlement, c'est ça ?
04:45Tout à fait, peut-être.
04:46Peut-être d'autres personnes ?
04:47Peut-être.
04:48Pour l'instant, malheureusement, vu qu'on se heurte à un mur, on n'aura aucun élément.
04:53Vous avez le sentiment qu'on veut peut-être cacher d'autres protagonistes ?
04:57Je ne sais pas. Malheureusement, c'est compliqué.
05:00Et ça, ça ajoute à la souffrance ?
05:02Tout à fait, parce que j'estime qu'ils sont aussi un petit peu responsables de leurs concitoyens.
05:10Et puis, d'être ouvert d'esprit, d'être une coopération internationale, c'est utile pour tout le monde.
05:17Vous me disiez que ce procès, ça va permettre évidemment de ne pas tourner la page, parce qu'on ne tourne pas.
05:23Non, on n'oublie pas. On ne peut pas oublier ce genre de choses-là.
05:26Et c'est une étape cruciale.
05:28Pour la reconstruction ?
05:29Tout à fait.
05:31Vous avez vécu, malheureusement, le pire, et on le voit dans un monde totalement fou en ce moment.
05:38Il y a eu plusieurs autres attentats depuis. C'est toujours, pour vous, aussi une épreuve ?
05:42C'est vrai que, malheureusement, cette haine, je pense qu'elle est une épreuve.
05:46C'est pour ça que, bon, malgré tout ce qu'il a fait,
05:50j'estime qu'il fait plus pitié, vraiment, que suivre cette haine.
05:56Ça serait vraiment se rabaisser à ce niveau-là.
06:00On ne peut pas lui pardonner, bien sûr.
06:01C'est vrai que, quand on voit cette haine partout dans le monde,
06:05je n'ai pas envie de devenir comme lui, tout simplement.
06:08On voit ce qui se passe actuellement dans le monde,
06:12cette radicalisation sur tout, qu'elle soit n'importe laquelle, d'ailleurs.
06:16Pas que l'islamisme, on la voit partout maintenant.
06:20Nadine, elle est croyante, elle croyait aussi en Dieu.
06:23Oui, tout à fait. Elle croyait beaucoup dans l'humanité.
06:27J'essaye d'y croire aussi.
06:28Je vous ferai deviner, merci.
06:30Merci à vous.
06:31Et merci à Frédéric Michel, correspondant d'Europe 1 à Nice, pour cet entretien.

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