André Bercoff et Céline Alonzo reçoivent Arnaud Teyssier qui publie "Charles de Gaulle : l'angoisse et la grandeur"
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NewsTranscription
00:00Sud Radio, la culture dans tous ses états. André Bercoff, Céline Alonso.
00:06Soudain, le chant d'un oiseau, le soleil sur le feuillage,
00:12où les bourgeons d'un taillis me rappellent que la vie, depuis qu'elle parut sur la terre,
00:18livre un combat qu'elle n'a jamais perdu.
00:22Alors, je me sens traversé par un réconfort secret.
00:27Puisque tout recommence toujours, ce que j'ai fait sera, tôt ou tard,
00:33une source d'ardeur nouvelle, après que j'aurais disparu.
00:40C'est cet extrait des mémoires de guerre du général de Gaulle,
00:43lors de la cérémonie du 25e anniversaire de sa mort aux Invalides, André Bercoff.
00:47Le 9 novembre, ça fera 54 ans qu'il nous a quittés.
00:51Et aujourd'hui, le général fascine toujours autant André.
00:55Une biographie passionnante vient de sortir.
00:58Tout à fait, l'angoisse et la grandeur d'Arnaud Tessier, qui est avec nous, qui est paru chez Perrin.
01:03Ce livre remarquable, beaucoup d'informations, beaucoup d'éclairages sur cette personnalité.
01:13Qu'est-ce qu'on peut dire ? Et vous le savez déjà, qu'il fascine, qu'il fascine encore, qu'il fascine plus que toujours. Pourquoi ?
01:20Arnaud Tessier en parle longuement, mais je voudrais dire que ce qui est très frappant aujourd'hui,
01:24c'est que cet homme qui a refusé sa zone de confort, cet homme qui a dit non au moment où les 90% des gens disaient oui,
01:34cet homme qui a décidé de partir pour l'ombre un certain jour de 1940, avec trois pelées et dix tendues, et qui a dit « la France c'est moi ».
01:44« La France c'est moi » au problème du mec qui vous êtes, qui êtes vous, colonel, parlez de la France, c'est vous.
01:50Cet homme qui a toujours, qui a connu la traversée du désert, qui est revenu au pouvoir, qui a fondé cette cinquième république,
01:59qui aujourd'hui fonctionne toujours plus ou moins bien, mais ça dépend des hommes.
02:04Et justement, ce qui est fascinant, et pourquoi tout le monde se réfère à de Gaulle,
02:09c'est parce que de Gaulle reste comme une espèce de statut du commandeur face à la volerie des uns, à la démission des autres,
02:20à la faiblesse de quelques-uns, à la soumission d'autres, et je crois que de Gaulle reste effectivement avec ses qualités et ses défauts,
02:29comme un modèle où on se dit « Ah, s'il était là, qu'est-ce qu'il dirait ? »
02:34Et oui, et ce qu'il a dit, André Bercoff, dans ses mémoires de guerre, c'est notamment « Face au grand péril, le salut n'est que grandeur ».
02:41Alors, ses angoisses devant la guerre, devant les divisions, devant l'avenir, il a voulu y répondre par la grandeur.
02:48On va en parler dans un instant sur Sud Radio avec Arnaud Tessier, spécialiste de la cinquième république, dont il est l'un des meilleurs connaisseurs.
02:56Alors, à tout de suite, dans quelques instants.
02:59De l'île, le siècle va mourir tranquille, de Gaulle disant, la France est douce en 1900,
03:18Pendant que les autres garçons vont jouer au billet ou au ballon.
03:27Et oui, c'est en 1989, André Bercoff, que Mireille Mathieu a enregistré cette chanson, à la demande de François Mitterrand.
03:35Alors, on va parler du grand Charles aujourd'hui, et pour en parler, nous avons le plaisir de recevoir Arnaud Tessier.
03:42Bonjour à vous.
03:43Bonjour.
03:44Alors, vous publiez chez Perrin, Charles de Gaulle, l'angoisse et la grandeur.
03:48L'angoisse, ce sentiment, semble avoir vraiment dominé sa vie, et ce, dès son enfance, racontez-nous.
03:56Oui, parce qu'il faut que quelque chose les portait, pour qu'il ait tenu cette ligne de force, qu'est toute sa vie, qui est incroyable.
04:03Toute une vie sous tension, et au début des mémoires de guerre, où il parle très peu de lui, et très peu de sa famille,
04:08il dit que quand il était enfant, avec sa sœur et ses frères, ils éprouvaient vis-à-vis de la France, une fierté anxieuse.
04:14Et chez lui, le mot d'anxiété, c'est l'angoisse aussi.
04:16Une jolie fierté anxieuse.
04:18Oui, une fierté anxieuse, c'est-à-dire, une grande fierté d'être français, une conscience d'appartenir à un destin collectif prodigieux,
04:25et en même temps, l'angoisse que cette grandeur, que ce destin, soit compromis par la médiocrité, ou par la défaite, ou par la guerre.
04:32Et oui, et cette formule, on peut dire qu'elle définit toute son existence, en quelque sorte.
04:36Oui, parce qu'il sera angoissé, il aura des retours d'angoisse toute sa vie.
04:39C'est comme une angoisse personnelle, intérieure, qu'il a transcendée avec une angoisse collective.
04:43Il a pris en charge l'angoisse collective des Français.
04:47Il y a un très joli discours, d'ailleurs, au milieu des années 60, dans le Nord de la France,
04:51où il dit, si j'ai réussi à rendre le pays un peu heureux, il le dit quand même, j'aurais gagné ma vie.
04:59Il a une très jolie formule.
05:00Donc il ne pensait pas seulement qu'à la gloire et à la grandeur, au sens rhétorique du terme,
05:04il pensait aussi, quand même, au bien-être du Français.
05:06Et oui, et puis il faut surtout rappeler qu'il est né en 1890.
05:10Il fait donc partie, on peut le dire, de cette génération qui a vécu dans la souffrance de cette terrible défaite de 1870.
05:19Oui, c'est l'idée que la France est un pays diminué, d'abord territorialement, par la perte de l'Alsace-Moselle,
05:25et puis moralement.
05:26C'est la génération d'Agathon, comme on l'appelle à l'époque,
05:29et c'est un homme qui, comme les gens de sa génération, est dominé par l'idée que la France a été vaincue,
05:35et qu'il faut surmonter cette défaite, par la revanche sur l'Allemagne.
05:39Mais pour lui, la revanche sur l'Allemagne, ce n'est pas seulement une revanche nationale, patriotique,
05:43c'est aussi une forme de combat de civilisation.
05:46Il pense qu'il faut porter la civilisation française.
05:49C'est un lecteur de Peggy.
05:50Il pense que l'impérialisme allemand est l'ennemi de la civilisation à la française.
05:54Et la fierté d'être Français est échevillée au corps de ces générations.
05:58Oui, tout à fait.
05:59Sinon, on n'expliquerait pas la force avec laquelle cette société a supporté le sacrifice de la Grande Guerre,
06:05qui est quand même un sacrifice énorme.
06:07Certes, il y a eu des mutineries, certes, il y a eu des crises morales,
06:10mais le peuple français, porté par le patriotisme, a quand même supporté quelque chose,
06:15une souffrance collective incroyable.
