Le ministre de la Justice réunit ce lundi à Paris l'ensemble des procureurs généraux et des procureurs de la République pour mettre en œuvre une politique pénale adaptée au trafic de drogue. Michaël Delafosse, maire PS de Montpellier, une ville particulièrement touchée, est l'invité de 7h50. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50/l-invite-de-7h50-du-lundi-27-janvier-2025-1637670
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00:00« Il est 7h50, Sonia De Villers, votre invitée, le maire socialiste de Montpellier. »
00:06Lutte contre le trafic de drogue.
00:09Le ministre de la Justice réunit aujourd'hui à Paris l'ensemble des procureurs généraux
00:13et des procureurs de la République pour mettre en œuvre une politique pénale adaptée.
00:19Une proposition de loi arrive demain au Sénat sur le sujet, nous on en parle ce matin avec
00:24un maire.
00:25Un maire sur le terrain.
00:26Bonjour, Michael Delafosse.
00:27Bonjour.
00:28D'abord, dans quelle mesure estimez-vous que votre ville, Montpellier, est touchée
00:32par le narcotrafic ?
00:33Le narcotrafic, c'est une réalité à Montpellier comme dans d'autres villes.
00:37On voit des endroits où la liberté d'aller et venir est menacée par des jeunes qu'on
00:43nomme des « chouffeurs », des « mules » qui occupent l'espace public et qui vendent
00:49de la drogue.
00:50On voit la réalité du blanchiment de la drogue.
00:54Quand je suis devenu maire, en 2020, il y avait 200 épiceries de nuit à Montpellier,
01:00et pas pour servir la vie étudiante, mais pour blanchir l'argent mal acquis par la
01:09drogue.
01:10Et donc, aujourd'hui, il faut une mobilisation parce que le narcotrafic, c'est une réalité
01:16qui déstabilise la cohésion de la société et la vie dans nos villes.
01:21Justement, je reviens sur ces épiceries de nuit, parce que vous en faites une de vos
01:25priorités.
01:26Vous réclamez des moyens légaux pour lutter contre ce qu'on appelle les commerces de
01:30façade.
01:31Il y a les épiceries de nuit, mais il peut y avoir aussi les barbershops, les fast-foods,
01:35les kebabs…
01:36Les ongleries, etc.
01:37Oui, il faut très clairement lutter parce que…
01:40Ce sont des commerces qui servent à blanchir de l'argent.
01:42Exactement.
01:43Parfois, ces réseaux très puissants du narcotrafic intimident des commerçants pour qu'ils cèdent
01:49leur bail commercial, et hop, on paye en petites coupures, on blanchit l'argent.
01:54Donc, nous, à Montpellier, on pilonne.
01:57C'est-à-dire ?
01:58On pilonne.
01:59C'est-à-dire que le maire que je suis prend des arrêtés, de fermeture à des horaires
02:04et il y a des infractions, ou l'interdiction de la vente de protoxyde d'azote.
02:08Et quand notre police municipale ou la police nationale constate des infractions, eh bien,
02:15nous pouvons obtenir une fermeture administrative.
02:18Bref, on ne fait pas l'autruche.
02:20Vous rachetez des bottes également ?
02:21Et effectivement, rue de la Sorbe, à Saint-Martin, nous rachetons les bouts commerciaux pour
02:29reprendre la main et ensuite procéder à des destructions de ces cellules commerciales
02:34qui souvent ont détruit la qualité de vie dans un quartier.
02:38Et donc, il ne faut pas lâcher.
02:40Parce que la proposition de loi qui arrive au Sénat, justement, elle vient d'être
02:43renforcée.
02:44D'une mesure qui va exactement dans votre sens.
02:47C'est-à-dire la possibilité au niveau local pour la préfecture et pour les maires
02:50de fermer ces commerces.
02:52Je me réjouis que la proposition des sénateurs Durin et Blanc, LR et socialiste, ait été
02:58retenue.
02:59Je souhaite même qu'on aille plus loin.
03:00Qu'on donne aux maires la possibilité d'autoriser ou pas l'ouverture de commerces.
03:05Sur quels critères ?
03:06Je pense que pour connaître le type d'activité qui s'y déroule.
03:10Parce que quand dans une rue ou dans un espace, vous n'avez que des épiceries de nuit…
03:15Oui mais sur quels critères, monsieur le maire ? Vous allez autoriser un commerçant
03:18à ouvrir une échoppe ou non ?
03:20Oui mais sur le type d'activité.
03:23Est-ce qu'on garantit bien la diversité commerciale dans un quartier ? Quand vous
03:27avez un linéaire commercial qui n'est devenu que des épiceries de nuit, certes le législateur
03:31va nous donner des pouvoirs, mais c'est à posteriori.
03:35Et aujourd'hui, l'ampleur du phénomène est très dure.
03:38Je le dis, cette réalité-là, elle est puissante.
03:42Il y a près de 5 milliards d'argent sale qui circule.
03:45Ils cherchent des chemins pour blanchir.
03:48De la même manière, si vous me permettez, moi je suis très clair, à Montpellier, quand
03:53quelqu'un possède un logement social et pratique du deal, il est expulsé de son logement
03:59social.
04:00Expulsé.
