• il y a 7 mois
Vendredi 3 mai 2024, SMART BOURSE reçoit Régis Bégué (Partner and Co-Head of Memnon European, Zadig Asset Management) , Mabrouk Chetouane (Head of Global Market Strategy, Solutions, International, Natixis IM) et Nicolas Goetzmann (Responsable de la stratégie Macroéconomique, Financière de la Cité)

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00:00Trois invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète marché.
00:15Mabrouk Chetouan, Responsable Stratégie Marché Globo chez Nantic 6ème est à nos côtés.
00:20Bonsoir Mabrouk. Merci d'être là.
00:22Merci également à Régis Beguet, partenaire et gérant chez Zadig AM. Bonsoir Régis.
00:27Bonsoir Florence.
00:28Et enfin merci à Nicolas Goetzmann, Responsable de la Stratégie Macroéconomique de la Financière de la Cité. Bonsoir Nicolas.
00:33Bonsoir.
00:34Alors on va tout de suite commencer par la question qui agite les marchés.
00:38Alors on a eu l'intervention de Jérôme Pohen le 1er mai qui a dit qu'une baisse des taux n'était pas envisageable maintenant compte tenu de la résistance de l'inflation.
00:48Mais bon c'est quand même bien une désinflation qui était envisagée et une baisse des taux qui continue d'être anticipée.
00:53Il a quand même écarté une hausse.
00:55Mais on ne sait pas évidemment avec certitude quand est-ce que la baisse s'interviendra.
00:58Alors évidemment les marchés surveillent de très près tous les indicateurs macroéconomiques qui pourraient influencer la politique de la Fed.
01:03On l'a bien vu cet après-midi avec les chiffres de l'emploi américain.
01:06Alors est-ce qu'on peut encore s'attendre à une baisse des taux en 2024 ?
01:09Est-ce que ce sera une ? Est-ce que ce sera deux ? De quelle ampleur ?
01:13Vous voulez commencer ?
01:15Pourquoi pas.
01:16Allons-y.
01:18Alors en fait une ou deux ça ne changera pas grand-chose en réalité.
01:22Ce n'est pas le sujet.
01:23Ce qui compte en fait c'est l'orientation de la politique monétaire.
01:26Et là Jérôme Powell a encore entre guillemets brillé par sa capacité à jouer les équilibristes.
01:31En même temps en disant finalement qu'il était capable de réagir à toute évolution adverse du marché du travail.
01:38Donc là effectivement ce chiffre de l'emploi, des créations d'emploi a été à un moment donné perçu comme étant bad news is good news en réalité.
01:45Mais fondamentalement quand on regarde un peu dans le détail, on a déjà eu des chiffres finalement au mois de janvier de cette année montrant qu'on avait seulement 175 000 créations d'emploi.
01:53C'est remonté à plus de 300 000 après.
01:55Le chiffre du mois dernier a été révisé à la hausse.
01:57Donc là encore il convient finalement de se montrer un peu prudent sur la lecture de ces chiffres-là.
02:02Qui a été par ailleurs notamment sur la composante prix de l'ISM Service qui pose un problème finalement à la Fed.
02:07Et ça a été rappelé, publié cet après-midi.
02:10Et qui a littéralement on va dire quasiment effacé toute la baisse des taux d'intérêt à long terme qu'on a observé suite à la publication de ce chiffre.
02:17Donc encore une fois finalement est-ce qu'il est urgent pour la Fed de bouger entre guillemets sa politique monétaire ?
02:24Non. Les marchés font le travail entre guillemets de durcissement des conditions financières en maintenant des taux d'intérêt finalement à leur niveau actuel.
02:31Et donc le higher for longer prend tout son sens.
02:34Et ça devient d'autant plus finalement et ça a été posé comme question.
02:37C'est une question que je trouve extrêmement pertinente lors de la session de questions-réponses.
02:41Au fond quand on a une croissance potentielle qui globalement d'après les premières estimations,
02:48même si c'est beaucoup trop tôt finalement pour pouvoir estimer cette dernière,
02:51qui est possiblement en hausse et bien fondamentalement on aurait sans doute un peu plus d'inflation dans le tuyau.
02:57Donc même si Jérôme Powell a bien dit qu'il ne tolérerait pas plus de 2% d'inflation mais ça c'est de la rhétorique.
03:02Et bien finalement est-ce qu'il est nécessaire finalement de baisser tout de suite aussi violemment que le marché ne le demande etc.
03:09Le marché est toujours dans l'exagération. On le voit encore cet après-midi avec ce qui s'est passé au marché obligataire.
03:14Surréagir tout le temps et donc c'est à la banque centrale d'apporter un peu de sérénité tout en finalement disant
03:19nous sommes prêts à agir si jamais effectivement la situation le nécessite.