06:17Mais après, il en a été comme épuisé, et c'est ce qui inquiètera De Gaulle.
06:21Et oui, alors, il a 23 ans au moment de la guerre de 14.
06:24La guerre va vraiment être pour lui une source de frustration,
06:27et sa première source d'angoisse.
06:30Pourquoi ? Expliquez-nous.
06:32D'abord parce qu'il se bat, il est blessé à plusieurs reprises,
06:35puis il va être fait prisonnier, et donc il va être prisonnier pendant de très très longs mois.
06:391000 jours !
06:40Il cherchera à s'évader 5 fois.
06:42Sa période de captivité, d'ailleurs, il sera conseiller historique sur le tournage de La Grande Illusion,
06:4820 ans plus tard, c'est intéressant de le noter.
06:51Donc, il a été marqué par cette période,
06:54pour deux raisons, d'abord parce qu'il ne supporte pas la captivité,
06:58et cette sorte d'inaction forcée,
07:00mais qu'il va remplir en lisant, en réfléchissant,
07:03de manière intense, donc une partie de son tempérament politique va se forger à ce moment-là.
07:08Et puis il est angoissé parce qu'il sent très tôt que cette guerre qui va se terminer par une victoire
07:12sera une victoire à l'apyrus, et que tout risque de recommencer très vite,
07:16et que le danger allemand se remanifestera.
07:18Et oui, et c'est une véritable obsession pour lui, en quelque sorte.
07:22Qu'une nouvelle guerre ressurgisse.
07:24Il n'est pas le seul à le penser, quand on voit un autre militaire plus âgé que lui,
07:28qui est le maréchal Lyoté,
07:30Lyoté disait aussi à la fin de la guerre de 1914, il écrivait à sa sœur,
07:34tout va recommencer, cette guerre civile européenne va recommencer,
07:37parce que nous n'aurons pas su faire la paix,
07:39et chez de Gaulle, il y a quand même une hostilité très forte envers l'Allemagne,
07:42et l'idée que l'Allemagne trichera sur les réparations,
07:46et que le nationalisme allemand renaîtra.
07:48Il l'écrit dans des lettres à sa famille, c'est très clair.
07:50Les traités de Versailles, et tout ce qui s'en suit.
07:53Et oui, la discorde chez l'ennemi, c'est à cette période qu'il écrit aussi ce livre.
07:56Oui, son premier livre, La discorde chez l'ennemi, qui parait en 1924,
08:00est un livre assez extraordinaire, parce qu'il montre comment
08:02l'Empire allemand, qui était une structure en apparence très forte,
08:05s'est effondré en quelques jours, voire quelques heures,
08:09et il verra, c'est une sorte de préfiguration de ce qu'il verra avec la République en 1940.
08:14Il a une sorte d'instinct prophétique qui est assez troublant.
08:18En tout cas, revenons aux années 30,
08:20dans ses Alléans, on peut dire qu'il va faire des efforts pour mobiliser l'opinion,
08:24et il va vraiment publier des livres dans lesquels va se forger sa pensée politique,
08:30sa pensée militaire.
08:32Oui, le fil de l'épée, vers un même métier, La France et son armée.
08:35Avec La France et son armée, il arrive chez Plon,
08:37donc déjà chez un plus gros éditeur,
08:39il écrit des articles sous pseudonyme,
08:41enfin il fait signer par un autre des articles,
08:44et puis il mène une intense campagne auprès des milieux dirigeants,
08:47grâce à un de ses amis, le colonel Maillère,
08:49qu'il respecte, et qui a un salon très fréquenté.
08:52Pourquoi sous pseudonyme ? Il pouvait pas ?
08:54C'est la grande muette ?
08:56Il est quand même officier supérieur,
08:58et déjà il prend beaucoup de liberté,
09:00et il va aussi démarcher énormément les hommes politiques,
09:02beaucoup les hommes politiques.
09:04Il les fréquente, oui, à ce moment-là.
09:06Il essaie de les convaincre, c'est finalement Paul Reynaud
09:08qui va être le porteur de ses idées,
09:10mais il démarche beaucoup.
09:12Il est pas totalement ignoré,
09:14mais il a des relations politiques,
09:16certains beaucoup le lisent,
09:18des grands intellectuels comme Daniela Lévy
09:20le remarquent très tôt.
09:22Il est lu, il est repéré,
09:24considéré avec une certaine méfiance,
09:26mais il est repéré.
09:28Pourquoi méfiance, pardon ?
09:30Parce qu'il dit des choses qui perturbent.
09:32Ah, on bouge poil de la doxa de l'époque.
09:34Il critique la doctrine militaire,
09:36même la doctrine diplomatique,
09:38il voit que la France est dotée d'alliances de revers,
09:40mais qu'elle ne sera pas capable de tenir
09:42parce qu'elle est une stratégie entièrement défensive.
09:44Il plaide pour une
09:46grande force
09:48motorisée, autonome.
09:50Mais en même temps,
09:52ses idées circulent,
09:54mais le système politique est tellement
09:56compliqué, tellement affaibli,
09:58le système de la Troisième République,
10:00que les idées ne prennent pas.
10:02On peut dire que sa troisième phase d'angoisse
10:04sera la France libre.
10:06Oui, parce que d'abord,
10:08comme le disait André Bercov tout à l'heure,
10:10c'est un pari incroyable que de partir
10:12un jour de juin
10:14comme ça, seul.
10:16Il le dit d'ailleurs dans le premier chapitre des Mémoires de guerre.
10:18Il dit, beaucoup mieux que je ne saurais le faire,
10:20l'esprit de la phrase,
10:22il dit, je me trouvais
10:24comme un homme seul au bord d'un océan
10:26qu'il faudrait traverser à la nage.
10:28C'est extraordinaire, cette image de l'océan,
10:30qui d'ailleurs sera toujours récurrente
10:32chez lui, c'est intéressant.
10:34En Irlande...
10:36L'océan, pour lui, c'est la fin
10:38de toute chose, mais c'est aussi le début de toute chose.
10:40Et donc,
10:42ce sentiment de solitude, et puis le fait qu'effectivement,
10:44faute
10:46d'État souverain dans la France occupée,
10:48puisqu'il considère que Vichy,
10:50avec un pays occupé au 3e, 5e,
10:52sans aucune marge de manœuvre,
10:54Vichy n'est pas un État souverain,
10:56il pense que la souveraineté doit la prendre en charge,
10:58et ça va être toute l'aventure de la France libre,
11:00mais le plus dur pour lui, ce sera
11:02de s'imposer face aux Alliés,
11:04les grands Alliés, face aux États-Unis,
11:06Churchill, Roosevelt et autres.
11:08Et oui, effectivement, alors De Gaulle et
11:10Churchill, on peut dire qu'ils s'admiraient
11:12mutuellement, mais leur rapport,
11:14on peut dire qu'ils ont été exécrables quand même.
