• l’année dernière
Grégory Joron, secrétaire général du syndicat Unité SGP police-FO, revient sur la semaine de violences un peu partout en France qui a suivi la mort de Nahel à Nanterre. Il évoque une "haine anti-flics", et la perte de confiance des policiers envers Emmanuel Macron.

Retrouvez les entretiens de 7h50 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50

Category

🗞
News
Transcription
00:00 Il est 7h48, Léa Salamé, votre invitée ce matin, et le secrétaire général du syndicat
00:04 Unité SGP Police EFFO.
00:07 Et bonjour Grégory Joron.
00:08 Bonjour.
00:09 Merci d'être avec nous ce matin.
00:10 Deuxième nuit plus calme après la semaine d'émeute qui a suivi la mort de Naël lors
00:13 d'un contrôle routier.
00:14 Il n'y a eu que 17 interpellations en région parisienne cette nuit, contre 315 par exemple
00:19 dans la nuit de samedi à dimanche.
00:20 Sentez-vous sur le terrain la décrue des violences ? Diriez-vous qu'on va vers un
00:25 retour à la normale ?
00:26 Oui, nous sommes tout assez clairs et heureusement, je pense qu'on n'aurait pas pu tenir malheureusement
00:31 ce qu'on a pu voir ces derniers jours avec, je le rappelle, un engagement extrêmement
00:36 fort, 45 000 agents et surtout beaucoup de blessés.
00:39 On compte quand même 730 collègues blessés par rapport à ces nuits d'émeute et aussi
00:44 une crainte qui devenait palpable puisqu'on a fait face quand même, et mes collègues
00:48 ont fait face sur le terrain, réellement à des actes inqualifiables.
00:52 Vous étiez ancien CRS en 2005, vous étiez engagé sur le terrain pendant les émeutes
00:57 de 2005.
00:58 Y a-t-il une différence avec ce qui s'est passé il y a 18 ans ? Est-ce que vous voyez
01:01 quelque chose de différent ? Vous allez me répondre les réseaux sociaux, mais comment
01:05 vous la voyez la différence ?
01:07 C'est assez fondamental puisqu'il y a vraiment une différence d'organisation.
01:10 En fait, 2005 c'était l'expression d'une colère suite à la mort des deux jeunes dans
01:18 le 93, je vais pas dire de bêtises, et forcément un embrasement des quartiers.
01:23 Mais là on a quelque chose qui était très organisé, qu'elle soit lors d'attaques
01:28 de commissariats ou de police, de gendarmerie ou de police municipale, il y en a eu des
01:32 centaines attaquées, c'est une réalité.
01:33 On voyait que c'était très organisé, mais aussi de pillages où pour le coup il y avait
01:37 des vrais checkpoints où les gens étaient interdits de passer pendant qu'on faisait
01:40 un bureau de tabac.
01:41 Donc clairement tout ça était extrêmement bien organisé, extrêmement bien coordonné.
01:46 C'est la grosse différence avec 2005, ce qui a d'ailleurs posé beaucoup de problèmes
01:49 aux policiers.
01:50 Et puis il y a la colère et la haine de la police que vous entendez tous les jours.
01:53 Le sociologue au CNRS Olivier Galland dit qu'il y a chez les émeutiers, comme en 2005,
01:57 une banalisation de la haine de la police.
01:59 Vous la ressentez cette haine à l'issue de cette semaine de violences et d'émeutes.
02:05 Vous nous avez dit en préparant l'interview que ce qui remonte du terrain c'est le dégoût.
02:10 Oui, déjà la haine malheureusement anti-flics, elle date pas de la semaine dernière.
02:14 Elle est depuis quelques années entretenue en plus.
02:18 Moi je le dis très clairement, je fais du syndicalisme, pas de politique, j'ai l'habitude
02:21 de le lire et c'est une réalité.
02:22 Pour autant on a des personnalités politiques qui ont une parole publique et qui au travers
02:27 de cette parole publique entraînent justement un glissement vers la haine anti-flics banalisée.
02:33 On a un exemple terrible hier dans le 93 à Mitry où un collègue est avec sa fille de
02:38 deux ans et demi.
