Chômeurs, malades longue durée, Arizona : Jean-Pascal Labille, secrétaire général de Solidaris, est notre invité politique
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00:00A la veille du 1er mai, nous recevons le patron de Solidaris, les mutualités socialistes, Jean-Pascal Laby, bonjour et bienvenue dans le studio de Sudinfo.
00:15Alors, entrons directement dans le vif du sujet. Selon vous, après cinq mois de gouvernement Arizona, peut-on déjà évaluer l'impact qu'auront les mesures prises par le gouvernement sur la santé des Belges, puisque c'est votre rayon, la santé ?
00:30Oui, et c'est bien au-delà de la santé, parce que des mesures qui sont prises en chômage ou en pension, et on l'a vu depuis de nombreuses années, ont un impact sur l'assurance maladie et invalidité.
00:42Je m'explique, quand on allonge le délai pour accéder à la pension, ou quand on enlève les prépensions, ou quand on exclut des chômeurs, généralement, ces gens, ils arrivent à un moment donné dans le système de l'invalidité.
00:55Et ça, je pense que ce gouvernement ne l'a pas mesuré.
00:58Alors, je vais vous dire très franchement...
01:00Pardon, il ne l'a pas mesuré, ça veut dire que ce n'est pas prévu budgétairement, le surcoûte, que ça va avoir ?
01:05Non, non, non, puisqu'en plus on va remettre les malades au travail, on y viendra certainement tout à l'heure.
01:10Donc je pense qu'on a affaire ici à des mesures qui ont été purement idéologiques, je le dis franchement, comme la limitation dans le temps des allocations de chômage,
01:19donc l'exclusion de ces chômeurs, qui ont une seule vision qui est d'ordre budgétaire, puisqu'on sait aujourd'hui que le budget qui est alloué à l'invalidité, à l'incapacité de travail,
01:33est de loin supérieur à celui du chômage. Et je vais être franc avec vous, la troisième raison, je me demande si parfois ce n'est pas tout simplement faire exactement le contraire de ce que le PS avait fait.
01:43Donc purement, bêtement, comme cela, certains ministres ne s'en cachent d'ailleurs pas dans leurs propos en disant nous on ne va pas faire comme le PS avait fait.
01:55Mais là n'est pas l'essentiel. Moi ce qui m'inquiète beaucoup dans les mesures qui viennent d'être prises, qui sont des mesures qu'on peut qualifier d'un gouvernement champion du monde de la pyromanie.
02:08C'est vraiment un gouvernement pyromanie. Il allume tous les feux. Il allume les feux avec les chômeurs, il allume les feux avec les malades, il allume les feux avec les médecins,
02:18il allume les feux avec les universités, avec les magistrats. Quand on regarde un peu toute la liste de ces personnes, alors je ne dis pas qu'il ne faut pas à un moment donné adapter la société
02:27et la manière dont on est organisé à l'évolution de la société, mais ici j'ai le sentiment que ce sont des mesures quand même qui sont purement aveugles.
02:38Donc on a là, à un moment donné, un gouvernement qui prend des mesures, qui accroît la flexibilité au travail, qui allonge les carrières, qui ressort le travail de nuit
02:48et qui en même temps dit aux personnes, bon maintenant au boulot, que ce soit chômeur ou malade, au boulot.
02:54Donc l'impact sur la santé des Belges, il va être...
02:56Mais bien sûr, elle va être terrible. Et sur les femmes, je pense qu'on ne mesure pas l'impact que ça va avoir sur les femmes.
03:01Et je peux prendre l'un ou l'autre exemple et je les prendrai tout à l'heure.
03:06Donc je pense que ces mesures qui vont être prises sont vraiment des mesures complètement contradictoires par rapport à ce qu'il faudrait faire.
03:14Et elles sont complètement hors sol et déconnectées de la réalité de terrain.
03:20Et en plus, elles ont un caractère quand on dit...
03:23Oui, mais on nous avait demandé que les chômeurs se soient finis après deux ans.
03:26Mais il y a une rupture du contrat social dans ce qui va être fait. Je m'explique.
03:32Prenons une dame qui a entre 55 et 60 ans, qui a travaillé pendant 30 ans chez Cora.
03:3930 ans. Souvent à temps partiel, puisque généralement ses emplois ne sont pas des emplois temps plein.
