Mardi 7 janvier 2025, SMART BOURSE reçoit Edouard Faure (Responsable du crédit, Swiss Life Asset Managers France)
Category
🗞
NewsTranscription
00:00Le dernier quart d'heure de Smart Bourse, c'est le quart d'heure thématique chaque
00:13soir.
00:14On parle beaucoup des actions évidemment dans Smart Bourse, mais il faut absolument
00:17parler de cette classe d'actifs qui reste peut-être, une classe d'actifs intournable
00:21pour 2025.
00:22Elle l'a été en tout cas en matière de performance pour 2024, je veux parler du crédit, des
00:26obligations d'entreprise.
00:27Nous en parlons avec Edouard Faure, responsable du crédit chez Swiss Life Asset Management
00:31à Mercator en plateau.
00:32Bonsoir Edouard.
00:33Bonsoir Grégoire.
00:34Merci d'être là.
00:35Oui, oui, il faut rendre quand même à César ce qui est à César.
00:36Il y a des indices crédits qui ont fait mieux en Europe que certains indices actions.
00:412024 a été une année exceptionnelle et je pense que c'est difficile dans toutes les
00:45classes d'actifs de trouver un meilleur couple rendement-volatilité au rendement-risque
00:50que ce que le crédit a pu délivrer l'an dernier Edouard.
00:53Effectivement, trouver l'année pour le crédit, pour moi c'était très agréable.
00:5623 était déjà pas mal si j'ai bonne mémoire.
00:59Voilà.
01:00Donc on a deux années et après une année 2022 un peu plus difficile, il faut quand
01:04même…
01:05Historiquement difficile.
01:06Oui, exactement, il faut quand même se rappeler du passé.
01:07C'est bien de le rappeler.
01:08Mais 24, très bonne année tant sur la partie Investment Grade que sur la partie AYLD.
01:13Donc ça c'était vraiment la bonne nouvelle de l'année dernière.
01:17On a des performances qui tangentent les 5% sur l'Investment Grade Euro.
01:22On est à plus de 8% et demi sur le AYLD Euro.
01:26C'est là où je dis que le crédit fait mieux que les actions.
01:30Exactement.
01:31C'est vrai que quand on compare à des indices actions, prenons le CAC 40 qui est le plus
01:36proche de nous, qui malheureusement a vraiment pâti de la situation politique en France,
01:41clairement le crédit était une place importante dans laquelle il fallait être au cours de
01:46l'année.
01:47Vous dites bonnes nouvelles bien sûr, bonnes nouvelles ou bonnes surprises ? C'est-à-dire
01:51qu'est-ce qui a permis cette performance du crédit ? Est-ce que c'est ce qu'on avait
01:56en tête en début d'année 2024 quand on regarde à l'arrivée ce qui s'est passé
02:00et comment on l'explique ?
02:01Alors en fait pour expliquer les performances du crédit, il y a trois facteurs majeurs
02:06à prendre en compte.
02:07Le premier, c'est l'effet taux parce qu'on est sensible à l'évolution des taux souverains
02:12et celui-là j'ai envie de dire c'est probablement celui sur lequel on misait le plus et qui
02:17a le moins porté ses fruits parce qu'on s'attendait à une baisse des taux souverains et finalement
02:22quand on regarde l'année 2024, les taux souverains ont plutôt eu tendance à augmenter.
02:25On voit le mois de décembre qui a été particulièrement sanglant sur ce plan-là donc clairement
02:31la contribution des taux sur la performance du crédit a été négative.
02:34En revanche, et ça c'est l'excellente surprise, ça a été les compressions des
02:40primes de risque qui ont été extrêmement importantes en 2024 portées par une croissance
02:45qui a été meilleure qu'attendue tout au long de l'année.
02:47On s'attendait à ce que la croissance soit bien plus en berne, plus rapidement en berne
02:51que ce qu'elle a été même en Europe et on voit que les primes de risque sont largement
02:55resserrées.