02:39 Il y a un problème de manœuvre dans la rue pour un véhicule.
02:42 Il explique juste qu'il est policier et qu'il veut pas de problème.
02:44 Les trois personnes descendent du véhicule, le passent à tabac devant sa fille de deux
02:47 ans et demi et le laissent inconscient sur le trottoir parce qu'il a décliné son identité.
02:51 Donc vous mettez en cause certains politiques et certaines opérations de sa compagnie ?
02:55 Clairement oui, clairement oui.
02:56 Je pense qu'il participe vraiment à ce que les flics aujourd'hui soient des cibles.
02:59 D'ailleurs on est régulièrement menacé jusque dans nos foyers.
03:04 Emmanuel Macron était hier en visite nocturne dans une caserne parisienne pour remercier
03:08 les forces de l'ordre.
03:09 Est-ce que ce sera suffisant parce que vous avez tous exprimé votre malaise après sa
03:14 réaction après la mort de Nahel quand il a dit que les faits étaient inexcusables
03:18 et injustifiables ?
03:19 Je pense pas que ce soit suffisant.
03:21 Je pense même clairement qu'on repart dans une phase où malheureusement les policiers
03:25 aujourd'hui ont perdu totalement confiance dans le président.
03:30 A ce point ?
03:31 Oui, clairement.
03:32 C'est ce qui remonte du terrain de tout ce qu'on nous renvoie comme message, de tout
03:34 ce qui est ressenti par nos collègues, puisque au moment où un des nôtres était, on en
03:40 parlera j'imagine après, mais était entendu, placé en garde à vue, en attente justement
03:45 probablement d'une mise en examen, la parole présidentielle elle est quand même il me
03:48 semble extrêmement importante dans notre pays et LPS forcément c'est le premier d'entre
03:52 nous.
03:53 Quand il dit que c'est inacceptable et inexcusable avant même de dire que la justice va faire
03:57 son travail, j'estime de manière assez évidente qu'il donne une couleur au dossier qui est
04:02 insupportable.
04:03 C'est-à-dire que le président de la République a comme tout le monde vu les images, Grégory
04:06 Joron, de ce jeune homme de 17 ans qui a été tué à bout portant dans une voiture lors
04:10 d'un contrôle routier.
04:11 Très vite la version des policiers relayée par la préfecture c'était de dire que la
04:15 voiture avait foncé sur les motards.
04:17 Version qui a été contredite quelques minutes plus tard par cette vidéo, par ces images
04:21 où on voit donc que ce n'était pas le cas, que le policier tenait Naël en joue avant
04:24 de tirer à bout portant.
04:25 Le passager, je ne sais pas si vous avez vu le Parisien ce matin, il y a un passager qui
04:28 était le troisième passager dans la voiture, raconte que l'un des policiers a dit "tu
04:33 vas te prendre une balle dans la tête".
04:35 Raconte aussi que Naël aurait pris trois coups avant le tir et les derniers mots de
04:39 Naël avant de mourir auraient été "c'est un fou, il a tiré".
04:42 Comprenez-vous quand même que ces images ont choqué beaucoup de monde, y compris le
04:47 président ?
04:48 Oui, mais évidemment que je le comprends.
04:49 Ce que je comprends moins c'est que, encore une fois, quand on est président de la République
04:54 ou homme public ou homme politique ou journaliste ou policier, ce qui me dérange un peu plus
05:00 c'est que chacun y aille de son avis, de son analyse sur huit secondes de vidéo, de
05:04 "peut-être que c'était ça", de témoignages qui valent ce qu'ils valent alors qu'en
05:09 fait il n'y a rien d'écrit, notamment pour la version des policiers.
05:11 Parce qu'il y a eu un avocat, j'ai entendu qu'il s'exprimait en disant qu'il y avait
05:15 un faux en écriture sauf que jamais rien n'a été écrit.
05:18 Donc en fait on est réellement, moi c'est ce qui me dérange et c'est ce que j'ai dénoncé,
05:22 c'est ce à quoi je n'ai pas voulu participer, c'est-à-dire à donner mon avis sur une affaire.
05:26 Je ne suis pas magistrat, je ne suis pas le juge, instructeur, je suis juste un policier
05:30 qui regarde ça de l'autre côté.