03:46Elle, elle va se faire exclure. Et elle n'est pas dans les exceptions.
03:48Elle est temps partiel, elle n'est pas dans les exceptions.
03:50C'est ça le remerciement qu'on fait aux travailleuses et aux travailleurs qui, durant 30 ans, ont prodigué de loyaux services.
03:59Et le remerciement, c'est de les exclure, etc.
04:01Alors on me dit, mais non, il n'y a aucun problème.
04:04Ces personnes n'ont qu'à s'inscrire dans des formations de métiers en pénurie.
04:10Mais ces métiers en pénurie, c'est justement ces métiers qui rendent malades, qui ne sont plus accessibles.
04:16– Mais en pénurie, parce qu'ils sont trop difficiles. – Mais bien sûr, mais bien sûr, c'est souvent, dans le soin, c'est très difficile d'aller voir des infirmières qui ont 40, 45, 50 ans.
04:24Elles sont, et à force et orie plus, que ce soit dans l'horeca, que ce soit dans les plateformes de distribution, etc.
04:30Ce sont des métiers extrêmement pénibles.
04:33Qu'aucun de ceux qui ont décidé n'ont jamais effectué eux-mêmes.
04:36Donc ça, il faudrait quand même un peu le dire.
04:38Donc je trouve que là, il y a quelque chose de très grave qui est en train de se produire dans la société dans laquelle on est.
04:45C'est la rupture du contrat, la rupture du contrat social.
04:48Et je trouve ça extrêmement grave et extrêmement dommageable pour des femmes à qui on dit, mais non, allez suivre des formations et puis vous aurez encore droit à votre chômage.
04:59Mais c'est la dame qui a deux enfants, qui va garder les enfants ?
05:02Donc il y a à un moment donné, des mesures qui sont prises et qui sont complètement déconnectées de la vie réelle des gens.
05:09Et ça, je pense qu'il faut vraiment le souligner et ça me paraît être important.
05:14Alors on nous dit, mais on n'a pas les moyens.
05:17On n'a pas les moyens, il faut donc retourner à l'équilibre budgétaire.
05:21Deux choses là-dessus.
05:22La première, c'est que sur les 24 milliards d'économies qu'il conviendra de faire sous cette législature, 38% de l'effort, vous m'entendez bien, 38% de l'effort, ce sont les allocataires sociaux et les travailleurs qui vont le faire.
05:38Et la fameuse taxe sur les plus-values dont on ne sait toujours pas si elle va voir le jour, ce n'est que 6%.
05:43C'est un véritable scandale.
05:46Il y a une vraie politique assumée de faire mal à ceux qui sont déjà faits.
05:51Mais en même temps, les gens, ils ont voté pour la droite.
05:53Donc on ne peut pas...
05:54On peut y revenir après sur la bataille culturelle.
05:56La bataille des idées a été gagnée par la droite.
05:58Aucune bataille n'est gagnée définitivement.
06:00Deuxième chose, la productivité dans ce pays, elle augmente grosso modo de 1,2%.
06:05La productivité, c'est les travailleuses et les travailleurs.
06:08Le produit intérieur brut, la richesse produite de 1,8%.
06:13Les dividendes, 55%.
06:15Mais on est où là ?
06:17On est où dans cette répartition de la richesse ?
06:20Et ce qui m'inquiète le plus, je vais vous le dire, c'est le risque que l'on a d'explosion sociale.
06:26On est en train de détruire le contrat social qui a fondé l'État belge.
06:30Et la cohésion sociale est bien mise à mal dans les politiques qui sont menées.
06:34Donc je veux vraiment alerter maintenant.
06:36Et il en va de même sur le retour des malades au travail.
06:40Justement, vous posez la question.
06:41C'est exactement la même chose.
06:42Donc la Belgique compte un nombre très important de malades de longue durée.
06:45C'est même plus important proportionnellement que nos pays voisins.
06:49Ça, ça reste à démontrer.
06:50Allez, admettons.
06:51Bon, comment l'expliquer ?
06:53Alors il y a plusieurs causes.
06:54Il y a d'abord une société anxiogène aujourd'hui.
06:57Il y a une société anxiogène.
