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Dans cette archive rare diffusée sur RDI (Canada), Johnny Hallyday se confie à la journaliste France Nadeau dans une interview intime, réalisée le 5 avril 1966, juste avant l’un de ses concerts. Une plongée unique dans l’univers du jeune rockeur français en pleine ascension, à l'époque où son aura dépasse déjà les frontières de l'Hexagone.

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Musique
Transcription
00:00Johnny Hallyday, vous faites votre rentrée à Paris après deux ans d'absence.
00:04Vous commencez d'ailleurs votre tour de chant par une chanson qui s'appelle « Tu oublieras mon nom ».
00:09Non, ce n'est pas tout à fait exact. Je commence mon tour de chant par un potpourri de mes anciennes chansons.
00:14Ah bon, mais vous chantez cette chanson « Tu oublieras mon nom ».
00:17Tout de suite après le potpourri, oui.
00:18Oui, et bien le public parisien vous a bien prouvé qu'il n'avait pas oublié votre nom.
00:22Mais vous, est-ce que vous avez l'impression d'avoir changé pendant ces deux ans ?
00:26Changer, si vous parlez, si vous voulez dire changer, de chanter des chansons plus douces, j'ai peut-être changé un peu, oui.
00:37Mais enfin, j'ai quand même fait attention de ne pas trahir le public qui m'a aimé avec des chansons rapides.
00:44Oui, vous faites beaucoup de rock.
00:45J'en ai quand même conservé quelques-unes dans mon tour de chant. Peut-être moins qu'avant, mais quand même quelques-unes encore.
00:50Et le yéyé, c'est fini selon vous ?
00:52Vous savez, le yéyé, moi, je n'ai jamais fait partie du yéyé.
00:57C'est stupide à dire, parce que pour des gens qui ne connaissent pas ce que veut dire de la musique,
01:03rythme et blues, sitôt qu'il y a une batterie, c'est de la musique yéyé pour eux.
01:07Mais pour moi, yéyé, je n'étais pas tout à fait dans la musique yéyé,
01:13parce que c'est la musique qui est venue après moi, le yéyé.
01:15Oui, d'ailleurs, vous l'avez dit, vous avez dit le yéyé, c'est pas moi.
01:17Alors, qu'est-ce que c'est, vous ? C'est chanteur de rock, quoi ?
01:21J'ai commencé avec du rock, oui.
01:24Et puis, je me suis, ensuite, je me suis basé beaucoup plus vers la musique rythme et blues,
01:32la musique comme on l'a fait à Harlem, par exemple.
01:37Oui, je sais, d'ailleurs, pour vous avoir entendu dans une boîte de nuit que vous êtes un très, très bon interprète de blues.
01:47Vous avez fait un disque, d'ailleurs, m'avez-vous dit.
01:49Enfin, j'ai fait un 30 centimètres où j'ai composé les 12 chansons.
01:55Et sur les 12 chansons, il y en a deux qui sont typiquement rythme et blues.
01:59Et là, à la fin du mois, enfin, après l'Olympia, je commence, je vais faire un 45 tours qui s'appelle Johnny Hallyday chante le blues.
02:07Et pourquoi ne connaît-on pas ce disque, ces disques-là ?
02:11Au Canada ?
02:12Oui.
02:12Eh bien, parce que ce disque vient de sortir en France, il y a à peine 15 jours qu'il est sorti.
02:19Et on ne le trouve même pas encore partout en France.
02:21Alors, ce sera assez difficile qu'on l'ait déjà au Canada.
02:24C'est une excellente raison.
02:25Johnny Hallyday, on vous voit toujours entouré de beaucoup de personnes que certains appellent votre cours.
02:32On voit des gens qui entrent et qui sortent de votre loge constamment.
02:36Est-ce que c'est indispensable à votre personnage ou est-ce que c'est parce que vous avez beaucoup d'amis ?
02:42Non, c'est que je veux dire que j'ai beaucoup de gens qui travaillent pour moi.
02:44J'ai tout d'abord des amis, des vieux amis à moi.
02:51Et puis ensuite, j'ai mon secrétaire, j'ai mes musiciens.
02:54Enfin, il y a beaucoup de monde qui travaillent autour de moi.
02:57Et comme j'ai horreur du genre de chanteur, vedette, dans ma loge, il n'y a que moi qui y rentre.