05:31 Alors nous parlons, la vidéo est encore en train d'être examinée par les GPN, par
05:34 la police des polices.
05:35 Et la bande sonore aussi.
05:36 Qu'est-ce qui se serait passé s'il n'y avait pas eu cette vidéo ? Qu'est-ce qui
05:39 se serait passé ? On s'en serait tenu à la version du policier.
05:42 La voiture nous a foncé dessus et voilà, il n'aurait pas été inquiété.
05:45 Je vais vous donner un exemple où il n'y a pas eu de vidéo, notamment à Angoulême
05:49 une semaine après, où un de nos collègues a tiré sur une mise en danger.
05:53 J'évite de faire l'amalgame entre refus d'obtempérer et action de tir, parce qu'heureusement
05:57 qu'à chaque fois qu'il n'y a pas un refus d'obtempérer, il n'y a pas un tir policier.
06:01 Donc mon collègue à Angoulême s'est senti en danger, il a fait action de tir et malheureusement
06:07 un jeune de 19 ans est décédé.
06:08 Il n'y avait pas de vidéo.
06:11 La version du policier semble-t-il très claire ? Il a été auditionné une première fois
06:15 en audition libre, ensuite il a été placé en garde à vue une semaine après et maintenant
06:18 il est mis en examen au métier de volontaire avec un contrôle judiciaire et une attribution
06:22 d'exercice.
06:23 Vous voyez, il n'y a pas de vidéo et pour autant la justice a fait son devoir.
06:25 Mais vous reconnaissez que la première version n'était pas la bonne ?
06:29 Mais la première version, je ne sais pas qui la donne.
06:30 Est-ce que la voiture a foncé sur le motard ?
06:32 Pardon madame, mais j'ai justement écouté la version de l'avocat de mon collègue qui
06:40 a passé les premières heures avec lui.
06:41 Je ne sais pas ce qui a été dit ou pas dit, je ne sais pas ce qui a été relayé ou pas
06:44 relayé et comment ça a été.
06:45 La mort de Nahel a relancé les débats sur la loi de 2017 qui a élargi les conditions
06:50 d'ouverture du feu des policiers.
06:51 Le spécialiste de la police Fabien Jobart, qui était à notre micro, raconte qu'il y
06:56 a eu une multiplication par 5 des tirs mortels sur les véhicules entre avant et après cette
07:00 loi de 2017.
07:01 Il affirme également qu'en Allemagne il y a eu un tir mortel en 10 ans pour refus d'obtempérer.
07:05 Il y en a eu 16 des tirs mortels en France depuis un an et demi seulement.
07:09 Est-ce qu'il faut la changer ? Est-ce qu'il faut la broger cette loi ?
07:11 De toute façon, il y aura un après.
07:13 Ce moment-là de notre démocratie va laisser forcément des traces, que ce soit malheureusement
07:18 au sein de la police nationale, mais aussi au sein de notre société.
07:20 Les policiers agissent dans un cadre légal.
07:23 Le cadre légal aujourd'hui qui est posé pour l'usage des armes, il est fixé par la loi de 2017.
07:27 Si vous reprenez textuellement ce point 4 de l'article 435-1 du Code de sécurité intérieure,
07:33 vous verrez, en le lisant comme ça et en collant à la version, ne serait-ce que du
07:37 procureur, parce que c'est quand même peut-être le plus important, il n'y a que lui qui avait
07:40 le droit de s'exprimer sur l'affaire, vous verrez que dit comme ça, mon collègue semble
07:44 vraiment être dans les clous.
07:45 Grégory Giron, il y a aussi ce communiqué publié vendredi par les syndicats Allianz
07:49 et Unsa, ce n'est pas votre syndicat, je le précise, votre syndicat est majoritaire,
07:53 je le précise aussi.
07:54 Ce communiqué qui a beaucoup fait réagir, ils se disent en guerre contre les hordes
07:58 sauvages et les nuisibles.
07:59 Vous partagez ces mots ?
08:00 Non, clairement pas.
08:02 Je ne partage pas ces mots.
08:03 Je ne peux pas dire il y a cinq minutes que quand on a une parole publique, on a une responsabilité.