06:59Est-ce qu'on peut encore tenir la fameuse promesse que nos grands-parents ont faite à nos parents,
07:03que nos parents nous ont faite, ta vie sera meilleure que la mienne ?
07:05Dans le monde dans lequel on est, et ça échappe aussi à la Belgique, c'est beaucoup plus large que la Belgique.
07:12Donc il y a une société qui est anxiogène et qui fait qu'à un moment donné, des gens tombent en burn-out, tombent en dépression, décrochent du milieu du travail.
07:20L'autre élément, c'est qu'on a très très peu axé les politiques sur la prévention.
07:26Prévoir avant que ça ne se passe.
07:28Et prévoir, ça veut dire aussi qu'il y a une participation plus grande des employeurs,
07:34en manière telle que les conditions de travail soient acceptables, soient vivables, soient supportables par les travailleurs.
07:40Autre élément, c'est le détricotage minutieux depuis de nombreuses années du droit du travail,
07:46qui a affaibli cette flexibilisation, ce travail de nuit, tout ça.
07:49Est-ce que ça, ça va amener...
07:51C'est ça qui rend les gens malheureux, en fait.
07:53C'est un des éléments, c'est pas le seul élément, mais c'est un des éléments.
07:55Est-ce que ça, ça va amener une meilleure santé à des jeunes ?
07:58Peut-être parce qu'eux ont la capacité de le faire.
08:00À des plus âgés, le monsieur de 50 ans qui va être exclu du chômage,
08:04il va aller travailler dans des plateformes de distribution avec un travail de nuit, mais il ne va pas tenir longtemps.
08:08Il y a aussi l'austérité, bien sûr.
08:09On a affaibli les services publics.
08:11Je prends l'exemple de cette dame qui a des enfants, qui ne sait pas retrouver un travail parce qu'il n'y a pas de crèche.
08:16Donc les services publics sont affaiblis.
08:18Et puis enfin, il y a un modèle économique qui est arrivé, à mon sens, à son bout,
08:22et qui devient de plus en plus violent parce qu'il veut perdurer.
08:26Et ça, je pense qu'il faut aussi le dénoncer.
08:28Responsabiliser les médecins qui donnent des certificats médicaux, est-ce que c'est une bonne idée ?
08:32On sait que dans les mutuelles, il y a des médecins-conseils qui sont chargés parfois de contrôler les médecins.
08:38Est-ce que c'est une bonne idée de s'attaquer à ces médecins qui donneraient des certificats de complaisance ?
08:44Alors, on a entendu le cas de ce médecin dans la région bruxelloise qui fait payer les certificats à 13 euros.
08:50Mais permettez-moi de vous dire, M. Jacques-Marc, c'est la caricature de présenter ça comme étant ce que sont les médecins généralistes.
08:5599,99% des médecins généralistes sont des médecins de grande qualité qui essayent de faire leur travail du mieux qu'ils peuvent.
09:03Mais bien sûr. Mais maintenant, leur dire, vous allez devoir faire un bilan d'aptitude.
09:08Mais un, ils n'ont pas le temps. Et deux, ils ne sont pas formés pour cela.
09:12Et après, on va les profiler pour voir ceux qui vont donner le plus de certificats.
09:18Ils sont déjà profilés, par exemple, sur les médicaments.
09:21Mais on est dans une société du contrôle. Vraiment du contrôle et du contrôle.
09:25Permettez-moi de le dire, bête et méchant.
09:27Donc, il faut sensibiliser. Je pense qu'une des clés, c'est la prévention.
09:30C'est la prévention.
09:31Et ça, ça pourrait faire en sorte que des jeunes ne voudraient plus faire la médecine ?
09:35C'est ce qu'ils disent. Mais est-ce que ce n'est pas un peu exagéré ? Finalement, il y a quand même une passion dans ce métier.
09:40Alors, la plupart de ces médecins, c'est pour ça que je le dis, qu'ils ne sont pas formés pour ça et qu'ils n'ont pas envie de faire ça.
09:45Parce que quand on fait la médecine, c'est une vocation. On aime faire ce métier pour aider les autres.
09:50Donc, voilà. Les médecins conseillent, par contre, c'est un autre rôle. C'est un rôle de contrôle.
09:55Mais on m'expliquait ce week-end qu'un médecin, dans une société de médecine du travail,
10:00Vous savez combien de patients la personne doit voir sur une demi-journée ? Sur une matinée ? Vous savez combien ?
