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Ce nouveau numéro du rendez-vous cinéma politique de Public Sénat est consacré à la fiction : "La loi, le combat d'une femme pour toutes les femmes" (2015), réalisée par Christian Faure, avec Emmanuelle Devos. Une fiction précédée d'un entretien en plateau mené par Claire Chazal, qui reçoit à cette occasion Laurence Rossignol, sénatrice SER du Val-de-Marne. Année de Production :

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Transcription
00:00Et si tu devais piquer ?
00:02T'es pas sûre d'en faire ton boulot, hein ?
00:04Mais ça te prendra dans les genoux !
00:06Il peut y aller.
00:08Parce que quand on mettra les comptes sur orbite,
00:10ta profondeur tournera.
00:12Monsieur le Président,
00:14Mesdames, Messieurs les députés,
00:18Si j'interviens aujourd'hui à cette tribune,
00:22Ministres de la Santé,
00:24Femmes et non parlementaires,
00:26pour proposer aux élus de la Nation
00:28une profonde modification de la législation sur l'avortement,
00:32croyez bien que c'est avec un profond sentiment d'humilité
00:36devant la difficulté du problème,
00:38comme devant l'ampleur des résonances qu'ils suscitent
00:42aux plus intimes de chacun des Françaises et des Français,
00:46et en pleine conscience de la gravité des responsabilités
00:50que nous allons assumer ensemble.
00:52Voilà, pour ce Ciné-Club de Public Sénat,
00:56c'est un extrait du film que nous allons voir ce soir,
00:58du téléfilm d'ailleurs, qui s'appelle La Loi,
01:00un film de Christian Faure,
01:02qui a été diffusé en 2014,
01:04qui revient bien sûr, et vous le venez de le voir,
01:06par l'intermédiaire de l'actrice Emmanuelle Deveau,
01:08ce qui est formidable d'ailleurs dans ce téléfilm.
01:10Elle incarne Simone Veil,
01:12qui fait voter en 1974,
01:14dans la difficulté, dans le combat,
01:16cette loi sur l'avortement.
01:18Pour en parler avec nous,
01:20et vous donner envie de voir ce film,
01:22ou de le revoir bien sûr,
01:24la sénatrice socialiste Laurence Rossignol,
01:26sénatrice du Val-de-Marne,
01:28vice-présidente de la délégation aux droits des femmes,
01:30vous aviez d'ailleurs été ministre au François Hollande
01:32dans ce domaine,
01:34et vous êtes évidemment parfaitement qualifiée
01:36pour essayer de parler de ce film.
01:38Vous vous en souvenez,
01:40vous l'aviez vu à l'époque ?
01:42– Je l'avais vu quand il était sorti, bien entendu,
01:44et je l'ai revu avec plaisir dans la perspective de cet entretien.
01:46– Alors, ce qui est frappant, c'est vrai,
01:48Laurence Rossignol, c'est le combat
01:50que cette Simone Veil mène,
01:52dans sa propre majorité,
01:54il y a beaucoup de réticences.
01:56– L'adversité, pour elle, au moment du vote de la loi,
01:58s'est trouvée dans sa propre majorité,
02:00puisqu'elle avait un soutien absolu
02:02de la gauche, total,
02:04puisque le projet de loi
02:06est venu de mobilisations
02:08féministes, essentiellement,
02:10et puis d'une mobilisation de la société aussi.
02:12C'est là, au moment, il faut aussi citer Gisèle Halimi.
02:14– Oui, qui est là, bien sûr,
02:16pas loin de son combat.
02:18– Qui est pas loin,
02:20qui a aussi porté cette avancée,
02:22et elle avait le soutien de la gauche,
02:24mais elle avait l'hostilité
02:26d'une immense partie de sa majorité
02:28de droite, à l'époque,
02:30et quand on revoit les débats
02:32et la violence des invectives,
02:34de ce qu'elle a essuyé,
02:36de ce qu'elle a subi,
02:38on se dit que la vie politique,
02:40déjà dans les années 70,
02:42c'était pas tendre, absolument,
02:44et qu'ils ne comptaient pas leur coup.
02:46Et le fait qu'elle ait été une femme
02:48a bien entendu démultiplié
02:50la rudesse des…
02:52Et ce qu'ils se sont cru autorisés à dire,
02:54c'est ça qui est étonnant,
02:56c'est ce que ces hommes se sentaient autorisés à dire,
02:58et c'est parce que c'était une femme.
03:00– C'est très bien montré dans ce film.
03:02Ce qu'on voit aussi, c'est la différence d'approche
03:04entre Simone Veil, qui est ministre de la Santé,
03:06et qui, elle, veut défendre la santé des femmes,
03:08car elle rappelle que chaque année,
03:10je crois que c'est 47 000 femmes qui meurent
03:12d'avortements clandestins, bien sûr,
03:14alors que François Giroud, qui, elle,
03:16est à la condition féminine,
03:18veut défendre la liberté de chaque femme
03:20à disposer de son corps.
03:22Et il y a deux approches.