11:16Oui, et d'ailleurs,
11:18dans les mémoires de guerre, j'ai même l'impression
11:20que De Gaulle, de manière sous-jacente,
11:22est presque plus aimable avec
11:24Roosevelt qu'avec Churchill. Je pense que
11:26Churchill, à un moment donné, a pris le parti de soutenir
11:28systématiquement les positions de Roosevelt,
11:30par des intérêts qui dépassaient
11:32d'ailleurs le cadre de la guerre,
11:34et il n'a pas toujours été avec De Gaulle comme il aurait dû l'être.
11:36Celui qui finalement, près de
11:38Churchill, comprenait le mieux De Gaulle
11:40et l'appréciait le plus, c'était
11:42Anthony Hidden, plus que Churchill.
11:44Alors justement, mais quand même,
11:46là-dessus, c'est vrai,
11:48on en a beaucoup parlé, et vous avez raison,
11:50est-ce que, quand même, il n'y a pas aussi ce
11:52syndrome, cette réaction
11:54psychique, parce que
11:56si il n'y avait pas Churchill,
11:58est-ce que De Gaulle aurait été accueilli à Londres ?
12:00Oui, absolument. Et si De Gaulle
12:02n'avait pas forcé Paul Reynaud à le prendre
12:04dans le gouvernement au début de juin 1940,
12:06il n'aurait jamais rencontré Churchill.
12:08Les deux hommes se respectaient,
12:10s'admiraient, ça c'est certain.
12:12Mais il y a un moment où De Gaulle gêne,
12:14parce que De Gaulle, ce n'est pas seulement l'homme qui veut libérer
12:16la France, ce n'est pas seulement un chef militaire
12:18qui conduit les troupes françaises
12:20aux côtés des alliés, c'est l'homme
12:22qui veut reconstruire la France très vite,
12:24et reconstruire la souveraineté française.
12:26Il est déjà perçu comme
12:28quelqu'un qui va gêner sur le plan politique.
12:30Je crois que c'est toute la clé
12:32de l'incompréhension vis-à-vis de De Gaulle,
12:34c'est que De Gaulle n'est jamais seulement
12:36quelqu'un qui veut libérer la France, c'est quelqu'un
12:38qui veut la reconstruire et lui redonner sa puissance.
12:40Oui, mais pourquoi Roosevelt
12:42le considérait comme un potentiel
12:44dictateur ? Roosevelt ne le comprenait pas,
12:46pour plusieurs raisons.
12:48D'abord parce que psychologiquement, il a eu du mal à le comprendre,
12:50bien que De Gaulle lui ait adressé une très très
12:52belle lettre pendant la guerre où il lui expliquait
12:54la mystique de la France libre.
12:56Roosevelt le voyait effectivement
12:58comme quelqu'un qui pouvait être porté à la
13:00mégalomanie, et puis il y avait aussi
13:02le fait que beaucoup de
13:04français en exil aux Etats-Unis
13:06disaient du mal de De Gaulle.
13:08Et ils préféraient Giraud. Oui, ils préféraient Giraud
13:10parce que Giraud c'était le chef militaire.
13:12C'était pas un mauvais homme, le général Giraud,
13:14simplement pour lui, c'était la libération de la France
13:16par des voies militaires. De Gaulle c'était déjà un chef
13:18politique. Déjà la reconstruction, c'est ça ?
13:20Quelle France on veut, quelle France...
13:22Je dirais la France un peu forte et indépendante
13:24semblait déjà un peu de retour avec lui par
13:26anticipation, et ça c'était quand même
13:28ça troublait le jeu.
13:30On a parlé effectivement, il y a eu des archives
13:32qui sont ressorties en 2020 à Londres,
13:34on a parlé à l'époque
13:36apparemment d'un complot entre
13:38Churchill et Roosevelt pour
13:40se débarrasser de De Gaulle.
13:42Le complot, en fait,
13:44en 1943,
13:46Jean Monnet, qui était très proche
13:48des Américains et qui
13:50soutenait plutôt la solution Giraud,
13:52écrit quand même au proche conseiller
13:54de Roosevelt, il faut se débarrasser de De Gaulle.
13:56Je ne dirais pas que c'était pour s'en débarrasser
13:58physiquement, encore que
14:00Alger n'était pas un lieu de haute sécurité,
14:02mais je pense que c'était s'en débarrasser
14:04politiquement, parce que De Gaulle déjà
14:06tenait trop de place dans un monde
14:08qui commençait à se fabriquer sans la France.
14:10Il n'est pas inintéressant de rappeler que Jean Monnet
14:12était un des fondateurs de l'Europe ?
14:14Absolument. Comme par hasard.
14:16Et entre De Gaulle et Giraud, ça a été un vrai duel ?
14:18Oui, mais un duel
14:20inégal sur le plan des personnalités.
14:22Parce que Giraud
14:24était une personnalité d'une
14:26envergure bien moindre, c'est pas lui faire un jure,
14:28que De Gaulle.
14:30Mais inégal aussi pour De Gaulle, parce que
14:32Giraud, effectivement, était plutôt soutenu par les Alliés,
14:34pour qui c'était la solution idéale.
14:36Mais ça va être une lutte politique
14:38et psychologique dont De Gaulle
14:40sortira vainqueur,
14:42mais non sans mal et non sans difficulté.
14:44Ça sera effectivement une cause d'angoisse.
14:46Parce que l'angoisse de De Gaulle,
14:48c'est qu'on oublie
14:50le sens de son combat.
14:52Pas seulement libérer la France.
14:54Si c'est libérer la France pour qu'elle redevienne
14:56la Troisième République,
14:58et qu'elle retourne sur les mêmes travers,
15:00et qu'elle devienne une puissance de second ordre,
15:02est-ce que ça vaut la peine ?
15:04Son ambition principale était vraiment, comme vous l'avez dit,
15:06de rénover la France.
15:08Moralement aussi.
15:10Économiquement, socialement, politiquement,
15:12administrativement et moralement.
15:14Sa troisième période
15:16d'angoisse, c'est la fin de la guerre.
15:18Comment imposer l'État
15:20et la souveraineté française ?
15:22Et comment donner à la France
15:24les bonnes institutions politiques, Arnaud Tessier ?
15:26Dès le débarquement en Normandie,
15:28l'obsession de De Gaulle,
15:30ça va être d'abord de faire en sorte
15:32que la France ne passe pas sous commandement
15:34militaire allié,
15:36l'organisation américaine l'amgote,
15:38et que l'État souverain se remanifeste.
15:40Donc renommer des préfets,
15:42remanifester la présence de l'État
15:44dans tout le territoire, et faire circuler
15:46la monnaie française, éviter que la monnaie américaine
15:48d'occupation...
15:50Juste à moi, Arnaud Tessier,
15:52est-ce qu'il s'est murmuré
15:54qu'il n'était pas au courant d'opération
15:56du 6 juin ? Est-ce qu'on l'avait tenu à l'écart ?
15:58Oui, jusqu'au moment le plus longtemps possible.
16:00Oui, tout à fait.
16:02Il l'a su que quelques heures avant.
16:04Et puis surtout, seule une
16:06petite unité française y était associée.
16:08Il y a eu une poignée.
16:10C'est pour ça qu'il a toujours considéré
16:12que le débarquement
16:14avait été un événement capital
16:16dans l'histoire de la guerre.
16:18Mais il a toujours un peu boudé les cérémonies du débarquement
16:20pour cette raison.
