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Dans son édito du 26/04/2025, Jules Torres revient sur le drame de Nantes où une adolescente a été tuée de 57 coups de couteau dans son lycée.

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Transcription
00:00Oui, il était un peu plus de midi jeudi dans un lycée de Nantes quand des élèves s'apprêtaient à terminer leur matinée de cours.
00:08L'un d'eux a sorti un couteau, une adolescente de 15 ans est morte, l'assassin était un camarade, il s'est acharné sur elle, 57 coups de couteau, elle s'appelait Lorraine.
00:17Ce n'était ni une dispute ni un accident, c'était une exécution. Le crime, cette fois encore, n'est pas venu de la rue, il a surgi du dedans, de nos écoles, de notre jeunesse, de notre société.
00:27Alors l'on recommence, minutes de silence, cellules psychologiques, déplacements ministériels, les mêmes mots, les mêmes mines graves, on parle d'émotion, on parle de drame,
00:37comme si le lexique du chagrin pouvait tenir lieu de politique publique.
00:41Mais à force de deuils nationaux, la France devient un pays en habit noir, marchant d'un enterrement à l'autre, une rose à la main, les yeux embués et les poings dans les poches.
00:49Car la vérité, elle est brutale, l'école est devenue un champ de risque, non plus le sanctuaire, mais un lieu d'alerte, de menace, de mise en danger.
00:56Dans ce pays, désormais, un enfant peut mourir pour avoir franchi la grille d'un établissement scolaire.
01:01Voilà où nous en sommes. Combien de Lorraine encore, combien de cercueils faudra-t-il avant que l'on réagisse ?
01:07L'émotion, oui, mais l'émotion seule est une lâcheté si elle n'est pas suivie d'action.
01:11Le réel ne demande pas nos larmes, elle exige nos lois.
01:13Ce drame est devenu, quelque part, l'illustration d'une violence qui est incontrôlable dans notre pays.
01:19Oui, le mot a longtemps été honni, repoussé, contesté.
01:23En sauvagement serait un mot tabou, un mot sale, un mot interdit.
01:27Ce serait une exagération, une vue de l'esprit, mais il suffit d'ouvrir les mots.
01:32C'est le mot juste, le seul mot juste.
01:34Au gouvernement, seul Bruno Roteuil a eu le courage de nommer les choses par leur nom.
01:38La violence ne se contente plus d'exister, elle déborde, elle infiltre partout.
01:42Tout le temps, elle est brute, elle est crue, elle est gratuite.
01:45Elle surgit dans une salle de classe, dans un bus, à la sortie d'une fête,
01:49dans un hôpital ou parfois même dans une église.
01:51L'ensauvagement, ce n'est pas un concept, c'est une élève de 15 ans poignardée dans sa classe.
01:56C'est un professeur exécuté devant ses élèves.
01:59C'est un jeune de 16 ans tabassé après une fête.
02:03C'est notre société qui s'effondre.
02:05On nous parle de faits divers, mais il n'y a plus de divers,
02:08il n'y a plus que du répétitif, de l'ordinaire, du prévisible.
02:11L'ensauvagement est devenu la bande-son funèbre de la France contemporaine.
02:15À chaque fois, les signaux étaient là,
02:17une fascination pour le plus horrible des criminels du XXe siècle,
02:20un manifeste délirant, des alertes lancées, des cris étouffés.
02:24À chaque fois, on savait, à chaque fois, on n'a pas voulu voir.
02:27Pourquoi ? Parce que les institutions plient sous le poids de leurs propres faiblesses.
02:31Parce que, dans cette France qui tremble,
02:34mieux vaut minimiser, relativiser et attendre que le pire se soit passé.
02:37Mais à ce jeu-là, c'est toujours la barbarie qui gagne.
02:40C'est elle qui avance et qui y détruit.
02:42Et c'est la France qui recule.
02:44Mais quand un pays abandonne ses enfants à la violence,
02:46eh bien, il n'est plus très loin d'abandonner son propre avenir.
02:49Jules, les Français en ont marre de tout ça, ils n'en peuvent plus.
02:52Que sont-ils encore en droit d'attendre de nos responsables politiques ?
02:55Ils sont en droit d'attendre que le temps des constats, eh bien, il est terminé.
03:00Il n'y a plus rien à diagnostiquer.
03:02Tout est sous nos yeux.
03:03Et il n'y a plus d'excuses pour ne pas agir.
03:05Chaque mort en est la preuve.
03:07Nous ne sommes plus dans l'accidentèle, mais dans le systémique.
03:10Dans un pays où des enfants tombent dans les écoles,
03:12les discours d'émotion ne sont plus qu'une forme d'imposture.
03:15Depuis des années, les gouvernements promettent
03:17plus de moyens, plus de psychologues, plus d'écoute.
03:20Mais les promesses, comme les fleurs déposées devant les grilles,
03:23ne ramènent pas les morts.
03:24Protéger n'est pas une option.
03:26C'est la première mission d'un État digne de ce nom.
03:28Cela passe par des mesures claires.
03:29Sécuriser les établissements, ça c'est la première des choses.
03:32Ensuite, il faut former les personnels, expulser les fauteurs de troubles
03:35et surtout, rétablir l'autorité jusque dans les moindres recoins du pays.
03:39Et frapper fort, frapper vite, chaque fois qu'un signe de bascule apparaît.
03:43Car il ne s'agit plus d'éviter la colère.
03:45C'est bien trop tard.
03:46Il s'agit d'éviter l'effondrement.
03:48Un pays qui ne protège plus ses enfants n'est plus un pays.
03:51C'est un territoire livré à la violence, à la peur et surtout au chaos.
03:55À Nantes, ce n'est pas seulement une jeune fille qui a été tuée.
03:57C'est un avertissement qui a été lancé, lancé à la France, lancé à la République.
04:02C'est un avertissement que nous entendrons ou que nous paierons.
04:05La France est un carrefour.
04:07Soit elle se redresse, soit elle tombe.
04:09Sous-titrage Société Radio-Canada

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