03:05Elle est ouverte à tout le monde et tout le monde y rentre ou en sort comme il a envie.
03:10Vous avez beaucoup d'amis ?
03:11J'en ai deux, trois. Deux, trois très bons que je considère comme mes meilleurs amis.
03:15Qui sont-ils ? Je ne veux pas que vous les nommiez.
03:18Je ne veux pas que vous les nommiez.
03:20Ce sont des chanteurs, des gens du métier ?
03:22Absolument pas, non. Mon meilleur copain, c'est mon plus vieux copain.
03:26Ça fait 15 ans que je le connais.
03:28On a été élevés dans la même rue, dans le même quartier à Paris.
03:33Et il est toujours resté mon copain.
03:35On se voit pour un signeur tous les jours.
03:36Et puis j'en ai d'autres qui sont des copains que je connais depuis deux, trois ans et qui travaillent avec moi.
03:43Est-ce que vous êtes un homme gay dans la vie ?
03:46Ça dépend des moments.
03:47J'ai mes moments de gaieté, j'ai mes moments de sérieux comme tout le monde.
03:54On a souvent l'impression que vous avez un peu la nostalgie du temps où vous étiez un blouson noir.
04:01Oh, absolument pas. J'ai passé du bon temps.
04:04Je n'ai jamais été vraiment un blouson noir.
04:06Je suis né dans un quartier à Paris, où pour ainsi dire, tous les garçons qui sont nés ont été plus ou moins un blouson noir,
04:14puisque je suis né à Pigalle.
04:15Mais j'ai été comme tous les garçons, un peu blouson noir.
04:22Et puis ensuite, quand j'ai commencé à avoir 15 ans, il a fallu que je commence à gagner ma vie.
04:27Alors j'ai commencé à travailler.
04:29Et puis je suis trouvé comme ça.
04:32Mes parents étaient artistes.
04:33J'ai commencé à chanter.
04:35Ça a marché.
04:37Ça a commencé à marcher vers 18 ans.
04:40Facilement ?
04:40Facilement, c'est-à-dire, pour quelqu'un comme Aznavour, oui, ça a été facile à côté de lui,
04:47parce que lui, il a mis 15 ans pour réussir.
04:50Il en a vraiment ce qu'on appelle dans le métier, il en a bavé.
04:53Moi, j'en ai bavé, mais d'une autre façon, ça n'a pas été vraiment long.
04:56Seulement, dans le métier, quand ça ne marche pas très bien, on dit on se prend un bide.
05:01C'est toujours trop long.
05:01On se prend un bide et en parlant des bides, je m'en suis pris des sérieux quand même.
05:06Vous avez dit un jour dans une entrevue, où on vous l'a fait dire,
05:10« Maintenant, je suis triste à mourir. Pourquoi est-ce que vous ne vous amusez plus, maintenant ? »
05:17« D'abord, je n'ai jamais dit ça. »
05:20« Alors, êtes-vous triste à mourir ? »
05:24« Non, admettons simplement que je n'ai pas un caractère très, très drôle.
05:33Je pense beaucoup trop. Je suis un peu ma justice sur les bords. »
05:40« Je croyais que c'était le privilège des femmes, ça. »
05:43« Non, pourquoi non ? Je suis assez torturé comme garçon.
05:48Et pour des petites choses de rien, je m'en fais des montagnes. »
05:52« Oui, d'ailleurs, on a souvent identifié votre personnage à celui de James Dean.
05:58Est-ce que vous trouvez que vous avez quelque chose de semblable ? »
06:01« Absolument pas, parce que je ne connais pas James Dean, j'en regrette,
06:05parce que ça a été pendant très longtemps mon acteur favori, mon idole même.
06:10Je ne peux pas me comparer à lui, parce que je ne le connais que d'après ses films.
06:17Et c'est très possible que James Dean, en dehors de ses films,
06:20ait été quelqu'un de totalement différent des rôles qu'il jouait à l'écran. »
06:27« Vos fans vous appellent Johnny le roi. »
06:31« Johnny le roi, dites-nous, est-ce que les rois sont heureux ? »
06:36« Écoutez, je ne sais pas si je suis un roi, non, je suis un chanteur.
06:41Et puis, dans mon métier, j'essaye de faire le mieux que je peux.
06:45Je suis heureux et je suis malheureux comme tout le monde, ça dépend. »

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