08:06 Je pense que ça va avec.
08:08 On demande à mes collègues sur le terrain d'être exemplaires face à des situations
08:10 extraordinaires et de les gérer du mieux possible avec des ontologies et quand on les représente,
08:15 nous on s'abrogerait et en fait on s'écarterait justement de cette dénité qu'on leur doit.
08:20 Je laisse les collègues et les personnes seules jugent de ce genre de propos.
08:26 Je pense que dans la bouche ou dans la plume de représentants du personnel, notamment
08:30 de policiers syndicalistes, ce n'est pas approprié.
08:33 Dernière question, la cagnotte.
08:35 La cagnotte lancée par Jean Messia en soutien à la famille du policier qui a téni 1,3
08:39 million d'euros ce matin de cagnotte pour un policier mis en examen pour homicide volontaire.
08:43 Ça choque beaucoup de gens.
08:44 Oui, ça choque beaucoup de gens.
08:46 Les policiers, ça ne les choque pas vraiment parce qu'ils ne politisent pas la chose.
08:49 Sachez qu'il y a une deuxième cagnotte qui a été ouverte pour le coup à l'initiative
08:52 de policiers, gérée par un policier pour une amicale de policiers qui va remettre l'argent
08:56 à la famille du policier.
08:58 Juste comme ça, rapidement.
08:59 Mais celle-là, elle est initiée par un polémiste d'extrême droite.
09:03 Vous la relayez ?
09:04 Non, non, je ne l'ai jamais relayée.
09:06 Je ne l'ai relayée que celle de l'amicale de la police parce que forcément, on savait
09:09 qu'à l'ouverture de cette cagnotte, ça allait devenir un enjeu politique.
09:12 Lui, il en fait d'ailleurs un étendard politique.
09:14 Maintenant, les policiers, eux, permettaient-leur d'être en dehors de ce champ-là et de se
09:18 dire que c'est juste un soutien à la population.
09:20 Aujourd'hui, ils en ont besoin.
09:21 Merci Grégory Joron d'avoir été à ce micro.
09:23 Merci et belle journée.
09:24 Merci Léa.
09:25 Il est 7h58.
09:26 L'heure de notre rendez-vous en été avec Don Quichotte par l'historien de la littérature
09:33 William Marx.
09:34 Et ce matin, William, nous continuons dans l'histoire de Don Quichotte ?
09:38 Pas tout à fait.
09:39 Car nous sommes allés un peu trop vite en besogne hier.
09:42 Revenons un peu en arrière.
09:45 Non.
09:46 Jamais votre invité ce matin est le secrétaire général du syndicat Unité SGP Police FO.
09:52 Et bonjour Grégory Joron.
09:53 Bonjour.
09:54 Merci d'être avec nous ce matin.
09:55 Deuxième nuit plus calme après la semaine d'émeute qui a suivi la mort de Naël lors
09:58 d'un contrôle routier.
09:59 Il n'y a eu que 17 interpellations en région parisienne cette nuit contre 315 par exemple
10:04 dans la nuit de samedi à dimanche.
10:05 Sentez-vous sur le terrain la décrue des violences ?
10:08 Diriez-vous qu'on va vers un retour à la normale ?
10:11 Oui, nous sommes tout assez clairs.
10:14 Et heureusement, je pense qu'on n'aurait pas pu tenir malheureusement ce qu'on a pu
10:17 voir ces derniers jours avec, je le rappelle, un engagement extrêmement fort.
10:22 45 000 agents et surtout beaucoup de blessés.
10:24 On compte quand même 730 collègues blessés par rapport à ces nuits d'émeute.
10:28 Et aussi une crainte qui devenait palpable puisqu'on a fait face quand même, et mes
10:32 collègues ont fait face sur le terrain, réellement à des actes inqualifiables.
10:37 Vous étiez ancien CRS en 2005, vous étiez engagé sur le terrain pendant les émeutes
10:42 de 2005.
10:43 Y a-t-il une différence avec ce qui s'est passé il y a 18 ans ? Est-ce que vous voyez
10:46 quelque chose de différent ? Vous allez me répondre les réseaux sociaux mais comment
10:50 vous la voyez la différence ?
