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00:00 [Musique]
00:05 Si vous aimez manier les chiffres pour leur donner du sens, alors le métier de statisticien pourrait vous plaire.
00:12 Pour en savoir plus sur la statistique et en connaître l'univers, restez avec nous car nous en parlons maintenant
00:19 dans cet entretien avec notre invité du jour, Franck-Stéphane Dédy, qui est ingénieur, statisticien, économiste.
00:26 Monsieur Dédy, bienvenue.
00:27 Merci madame.
00:28 Merci d'avoir accepté notre invitation.
00:30 Dites-nous en plus sur votre parcours.
00:32 Oui, merci madame.
00:33 Donc, comme vous l'avez dit, je suis ingénieur, statisticien, économiste, diplômé de l'UNCA,
00:39 l'École Nationale de Statistique et d'Économie Appliquée, donc qui est une école sous-régionale
00:46 qui forme au métier de la statistique, mais aussi de l'économie et de la finance.
00:50 Donc, diplômé de l'UNCA, qui est un centre d'excellence de la Banque Mondiale et de l'Union Européenne et de l'UEMA.
00:57 Et donc, juste après l'UNCA, après avoir été diplômé, j'ai été recruté à l'Union Européenne
01:04 comme chef de projet statistique dans le nord de la Côte d'Ivoire et dans le sud du Bukhina et du Mali.
01:11 Et, subséquemment, après, je suis allé dans d'autres métiers, donc dans les métiers du conseil en stratégie et en finance,
01:18 et puis dans les métiers aussi de banquier d'affaires que je suis jusqu'à aujourd'hui.
01:22 Mais qu'est-ce qui vous a véritablement fait aimer les statistiques, parce que ça relève des mathématiques, certes,
01:29 mais c'est quand même un domaine qui est extrêmement vaste.
01:31 Oui, c'est un domaine qui est extrêmement vaste, mais j'ai toujours eu cette appétence-là, cette attirance pour les chiffres.
01:38 Donc, c'était tout de go, le bon métier qui correspondait à ce que j'aimais faire.
01:44 Donc, c'est comme ça que j'ai mûri ce choix-là d'intégrer l'UNCA et de m'y faire former.
01:50 Et aujourd'hui, je peux dire qu'avec du réculte, je ne regrette pas.
01:54 Ça se voit, vous avez l'air épanoui. Alors, dites-nous concrètement, qu'est-ce que c'est la statistique ?
01:58 Donc, la statistique, pour faire simple, et je vous promets, tout au long de cet entretien, on va éviter les thèmes techniques.
02:04 Merci beaucoup, d'avance.
02:06 Donc, la statistique, en fait, c'est une discipline, comme toute autre science, mais qui a un trait à quatre éléments.
02:13 Le premier, c'est de collecter la donnée. Le deuxième, c'est de la traiter et de l'analyser.
02:19 Le troisième, c'est de l'interpréter. Et puis, le quatrième, c'est de la diffuser ou bien de communiquer l'information à partir de ces données-là.
02:27 Donc, toutefois, on peut, comme j'aime bien le dire souvent quand je parle de statistique,
02:32 toutefois qu'on peut compter jusqu'à deux, on parle déjà des statistiques.
02:35 Et le métier de statisticien s'attèle à faire ces quatre étapes.
02:40 Alors, dans la société, concrètement, comment on peut utiliser les statistiques ?
02:45 Alors, les statistiques, et vous l'avez si bien dit dans votre précédente question, c'est un domaine, les statistiques ont un domaine d'application très vaste.
02:54 Dans presque tous les secteurs d'activité, on utilise la statistique, que ce soit dans le domaine médical, l'estimation des taux de survie,
03:04 que ce soit dans le domaine des sciences sociales, en économie, quand vous regardez l'actualité, qu'on parle des données sur le produit intérieur brut, sur l'indice des prix à la consommation.
03:15 Tous ces éléments-là sont alimentés par des données statistiques qui sont le champ d'application de la statistique.
03:23 Et dans un domaine plus courant, par exemple, je ne sais pas, ma grand-mère veut aller au marché, comment elle peut faire ses statistiques ?
03:32 Avant d'aller au marché, par exemple, votre grand-mère essaie d'établir ce qu'elle va y acheter.
03:38 Elle va dire, je vais acheter de la tomate, plutôt que de prendre un kilo comme je l'ai fait il y a trois jours, peut-être que parce que les prix ont augmenté, je vais peut-être en prendre un demi-kilo.
