• il y a 7 mois
Transcription
00:00Bonjour, Franck Thillier.
00:01Bonjour.
00:02Vous devriez, de par vos études à l'Institut supérieur de l'électronique
00:06et du numérique, évoluer en tant qu'ingénieur dans les nouvelles technologies.
00:09Sauf que l'écriture, en parallèle, a eu raison de vous.
00:11Les romans, scénarios, histoires nourrissent votre quotidien avec de beaux
00:14succès. Je pense notamment à La Chambre des Morts, parce que c'est vraiment le
00:17point de départ, on va dire, de la rencontre avec le public qui a reçu une
00:19belle reconnaissance dans le milieu.
00:21Aujourd'hui, vous publiez Northerville chez Fleuve Édition, ou Comment
00:25être projeté dans le Nord, dans le Grand Nord québécois, ou
00:29Le Froid Extrême devient un personnage central qui affronte la rudesse d'un
00:32assassinat morbide, de plusieurs assassinats morbides, puisqu'on est face
00:36à un tueur en série et face aussi à l'existence et
00:41une violence qui est très ancrée.
00:43Vous semblez jubiler, en fait, davantage en ouvrage.
00:46Qu'est-ce qui vous plaît dans ces rôles que vous endossez tour à tour,
00:49inspecteur, assassin, médecin légiste, ami, proche de la victime ?
00:53Oui, c'est vrai que c'est un univers très sombre qui peut paraître
00:55surprenant parce que les gens disent que je suis une personne plutôt
00:59sympathique. Non, c'est la transmission de la peur.
01:02Moi, quand j'étais ado, j'adorais me faire peur, ressentir cette
01:06adrénaline dans les histoires que je pouvais soit voir à la télé ou
01:10lire, notamment avec Stephen King.
01:12En général, quand on lit un thriller, on est rattrapé par le fait, en tout
01:16cas, conforté, protégé par le fait que ça reste un livre.
01:19En même temps, dans ce livre-là et dans certains de vos livres, de plus en
01:22plus, vous injectez des vraies situations de vie, de société,
01:27un regard aussi sur la vie.
01:29On ne se contente pas de raconter une histoire qui est une pure fiction.
01:31Ce sont des livres qui parlent du monde dans lequel on vit.
01:35Suivant le regard de tel ou tel auteur, j'ai plutôt un regard, on va dire,
01:39sociétal et scientifique dans certains autres livres.
01:42C'est vrai que là, ça parle d'un vrai fond.
01:45C'est ce qui va donner la matière au roman, qui est une surreprésentation de
01:49la violence, en fait, chez les femmes autochtones qui vivent au Canada,
01:54chez ces communautés, de la violence, les disparitions, les meurtres.
01:57C'est vraiment un fait qui est avéré, dont on a beaucoup parlé
02:01en 2016, mais qui est assez méconnu, finalement, ici, en France.
02:05Et c'était l'occasion, à travers une histoire qui reste quand même un
02:08thriller, c'est-à-dire on tourne les pages sans s'arrêter.
02:10Derrière, il y a un vrai fond et ce qui fait que quand on referme le livre,
02:13en fait, on a découvert, on a une image un peu plus précise,
02:18finalement, du monde dans lequel on évolue.
02:20L'idée, c'est de donner aussi envie de faire réfléchir, là,
02:24sur la situation, notamment très, très claire.
02:26Et puis, surtout, de comprendre à quel point c'est difficile.
02:29Par exemple, pour un enquêteur, vous rentrez dans la peau de l'enquêteur
02:32et vous dites que la première chose qu'on indique à un enquêteur,
02:35c'est de ne pas faire rentrer la victime, finalement, dans sa sphère privée.
02:40Oui, oui, ça fait partie de leur métier.
02:42Comme le médecin légiste, avant de connaître des médecins légistes,
02:46je me disais, mais comment on est capable de passer sa journée
02:48à faire des autopsies avec des vrais gens en face et de ne pas avoir d'affect
02:52suivant la personne qui se trouve juste en face ?
02:54C'est un peu le médecin, c'est-à-dire il y a le travail,
02:56il y a le protocole et puis après, il y a l'humain qu'on laisse de côté
03:01à l'entrée de la pièce.
03:02Et moi, je fais un peu pareil, c'est-à-dire parce que je parle
03:05d'histoires de disparition, de crimes.
03:07J'ai moi-même des enfants, donc c'est vrai que
03:10j'aurais tendance à penser à mes propres enfants.
03:12Quand j'écris une mère ou un père qui recherche son propre enfant...
03:17Et qui essaye d'élucider la mort de son enfant, surtout.
03:19Oui, oui, c'est absolument terrifiant et ça m'arrive d'avoir des transferts
03:23comme ça pendant l'écriture et ça me met mal parce que je ne peux plus écrire.
03:26Mais la plupart du temps, quand même, ça reste assez...
03:29Voilà, il y a le travail où je suis face à mon bureau
03:32et je peux explorer vraiment des sujets très sombres.
03:34Puis après, il y a la vie de famille et cette séparation,
03:36elle est, je trouve, nécessaire pour garder la tête froide
03:39quand on écrit ce genre d'histoire.
03:41Et il y a, sous couvert de tout ça, ce sentiment de trahison
03:46qui est terrible qu'on peut toutes et tous subir.
03:49J'en dis pas plus, ça s'appelle Northerville.
03:50C'est sorti chez Fleuve Noire.
03:52Merci beaucoup d'être passé dans le monde d'Élodie sur France Info.
03:54Oui, merci. Merci beaucoup.