10:52 C'est assez fondamental puisqu'il y a vraiment une différence d'organisation.
10:55 En fait 2005 c'était l'expression d'une colère suite à la mort des deux jeunes dans
11:03 le 93, je vais pas dire de bêtises, et forcément un embrasement des quartiers.
11:08 Mais là on a quelque chose qui était très organisé, qu'elle soit lors d'attaques
11:13 de commissariats ou de police, de gendarmerie ou de police municipale, il y en a eu des
11:17 centaines attaquées, c'est une réalité.
11:18 On voyait que c'était très organisé mais aussi de pillages où pour le coup il y avait
11:22 des vrais checkpoints, où les gens étaient interdits de passer pendant qu'on faisait
11:25 un bureau de tabac.
11:26 Donc clairement tout ça était extrêmement bien organisé, extrêmement bien coordonné.
11:31 C'est la grosse différence avec 2005 et c'est ce qui a d'ailleurs posé beaucoup
11:33 de problèmes aux policiers.
11:34 Et puis il y a la colère et la haine de la police que vous entendez tous les jours.
11:38 Le sociologue au CNRS Olivier Galland dit qu'il y a chez les émeutiers, comme en 2005,
11:42 une banalisation de la haine de la police.
11:44 Vous la ressentez cette haine à l'issue de cette semaine de violences et d'émeutes.
11:50 Vous nous avez dit en préparant l'interview que ce qui remonte du terrain c'est le dégoût.
11:55 Oui, déjà la haine malheureusement anti-flic, elle date pas de la semaine dernière.
11:59 Elle est depuis quelques années entretenue en plus, moi je le dis très clairement.
12:04 Je fais du syndicalisme, pas de politique, j'ai l'habitude de le lire et c'est une réalité.
12:07 Pour autant on a des personnalités politiques qui ont une parole publique et qui au travers
12:12 de cette parole publique entraînent justement un glissement vers la haine anti-flic banalisée.
12:18 On a un exemple terrible hier dans le 93 à Mitry où un collègue est avec sa fille de
12:23 deux ans et demi, il y a un problème de manœuvre dans la rue pour un véhicule, il explique
12:27 juste qu'il est policier et qu'il veut pas de problème, les trois personnes descendent
12:30 du véhicule, le passent à tabac devant sa fille de deux ans et demi et le laissent inconscient
12:33 sur le trottoir parce qu'il a décliné son identité.
12:36 Donc vous mettez en cause certains politiques et certaines opérations de sa compagnie ?
12:39 Clairement oui, clairement oui.
12:40 Je pense qu'ils participent vraiment à ce que les flics aujourd'hui soient des cibles.
12:44 D'ailleurs on est régulièrement menacés jusque dans nos foyers.
12:49 Emmanuel Macron était hier en visite nocturne dans une caserne parisienne pour remercier
12:52 les forces de l'ordre.
12:53 Est-ce que ce sera suffisant parce que vous avez tous exprimé votre malaise après sa
12:59 réaction après la mort de Nahel quand il a dit que les faits étaient inexcusables
13:03 et injustifiables ?
13:04 Je pense pas que ce soit suffisant.
13:06 Je pense même clairement qu'on repart dans une phase où malheureusement les policiers
13:10 aujourd'hui ont perdu totalement confiance dans le président.
13:15 A ce point ?
13:16 Oui, clairement.
13:17 C'est ce qui remonte du terrain, de tout ce qu'on nous renvoie comme message, de tout
13:19 ce qui est ressenti par nos collègues.
13:21 Puisque au moment où un des nôtres était, on en parlera j'imagine après, mais était
13:26 étant entendu placé en garde à vue en attente justement probablement d'une mise en examen,
13:32 la parole présidentielle elle est quand même il me semble extrêmement importante dans
13:34 notre pays et LPS forcément c'est le premier d'entre nous.
13:37 Quand il dit que c'est inacceptable et inexcusable avant même de dire que la justice va faire
13:42 son travail, j'estime de manière assez évidente qu'il donne une couleur au dossier
13:47 qui est insupportable.