16:22C'est pour ça que dès le débarquement fait,
16:24il s'est manifesté sur le sol français
16:26pour réaffirmer la souveraineté française.
16:30En tout cas, vaincre l'angoisse,
16:32cet impératif a dicté ce qu'il a accompli
16:34en 50 ans, depuis la fin de la Grande Guerre
16:36jusqu'au référendum d'avril 1969.
16:38À l'angoisse,
16:40il a voulu répondre par l'élan.
16:42On va en parler dans un instant sur Sud Radio,
16:44avec notre invité, Arnaud Tessier.
16:46A tout de suite.
16:48De Gaulle s'en va.
16:50De Gaulle quitte la présidence du gouvernement.
16:52Voici deux semaines.
16:54Il s'était donné à Antibes, devant la mer,
16:56les premiers jours de vacances qu'il ait pris depuis 1939.
17:02Et puis, il avait repris, derrière les murs de son ministère,
17:04la lourde tâche que lui avait confiée la France.
17:10Et voici, tout d'un coup, que l'homme du 18 juin s'écartait.
17:18Le 20 janvier 1940,
17:20André Berghoff de Gaulle
17:22démissionne.
17:24Il démissionne de ses fonctions
17:26de président du gouvernement provisoire.
17:28Arnaud Tessier,
17:30pourquoi est-il parti ?
17:32Quelles étaient les conditions de son départ, surtout ?
17:34Il est parti parce que
17:36il voyait qu'il était en train de perdre
17:38le contrôle de la situation politique
17:40et que les partis avaient repris le contrôle du jeu.
17:44Il a eu presque deux ans,
17:46pas tout à fait deux ans, un an et demi,
17:48quand il était président du gouvernement provisoire,
17:50pour faire des réformes profondes,
17:52parce qu'il avait très largement les mains libres.
17:54Il faut les rappeler, d'ailleurs.
17:56La création de la sécurité sociale,
17:58beaucoup de nationalisation,
18:00la création de l'école nationale d'administration
18:02et la rénovation
18:04de la haute fonction publique,
18:06parce que la haute fonction publique
18:08d'avant-guerre avait failli en 1940.
18:10Des grandes réformes économiques et sociales.
18:12Et à partir
18:14de l'année 45,
18:16et surtout
18:18avec la fin de la guerre,
18:20le jeu politique commence à lui échapper, puisque la guerre
18:22est terminée. Il faut bien voir que la guerre a duré
18:24après le débarquement encore plus d'un an.
18:26Et donc, De Gaulle
18:28va partir. Alors, on a dit qu'il était
18:30parti en espérant qu'on le rappellerait.
18:32Non, je crois simplement qu'il pensait
18:34qu'il allait falloir surtout se battre
18:36pour que la France se dote
18:38de la bonne constitution.
18:40Et c'est ce qu'il va faire par les discours de Bayeux
18:42et d'Epinal en 1946,
18:44puisqu'il avait posé comme principe
18:46que la constitution serait ratifiée par référendum.
18:48Il va essayer de se battre
18:50contre les partis qui veulent en fait
18:52un système similaire à celui de la Troisième.
18:54Certains auraient même voulu reprendre
18:56l'existence de la Troisième.
18:58Oui, certains étaient pour la reconduction de la Troisième République.
19:00Voilà, radicaux en particulier.
19:02Donc, il va se battre pour que
19:04les institutions soient conformes à ses voeux.
19:06Mais il ne va pas y parvenir
19:08puisqu'en réalité, la constitution
19:10de la Quatrième République sera une constitution
19:12créant de nouveau un régime
19:14parlementaire proche
19:16du régime d'Assemblée.
19:18Et pour lui, ça va être une période
19:20évidemment, ce départ.
19:22Très vite, il va se dire
19:24qu'il faut peser sur la vie politique.
19:26D'où le Rassemblement du Peuple Français.
19:28En créant, il va lancer en 1947
19:30le Rassemblement du Peuple Français, qui comme son nom l'indique
19:32est un rassemblement
19:34et non pas un parti classique.
19:36C'est un mouvement qui vise à rassembler.
19:38D'ailleurs, son électorat ira bien au-delà
19:40de l'électorat de droite
19:42où ce sera un électorat qui prendra
19:44qui aura prise sur l'Union ouvrière.
19:46Il a toujours dit que la France n'est ni de gauche ni de droite.
19:48La France, c'est la France.
19:50Et le RPF aura une dimension sociale
19:52dans son programme politique
19:54qui est une constante chez De Gaulle
19:56depuis la guerre.
19:58Quand il fonde le RPF,
20:00c'était le 14 avril 1947,
20:02il a dit précisément
20:04nous zigzaguons sur une route
20:06bordée de précipices.
20:08Il est temps que se forme et s'organise
20:10le RPF.
20:12Nous zigzaguons sur une route
20:14bordée de précipices, on pourrait dire ça
20:16aujourd'hui en 2024.
20:18Oui, mais il n'y a pas de général De Gaulle.
20:20Ensuite,
20:22on parle d'une traversée
20:24du désert pour De Gaulle.
20:26Vous, cette période,
20:28vous la situez de 54 à 58.
20:30Certains historiens la font
20:32donc commencer dès 47.
20:34Oui, j'avoue que j'ai réagi
20:36à la lecture de votre livre parce que
20:38effectivement, ils fondent le RPF.
20:40De Gaulle n'est plus au pouvoir
20:42et moi, comme d'autres,
20:44situé à traverser du désert
20:46à partir du moment où il avait quitté le pouvoir.
20:48Et vous, vous dites 54 à 58.
20:50Pourquoi c'est intéressant ?
20:52Parce que la période du RPF, il est quand même très présent
20:54politiquement, il fait des discours.
20:56Il y a le discours de Bagatel en 1950.
20:58C'est à partir des élections
21:00de 51, lorsque
21:02les partis au pouvoir
21:04tricotent
21:06le système des apparentements,
21:08le scrutin proportionnel mijoté
21:10de façon à limiter la victoire
21:12des gaullistes et des communistes
21:14qui commence un peu à prendre du recul
21:16par rapport à son propre mouvement
21:18et puis finalement, il va s'éloigner véritablement,
21:20il va le mettre en sommeil parce qu'en réalité,
21:22contrairement à ce qu'il pensait, la 4ème République
21:24arrive à durer, elle s'installe
21:26malgré les difficultés
21:28internationales, elle s'installe
21:30et donc il voit que
21:32beaucoup, parmi ceux qu'il soutiennent au RPF
21:34ont la tentation de rejoindre
21:36la vie politique de la 4ème.
21:38Il sent que ça lui échappe
21:40à nouveau et quand ça lui échappe,
21:42De Gaulle fait une première position de repli
21:44et il va partir
21:46d'une certaine manière, tout en venant toujours
21:48à Paris régulièrement, il va beaucoup
21:50ramer à la boisserie à Colombay
21:52pour suivre l'écriture des mémoires de guerre
21:54qui pour lui est une entreprise
21:56à la fois, non pas seulement de
21:58mémorialiste, mais pédagogique.
22:00Et c'est une période où, à nouveau,
22:02il angoisse de voir la France
22:04au bord de la guerre civile en quelque sorte.