02:56Et le troisième élément pour expliquer la performance c'est le portage et celui-là
03:00j'ai envie de dire c'est pas vraiment une surprise puisque on avait vu les financements
03:05des sociétés augmenter ces dernières années donc on savait qu'on avait un portage attractif
03:10sur la classe d'actifs et ça, ça a joué à plein son rôle au cours de l'année 2024.
03:14Quel est le niveau de cherté qu'on a atteint là aujourd'hui sur cette classe d'actifs
03:17et quand on prend ces trois moteurs que vous avez décrits, Édouard, avec l'histoire
03:23de 2024, quelles sont les réflexions qui vous animent sur les perspectives de cette
03:28classe d'actifs pour 2025 ?
03:29Alors si on reprend ces trois moteurs-là, finalement on a deux moteurs qui tournent
03:36encore à pas régime j'ai envie de dire, c'est le portage, il est toujours là, il
03:41reste attractif et c'est les taux qui n'ont pas baissé, on s'attendait à ce qu'ils
03:46baissent et donc qui nous pourraient permettre d'avoir une bonne performance en 2025, notamment
03:52en Europe sur la partie taux, on s'attend si tout se passe comme prévu.
03:57C'est là où le facteur taux devrait être le plus favorable, c'est ça Édouard ?
03:59C'est là où le facteur taux devrait être le plus favorable, on a plus de doutes aux
04:02Etats-Unis, d'ailleurs c'est ce qui explique aussi la forte hausse des taux qu'on a vécu
04:06en décembre, c'est le discours de Jérôme Powell qui a annoncé que pour l'instant
04:10il n'envisageait que deux hausses de taux, enfin 50 points de baisse de taux, mais peut-être
04:15qu'on parlera d'eux aussi, dimanche, vous voyez on s'y met, 50 points de baisse de
04:21taux, merci de me reprendre, pour l'année 2025 et le marché s'attendait à beaucoup
04:26plus que ça, donc c'est vrai qu'aux Etats-Unis avec une politique qui pourrait être inflationniste,
04:31il y a beaucoup plus de doutes sur l'évolution des taux, alors tactiquement aujourd'hui
04:35on se dit que vu le mouvement qu'on a eu en décembre, on pourrait avoir une petite
04:37baisse dans les prochaines semaines, en revanche si on regarde sur moyen terme, disons sur
04:42l'année 2025, on est probablement autour d'un niveau d'équilibre sur le design américain,
04:47en Europe c'est une autre histoire, donc ça, ça devrait vraiment aider la classe d'actifs
04:51crédits, en particulier en Europe. L'autre élément qui reste porteur, le deuxième
04:57moteur qui tourne à plein régime, c'est le portage, celui-là il est toujours bien
05:00là, alors il risque de diminuer parce que les refinancements avec les primes de risques
05:05qui sont plus serrées vont être de plus en plus bas de la part des entreprises, mais
05:08en tout cas il est là, il faut en profiter tant qu'il est présent. Le troisième moteur
05:13qui lui pour le coup risque plutôt d'être à l'arrêt, voire à reculons, je ne sais
05:18pas trop comment on peut confiler la métaphore, c'est le moteur des primes de risques. Les
05:24primes de risques sont fortement serrées, on est à plus de 80 points de base de resserrement
05:27sur l'île d'Euro, plus de 30 points de base de resserrement sur l'investissement
05:31de grès d'euro, donc on est vraiment sur des primes de risques qui sont historiquement
05:34relativement serrées, il y a peut-être encore un peu d'aller chercher un peu de
05:40performance de ce côté-là, mais en tout cas c'est vraiment dans un scénario extrêmement
05:43positif, du coup chez nous, chez Swiss Life et cette manager, on s'attend plutôt à
05:46un écartement des primes de risques l'année prochaine qui viendra un peu diminuer la
05:50performance, mais en absolu, on s'attend à une performance positive.