03:22C'est ce que Jérôme Powell a dit mais en l'occurrence, en l'état actuel des choses
03:26et compte tenu de ce qu'on observe sur le marché finalement dans l'économie,
03:29il n'est absolument pas question finalement de bouger notre intérêt.
03:32Je rappelle juste un point encore une fois sur le secteur manufacturier qui est le secteur exposé fondamentalement.
03:36Et bien celui-ci finalement montre qu'il se comporte, on va dire, certains points, certains items de l'IAC manufacturier
03:44sont entre guillemets supérieurs à ce qu'ils étaient en début d'année.
03:47Donc c'est dire à quel point fondamentalement on est dans un cycle qui reste encore extrêmement fort aux Etats-Unis.
03:54La résilience du cycle américain est là et globalement on ne voit pas aujourd'hui ce qui à brève échéance
03:59pourrait effectivement casser cette dynamique-là.
04:02Donc c'est pour ça que temporiser, attendre finalement, je suis quasiment certain que Jackson Hole encore une fois au mois d'août
04:08sera le moment pour les banquiers centraux, notamment pour Powell, une nouvelle fois de saisir cette tribune
04:14pour s'exprimer et dire fondamentalement quelle sera la feuille de route pour le restant de l'année.
04:19Alors une ou deux baisses fondamentalement ça ne changera rien.
04:21Brigitte Bégui, votre avis sur la feuille de route de la fête ?
04:24Oui, écoutez, je crois que ce qui vient d'être dit est tout à fait juste.
04:29Jérôme Powell a fait sien l'aphorisme d'Hélène Grispan, le fameux aphorisme d'il y a 25 ans
04:37« si vous m'avez compris c'est que je me suis mal exprimé »
04:40et je crois que c'est vraiment un bon résumé de ce qu'il a dit mercredi.
04:46On ne voit pas très bien.
04:47Mais on sait qu'il va baisser les taux un jour.
04:51Je ne vois vraiment pas du tout d'urgence au vu des dernières données que nous avons eues à baisser les taux.
04:59Même si aujourd'hui effectivement pour plus ou moins la première fois on a eu un chiffre
05:04qui n'est pas forcément significatif d'un marché de l'emploi un peu moins dynamique que ce qu'il était jusqu'à présent.
05:09Et même si on a un taux de chômage qui a effectivement monté de 3,9% à 4,1%
05:13on a toujours une inflation salariale, une augmentation des salaires.
05:18Même si aujourd'hui le chiffre est un peu plus faible qu'attendu et quand même proche de 4%
05:24les derniers chiffres de l'inflation guident plutôt entre 4,5% et 5% d'inflation sur l'ensemble de l'année.
05:31On est donc très très loin de l'objectif qui rappelons-le de 2%.
05:36Donc ça n'est pas parce que nous sommes dans une phase de ralentissement de l'inflation
05:40que nous sommes sur le point d'atteindre l'objectif de la Fed.
05:45On en est à vrai dire assez loin.
05:47Alors en fait je pense que ce qui a poussé les marchés à imaginer que ces baisses de taux interviendraient très rapidement
05:55c'est effectivement l'échéance des élections américaines qui arrivent en novembre.
05:59Et on se dit c'est difficile pour la Fed d'intervenir juste au moment des élections.
06:04Mais c'est vraiment juste au moment.
06:06Après une non-intervention c'est aussi un acte de gestion de ne pas intervenir.
06:11Donc dans quelle mesure et qui il avantage ou elle désavantagerait spécialement en agissant sur les taux au moment des élections
06:21c'est pas très clair.
06:22Ça donnerait peut-être du grain à moudre au candidat en disant je suis victime de la Fed.
06:26Effectivement ça donnerait un prétexte.
06:29C'est pas la baisse des taux de la Fed 15 jours avant qui va changer le résultat des élections américaines.
06:35Donc je pense que c'est un peu une fausse échéance.
06:38Et pour moi il n'y a vraiment aucune perspective de baisse de taux à court terme qui serait justifiable par les données que nous avons.
06:47Encore une fois on a une économie américaine qui se porte très très très bien sur tous les plans.
06:51Là il y a un tout petit signe de ralentissement.
06:54Je ne vois vraiment pas l'urgence.
07:00Et si jamais l'inflation se stabilisait autour de ces 5% et que la Fed soit rentrée dans un cycle de baisse des taux
07:08comment elle remonterait les taux immédiatement après les avoir baissés.
07:12C'est déjà arrivé par le passé mais ce ne serait pas un très bon signal envoyé au marché.
07:19Nicolas, votre avis sur le calendrier de la Fed ?
07:23Si on regarde le calendrier, la prochaine réunion importante c'est le 12 juin, la prochaine c'est le 31 juillet.