22:06Il va y avoir évidemment la crise, la guerre d'Algérie
22:081954,
22:10la guerre d'Algérie.
22:12Progressivement, le pays qui s'enlise
22:14dans la crise de Suez
22:16et puis le pays qui s'enlise dans le chaos
22:18financier
22:20et avec le risque de guerre civile,
22:22il y a la guerre d'Algérie.
22:24Je pense que c'est aussi
22:26l'angoisse devant le temps qui passe
22:28qui est très importante pour comprendre De Gaulle.
22:30Oui, ça l'obsédait ce temps qui passe.
22:32Il pense qu'il a peu de temps, d'abord parce qu'il se sent
22:34vieux,
22:36à l'époque, c'est un homme
22:38qui aujourd'hui, ça ne paraît pas vieux,
22:40mais à 64, 65 ans, il a l'impression
22:42quand même qu'on commence à discuter
22:44sur sa disparition future.
22:46Donc, il y a son propre
22:48temps qui découle.
22:50Le temps qui reste, quel est le temps qui me reste ?
22:52Et puis surtout, il se dit
22:54qu'on perd du temps avec cette quatrième république.
22:56On rate les grandes occasions, le pays s'enfonce
22:58dans le déclin
23:00et de plus en plus mal considéré sur le plan international.
23:02Donc, ça devient dramatique
23:04pour lui ce temps perdu et je crois que c'est
23:06ça aussi qui l'angoisse, c'est toujours la même chose.
23:08Il lutte contre le temps. Je voudrais rappeler
23:10qu'entre juin 1940 et le départ
23:12de De Gaulle du pouvoir,
23:14vous voyez tout ce qui s'est passé ?
23:16Ce qu'on évoque aujourd'hui, c'est d'une densité incroyable.
23:18Mais ça ne fait même pas 30 ans.
23:20C'est ce qui nous sépare du traité
23:22de Maastricht. L'histoire n'a pas
23:24la même densité.
23:26On l'a dit il y a quelques instants, il a voulu
23:28répondre à l'angoisse par la grandeur
23:30avec notamment la création
23:32de la cinquième république. Mais quel sens
23:34donnait-il à ce mot grandeur ?
23:36Qu'est-ce que ça signifiait pour lui réellement ?
23:38Oui, la grandeur, ce n'est pas quelque chose de rhétorique
23:40parce que souvent, on voit De Gaulle
23:42faisant des grands discours avec des grandes envolées
23:44à Phnom Penh, à Mexico, etc.
23:46On dit la grandeur.
23:48Il faisait rêver les Français.
23:50Il a fait croire que la France
23:52avait véritablement contribué
23:54à la victoire pendant la guerre. Tout ça, c'est un grand mensonge
23:56alors que ce n'est pas un mensonge.
23:58La France a effectivement, militairement
24:00participé à la victoire sur l'Allemagne.
24:02Mais ce n'est pas du tout ça.
24:04Ce n'est pas du tout de la rhétorique. En fait, le mot grandeur
24:06chez lui, c'est comme l'ambition, l'élan.
24:08Pour lui, la grandeur, c'est pour sortir
24:10de l'angoisse et pour construire
24:12l'avenir, il faut s'arracher à l'angoisse
24:14et à l'esprit de résignation
24:16par un élan vers les hauteurs.
24:18C'est ça, c'est un élan vers les hauteurs.
24:20C'est une ambition, la grandeur, pour lui.
24:22Reste que, effectivement, mais ce n'est pas la France qui
24:24militairement a gagné, enfin, elle a contribué, comme vous dites.
24:26Mais je crois que le grand acte de De Gaulle
24:28et vous l'avez souligné vous-même,
24:30c'est d'avoir symboliquement
24:32mis la France à la table des pays vainqueurs.
24:34Alors que, elle aurait pu,
24:36je veux dire, jouer un rôle,
24:38même la France de la collaboration, etc.,
24:40il a été là pour
24:42contrer cela, quand même.
24:44Il a fait en sorte que la France termine la guerre dans le camp des vainqueurs,
24:46ce qui nous a valu de redevenir
24:48pleinement un État souverain, d'avoir un siège
24:50au Conseil de sécurité,
24:52et c'est quelque chose que,
24:54c'est pour cela que
24:56tout le discours sur le fait que la France,
24:58tout ce qui souligne
25:00la médiocrité française,
25:02les trahisons, les crimes
25:04de l'occupation, évidemment, c'est des choses
25:06qu'il faut rappeler, mais il ne faut pas que ça finisse par effacer cela,
25:08parce que sinon, ce serait
25:10une défaite posthume pour De Gaulle.
25:12Il a dit, devant les Libanais,
25:14il a dit pendant la guerre devant les Libanais,
25:16cette guerre est une guerre morale.
25:18Je pense que le mot morale est capital.
25:20Pour comprendre toute la philosophie
25:22de la vie de De Gaulle.
25:24Justement, vous parlez de morale, et Céline Alonso
25:26parle justement de retour de 58.
25:28Il y a eu quand même ce paradoxe étonnant.
25:30On le connaît, mais c'est que,
25:32il faut dire, De Gaulle est revenu au pouvoir
25:34par les partisans de l'Algérie française.
25:36Ils sont venus le chercher, et ils lui ont dit,
25:38écoutez, on a besoin de vous, parce qu'ils pensaient,
25:40d'ailleurs, eux, que De Gaulle allait être
25:42le garant de l'Algérie française.
25:44Ce paradoxe, aujourd'hui,
25:46il l'a vécu comment ?
25:48Pas seulement par les partisans de l'Algérie française,
25:50parce qu'il y avait beaucoup de militaires
25:52algiers qui se méfiaient quand même de De Gaulle.
25:54De Gaulle a toujours eu
25:56un statut un peu particulier au sein de l'armée française.
25:58Au sein de l'armée, oui.
26:00Il était considéré comme méfiant,
26:02Alain, par exemple, considérait De Gaulle avec méfiance.
26:04Et puis, il y avait quand même des figures
26:06de la 4ème République qui avaient peur
26:08quand même du coup de force et de la guerre civile,
26:10et qui se sont tournés vers De Gaulle
26:12comme instrument du salut.
26:14Et puis, évidemment, il y a la figure de René Coty,
26:16le dernier président de la 4ème République,
26:18sans qui rien ne se serait produit.
26:20C'est lui qui a imposé à une
26:22assemblée réticente le retour de De Gaulle.
26:24C'est lui, c'est vraiment René Coty.
26:26Il a dit qu'il s'en irait si on n'acceptait pas
26:28les conditions de De Gaulle. Il y a eu une sorte de compromis
26:30sur les travaux préparatoires de la Constitution.
26:32Donc, ce n'est pas seulement
26:34les partisans de l'Algérie française,
26:36c'est la situation.
26:38Comme toujours, c'est comme à la Libération.
26:40On a besoin de De Gaulle
26:42pour résoudre le problème, et puis on espère
26:44qu'il va s'en aller. Et donc, je pense que
26:46chez beaucoup de politiques de la 4ème, on disait
26:48ça sera comme en 1945, il va rétablir la situation
26:50et puis après, il s'en ira.
