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Regardez Les invités de RTL avec Olivier Boy du 23 décembre 2024.

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00:00RTL, au coeur de l'actu.
00:03Jour de deuil pour Mayotte aujourd'hui, le Président de la République, Emmanuel Macron, qui appelle les Français par exemple à se recueillir tout à l'heure à 11h du matin.
00:11Et on est avec Estelle Youssoupha, députée de Mayotte. Bonjour Madame.
00:16Bonjour.
00:16Donc journée de deuil nationale, c'est très rare d'ailleurs, d'isolon, il y en a eu 10 depuis le début de la 5ème République.
00:23Est-ce que c'est un signe, un message important pour vous, ce jour de deuil national ?
00:28Oui, je pense que ça manifeste la solidarité de la nation. Et pour Mayotte, qui est dans une telle tragédie, c'est quelque chose d'important.
00:38Nous sommes en plus un territoire singulier dans la République. Nous sommes Français depuis 1841, mais départements seulement depuis un peu plus d'une dizaine d'années.
00:49Et souvent, nos compatriotes ne connaissent pas notre histoire, ont même du mal à nous situer géographiquement.
00:57Et malheureusement, les crises successives ont fait entrer Mayotte dans l'inconscient collectif national.
01:07Et de voir la compassion, la solidarité de nos compatriotes, ça nous touche beaucoup, comme l'élan de générosité qui vient vers nous.
01:14J'allais vous le demander pour les Mahorais, effectivement, qui ne se satisfont pas, j'imagine, de symboles ou de messages comme ça.
01:22C'est quand même bien vécu là-bas. Même si on l'entend, on a entendu les reporters, tel sur place, on l'entend en permanence, on est oubliés, on se sent abandonnés, c'est ce qu'on entend également.
01:30En fait, il faut comprendre que comme il n'y a pas de téléphonie ni d'électricité, beaucoup de Mahoraises et de Mahorais ignorent,
01:38je parle de ceux qui sont à Mayotte, ignorent l'énorme élan de solidarité.
01:42Je suis arrivée samedi matin en rentrant de Mayotte pour être ici avec vous et pouvoir faire entendre la voix de Mayotte sur les plateaux télévision et de radio,
01:54ici à Paris, et puis peser sur les discussions au niveau du gouvernement pour mobiliser l'aide.
02:00Mais j'ai passé plus d'une semaine sur le terrain, et en allant dans les villages les plus reculés, je les informais personnellement de ce qu'il se passait pour le reste du monde, puisqu'on est coupés de tout.
02:15Et c'est vrai que cette solidarité a beaucoup touché, touche beaucoup, et de voir comment s'organise l'aide, c'est important.
02:22Et dans quelle situation est Mayotte aujourd'hui ? On a entendu encore hier le ministre des Outre-mer, Sir Hertel, dans le Grand Jury, dire que tout était détruit, qu'il avait survolé l'archipel, qu'il ne voyait que peu d'habitants.
02:34Il posait même cette question, où sont les habitants ? Vous avez été l'une de celles qui avait alerté le Président de la République en parlant de charniers à ciel ouvert.
02:41Vous nous dites à l'instant que vous êtes allés dans les villages les plus reculés.
02:44Aujourd'hui tout est détruit, et ce bilan, est-ce qu'il est aussi grave que vous l'imaginiez quand vous interpelliez le Président de la République ?
02:53Je voudrais juste remettre les choses dans leur contexte pour Mayotte. Mayotte, c'est officiellement, selon l'INSEE, un peu plus de 300 000 habitants, dont un tiers qui vivaient dans des bidonvilles.
03:06C'est ça les chiffres officiels, que tous les élus de Mayotte ont contesté depuis des années, en disant, au regard de la consommation en eau, au regard de la consommation en électricité,
03:16et de la densité que l'on observe, nous étions, avant le cyclone, au moins un demi-million d'habitants à Mayotte.
03:23C'est-à-dire qu'il y avait plusieurs dizaines de milliers de personnes qui vivaient dans les bidonvilles de manière officielle et recensée,
03:31mais c'était une population qui habitait illégalement, qui n'était pas avec des papiers, donc qui échappe à tout contrôle de l'administration.