13:48 Il faut dire que le président de la République a comme tout le monde vu les images, Grégory
13:51 Joron, de ce jeune homme de 17 ans qui a été tué à bout portant dans une voiture
13:55 lors d'un contrôle routier.
13:56 Très vite la version des policiers relayée par la préfecture c'était de dire que la
14:00 voiture avait foncé sur les motards.
14:02 Version qui a été contredite quelques minutes plus tard par cette vidéo, par ces images
14:06 où on voit donc que ce n'était pas le cas, que le policier tenait Nahel en joue
14:09 avant de tirer à bout portant.
14:10 Le passager, je ne sais pas si vous avez vu le Parisien ce matin, il y a un passager
14:13 qui était le troisième passager dans la voiture, raconte que l'un des policiers
14:18 a dit "tu vas te prendre une balle dans la tête", raconte aussi que Nahel aurait
14:21 pris trois coups avant le tir et les derniers mots de Nahel avant de mourir auraient été
14:26 "c'est un fou, il a tiré".
14:27 Comprenez-vous quand même que ces images ont choqué beaucoup de monde, y compris le
14:32 président ?
14:33 Oui, mais évidemment que je le comprends.
14:34 Ce que je comprends moins, c'est que, encore une fois, quand on est président de la République,
14:39 ou homme public, ou homme politique, ou journaliste, ou policier, ce qui me dérange un peu plus
14:45 c'est que chacun y aille de son avis, de son analyse sur huit secondes de vidéo,
14:49 de "peut-être que c'était ça", de témoignages qui valent ce qu'ils valent alors qu'en
14:54 fait il n'y a rien d'écrit, notamment pour la version des policiers, parce qu'il
14:57 y a eu un avocat, j'ai entendu qu'il s'exprimait en disant qu'il y avait un faux en écriture
15:02 sauf que jamais rien n'a été écrit.
15:03 Donc en fait on est réellement, moi c'est ce qui me dérange, c'est ce que j'ai
15:06 dénoncé, c'est ce à quoi je n'ai pas voulu participer, c'est-à-dire à donner
15:10 mon avis sur une affaire.
15:11 Je ne suis pas magistrat, je ne suis pas le juge, instructeur, et je suis juste un policier
15:14 qui regarde ça de l'autre côté.
15:15 Alors nous parlons, la vidéo est encore en train d'être examinée par les GPN,
15:18 par les policiers des polices.
15:19 Tout à fait, et la bande sonore aussi.
15:21 Qu'est-ce qui se serait passé s'il n'y avait pas eu cette vidéo ? Qu'est-ce
15:24 qui se serait passé ? On s'en serait tenu à la version du policier.
15:27 La voiture nous a foncé dessus et voilà, il n'aurait pas été inquiété.
15:30 Je vais vous donner un exemple où il n'y a pas eu de vidéo, notamment à Angoulême
15:34 une semaine après où un de nos collègues a tiré sur une mise en danger.
15:38 J'évite de faire l'amalgame entre refus d'obtempérer et action de tir parce qu'heureusement
15:42 qu'à chaque fois qu'il n'y a pas un refus d'obtempérer, il n'y a pas un tir
15:46 policier.
15:47 Donc mon collègue à Angoulême s'est senti en danger, il a fait action de tir et malheureusement
15:52 un jeune de 19 ans est décédé, il n'y avait pas de vidéo.
15:56 La version du policier semble-t-il très claire, il a été auditionné une première
15:59 fois en audition libre, ensuite il a été placé en garde à vue une semaine après
16:03 et maintenant il est mis en examen au métier de volontaire avec un contrôle judiciaire
16:07 et une attribution d'exercice.
16:08 Vous voyez, il n'y a pas de vidéo et pour autant la justice a fait son devoir.
16:10 Mais vous reconnaissez que la première version n'était pas la bonne ?
16:14 Mais la première version, je ne sais pas qui la donne.
16:15 Est-ce que la voiture a foncé sur le motard ?
16:17 Pardon madame, mais j'ai justement écouté la version de l'avocat de mon collègue qui
16:24 a passé les premières heures avec lui.
16:26 Je ne sais pas ce qui a été dit ou pas dit, je ne sais pas ce qui a été relayé ou pas
16:29 relayé et comment ça a été.
