Marie-Estelle Dupont : «Il y a cinq ans, j'écrivais qu'on allait avoir une génération de plus en plus déprimée et violente. Malheureusement, les chiffres sont venus corroborer mes propos. [...] Ce jeune a perdu tous ses appuis pour devenir un adulte équilibré.»
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00:00Il y a cinq ans, j'écrivais dans le Figaro qu'on allait avoir une génération de plus en plus déprimée, de plus en plus violente.
00:06On me disait que j'étais alarmiste et malheureusement, les chiffres aussi bien de la violence que de la santé mentale sont venus corroborer mes propos.
00:13Alors, je pense que c'est important de rappeler deux éléments de contexte.
00:18Le premier, c'est que ce jeune était probablement en sixième au moment des confinements,
00:23c'est-à-dire qu'au moment de la puberté et de cette période tellement fragile où on est tellement influençable
00:30et tellement suggestible et tellement poreux au discours ambiant, il a perdu tous ses appuis pour devenir un adulte équilibré.
00:37C'est-à-dire qu'il n'avait plus d'interaction sociale, les apprentissages étaient de mauvaise qualité.
00:40On sait bien que l'instruction est un appui très important pour la santé mentale
00:44puisque plus on peut élaborer une pensée, plus on peut prendre de recul avec ses pulsions, etc.
00:49Donc, il y a effectivement certainement un impact de la crise sanitaire d'une manière générale
00:54sur l'augmentation des passages à l'acte, mais d'une manière plus générale, depuis 40 ans,
00:58je pense quand même qu'on peut dire qu'on vit dans une société qui offre à nos jeunes
01:02beaucoup plus de motifs de violence que de motifs d'espérance.
01:06Parce que moi, j'ai 42 ans et sincèrement, depuis que je suis née, je n'entends parler que de crise.
01:10Donc, c'est la fin du monde écologique, c'est la fin du monde sanitaire, c'est la fin du monde économique,
01:15c'est la fin du monde parce qu'il va y avoir la guerre.
01:17Donc, je trouve que pour des jeunes, c'est un petit peu compliqué d'élaborer les angoisses
01:21liées naturellement à leur âge quand ils sont dans un contexte aussi peu porteur.
01:27Et je pense que c'est important de remettre ce geste dans ce contexte global
01:32pour pouvoir en tirer les leçons en termes de responsabilité collective de la part des adultes.
01:36Parce que c'est très bien que M. Retailleau dise qu'on a cassé les figures d'autorité.
01:41Effectivement, tous ses amis depuis 40 ans ont bien sapé tous les cadres symboliques
01:47structurants de la société.
01:49Mais je ne crois pas que ce soit en allant vers une fuite en avant de la société de contrôle
01:52avec des caméras, des portiques de sécurité, qu'on va redonner des appuis internes
01:57et des enveloppes psychiques à nos jeunes.
01:59Donc, je pense qu'il ne faut pas se tromper de combat.
02:01Et je trouve qu'il y a un point qui est très intéressant dans ce passage à l'acte.
02:08C'est le support idéologique sur lequel il s'appuie pour rationaliser en fait sa pulsion de mort.
02:14C'est-à-dire qu'il prend un couteau, il vient égorger, poignarder ses pères,
02:20donc des gens de son âge.
02:21C'est-à-dire que les jeunes sont à la fois les plus violents,
02:23mais aussi les plus victimes de violences.
02:25Et je trouve, enfin moi, ça fait écho pour moi, à quelque chose de l'ordre du sacrifice.
02:32Et quand il dit qu'il faut passer à une misanthropie active,
02:36parce que dans le petit manifeste qu'il a posté avant de passer à l'acte,
02:39il parle finalement de nos péchés environnementaux, d'un écosyde mondialisé,
02:46et du fait qu'il faut que l'être humain finalement soit dans une rédemption,
02:54mais aussi une culpabilisation de toutes ses fautes environnementales.
02:57Alors on le voit en ce moment avec le mouvement No Kids,
02:59il ne faut pas faire d'enfants pour sauver la planète,
03:01il ne faut plus bouger, il faut des confinements écologiques, etc.
03:05En fait, il s'inscrit là-dedans.
03:08Et moi, ce qui m'inquiète beaucoup, c'est que je me dis,
03:09mais on est dans une société qui s'est tellement déspiritualisée
03:13qu'en fait, les jeunes qui sont fragiles,
03:17ils ont un choix immense d'idéologies vers lesquelles régresser et se radicaliser.
03:26Très souvent, c'est l'islamisme radical qui est très présent sur les écrans,
03:30mais ça peut être un militantisme politique ou écologique aussi.
03:34Et là, je trouve que son discours est extrêmement préoccupant,
03:37parce qu'on ne peut pas accuser simplement les réseaux.
03:39Ce militantisme écologique où la déesse mère Gaïa serait persécutée
03:45par les méchants êtres humains qui polluent et qui se reproduisent,
03:48malheureusement, c'est une frange aussi des adultes écologistes radicaux
03:55qui véhiculent ce discours.
03:58Et je trouve que c'est très dangereux,
04:00parce que ça donne une accroche et un support
04:02à des jeunes qui ont visiblement des pathologies mentales latentes.
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