03:48 Donc déjà, elle est en train de faire de la statistique. Elle se sert d'une donnée, donc les prix qui ont augmenté, elle les analyse, elle les traite et elle décide de prendre une décision par rapport à cela.
03:57 Donc la statistique, c'est aussi ça. C'est comment est-ce qu'on s'appuie sur des données empiriques pour éclairer aussi son processus de décision.
04:04 Une fois qu'elle arrive au marché, elle peut tomber sur une opportunité. Plutôt que d'acheter une mangue à 500, on lui propose deux mangues à 750.
04:13 Elle se dit que ça peut être un bon pari que de le prendre et elle décide d'acheter ces mangues.
04:18 Donc vous voyez que même à un niveau le plus informel possible, la statistique trouve sa place.
04:23 Alors vous l'avez dit, la statistique est au cœur de toutes les sphères de la société. On vient de le voir avec cet exemple.
04:28 De façon plus pratique, en quoi consiste le métier de statisticien ?
04:34 Donc le métier de statisticien, c'est le professionnel de la statistique.
04:41 C'est-à-dire que c'est l'individu qui va chercher à faire ce que la statistique recommande de faire, à savoir collecter la donnée, l'analyser, l'interpréter, la diffuser, communiquer là-dessus.
04:56 Mais ajouté à cela, le statisticien va prendre un certain nombre de mesures.
05:02 Le statisticien doit pouvoir faire preuve d'éthique, c'est-à-dire se mettre à équidistance et ne pas laisser transparaître dans ce qu'il fait comme travail ses sentiments personnels.
05:12 Le statisticien doit aussi pouvoir faire preuve de confidentialité sur certaines données.
05:17 Par exemple, dans le domaine médical, il y a le secret médical.
05:20 Donc le statisticien qui fournira par exemple des données sur le pronostic vital d'un ou d'un autre patient ne doit pas le communiquer à l'encant dans la rue.
05:30 Donc il doit faire attention à ces éléments-là.
05:33 Il doit aussi faire preuve d'une très grande déontologie en essayant de rester le plus professionnel possible si tant est que cela dépend de lui.
05:43 Donc voilà à quoi se résume le métier de statisticien.
05:47 Mais tout cela rentre dans une logique bien précise.
05:51 Son métier doit pouvoir servir à éclairer la prise de décision.
05:56 Mais est-ce que ce n'est pas en quelque sorte difficile parce qu'on voit par exemple aux États-Unis des statistiques raciales ?
06:04 D'un pays à un autre, on a des statistiques qui sont, je dirais, plus ou moins farfelues.
06:10 Ce n'est pas trop difficile de prendre quelquefois du recul par rapport à ça ?
06:13 Ça peut l'être. Mais c'est en ce moment-là où la déontologie doit pouvoir s'appliquer.
06:20 C'est en ce moment-là où l'éthique doit pouvoir prévaloir.
06:23 C'est comme le métier de journaliste.
06:26 C'est vrai, c'est vrai, c'est difficile.
06:28 Vous devez pouvoir vous mettre, prendre une certaine hauteur par rapport à l'information que vous traitez en vous assurant de pouvoir donner la juste et bonne information.
06:37 Bien entendu, dans tout corps de métier, il y a des brevets galeuses. Il ne faudrait pas qu'on s'en cache.
06:41 Mais nous préférons parler du cas général en essayant de mettre en place des garde-fous qui permettent au statistique de rester dans son domaine de compétence
06:49 et de ne pas se laisser influencer par un contexte particulier.
06:53 Alors les garde-fous, qui vous les impose ? C'est vous-même ? C'est l'État ? C'est des institutions ?
07:00 Le métier est régulé par la puissance publique, par les organismes internationaux et aussi par l'éthique personnelle.
07:10 Parce que c'est un métier comme tout autre. Il obéit à une certaine déontologie, à une certaine éthique de travail.
07:17 Et donc ces garde-fous sont mis en place par ces différentes parties prenantes, du côté personnel jusqu'à la puissance publique ou aux organismes internationaux avec qui le statisticien a à travailler.
07:30 En dehors de ce soft skill ici présent, quelles sont les compétences requises pour être un bon statisticien selon vous ?
07:38 En général, le classique, c'est d'abord d'aimer les chiffres, d'aimer manier les chiffres.
07:45 Dans le parcours classique, il faut avoir un diplôme, une licence en mathématiques, en sciences sociales, comme l'économie, pour être un statisticien.
07:58 Mais la base, c'est qu'il faut aimer les chiffres et aimer les manier.