07:29Donc d'ici le 12 juin on aura seulement une publication d'emplois supplémentaires.
07:33On aura deux rapports d'inflation qui vont être publiés d'ici là.
07:36Alors ce qu'il a dit mercredi soir c'est justement d'indiquer qu'on a eu trois mois consécutifs d'une inflation qui était plus forte que ce qu'on anticipait précédemment.
07:46Et donc il va lui falloir au moins trois lectures d'inflation, c'est-à-dire trois chiffres d'inflation dans le sens inverse
07:52pour lui permettre d'avoir éventuellement une ouverture pour pouvoir baisser les taux.
07:56Donc on peut déjà exclure le mois de juin, ce qui était anticipé précédemment.
08:00Et quand on regarde ce qui était anticipé notamment au mois de mars par la médiane des gouverneurs,
08:05en fait on avait une anticipation de trois baisses de taux qui étaient anticipées à ce moment-là.
08:10Mais cette médiane-là était obtenue justement par une seule voix d'un seul gouverneur.
08:14Donc on peut très facilement imaginer qu'il ne faudra qu'un gouverneur pour modifier ce type de trois à deux baisses de taux,
08:20ce qui sera probablement le cas lors de la publication du SEP au mois de juin,
08:26avec tout de même une possibilité pour le mois de juillet qui serait ouverte si jamais les trois lectures d'inflation qui seront publiées d'ici là
08:33sont vraiment dans le rang et viendraient infirmer ce qui s'est passé au début d'année.
08:37Et quand on regarde ce qu'a dit Powell aussi bien au mois de mars que lors de cette réunion-là,
08:43ce qui est intéressant c'est qu'il avait dit qu'il n'avait pas surréagi lors de la très forte baisse qu'on avait eue à la fin,
08:48enfin lors du dernier trimestre 2023, parce qu'il considérait qu'il y avait des effets statistiques dans ces chiffres-là.
08:54On a vu notamment sur les biens, tout ce qui était relatif à l'électronique qui avait connu une baisse tout à fait historique pendant cette période-là.
09:02Or au premier trimestre on a une inversion de cette tendance-là et donc en fait ils n'ont pas surréagi à la fin de l'année,
09:07ils n'ont pas surréagi non plus en ce début d'année avec la hausse de l'inflation.
09:11Et donc ce qu'ils veulent voir c'est éventuellement un retour à la tendance qu'ils avaient précédemment,
09:14justement à cette tendance de désinflation.
09:17Par contre si on arrive sur ce chemin-là, je pense qu'il y a une réelle volonté de la FED de pouvoir intervenir
09:22avant qu'il ne se passe quoi que ce soit sur le niveau de l'emploi.
09:26S'ils peuvent agir en faisant baisser leur taux uniquement sur le rythme d'une baisse de l'inflation,
09:33donc en suivant bêtement la baisse de l'inflation, en suivant d'ailleurs les règles de Taylor,
09:38montrées aujourd'hui quasiment au niveau actuel de la FED,
09:42on pourrait avoir justement un signal donné par la Banque Centrale Américaine qui permettrait de dire
09:47on n'a pas besoin justement d'avoir une situation qui commence à être mauvaise pour pouvoir réagir,
09:51on est capable d'agir avant, ce qui serait également je pense une préparation du terrain
09:55de ce qui se passe au deuxième semestre de cette année,
09:58c'est-à-dire la mise en place de la revue de stratégie politique monétaire
10:01dont le résultat sera donné l'année prochaine, donc mi-2025,
10:05et de donner vraiment un aspect un peu plus pro-croissance,
10:08enfin encore plus pro-croissance que la FED ne l'est déjà à l'intervention future.
10:14Mais je pense qu'il y a vraiment une réelle volonté de leur part,
10:16déjà une croyance je pense assez forte que la désinflation n'a pas été mise en danger
10:21par ce qui s'est passé lors du premier trimestre,
10:23ensuite on est capable de ralentir parce que les chiffres du PIB,
10:26même s'ils étaient à 1,6%, en fait quand on regarde sous le capot
10:30on voit que les chiffres étaient très bons au premier trimestre,
10:33le rythme de création d'emplois est également très bon pour le moment,
10:36donc il n'y a pas de problème de ce côté-là,
10:37mais s'ils ont la possibilité de baisser les taux avant même
10:40qu'on ait des dégâts qui soient causés par la politique monétaire,
10:43ça serait vraiment parfait de leur côté.
10:45Le seul point c'est que jusqu'à présent la politique monétaire n'a causé quasiment aucun dégât,
10:49c'est un peu ça la difficulté,
10:50parce que, enfin, sauf effectivement pour les petites entreprises
10:54qui ont beaucoup de difficultés à se financer,
10:56et certains, et même pour le marché immobilier,
10:59je ne parle pas de l'immobilier commercial,
11:01pour le moment les dégâts sont relativement contenus.