05:54Oui c'est ça, all in all comme on dit, avec le facteur taux et l'intérêt du portage,
05:59on peut se permettre, quand on fait le calcul, un réécartement partiel des primes de risques
06:06? On peut se permettre un réécartement
06:07partiel des primes de risques, de l'ordre de 50-60 BP sur l'île, de l'ordre de quelques
06:13dizaines de points de base sur l'investissement de grès d'euro, et on aura toujours des performances
06:18positives, je pense que la différence majeure qu'on aura entre l'année prochaine et
06:23cette année, c'est des performances entre l'investment grade et l'île qui seront
06:28beaucoup plus proches.
06:29L'année dernière, en 2024, on a eu deux fois plus de performances sur l'île que sur
06:34l'investment grade.
06:35Plus risqué, le high yield, je le rappelle, c'est la dette d'entreprise, plus risqué,
06:38l'investment grade, le high grade, c'est la meilleure qualité de notation et donc ce
06:42sont des souches moins risquées.
06:43Tout à fait, moins risquées, plus corrélées aux taux.
06:46Donc si on est dans un scénario en Europe où on a une baisse des taux souverains, la
06:51partie investment grade devrait plus en profiter.
06:54Le portage, lui, il est beaucoup plus important que le côté high yield et c'est là où
06:57le high yield va faire la différence.
06:58Donc on s'attend à plutôt des performances relativement proches entre investment grade
07:04et high yield.
07:05J'entends.
07:06Le côté binaire de l'investisseur obligataire ou crédit, c'est toujours à la fin de la
07:12journée de savoir si l'émetteur dans lequel j'ai investi fera défaut ou pas.
07:15Qu'est-ce qu'on peut dire de ce point de vue-là ? Alors je voyais que le nombre de
07:18défauts aux Etats-Unis est en train de remonter à des niveaux qu'on n'a pas vu
07:22depuis plus de 10 ans, 14 ans, je crois, précisément.
07:25Qu'est-ce qu'on peut dire de cette situation aux Etats-Unis ? Qu'est-ce qu'on peut dire
07:29de la situation en Europe en matière de taux de défauts observés chez les émetteurs ou
07:33attendus ?
07:34Les taux de défauts, quand on les regarde en nominal, c'est-à-dire en prenant la taille
07:39des souches qui font défaut, on est vraiment sur des taux de défauts qui sont relativement
07:43faibles, en particulier aux Etats-Unis.
07:45On a vu depuis plus de 10 ans, ça fait même 15 ans qu'on n'avait pas vu ça, c'est-à-dire
07:49des taux de défauts inférieurs aux Etats-Unis par rapport aux marchés européens, ce qui
07:53n'est pas inné parce que le marché américain est plus risqué par essence et donc du coup
07:59il y a beaucoup plus de notations spéculatives et il y a des taux de défauts qui sont plus
08:03importants aux Etats-Unis qu'en Europe.
08:05Ce n'est pas le cas aujourd'hui.
08:06On s'attend à ce que les défauts remontent légèrement en Europe, mais là-dessus je
08:11mettrais quand même un point d'intention tout particulier, c'est qu'on a deux situations
08:15qui sont déjà largement anticipées par le marché, à savoir Altice France et Times
08:21Water.
08:22Altice France, la société de SFR, et la utilité britannique, qui sont des gros points
08:28dans les indices, et qui anticipent déjà les restructurations, qui vont rentrer logiquement
08:35si les restructurations se font dans les statistiques des taux de défauts, or dans les primes de
08:40risque aujourd'hui sur le marché, c'est déjà très bien d'intégrer.
08:42Donc demain quand on aura le défaut acté, on ne devrait pas voir d'écartement majeur
08:47des primes de risque.
08:48Et donc du coup si on retraite les taux de défauts en Europe de ces deux noms-là, on
08:52devrait tomber à des taux de défauts qui devraient être autour de 1,5%, donc extrêmement
08:56faibles.