03:24– Oui, parce que probablement,
03:26Simone Veil, je ne suis pas sûre qu'elle ait été féministe
03:28avant de défendre ce projet de loi.
03:30– On sent qu'il y a une différence, oui.
03:32– Et quand on regarde la suite de son parcours,
03:34on voit qu'elle est venue à la réflexion féministe
03:36par le biais de la loi.
03:38Et c'est effectivement en tant que ministre de la Santé
03:40qu'elle défend cette loi,
03:42alors qu'effectivement, Françoise Giroud,
03:44elle, est déjà plus impliquée
03:46dans une réflexion féministe.
03:48Mais surtout, elle a eu raison de la défendre comme ça,
03:50parce que ce qui permettait
03:52effectivement de défendre
03:54la dépénalisation de l'avortement,
03:56c'était la dimension sanitaire,
03:58c'est-à-dire que c'était un sujet
04:00de santé publique et pas simplement
04:02un sujet de liberté des femmes.
04:04– Alors, on précise bien sûr que Valérie Giscard d'Estaing
04:06est le président de la République à ce moment-là,
04:08Jacques Chirac le Premier ministre,
04:10et qui vont soutenir Simone Veil, comme vous.
04:12– Ils la soutiennent.
04:14Comme on dit dans le jargon, elle a eu les arbitrages
04:16pour déposer sa loi,
04:18mais tout au long de l'examen du projet,
04:20elle va concéder
04:22des restrictions continuellement
04:24à sa majorité pour arriver
04:26à obtenir une majorité
04:28de députés
04:30à l'Assemblée nationale.
04:32– Elle va faire voter, parce qu'on s'aperçoit
04:34que même si ce n'est pas une femme politique,
04:36elle a une forme de sens politique, elle fait ses concessions.
04:38– Elle a un sens politique, elle veut y arriver.
04:40Et elle va y arriver
04:42aux prises de ce que vous avez dit,
04:44de ses efforts, de ses nuits passées à l'Assemblée,
04:46et bien sûr,
04:48de ce combat presque physique
04:50avec l'hémicycle.
04:52Laurence Rossignol, c'est important de montrer
04:54ce combat-là de l'époque.
04:56On sait que bien sûr,
04:58notre texte à nous est rentré dans la Constitution,
05:00grâce à l'Assemblée et au Sénat,
05:02mais que partout dans le monde,
05:04ces lois peuvent être menacées.
05:06– Et il faut quand même noter
05:08que moi, j'ai vécu effectivement
05:10la constitutionnalisation de l'IVG,
05:12je n'ai pas vécu la loi Veil,
05:14mais pour autant, j'ai lu les débats
05:16de la loi Veil, et les débats ont été
05:18d'une toute autre nature, y compris
05:20lorsque, par exemple, ici au Sénat,
05:22avant d'en arriver à un vote favorable,
05:24on est passé par des votes défavorables
05:26du Sénat sur la constitutionnalisation de l'IVG,
05:28les débats étaient d'une toute autre nature.
05:30C'est quand même quelque chose qui a changé
05:32dans l'approche du sujet,
05:34dans la qualité des débats,
05:36dans la manière dont les femmes sont traitées
05:38dans les débats parlementaires,
05:40quelque chose qui maintenant est installé,
05:42je pense, pour nous.
05:44Et dans le débat au Sénat,
05:46ce qui était surtout reproché,
05:48ce n'était pas tant sur l'IVG,
05:50les adversaires avaient un peu décalé
05:52en disant que ça ne relève pas de la constitution.
05:54En réalité, c'était quand même de l'IVG
05:56dont il était question dans cette affaire.
05:58Ce qui est important,
06:00c'est que les jeunes générations ont très bien compris
06:02au moment du vote de la constitutionnalisation,
06:04elles ont soutenu,
06:06il y a eu des manifestations,
06:08il y a eu un vrai enthousiasme dans le pays,
06:10un sentiment que la France venait de faire quelque chose
06:12qui était conforme à son identité et à son histoire,
06:14c'est-à-dire faire progresser les droits humains
06:16pour nous et pour toute la planète.
06:18Parce qu'on voit bien,
06:20et l'élection de Trump aux États-Unis
06:22provoque de nombreuses inquiétudes,
06:24et on sait bien qu'aux États-Unis,
06:26déjà, les États qui ont interdit l'IVG,
06:28l'avortement,
06:30on en voit les conséquences,
06:32c'est-à-dire une augmentation du taux de mortalité périnatale
06:34et une augmentation de la mortalité infantile.
06:36C'est-à-dire qu'on revient vraiment
06:38dans l'analyse de ce qui se passe aux États-Unis,
06:40on en revient exactement
06:42au combat de Simone Veil,
06:44c'est une question de santé publique.
06:46– Eh bien, je vous invite à tous
06:48à regarder ce téléfilm,
06:50La loi de Christian Faure avec une Emmanuelle de Vauz formidable,
06:52Laurent Deutsch qui est son conseiller.
06:54Merci beaucoup, Laurence Rossignol, de nous avoir accompagnées.
06:56Bon film, à très vite.

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