26:52Il n'a pas claqué la porte.
26:56L'affaire algérienne,
26:58elle a valu tant de haine.
27:00Vous, sa politique en Algérie,
27:02comment vous l'expliquez ?
27:04Je pense qu'elle est très simple. Il en a souvent parlé.
27:06Je pense qu'il a vite compris
27:08qu'il fallait organiser l'autonomie
27:10puis l'indépendance de l'Algérie. D'ailleurs, il l'a dit assez tôt
27:12en réalité.
27:14L'ambiguïté
27:16c'est d'au tout début, mais il l'a dit assez tôt.
27:18Mais il espérait que
27:20l'indépendance de l'Algérie se ferait,
27:22au début, il espérait que l'indépendance de l'Algérie
27:24se ferait dans des conditions telles
27:26qu'il y aurait quand même une possibilité de cohabitation
27:28entre les communautés. Il a vite compris que ça ne serait
27:30pas possible.
27:32Au départ, il pensait que c'était une possibilité.
27:34C'est ce qu'on pense. C'est difficile de savoir
27:36ce que pensait réellement de Gaulle, mais quand même.
27:38Par contre, je crois que
27:40là aussi, c'est la pression du temps.
27:42C'est que de Gaulle, il a
27:44un programme à réaliser.
27:46Il veut parachever ce qu'il a commencé
27:48en 1944-1945, c'est-à-dire
27:50faire une grande construction politique qui arrache la France
27:52à la médiocrité et qui lui permette
27:54d'affronter les crises de l'avenir.
27:56Il ne peut pas garder le boulet algérien, sinon on ne pourra rien faire.
27:58Je crois que
28:00effectivement, ça suppose à un moment donné
28:02quelque chose qui passe
28:04pour de l'indifférence
28:06à la souffrance, alors que ce n'était pas
28:08d'indifférence, c'est simplement qu'il était dans le coup d'après.
28:10Mais on sait par un certain nombre
28:12de confidences qu'il a faites, très rares.
28:14En tout cas, il a toujours été dans le coup d'après.
28:16En 1940, il avait
28:18vraiment de l'avance.
28:20C'est ce que disait son secrétaire
28:22dans les années 40, Claude Moria, qui était le fils
28:24de François Moria, qui disait
28:26« cet homme-là est incroyable, il a déjà
28:28oublié les souffrances du moment, il pense déjà
28:30il oublie les souffrances
28:32du présent, il pense déjà à prévenir
28:34les crises du futur, il est tout entier dans le futur. »
28:36D'où cette apparente insensibilité.
28:38Mais sa formule, son fameux
28:40« je vous ai compris »,
28:42est-ce que cette formule
28:44a-t-elle été si ambiguë qu'on l'a dit ?
28:46Oui, c'est ambiguë.
28:48A-t-il joué vraiment un double jeu ou pas ?
28:50Quelle est votre analyse ?
28:52Je pense qu'il a compris l'angoisse
28:54des Français d'Algérie,
28:56il a compris l'angoisse des Français d'Algérie,
28:58mais je pense qu'il était déjà quand même,
29:00mais c'est difficile, qu'il savait que
29:02de toute façon il allait falloir évoluer
29:04d'une manière ou d'une autre, mais pour cela il fallait
29:06conquérir l'avantage sur le terrain militaire.
29:08Il y avait eu l'histoire de la paix des braves,
29:10mais il a très vite compris que ça ne marcherait pas, la paix des braves.
29:12Et puis il y a un moment où il a compris que c'était foutu,
29:14pardonnez-moi l'expression, mais...
29:16Mais c'est terrible parce qu'à noter ici, on peut comprendre aussi
29:18les Français d'Algérie qui lui en ont voulu.
29:20Mais bien sûr !
29:22Je veux dire, est-ce que c'est normal ? Personne n'est...
29:24Mais vous savez, j'ai travaillé avec un homme
29:26qui était rapatrié de Tunisie,
29:28lui, sa famille s'est rapatrié de Tunisie, c'était Philippe Séguin.
29:30Et Philippe Séguin,
29:32il s'est rallié à De Gaulle à l'époque de la 5ème République
29:34et de la guerre d'Algérie parce qu'il approuvait la politique
29:36algérienne de De Gaulle. Mais Philippe Séguin,
29:38à plusieurs reprises dans des déclarations publiques,
29:40a rappelé des conditions épouvantables
29:42qui avaient été faites aux pieds noirs,
29:44et notamment quand ils sont rentrés en France.
29:46Donc, l'un n'empêche pas l'autre, malheureusement.
29:48Vous savez, c'est la fameuse
29:50phrase que De Gaulle voulait mettre dans les mémoires d'espoir
29:52à la fin du chapitre sur l'Algérie.
29:54À la fin, il voulait mettre
29:56« et que Dieu me prenne en pitié ». Et finalement, il l'a enlevé.
29:58Mais il a aussi écouté
30:00le cardinal de Retz, « on ne sort de l'ambiguïté
30:02qu'à son détriment ».
30:04Il en est sorti relativement vite, en fait.
30:06Oui, c'est vrai. C'est vrai qu'il n'est pas
30:08resté... Il ne pouvait pas.
30:10Je veux dire, il fallait trancher.
30:12Un élément qui est peu connu, c'est que
30:14dès qu'il est arrivé au pouvoir, il a voulu
30:16arrêter le recrutement des supplétifs.
30:18Ce qu'on appellera
30:20les harkis par simplicité.
30:22Parce qu'il sentait
30:24qu'il y avait là en germe quelque chose de dramatique.
30:26Et c'est le commandement en Algérie
30:28qui, au contraire,
30:30il ne s'est pas fait obéir au début.
30:32C'est vrai qu'il y a des drames,
30:34mais toujours des drames.
30:36Et au final, il est resté 11 ans
30:38au pouvoir. Et ce sera
30:40d'une densité exceptionnelle, ces 11 ans.
30:42Oui, c'est vrai que c'est ça qui fait un petit peu rêver.
30:44Mais en même temps,
30:46ça me permettrait de dire, si vous voulez,
30:48que ce n'est pas seulement la nostalgie
30:50de De Gaulle. Parce que
30:52moi, ça m'est arrivé de parler avec des jeunes étudiants
30:54qui me disent, oui, mais il ne faut pas tout le temps parler de De Gaulle.
30:56Mais non, parce qu'en fait,
30:58nous vivons dans le
31:00lègue de De Gaulle.
31:02Toute notre pensée diplomatique,
31:04tout notre système de défense,
31:06tout notre système institutionnel a été fabriqué
31:08par De Gaulle, non seulement par
31:10des textes, mais par la pratique du pouvoir.
31:12Nous vivons dans un univers façonné par De Gaulle.
31:14Il est très abîmé, il ne faut pas se
31:16le dissimuler. Mais c'est pour ça,
31:18ce qui est extraordinaire chez De Gaulle, c'est
31:20comme si le temps était aboli.
31:22C'est-à-dire qu'il est présent
31:24à chaque instant. C'est pour ça que son nom ressort toujours.
31:26Ce n'est pas seulement de la nostalgie, il ressort
31:28toujours parce qu'il est présent
31:30à travers tout ce qui se fait, ou tout ce qui ne se fait
31:32pas, ou tout ce qui devrait se faire.