03:39C'est une population qui, par définition, était invisible avant, je veux dire administrativement, qui était invisible avant le bidonville.
03:47Et qu'il est d'autant plus qu'on ne voit plus les gens. Alors, notre île fait 375 km², il n'y a pas de végétation, il n'y a plus de végétation pour que les gens se cachent.
03:58Dans les abris, on ne compte que quelques dizaines de milliers de personnes. Donc, en fait, il y a des dizaines de milliers de personnes qui manquent à l'appel.
04:07Donc, que les autorités ne veuillent pas les déclarer décédées, c'est une chose, mais elles sont disparues.
04:13Même si les familles ne les réclament pas...
04:15Est-ce que vous parlez des habitants qui disent, oui, on a enterré certains membres de notre famille, oui, on a eu des cérémonies ?
04:21On a plusieurs élus qui sont allés dans les zones des bidonvilles et qui ont constaté qu'il y avait des personnes qui avaient été enterrées.
04:29On a plusieurs témoignages de religieux aussi qui ont procédé aux enterrements.
04:33Mais moi, je voudrais quand même rappeler, les bidonvilles sont une chose, mais il y a 90% de la population amayotte qui n'a plus de toit.
04:4190% des Mahoraises et des Mahorais n'ont plus de toit. Ils n'ont pas non plus accès à l'eau et l'électricité.
04:48Moi j'entends les déclarations des uns et des autres du gouvernement, avec qui je n'ai quasiment aucun contact.
04:54Je les entends venir sur votre antenne, le ministre Rotaïou dire qu'il y a la sécurité amayotte, alors qu'on procède au pillage méthodique de toutes les maisons.
05:04Il n'y a pas de téléphone, donc les gens ne peuvent pas appeler les secours.
05:07Les gens sont dans une détresse inouïe. On est en train de désosser les écoles, les bâtiments publics qui restent encore debout pour aller voler des tôles,
05:15voler les panneaux solaires. On a essayé de piller ma maison, mais comme toutes les maisons qui, et pourtant elle est détruite,
05:24les maisons détruites sont en train d'être pillées pour aller reconstruire les bidonvilles qui sont des tombeaux à ciel ouvert.
05:30Donc on n'a pas conscience ici en métropole de la gravité de la situation ?
05:33Moi j'avais demandé depuis la semaine dernière l'état d'urgence pour déployer l'armée,
05:39c'est capital pour ramener l'ordre et la sécurité publique amayotte.
05:43Ce n'est pas une obsession sécuritaire, c'est que quand vous avez, après le cyclone, des caillassages et des agressions sur les secours,
05:52il faut quand même comprendre que la sécurité, elle est fondamentale.
05:56Et que là, compte tenu du fait que même l'état a été atteint, il est très difficile de faire régner l'ordre.
06:02Et vous avez déjà entendu parler sur votre antenne de la violence qui règne amayotte,
06:07c'est capital que l'état ne perde pas la main et ne laisse pas le chaos s'installer amayotte.
06:11Un tout dernier mot sur le message que vous avez posté hier sur le réseau social X,
06:15sur l'hypothèse d'une nomination aujourd'hui du gouvernement, vous avez exprimé de la colère là-dessus, pourquoi ?
06:21Écoutez, comme vous l'avez dit au début de cette interview, un deuil national c'est rarissime.
06:25Imaginez que la classe politique qui déjà, avec une bonne partie du gouvernement est aux abonnés absents
06:30parce qu'elle est occupée par le remaniement, se permet, alors que nous pleurons nos morts et nos disparus,
06:35d'utiliser tout le temps d'antenne et leur énergie à faire leur gouvernement.
06:41C'est franchement lamentable. Compte tenu du bazar dans lequel on est, honnêtement, il y avait le temps avant.
06:47Est-ce qu'on peut nous laisser une journée, une journée de solidarité du pays avec Mayotte
06:51au lieu d'aller nous enfoncer dans ces inepties de remaniement qui de toute façon n'avancent pas ?
06:57Merci beaucoup Estelle Youssoupha, députée Lyotte de Mayotte d'avoir été sur RTL avec nous. Bonne journée à vous.

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