10:0623. Ça fait 5 minutes par personne. Mais on est où dans les modèles dans lesquels on est ?
10:11Comment voulez-vous qu'il y ait un véritable accompagnement ?
10:15Comment voulez-vous qu'à un moment donné, ces médecins puissent aider ces personnes ?
10:18Je trouve que dans toutes ces politiques, il n'y a plus d'humanité.
10:21L'humanité a disparu et c'est ça que je dénonce avec force.
10:24Alors, en deux mots, que propose Solidariste pour faire diminuer le nombre de maladies de longue durée ?
10:30Puisqu'il y a quand même un problème, là.
10:32Oui, on a, certainement, mais un problème plus global, qui n'est pas lié qu'au travail.
10:37C'est la société dans laquelle on est, je l'ai évoqué tout à l'heure, les services publics, l'austérité, le modèle économique.
10:42Mais sur les maladies en tant que telles, il est clair que nous devons mettre en place un meilleur mécanisme de prévention des risques psychosociaux.
10:50La plupart des gens qui sont en incapacité de travail, c'est soit pour des problèmes musculo-squelettiques, soit pour des problèmes de santé mentale.
10:58Et les jeunes n'y échappent pas, d'ailleurs.
10:59Ça, c'est les principaux...
11:00C'est les deux gros facteurs d'incapacité de travail, d'absence au travail.
11:07Je parle des absences d'une certaine durée, bien sûr.
11:11Donc, on doit être beaucoup plus dans la prévention et dans les conditions de travail.
11:16On doit responsabiliser les employeurs.
11:18Je veux bien qu'on responsabilise les mutuelles et les compagnies, mais qu'on responsabilise aussi beaucoup plus les employeurs que ce qu'on ne l'a fait, d'ailleurs, là,
11:24parce qu'on leur a encore octroyé un certain nombre de cadeaux, notamment la réduction du préavis pour 4 forces majeures, qui est passé de 9 à 6 mois.
11:34Donc, on doit beaucoup plus responsabiliser les employeurs et puis reconstruire une véritable relation au travail.
11:41Le travail... Nous, chez Solidariste, nous sommes partisans du retour au travail, mais à une triple condition.
11:47Un, que ce soit volontaire. Deux, que ce soit médicalement possible. Et trois, et c'est extrêmement important, que ce soit un vrai travail,
11:54pas un travail qui va déstructurer de nouveau la personne et la rendre malade, comme certains qu'on connaît aujourd'hui dans des secteurs lourds.
12:03On avait avant la sidérurgie, on avait des secteurs comme ça.
12:05On a cru que parce qu'on migrait vers une société de service, tout d'un coup, la pénibilité au travail n'allait plus être présente.
12:12Mais elle est plus présente que jamais.
12:13C'est puir, en fait.
12:14Mais bien sûr. Et quelle réflexion a-t-on dans ces politiques, avec ce gouvernement, sur la pénibilité au travail ?
12:20Zéro. Aucune. On n'en parle même pas.
12:23Le chapitre emploi, le chapitre emploi de la déclaration de politique gouvernementale ne parle que d'une chose, du chômage.
12:31C'est très révélateur, ce que je vous dis là.
12:33Oui, mais c'est très révélateur. Et donc, il n'y a pas de vision particulière de ce que devrait être le travail.
12:40Le travail, ça doit être un facteur d'émancipation. Ça doit être un facteur de lien social.
12:46Et 70% des gens, vous l'aurez vu dans le baromètre, dans le thermomètre que l'on vient d'effectuer,
12:5170% des gens qui sont en incapacité de travail ne demandent qu'une chose, c'est de retourner au travail.
12:56Ils ont envie de travailler.
12:58Donc, ce ne sont pas des paresseux qui...
13:00Mais bien sûr que non. Ça, c'est le cliché. C'est le mensonge sur lequel certains ont gagné les élections.
13:06Bien sûr que ce n'est pas le cas. Et ce qui m'inquiète beaucoup plus encore dans ce qui s'est passé,
13:10je reviens à la cohésion sociale parce que je suis vraiment très préoccupé par cela,
13:13c'est de monter les gens les uns contre les autres.