08:57Donc les taux de défauts ne sont vraiment pas une inquiétude, à la fois en Europe
08:59et aux Etats-Unis, parce qu'encore une fois on est sur un régime relativement bas quand
09:02on regarde dans le nominal.
09:03Ce n'est pas un sujet d'inquiétude pour nous, surtout qu'aux Etats-Unis on a quand
09:06même une croissance qui est beaucoup plus forte qu'en Europe.
09:08Et donc du coup même si les primes de risque sont plus serrées aux Etats-Unis, il y a
09:12encore quelques anglais à faire, notamment sur la partie un peu plus cyclique.
09:18Peut-être qu'en Europe il faudra se diriger plutôt sur des secteurs moins cycliques,
09:22profiter de la baisse des taux sur les secteurs qui sont plus défensifs, plus sensibles aux
09:26taux, et moins sensibles à une baisse supplémentaire de la croissance, et profiter d'aller chercher
09:33des secteurs cycliques là où il y a de la croissance, là où il y a des taux de défauts
09:35relativement faibles, à savoir aux Etats-Unis.
09:37C'est quoi des secteurs défensifs dans l'univers crédit par exemple ?
09:40C'est la santé, c'est les télécommunications en Europe, alors on est encore une fois à
09:46part Altice France, mais ça fait partie des secteurs défensifs.
09:49Il y a un secteur qui a très très bien marché en 2024 qui est le secteur de l'immobilier,
09:54qui après des années très très compliquées a particulièrement bien marché en 2024.
09:58On pense qu'il y a encore quelques performances à aller tirer de ce secteur-là, alors pas
10:04dans les proportions de 2024, c'est évident, mais il y a encore des choses à faire sur
10:08ce secteur-là.
10:09C'est ce genre de secteur aujourd'hui qui semble relativement attractif en Europe.
10:12Un moment, il nous reste une minute pour évoquer le sujet spécifique de la dette bancaire.
10:16On ne va pas rentrer trop dans le détail, mais c'est vrai qu'il y a des souches hybrides
10:20notamment qui sont émises par les banques en Europe, et je crois que dans l'univers
10:25crédit, c'est un segment qui a explosé tous les compteurs l'an dernier à la hausse, j'entends
10:31Edouard.
10:32On pense qu'il y a des performances à deux chiffres.
10:33Oui, c'est ça.
10:34Sur les AT1, on est à deux chiffres de performances sur 2024.
10:38C'est excellent.
10:39Alors, c'est un vent qui continue en 2025 ?
10:44C'est un vent qui va continuer, encore une fois, un peu toujours le même constat, dans
10:47une moindre mesure, mais on devrait avoir des performances toujours positives sur ces
10:50classes d'actifs-là, on a toujours un portage attractif, les primes de risques sont relativement
10:54serrées, mais on fait le constat partout, du coup, voilà, mais il y a encore…
10:58Dans le jeu du concours de beauté des marchés ?
11:00Exactement.
11:01Et on a la possibilité d'aller sur des signatures de très bonne qualité, donc avec un risque
11:05de défaut très faible, en ayant des portages très attractifs sur ce genre de signatures.
11:10Donc oui, les bancaires, c'est intéressant.
11:11Se focaliser plutôt sur les bancaires qui ont une activité pan-européenne et pas sur
11:18des monopays qui sont beaucoup plus risqués, en termes notamment de fusion-acquisition,
11:25ce genre de risques politiques, comme en France.
11:28Merci beaucoup Edouard.
11:29Merci pour cet éclairage sur les marchés de crédit, le bilan 2024 et bien sûr les
11:34enseignements qu'il faut en tirer pour investir dans le crédit en 2025.
11:38Edouard Faure, responsable du crédit chez Swiss Life AM, était avec nous en plateau
11:42dans ce dernier quart d'heure de SmartPense.