08:02 Donc vous diriez qu'en fait, il faut être un bon mathématicien pour être un bon statisticien ?
08:06 Oui.
08:07 C'est loupé pour moi ! Quels sont les différents domaines d'activité qui peuvent faire l'objet de travaux du statisticien, justement ?
08:15 Alors, comme je le disais plus haut dans mon propos, c'est que la statistique s'applique à tous les domaines d'activité.
08:24 Au risque de me répéter là-dessus, mais c'est important d'y revenir.
08:27 Bien sûr.
08:28 Donc de l'économie à la finance, à la santé, au droit et à la justice, à l'art.
08:33 L'art ?
08:35 L'art, oui.
08:36 Comment ça ?
08:37 Si on doit faire une exposition, par exemple, il faut savoir combien d'exposants il y aura, il faut savoir combien de personnes…
08:43 Combien en moyenne ?
08:44 Voilà, combien de personnes assistent par jour, de quelle tranche, de quelle catégorie d'âge ils sont.
08:49 Et tout ça, c'est le statisticien qui fournit ces informations-là.
08:52 Combien de décisions de justice ont été appliquées ? Est-ce que les marchés publics ont été passés correctement, conformément au code ?
08:58 Selon quel pourcentage ?
09:00 Tout ce travail-là, il est fait par le statisticien.
09:03 Alors, vous l'avez dit, l'autorité publique régule votre métier en quelque sorte.
09:08 Alors, quelles sont les principales fonctions de l'Institution nationale des statistiques d'un pays ?
09:13 Très bien.
09:14 Donc, l'Institut national des statistiques d'un pays a à peu près dix domaines d'intervention que je vais étaler rapidement.
09:25 Le premier, c'est déjà de collecter la donnée, comme je l'ai dit, de la traiter, de l'analyser,
09:30 de faire des publications statistiques également, de pouvoir faire aussi le recensement de la population.
09:35 En 2021, par exemple, il y a eu le recensement général de la population et de l'habitat, le RGPH.
09:41 Donc, c'était piloté par l'INS, l'Institut national des statistiques.
09:45 L'INS aussi produit des indicateurs économiques, les données sur le PIB, sur l'indice des prix à la consommation,
09:51 l'indice de production industrielle.
09:54 Tous ces éléments-là sont produits par l'INS.
09:57 Vous avez aussi des enquêtes spécifiques, comme par exemple les enquêtes sur le niveau de vie des ménages,
10:02 pour que l'État puisse se rendre compte du réel pouvoir d'achat des populations.
10:06 C'est piloté aussi par l'INS.
10:09 Et au-delà de ces aspects techniques-là, l'INS se positionne aussi comme une sorte d'assistance aux décideurs,
10:16 pour éclairer la prise de décision.
10:18 L'INS également travaille à développer des méthodologies de statistiques les plus en ligne possible avec la réalité actuelle.
10:29 Et puis, l'INS aussi travaille à sensibiliser et à éduquer la population sur le bon usage de ces données-là.
10:36 Et finalement, vu que nous n'évoluons pas en vase clos, surtout dans un contexte de mondialisation,
10:42 l'INS aussi travaille à travers la coopération internationale avec d'autres instituts de statistiques
10:49 et d'autres organismes qui parlent, qui traitent la donnée.
10:53 Donc voilà les 10 domaines d'intervention des Nations nationales de statistiques.
10:57 Alors j'aimerais recentrer la question sur la Côte d'Ivoire, où nous sommes actuellement.
11:01 Vous avez parlé de recherche de méthodologie qui permettrait d'être plus en phase avec les réalités du pays.
11:08 Ici, ça consiste en quoi ?
11:10 Ici, en Côte d'Ivoire, par exemple, l'INS travaille d'arrache-pied avec l'UNCA,
11:15 qui est l'école sous-régionale de formation des cadres statisticiens.
11:21 Et c'est un échange de bons procédés, parce que les diplômés de l'UNCA constituent un vivier naturel de personnel pour l'INS.
11:31 L'INS forme également des instituts régionaux dans les différentes régions de la Côte d'Ivoire pour la collecte des données.
11:41 Par exemple, pas plus tard qu'hier, le président, dans son adresse à la presse,
11:47 après le Conseil des ministres, a dit que l'une des priorités de ce nouveau gouvernement,
11:52 c'était de favoriser l'approvisionnement en marchandises des différents marchés locaux dans les régions de la Côte d'Ivoire.
11:59 Et il a pu avoir cette information par les antennes régionales de l'INS.