13:15Quand vous montez les gens contre les chômeurs, que vous les montez contre les malades,
13:19que vous les montez contre les migrants, ça, ce sont des politiques extrêmement dangereuses
13:22qui ressemblent furieusement à des politiques que nous avons largement dénoncées par le passé
13:28et que nous dénoncerons encore dans le futur parce qu'elles sont dangereuses pour la démocratie.
13:31Par le passé, c'est-à-dire ?
13:32Par le passé, dans les années qui viennent de s'écouler, ou même il y a plus longtemps.
13:36Ce sont des politiques qui ressemblent furieusement à ça.
13:38Donc, faisons attention à ce qu'on fait.
13:39Et je demande à ce gouvernement de mesurer l'impact de ces politiques.
13:44Il n'y a personne qui a la vérité absolue dans ce pays.
13:46On se grandit parfois de dire, il y a quelque chose qui m'avait échappé.
13:49Je corrige le tir.
13:51Et qu'on mesure l'impact que les mesures qui vont être prises en matière de pension
13:57et en matière de chômage vont avoir sur le secteur de l'invalidité.
14:01Alors, autre chose, est-ce que le financement des soins de santé est suffisant
14:04dans les budgets qu'on a pu voir jusqu'à maintenant, dans ce qui a été annoncé par ce gouvernement ?
14:09Alors, je vais être tout à fait objectif.
14:11C'est probablement le secteur qui était le plus épargné par rapport au chômage
14:15ou par rapport aux pensions.
14:18Il n'en demeure pas moins vrai que se gausser, se glorifier de dire
14:22on a réinvesti 4 milliards dans les soins de santé,
14:25c'est de la pure rhétorique.
14:26C'est des mots, en fait.
14:28Sous la Vivaldi, certes, il y avait le Covid, mais c'était 12 milliards.
14:32Même si j'enlève le Covid, on est au-dessus des 4 milliards.
14:35Mais bon, je salue ceux qui se sont battus
14:37pour que le financement des soins de santé soit à la hauteur
14:40parce que d'autres ne voulaient pas financer les soins de santé.
14:43Bien. Sous la législature, c'est 4 milliards.
14:46C'est la norme de croissance, ce qu'on appelle dans le jargon la norme de croissance,
14:49donc l'augmentation annuelle du budget.
14:51Si je compare cela aux estimations du bureau du plan,
14:55ce n'est pas Solidaris, ce n'est pas la FGTB,
14:58ce n'est pas Thierry Botson ou Jean-Bascal Laby qui le disent.
15:01C'est le bureau fédéral du plan.
15:02Ce n'est pas 4 milliards qu'il faut, c'est 5 milliards.
15:05À politique constante.
15:07Donc sans politique nouvelle.
15:09Or, on sait qu'il y a des besoins.
15:10Donc il manque déjà ce milliard.
15:11D'où va-t-il venir ?
15:13Ça va être les discussions qu'on va avoir durant toute cette législature.
15:17Il y a pratiquement 360 millions d'économies à faire sur 2025.
15:20450 millions sur 2026.
15:23Donc on y est, hein ?
15:23On y est devant ces difficultés.
15:28Or, on sait qu'il y a des secteurs qui ne sont pas financés correctement.
15:31Que ce soit les maisons médicales,
15:31que ce soit les infirmières et le nombre d'infirmières dans les hôpitaux,
15:37les soins dentaires, les lunettes.
15:39Enfin, il y a plein de...
15:40La santé mentale.
15:41Il y a plein de secteurs dans lesquels il faut évidemment réinvestir.
15:44Et donc on verra maintenant quelle concertation,
15:46et je plaide pour la concertation là,
15:48avec Vandenbrouck qu'on peut avoir sous cette législature.
15:52Mais ça va être une législature difficile.
15:54C'est déjà un fameux budget, les soins de santé en Belgique.
15:56C'est quand même quelque chose...
15:58On a quand même un système de santé qui est relativement performant.
16:02Non, qui est performant.
16:04C'est un bon système de santé.
16:05Et ne me faites pas dire ce que je ne dis pas.
16:07Je sais qu'il y a moyen, parfois dans certains secteurs,
16:10de mieux investir l'argent,
16:12de le réorienter là où il doit être réorienté.
16:14Ça va être un des axes, une des mesures qui va devoir être prise.