16:30 La mort de Nahel en tout cas a relancé les débats sur la loi de 2017 qui a élargi les
16:34 conditions d'ouverture du feu des policiers.
16:36 Le spécialiste de la police Fabien Jobart, qui était à notre micro, raconte qu'il
16:41 y a eu une multiplication par 5 des tirs mortels sur les véhicules entre avant et après cette
16:45 loi de 2017.
16:46 Il affirme également qu'en Allemagne, il y a eu un tir mortel en 10 ans pour refus
16:49 d'optempérer.
16:50 Il y en a eu 16 des tirs mortels en France depuis un an et demi seulement.
16:54 Est-ce qu'il faut la changer ? Est-ce qu'il faut la broger cette loi ?
16:56 De toute façon, il y aura un après.
16:58 Ce moment-là de notre démocratie va laisser forcément des traces, que ce soit malheureusement
17:03 au sein de la police nationale, mais aussi au sein de notre société.
17:05 Les policiers agissent dans un cadre légal.
17:08 Le cadre légal aujourd'hui qui est posé pour l'usage des armes, il est fixé par la loi de 2017.
17:12 Si vous reprenez textuellement ce point 4 de l'article 435-1 du Code de sécurité intérieure,
17:18 vous verrez, en le lisant comme ça et en collant à la version, ne serait-ce que du procureur,
17:23 parce que c'est quand même peut-être le plus important, il n'y a que lui qui avait le droit
17:25 de s'exprimer sur l'affaire, vous verrez que dit comme ça, mon collègue semble vraiment
17:29 être dans les clous.
17:30 Grégoire Giron, il y a aussi ce communiqué publié vendredi par les syndicats Allianz
17:33 et Unsa, ce n'est pas votre syndicat, je le précise, non, votre syndicat est majoritaire,
17:38 je le précise aussi.
17:39 Ce communiqué qui a beaucoup fait réagir, ils se disent en guerre contre les hordes
17:43 sauvages et les nuisibles, vous partagez ces mots ?
17:45 Non, clairement pas, je ne partage pas ces mots, je ne peux pas dire il y a 5 minutes
17:49 que quand on a une parole publique, on a une responsabilité, je pense que ça va avec.
17:52 On demande à mes collègues sur le terrain d'être exemplaires face à des situations
17:55 extraordinaires et de les gérer du mieux possible avec des ontologies et quand on les représente,
18:00 nous on s'abrogerait et en fait on s'écarterait justement de cette dénité qu'on leur doit.
18:05 Je laisse les collègues et les personnes seules jugent de ce genre de propos, je pense
18:11 que dans la bouche ou dans la plume de représentants du personnel, notamment de policiers syndicalistes,
18:17 ce n'est pas approprié.
18:18 Dernière question, la cagnotte, lancée par Jean Messia, en soutien à la famille
18:22 du policier qui atteignait 1,3 million d'euros ce matin, une cagnotte pour un policier mis
18:26 en examen pour homicide volontaire, ça choque beaucoup de gens.
18:29 Oui, ça choque beaucoup de gens, les policiers ça ne les choque pas vraiment parce qu'ils
18:32 ne politisent pas la chose.
18:34 Sachez qu'il y a une deuxième cagnotte qui a été ouverte, pour le coup à l'initiative
18:37 de policiers, gérée par un policier, pour une amicale de policiers qui va remettre l'argent
18:41 à la famille du policier.
18:43 Juste comme ça, rapidement.
18:44 Oui, mais celle-là, elle est initiée par un police d'extrême droite, vous la relayez ?
18:49 Non, non, je ne l'ai jamais relayée, je ne l'ai relayée que celle de l'amicale de la
18:53 police parce que forcément on savait qu'à l'ouverture de cette cagnotte, ça allait
18:56 devenir un enjeu politique.
18:57 Lui, il en fait d'ailleurs un étendard politique.
18:59 Maintenant, les policiers, eux, permettaient d'être en dehors de ce champ-là et de se
19:03 dire que c'est juste un soutien de la population, aujourd'hui, ils en ont besoin.
19:05 Merci Grégory Joron d'avoir été à ce micro.

Recommandations