04:01Parce que nous ne pouvons pas accepter que les résidents des autres locataires vivent
04:07dans la peur.
04:08Et donc c'est une mobilisation dansante que nous devons conduire face à ce phénomène
04:14qui fragilise la société.
04:16Nickel de la fausse.
04:17Dans votre ville de Montpellier, autre sujet très brûlant ces derniers jours, un influenceur
04:22algérien très suivi sur TikTok et je crois dans la vie agent de nettoyage dans une salle
04:27de sport qui avait pour pseudonyme « Doualem » qui appelait à la violence envers des opposants
04:32au régime algérien.
04:33C'est vous, Nickel de la fausse, qui avez procédé à un signalement auprès de la
04:37justice.
04:38Il a été expulsé.
04:39Seulement l'Algérie n'a pas voulu le laisser pénétrer sur son territoire.
04:42Il a été renvoyé en France et placé en rétention administrative.
04:45Quelle leçon tirez-vous de cet épisode ?
04:47D'abord, un message très clair a été envoyé.
04:50On ne peut pas inciter en toute impunité à la haine sur un réseau social TikTok très
04:57fréquenté par les jeunes.
04:58Moi, je suis professeur d'histoire-géographie, encore un petit peu avec bonheur, et je vois
05:02l'influence de ce réseau.
05:04Donc moi, j'ai fait un article 40 du code de procédure pénale et ce monsieur a été
05:09interpellé.
05:10Et il y a une décision par le ministre de l'Intérieur, et je l'ai soutenu, de renvoi
05:14vers son pays.
05:15Parce qu'il y a plein de gens qui possèdent des titres de séjour et qui font des efforts
05:20incroyables pour s'intégrer, qui travaillent, qui veulent la réussite de leurs enfants.
05:24Et puis, il y a des gens, ils incitent à la haine, ils déstabilisent.
05:28La France est un pays d'hospitalité, mais il faut en respecter les règles.
05:33Alors maintenant, le gouvernement algérien nous a renvoyé cet influenceur.
05:39Et de l'autre côté, un écrivain est dans une cellule en Algérie.
05:43Boalem Sansal, dont j'espère la libération comme toute défenseur des droits de l'homme.
05:52Donc là maintenant, il doit y avoir des échanges au niveau diplomatique, ça ne relève
05:57pas de moi, mais je le dis, quand on est en France, quand on est résident, il y a tellement
06:03de gens.
06:04La France est un pays d'hospitalité, et bien on en respecte les règles, on en respecte
06:08les valeurs.
06:09Et donc, ce monsieur, moi j'ai fait un article, parce que nous devons être intransigeants
06:14face aux appels à la haine, face au racisme, face à l'antisémitisme.
06:17Alors, une question politique importante, Michael Delafosse, vous êtes l'une des figures
06:22de la gauche du parti socialiste les plus critiques vis-à-vis de la France insoumise.
06:26Or, il y a des villes que la France insoumise vise en particulier, Marseille et Montpellier,
06:32où il a déjà été annoncé que la LFI réfléchissait à des listes contre les maires
06:36sortant de gauche.
06:38Les municipales se rapprochent, ça va arriver très vite.
06:40Est-ce que la menace se rapproche ?
06:42Non mais, le débat d'idées doit avoir lieu.
06:45D'ailleurs, la gauche devrait mettre son énergie à les conquérir des villes de droite
06:48ou d'extrême droite.
06:49Dans le sud de la France, malheureusement, l'extrême droite est en position de force.
06:53Quant à Montpellier, moi je suis un maire de gauche et très fier d'avoir, avec l'équipe
06:58municipale, fait la gratuité des transports en commun depuis un an, pour 500 000 habitants,
07:04conciliant la question du pouvoir d'achat et celle du climat.
07:07Et j'espère qu'au municipal de 2026, ce sera ce type d'idées qu'on va défendre.
07:13Il y aura un nouveau débat, puisque la gratuité, elle est discutée, elle est contestée parfois
07:19parce qu'on se prive de très grosses recettes, à une époque où les collectivités territoriales
07:24pouvaient leur budger.
07:25Mais à l'heure de la crise climatique, à l'heure des enjeux de pouvoir d'achat et de dignité,
07:28c'est une mesure qui est extrêmement forte.
07:31Et puis, disons les choses, moi j'appartiens à une gauche qui revendique une fidélité
07:37à ses combats.
07:38La lutte contre le racisme et l'antisémitisme.
07:40Et quand des concitoyens, parce que juifs en France, meurent, la gauche ne doit jamais
07:45tergiverser là-dessus.
07:47Clarté.
07:48J'appartiens à une gauche qui ne renie pas ses combats en faveur de la laïcité.
07:53Et quand on doit défendre la neutralité de l'école publique et les conditions de travail
07:58des enseignants pour, dans les salles de classe, défendre la laïcité, on ne vient pas expliquer
08:02que quand, enfin, on se décide à interdire la baïa, il s'agirait d'une police du vêtement.
08:08Donc la question, ce n'est pas ce que pensent les autres, c'est la clarté des positions
08:13que nous défendons.
08:14Et je crois que les questions républicaines sont essentielles, comme allier la question
08:19écologique à la question sociale, à l'image de la gratuité des transports en commun.