16:18Mais globalement, ce secteur doit être financé
16:20parce qu'il y a vieillissement de la population,
16:22parce qu'il y a les maladies chroniques,
16:23parce qu'il y a la hausse du coût de certains traitements
16:28ou de certains équipements médicaux.
16:30Et puis il y a un secteur qui, là, est exonéré de tout.
16:33C'est le secteur pharmaceutique.
16:34Le secteur pharmaceutique, pas d'efforts particuliers à faire.
16:37Je ne dis pas qu'ils n'en font pas, mais ils pourraient en faire beaucoup plus.
16:39On estime qu'il y a là, nous,
16:41selon des modèles internationaux sur le prix du médicament,
16:44qu'il y a un milliard d'euros à aller rechercher dans le secteur du médicament.
16:47Les médicaments en Belgique sont beaucoup trop chers.
16:50Mais oui.
16:50Si on compare par exemple avec la France...
16:52Oui, mais même en France ou même en Allemagne,
16:54ils sont trop chers.
16:55C'est le lobby de l'industrie pharmaceutique qui fait l'eau.
16:57Ils sont trop puissants pour les États ?
16:59Bien sûr, parce que ce qu'il faudrait, c'est un prix européen du médicament.
17:02Et là, je pense qu'on pourrait régler un certain nombre de choses.
17:05Donc voilà, en soins de santé,
17:06ça va être une législature difficile, compliquée.
17:09Mais je veux être tout à fait objectif.
17:11Le financement a été supérieur à ce qu'il est dans d'autres secteurs,
17:16comme le chômage ou les pensions.
17:18Mais il n'est pas suffisant.
17:19Il y aura un milliard d'euros à aller chercher sous cette législature.
17:21Il y a quand même un ministre de l'Arizona qui trouve un peu grâce à vos yeux, alors.
17:26Oui, mais j'essaye d'être objectif.
17:28Je pense que vos reuils et les engagés pour prendre deux parties ont été sensibles à la santé.
17:36Sensibles jusque-là.
17:36Moi, j'attends les résultats.
17:37Je ne me prononce pas tant que je n'ai pas vu exactement la feuille de route telle qu'elle va être définie.
17:43Alors, avec la fin des allocations de chômage après deux ans,
17:46on en a déjà un petit peu parlé.
17:48Mais qu'est-ce que ça va avoir comme conséquence, selon vous,
17:51outre le fait qu'on sait que les gens pourraient basculer vers la CPS,
17:55et encore certainement pas tous ?
17:57Mais vous savez, allez, prenons le cas d'une dame ou d'un homme, peu importe.
18:021er janvier, il va recevoir une lettre,
18:04cette personne va recevoir une lettre vers juillet,
18:06en lui disant « Dans six mois, vous êtes exclu du chômage ».
18:09Et va aller au CPS.
18:11Le CPS, qui vont recevoir, ce n'est pas 100 000,
18:15c'est plus de 100 000.
18:17Parce que Carinval se fait,
18:20je vous avoue avoir été choqué de l'attitude de cette personne,
18:24qui se glorifie d'exclure 100 000 personnes
18:26et de les précipiter dans la précarité,
18:28et pas de les mettre à l'emploi.
18:30Parce que je vais vous expliquer pourquoi ils ne vont pas les remettre à l'emploi.
18:32100 000, c'est presque 140 000.
18:35Si on prend ceux qui ont plus de 55 ans,
18:36les temps partiels, etc.
18:38Les temps partiels ne sont pas dans les exceptions,
18:40contrairement à ce qu'ils peuvent dire à un moment donné.
18:42On va aller au CPS au mois de janvier.
18:44Comment voulez-vous que les CPS,
18:46face à ces 100, 140 000 personnes qui vont arriver ?
18:50Donc des dossiers vont peut-être être traités en janvier,
18:53d'autres en avril,
18:54et d'autres en septembre.
18:55Les gens, ils font comment pour vivre entre-temps ?
18:58Et on me répond,
18:59ah mais c'est facile,
19:00ils n'ont qu'à suivre des formations pour des métiers en pénurie.
19:03Et la boucle est bouclée.
19:04On revient à ce qu'on a dit tout à l'heure.
19:06Ces métiers, ce sont les métiers justement qui rentent malades.