31:34Et je dirais, Arnaud Tessé,
31:36qu'il est présent peut-être au moins au temps
31:38par son refus des compromissions.
31:40C'est fondamental, parce que
31:42quand on voit aujourd'hui, encore une fois, on ne citera
31:44ni des noms, ni de formes d'actualité
31:46écumes.
31:48Mais c'est un homme qui n'aurait
31:50jamais accepté la cohabitation.
31:52Si les élections législatives
31:54auraient eu lieu, qu'il aurait été désavoué
31:56quand il serait parti,
31:58il serait un peu là.
32:00Pensez au débat de la présidentielle de 1988
32:02du deuxième tour, Mitterrand, président
32:04de la République et Chirac, Premier ministre, s'accusant
32:06habituellement d'être des menteurs. On n'imagine pas
32:08effectivement De Gaulle,
32:10mis dans cette situation.
32:12Et puis surtout,
32:14ce qui était très important pour De Gaulle, et ce qui conditionne
32:16tout l'équilibre des institutions de la cinquième,
32:18c'est le lien de confiance directe avec le peuple.
32:20D'où la révision de 1962,
32:22qui instaure l'élection au suffrage universel
32:24direct du président de la République, et d'où la pratique
32:26du référendum.
32:28Qui était équivalente, et n'oublions pas,
32:30enfin je veux dire, on pense à De Gaulle,
32:32et c'est pour ça, quand il y a eu 2005, le fameux
32:34référendum sur la Constitution européenne,
32:36disant non,
32:38on refuse la Constitution européenne
32:4055% des Français,
32:42et on s'assoit dessus deux ans après avec le traité
32:44de Lisbonne. On se dit, là aussi,
32:46on ne peut pas ne pas penser à De Gaulle.
32:48Référendum, les Français n'en veulent pas,
32:50eh bien, aucune importance.
32:52Parce que comme disait Giscard, le référendum c'est bien quand la réponse
32:54est oui.
32:56De Gaulle, le dernier des géants,
32:58celui d'après mai 68,
33:00qui ne lâche pas prise, on va en parler
33:02dans un instant sur Sud Radio avec Arnaud Tessit.
33:04Sud Radio,
33:06la culture dans tous ses états.
33:08André Bercoff, Céline Alonso.
33:10Votre réponse
33:12va
33:14engager le destin
33:16de la France parce que
33:20si je suis désavoué
33:24par une majorité
33:26d'entre vous
33:28solennellement
33:30sur ce sujet
33:32capital
33:34et quel que puisse
33:36être le nombre,
33:38l'ardeur
33:40de l'armée
33:42de ceux
33:44qui me soutiennent
33:46et qui de toute façon
33:48détiennent l'avenir
33:50de la patrie,
33:52ma tâche actuelle
33:54de chef de l'État deviendra
33:56évidemment impossible
33:58et je cesserai
34:00aussitôt
34:02d'exercer mes fonctions.
34:04Et oui,
34:06le 25 avril 1965,
34:08De Gaulle prononce
34:10ce discours
34:12depuis le palais de l'Elysée
34:14deux jours avant le référendum
34:16sur la régionalisation et la réforme du Sénat,
34:18André Bercoff. Arnaud Tessit,
34:20comment en est-on arrivé à ce référendum ?
34:22Parce que
34:24avant même mai 68,
34:26évidemment on l'a confirmé dans cette idée,
34:28De Gaulle avait le sentiment qu'il y avait un problème,
34:30que la société supportait difficilement
34:32cet État puissant qu'était
34:34la constitution politique, l'administration
34:36de la Vème République, et puis il pensait
34:38qu'on allait vers une crise du capitalisme,
34:40que le communisme disparaîtrait un jour
34:42et que le capitalisme serait confronté.
34:44Il y pensait déjà, enfin il pensait.
34:46Il le dit, et donc il voulait absolument
34:48lancer une nouvelle étape
34:50de son mandat.
34:52C'est très curieux parce qu'il était âgé, on le sent
34:54dans sa voix, il était âgé, il était fatigué,
34:56il avait triomphé de mai 68,
34:58mais ça l'avait affaibli. Mais il voulait quand même remettre
35:00le couvert, si j'ose dire. Simplement,
35:02il a mis sur la table des choses que les Français
35:04n'ont pas compris. Il leur parlait d'un monde
35:06qui allait venir, mais qu'ils ne voyaient pas.
35:08Pour cause, c'est le monde dans lequel nous vivons.
35:10C'est celui de la mondialisation. Mais il le décrivait
35:12en 1969, c'est incroyable.
35:14Même ses proches collaborateurs n'ont pas compris à l'époque.
35:16Donc il a perdu le référendum,
35:18mais évidemment... De peu, de point,
35:20de 3, 4 points. Est-ce qu'il était obligé
35:22de partir ? Non, d'abord
35:24il n'était pas obligé de faire le référendum, ensuite
35:26il n'était pas obligé de partir. Mais il considérait qu'à partir
35:28du moment... C'était pas tellement
35:30un problème de confiance. Dans les sondages,
35:32il était à des niveaux que lui ont virés
35:34tous ses successeurs.
35:36C'est clair. Notamment les plus récents.
35:38Mais il considérait
35:40qu'il fallait non seulement
35:42qu'effectivement le peuple renouvelle sa confiance,
35:44mais qu'il les mandât de faire de grandes réformes.
35:46C'est incroyable cette énergie jusqu'à la
35:48dernière minute. Je ne sais pas,
35:50je mettrais peut-être un bémol
35:52à noter ce que vous dites, parce que
35:54effectivement,
35:56d'abord c'est mal formulé, le Sénat d'un côté,
35:58la régionalisation de l'autre,
36:00est-ce que ça ne voulait pas dire quelque part
36:02qu'il en avait un peu assez, qu'il avait
36:04envie de partir ? Non, je crois pas.
36:06C'était pas un référendum suicide.
36:08Je crois qu'il a compris
36:10quelques semaines avant qu'il allait le perdre,
36:12mais je crois que c'était pas un référendum. C'était quelqu'un
36:14qui ne renonçait jamais. Et d'ailleurs,
36:16il le dit d'ailleurs,
36:18quand il dit, en parlant de ceux qui l'ont soutenu,
36:20il est très nombreux finalement.
36:22C'est vous qui ferez la misère.
36:24Il n'y a jamais eu autant de gaullistes en France
36:26que le jour du référendum.
36:28Et puis il dira aussi dans une lettre
36:30à Debré, c'est triste ce qui arrive,
36:32on va connaître une longue période de médiocrité,
36:34il ne savait pas à quel point,
36:36mais un jour, on sera obligé
36:38de reposer
36:40les questions que j'ai posées,
36:42on sera obligé de les reposer dans les mêmes termes,
36:44et ces questions, c'était la cohésion
36:46du territoire en France,
36:48sujet que nous connaissons, et c'était la crise
36:50morale du capitalisme.
36:52C'est tout ce que nous connaissons avec le populisme,
36:54tout ce qui se passe en Occident.