12:03 Donc vous voyez que, de loin comme des prêts, l'INS contribue à la bonne marche même d'un État,
12:10 tant que ses décisions sont suivies, sont écoutées.
12:14 Alors aujourd'hui, l'offre statistique fait face à une demande de plus en plus variée et détaillée.
12:18 Vous venez de parler de l'exemple du président de la République.
12:20 Alors comment les producteurs de statistiques satisfont en quelque sorte les besoins des utilisateurs ?
12:26 Aujourd'hui, comme vous l'avez dit, la demande est variée parce qu'on a de nouveaux métiers qui naissent,
12:32 on a de nouveaux besoins au niveau des populations qui émergent également, de nouvelles technologies.
12:38 Donc il faut pouvoir l'intégrer.
12:40 Il y a 10, 20, 30 ans en arrière, on ne parlait pas de big data.
12:43 Mais de plus en plus, avec la donnée qui émerge, l'intelligence artificielle,
12:49 ces méthodes-là sont aussi intégrées par les statisticiens.
12:53 Et puis finalement, ce qu'il est important de noter, c'est que le travail du statisticien,
12:59 des instituts nationaux de statistique, c'est de se mettre aussi à jour
13:03 de toutes les réalités évolutives dans la société.
13:07 Donc face à ces besoins variés qui émergent, le statisticien doit pouvoir arriver à satisfaire toutes ces demandes-là,
13:14 bien sûr en restant aussi attaché à ses principes de base.
13:18 Collecter, analyser, traiter, interpréter, diffuser l'information.
13:23 Avec l'éthique, avec la confidentialité, avec la déontologie.
13:27 Alors, dernière question de M. Eledi.
13:29 Comment jugez-vous l'évolution dans le domaine des statistiques officielles
13:33 sur le continent durant ces dernières décennies ?
13:37 Il y a eu beaucoup d'avancées.
13:40 Il y a eu beaucoup d'acquis dont il faut se satisfaire.
13:43 Si l'on se souvient un peu, il y a quelques années, avec la révision du système statistique,
13:50 on avait le Nigeria qui était passé devant l'Afrique du Sud comme première puissance économique en Afrique.
13:56 Parce que le système de statistique avait été mis à jour.
13:59 Donc ça déjà, ça prouve qu'il y a certaines évolutions qui se font.
14:03 Aujourd'hui, il y a une coopération continentale au niveau des instituts nationaux de statistique.
14:10 Il y a des pays comme la Côte d'Ivoire qui sont un peu plus avancés,
14:13 qui vont aider d'autres pays comme le Libéria, la Guinée, le Mali, le Burkina Faso et inversement.
14:19 Comme nous aussi, nous nous faisons former par des Sud-Africains, des Égyptiens.
14:23 Donc il y a eu beaucoup d'acquis qui ont été réalisés.
14:26 Mais il ne faut pas se satisfaire aussi du peu.
14:29 Il faut regarder devant soi quels sont les pays les plus avancés.
14:32 Aujourd'hui, dans certains pays, la bouteille de vin qui est produite dans un comté de France
14:41 tout de suite est notée dans le système national de statistique.
14:45 C'est ce à quoi nous devons aboutir.
14:47 Le sac de riz qui est collecté, qui est récolté à Korogo,
14:51 doit pouvoir apparaître dans la minute qui suit dans le système national de statistique.
14:55 Donc vous voyez le gap que nous avons encore à combler avec les pays dits avancés.
15:00 Donc il faut se satisfaire des acquis qu'on a réalisés ces dernières années.
15:03 Mais il faut continuer à améliorer les méthodes, à diffuser, à sensibiliser sur l'usage des statistiques
15:08 et encourager aussi les décideurs publics à pouvoir formuler leurs décisions de politique publique
15:15 en se basant sur des chiffres empiriques qui sont produits par les instituts nationaux de statistique
15:19 auxquels il faut donner aussi les moyens, les moyens de travailler.
15:23 Parce qu'aujourd'hui, malheureusement, alors qu'on reconnaît tous la compétence
15:28 des instituts nationaux de statistique dans nos pays,
15:30 on ne leur donne pas forcément les moyens adéquats pour pouvoir travailler.
15:33 Donc c'est un aspect de la chose aussi qu'il faut envisager pour le futur.
15:37 Merci beaucoup M. Deddy, vous êtes ingénieur statisticien et économiste.
15:43 Merci à vous, chers téléspectateurs, d'avoir suivi ce nouveau numéro de C'est à dire.
15:48 L'actualité se poursuit sur cetteinfo et cetteinfo.ci.
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