19:10Et puis, on a ces personnes qui vont être exclues,
19:14et il y a combien d'emplois vacants ?
19:16On est en Wallonie dans un rapport grosso modo de 1 à 6.
19:20Un emploi pour 6 personnes.
19:22C'est impossible.
19:22Mais bien sûr.
19:23Et ces personnes, imaginons même qu'elles aillent suivre ces formations
19:26pour des métiers en pénurie.
19:28Et qui va organiser ces formations ?
19:31Je suis halluciné du peu de préparation
19:34et du peu de clairvoyance de certaines décisions.
19:37On prend des décisions,
19:39et ça me choque beaucoup en politique,
19:41et on ne mesure pas l'impact que ça a sur les gens.
19:44Sur M. Benoît, sur M. Bruno, sur Mme Josiane, etc.
19:48On ne mesure pas l'impact que ça a.
19:49Ici, on a pris des mesures idéologiques, budgétaires et politiques,
19:55on va le dire comme cela.
19:56Mais on ne mesure pas l'impact global que ça va avoir sur les gens.
20:00Et on va précipiter bon nombre de personnes
20:02dans de grandes difficultés,
20:04voire certaines et certains dans la précarité.
20:07Et je ne voudrais pas être une femme aujourd'hui
20:08qui est dans cette situation aujourd'hui.
20:10Ça va être très compliqué pour les femmes.
20:12Est-ce que vous diriez que c'est une mesure communautaire ?
20:14Parce qu'on sait que les Flamands seront nettement moins touchés.
20:17Donc les CPS flamands seront nettement moins touchés.
20:19Alors que la Wallonie risque d'être vraiment,
20:22et les communes wallonnes, dans de graves problèmes.
20:24Est-ce que c'est une décision communautaire ?
20:26J'ose croire que ce n'était pas la volonté
20:28de prendre une mesure communautaire.
20:30Mais in fine, dans la traduction de la mesure,
20:34elle va plus impacter la Wallonie que la Flandre,
20:36qui est quasi au plein emploi.
20:38Donc il y a ce côté communautaire indirect.
20:40On va le dire comme ça.
20:40Je fais un peu preuve ici d'un peu de naïveté,
20:43mais je suis conscient de ma naïveté.
20:45Vous n'y croyez pas vraiment ?
20:46Je suis conscient de ma naïveté.
20:47Non, parce que ce sont des mesures idéologiques.
20:49Donc il fallait, dans un accord de gouvernement,
20:51faire face à ça.
20:52Et puis, moi je crois que le rôle du politique,
20:54ce n'est pas toujours d'écouter ce que dit la population
20:58quand elle émet des critiques à l'égard d'un autre groupe dans la population.
21:03Je crois que le rôle du politique, c'est de rassembler la population
21:07dans un projet global, une aventure humaine commune.
21:10La cohésion sociale, j'y tiens comme à la prunelle de mes yeux.
21:13Ce n'est pas en opposant les travailleurs aux chômeurs ou aux malades
21:16que vous allez régler le problème de la société.
21:18Qu'est-ce qu'on va faire de tous ces gens
21:19qui vont à un moment donné vivre en parallèle de la société ?
21:23Est-ce qu'on peut se glorifier de ça quand on est politique ?
21:25Moi, ce n'est pas mon sens de la politique.
21:27Alors, on va parler pour terminer un petit peu de votre mutualité.
21:31Solidaris a demandé le statut d'entreprise en difficulté.
21:36Comment est-ce qu'on en est arrivé là ?
21:38En fait, d'abord, le terme.
21:40C'est entreprise en difficulté.
21:41Ce n'est pas moi qui l'invente.
21:42C'est le terme qui est dans la loi.
21:43Donc, ça peut faire peur.
21:44Mais je vous rassure, Solidaris est très, très loin de la faillite.
21:48Donc, Solidaris prend des mesures pour retourner à l'équilibre financier.
21:52Parce que depuis de nombreuses années,
21:54à la fois, on a demandé beaucoup plus de choses aux mutualités,
21:57beaucoup plus de missions,
21:58notamment sur les retours des malades au travail.
22:01Mais on n'a pas financé ces missions à la hauteur des besoins
22:04qui avaient été exprimés par le gouvernement.