36:56Mais en somme, les régions,
36:58lui, ces régions qu'il voulait créer,
37:00c'est en somme la démocratie participative
37:02avant l'heure en quelque sorte.
37:04Le mot démocratie participative
37:06était tellement galvaudé
37:08que j'ose à peine l'utiliser, mais c'est un peu ça
37:10d'ailleurs, le mot participation, c'est lui
37:12qui l'a lancé. Il voulait en fait créer des régions
37:14qui n'auraient pas été décentralisées. De Gaulle,
37:16pour lui, c'était quand même le préfet qui devait rester le patron.
37:18Mais il voulait créer un lieu
37:20de débat entre la société réelle,
37:22ce qu'il appelait les forces vives,
37:24avant que le terme soit galvaudé,
37:26c'est-à-dire les étudiants, les chercheurs,
37:28les professeurs, les syndicalistes, les familles.
37:30Les familles donnaient un lieu
37:32de débat entre la société
37:34et l'État. Donc c'était très, très
37:36moderne, mais à l'époque, personne
37:38n'a compris ce qu'il voulait dire.
37:40Mais lui-même ne l'a pas exprimé,
37:42il aurait pu l'exprimer autrement, franchement.
37:44Non, parce que l'exposé des motifs
37:46du projet de loi référendaire qu'il a écrit,
37:48on dirait un texte d'Henri Bergson.
37:50C'est un texte philosophique incroyable.
37:52Eh oui, en tout cas
37:54désavoué, le 27 avril
37:561969, il part
37:58et ce jour-là, Alain Delon
38:00lui adresse une lettre très émouvante.
38:02Écoutons-la.
38:04Mon général,
38:06depuis toujours
38:08et plus encore depuis des ans,
38:10j'étais grâce à vous
38:12fier d'être français.
38:16Ce soir,
38:18devant l'ingratitude et l'inconscience
38:20de plus de la moitié d'un peuple,
38:22je ressens avec effroi
38:24un sentiment de honte qui me brise le cœur.
38:26Je tenais
38:28à vous le dire.
38:30Dédiez me croire, mon général,
38:32fidèlement et inconditionnellement
38:34vôtre.
38:36Alain Delon.
38:38Très émouvant Alain Delon, Arnaud Tessieux.
38:40Quand de court, il quitte le pouvoir,
38:42il est à nouveau habité par l'angoisse
38:44et le désir obsessionnel de
38:46la vaincre. Qu'est-ce qui l'angoissait
38:48particulièrement à cette époque ?
38:50C'est le monde qui venait dans les
38:52conversations à Colombay, quand il recevait
38:54à déjeuner d'anciens collaborateurs, il en parlait.
38:56Les attentats, la violence,
38:58l'évolution de la vie
39:00internationale qui devait être de plus en plus
39:02violente et puis la question
39:04sociale qui l'avait toujours obnubilée
39:06et l'idée, encore une fois,
39:08que la confrontation entre le
39:10communisme et le capitalisme cesserait un jour,
39:12que le capitalisme sortirait en apparence
39:14vainqueur mais qu'il se retrouverait
39:16face à la question du progrès
39:18technologique, du progrès technique
39:20et du risque d'avilissement
39:22du travailleur, du salarié. Tout cela
39:24l'agitait beaucoup. Et puis la souveraineté
39:26et la mondialisation, qu'il ne le posait pas comme ça
39:28mais c'est tellement là aujourd'hui.
39:30Et puis la crainte pour la France
39:32qu'elle ne soit pas à la hauteur de ses institutions.
39:34Il y a ça aussi. Il avait peur
39:36qu'on s'arrange avec les institutions de la cinquième
39:38et qu'on retourne dans les
39:40errements du passé, qu'on revienne vers le régime des partis
39:42et la quatrième république. Ça c'était aussi une de ses obsessions.
39:44Et c'est pour ça qu'il continue d'agir à sa manière
39:46en commençant les mémoires d'espoir.
39:48Parce que les mémoires d'espoir, c'est
39:50un nouveau travail de pédagogie
39:52à l'égard de la postérité. C'est un
39:54document étonnant, inachevé
39:56dont je soulignerais que
39:58le premier tome s'appelle
40:00le renouveau et le deuxième tome l'effort.
40:02Pour lui, il fallait d'abord incarner
40:04le renouveau avant de demander un effort.
40:06Aujourd'hui, on a tendance à inverser l'ordre des facteurs.
40:08Il ne faut pas s'étonner.
40:10Arnaud Tessier,
40:12à la lumière de tout ce que vous venez
40:14de nous raconter sur
40:16De Gaulle, que
40:18ferait un De Gaulle aujourd'hui ?
40:20C'est très difficile à dire.
40:22Je pense qu'il ne se serait
40:24jamais mis dans cette situation.
40:26Je pense que nous ne serions jamais
40:28arrivés à la situation que nous connaissons.
40:30Le quinquennat,
40:32la présidentialisation extrême du régime.
40:34De Gaulle
40:36respectait ses premiers ministres. Je peux vous dire que
40:38Michel Debré et Georges Pompidou n'étaient pas
40:40des factotums.
40:42Je pense que
40:44la situation serait inconcevable.
40:46De Gaulle n'aurait jamais laissé les choses
40:48arriver là où elles en sont.
40:50Je pensais sur tout ça.
40:52En tout cas, pour lui, ce qui était absolument vital
40:54alors ce que je vous dis, vous en ferez ce que
40:56vous voudrez, mais c'était le lien de confiance
40:58qui l'unissait au peuple et la capacité
41:00de le vérifier.
41:02Il parle de bafouer à chaque fois cette confiance.
41:04C'est ça.
41:06Qu'aurait-il fait de l'Europe, lui qui voulait une Europe politique ?
41:08Il en aurait fait une Europe
41:10véritable. C'est-à-dire, oui, une Europe politique.
41:12Une Europe des nations.
41:14Pas seulement une Europe monétaire,
41:16mais une Europe
41:18des États.
41:20Une Europe politiquement forte, autonome
41:22vis-à-vis des États-Unis.
41:24Alliée des États-Unis, bien sûr, dans l'Alliance Atlantique,
41:26mais autonome vis-à-vis des États-Unis
41:28et capable de garantir elle-même
41:30sa défense dans un monde
41:32qu'il ressentait comme pouvant de revenir
41:34de nouveau très dangereux.
41:36Et quand on voit aujourd'hui la situation en Europe,
41:38on se dit que, là aussi,
41:40De Gaulle avait vu juste et que nous vivons
41:42toujours dans un univers
41:44dont il a, en quelque sorte,
41:46dessiné les contours, même si
41:48le sens qu'il donnait aux mots et aux choses
41:50c'est un peu perdu.
41:52Pour rappeler quand même qu'il avait, lui, amené la France à quitter l'OTAN.
41:54Oui, et pas l'Alliance,
41:56mais l'organisation intégrée.
41:58Oui, l'organisation intégrée, exactement.
42:00Arnaud Tessier, merci d'être venu sur Sud Radio.
42:02Merci pour cette émission passionnante.
42:04Je rappelle que votre livre
42:06Charles de Gaulle, l'angoisse et la grandeur
42:08est paru aux éditions Perrin.
42:10Tout de suite, c'est Brigitte Laé sur Sud Radio.