22:06Donc, à la fois, je suis satisfait qu'on pense que les mutualités
22:10sont des acteurs importants et qu'elles peuvent apporter des choses à la société.
22:15Mais j'aimerais bien alors qu'on finance également les mutualités
22:17à la hauteur de ce qu'on leur demande.
22:19Donc, chaque mutualité est confrontée à la même difficulté.
22:23Nos dépenses ont augmenté plus vite que nos recettes.
22:26Nos dépenses, c'est 80% de frais de personnel.
22:28Donc, voilà.
22:29Et j'en suis très, très heureux parce qu'il y a une richesse humaine extrêmement importante
22:32chez Solidaris et chez les autres mutualités,
22:35également, notamment nos collègues de la mutualité chrétienne.
22:38Mais on est confrontés à la même difficulté que toutes les autres mutualités.
22:43C'est-à-dire cet effet ciseau dont nos dépenses progressent plus vite que nos recettes.
22:48Et donc, nous devons prendre aujourd'hui un certain nombre de mesures.
22:51Mais on va prendre les mesures d'économie dans le respect du personnel.
22:55C'est de permettre à des gens de partir pour une dernière fois
22:57puisque la mesure va être supprimée une dernière fois en pension,
23:02enfin, avant l'âge de la retraite.
23:04Et donc, il y a d'autres mesures que nous prenons également sur nos frais généraux, etc.
23:07Bien sûr que nous allons prendre pour retourner à l'équilibre.
23:09Et ça, c'est quasi fait.
23:10Je pense que dans peu de temps, nous serons effectivement à l'équilibre financier
23:13avec un objectif majeur pour moi.
23:15C'est d'assurer le plus grand service de grande qualité à nos affiliés dans la proximité.
23:21Est-ce qu'il y aura des conséquences pour vos affiliés de ces difficultés ?
23:24Non, parce que je pense qu'avec les mesures qu'on va prendre, que du contraire.
23:27Nous allons même accroître le service à l'égard de nos affiliés.
23:30Ah bon ? C'est une bonne nouvelle alors.
23:32Je pense que c'est une excellente nouvelle pour nos affiliés.
23:34Est-ce que c'est bien le rôle d'une mutualité d'organiser, par exemple, un festival de musique ?
23:38Alors, moi, je suis de ceux qui pensent.
23:40Je ne suis pas le seul.
23:42C'est ça, on vous le reproche souvent.
23:43Oui, oui, oui, surtout une personne.
23:45Mais on pourrait s'intéresser aussi au football.
23:48Mais je pense que la culture fait partie de la santé.
23:52Quand on est en santé, il y a la santé physique, morale, psychique.
23:56Et le fait d'organiser un événement qui rassemble des gens, qui leur permet de vivre de grands moments de convivialité, c'est une fête populaire et familiale.
24:06Je pense, moi, que ça fait partie du rôle d'une mutualité que de promouvoir des valeurs dans la société dans laquelle on est.
24:14Je pense qu'on a besoin, à un moment donné, d'un positionnement.
24:17Je sais que ça déplait.
24:18Quand on est un corps intermédiaire, comme nous nous sommes, c'est-à-dire qu'on est quelque part des empêcheurs de tourner en rond, comme le sont les syndicats ou certains secteurs associatifs.
24:25Vous êtes quand même dans le vide, hein, donc ?
24:27Oui, bien sûr, j'ai aucun problème. Aucun problème. Ça me fait presque ni chaud ni froid. J'ai vraiment aucun problème avec cela.
24:33Et je continuerai à faire ce que je fais aujourd'hui parce que je crois qu'il est nécessaire que des personnes, que des structures s'expriment dans la société en disant à un gouvernement
24:42ce que vous faites ne va pas, vous allez précariser des personnes, vous allez empêcher des personnes de vivre une vie digne, vous allez porter atteinte à la cohésion sociale.
24:51C'est ce que Solidarize fait et c'est ce que je continuerai à faire dans les mois et dans les années qui viennent.
24:55Donc les solidarités ne sont pas menacées ?
24:58Les solidarités ne sont pas menacées. On va même varier les plaisirs. Vous verrez ça lors d'une prochaine édition.
25:02Ah, voilà. Eh bien, M. Laby, merci de...
25:05C'est moi qui vous remercie, M. Jacques Maire. Merci beaucoup.