11:04On a eu une politique budgétaire complètement hors de contrôle,
11:08quand on regarde certaines métriques,
11:10le déficit budgétaire américain est encore extrêmement fort,
11:13il sera extrêmement fort cette année,
11:15et rien n'exclut que quand on regarde la politique promise par les deux candidats,
11:20on reste dans cette thématique de l'expansion budgétaire.
11:25En tout cas, Donald Trump ne parle pas de réduire le déficit,
11:29il parle de réduire les dépenses, mais effectivement de ne pas réduire le déficit,
11:32donc lui c'est une politique fiscale,
11:34et Joe Biden, je n'ai pas l'impression qu'il ait intégré une thématique de réduction du déficit,
11:38donc ça va être encore plus compliqué pour la Fed de devoir envisager
11:41une réduction des taux d'intérêt,
11:43en sachant même que c'est cette politique budgétaire
11:45qui est un des moteurs de croissance américaine.
11:48C'est ça que je trouve très intéressant,
11:50c'est que quand vous décomposez le PIB
11:52et que vous sortez les éléments sur lesquels la Fed ne peut pas grand-chose,
11:55en gros les dépenses du gouvernement,
11:57et notamment tout ce qui est équipement en structure,
11:59qui est le reflet des subventions qui sont données au marché américain
12:03pour la politique industrielle américaine.
12:05Et on voit que c'est ça qui tire le PIB à la hausse,
12:07alors que le reste de l'économie est revenu à une situation normale.
12:10Et donc, sur le plan de l'activité qui dépend vraiment de la Fed,
12:14on a déjà un retour à la normale,
12:16pourquoi essayer de faire baisser ce niveau d'activité
12:18à un niveau qui serait inférieur
12:20pour compenser une politique industrielle aux Etats-Unis
12:22dans le but final,
12:24et comme le nom l'indique, IRA, par exemple,
12:27et de lutter structurellement contre l'inflation.
12:29Donc il y a une espèce de paradoxe,
12:31c'est que la Fed viendrait lutter,
12:33enfin compenser une situation qui serait un excès de PIB,
12:36dont l'objectif lui-même est de faire baisser l'inflation structurellement à l'avenir.
12:40Et donc là, il y a vraiment une question quasiment philosophique pour la Fed,
12:43c'est qu'est-ce qu'on fait dans cette situation-là,
12:45et quand on regarde les composantes qui sont vraiment très sensibles
12:48à la politique de la Fed,
12:49donc tout ce qui est investissement résidentiel,
12:51les biens durables, la consommation de biens durables,
12:53tout ce qui se fait à crédit,
12:54là on voit que ce qui s'est passé lors de l'année 2023
12:56était quand même assez sévère,
12:57et en fait, oui, l'activité américaine a bien réagi,
13:01enfin a réagi comme on l'attendait,
13:03est-ce que c'est vraiment besoin,
13:05est-ce qu'il est vraiment utile d'aller beaucoup plus loin
13:07et d'affaiblir ce niveau d'activité-là
13:09pour compenser quelque chose qui est vraiment décidé,
13:11d'une part par les électeurs et par le gouvernement en place ?
13:13Vous parlez d'anomalie, mais il y en a eu quand même une énorme aussi
13:16sur le PIB américain en premier trimestre,
13:18c'est justement cet investissement résidentiel.
13:20On a quasiment...
13:21Qui est reparti.
13:22Qui est reparti, mais de manière pas non plus, entre guillemets,
13:25juste, c'est pas un petit rebond,
13:26c'est quand même un rebond tout à fait substantiel,
13:28qui est d'ailleurs un peu curieux, qui interpelle,
13:30on aura sans doute une deuxième estimation qui va revoir ce chiffre,
13:33ça j'en suis quasiment convaincu,
13:35mais là encore, ça interroge finalement sur
13:37même la sensibilité de l'économie américaine
13:40face à cette politique monétaire.
13:42En fait, la crainte finalement, je pense,
13:44c'est de ne plus avoir la main mise,
13:45de ne plus avoir le contrôle sur le cycle américain.
13:47Alors même que l'une des missions d'une banque centrale,
13:49c'est de lisser le cycle.
13:50Or là, le cycle, manifestement,
13:51il a l'air d'avoir emprunté une espèce de tendance
13:54légèrement haussière, au-dessus du potentiel,
13:56ce qui bien évidemment ne manquera pas
13:58de générer des tensions inflationnistes.
13:59Bon, ça c'est en théorie, bien sûr.
14:00Et sur l'ensemble de l'année, en fait, tout ce qui dépend,
14:02tout ce qui est vraiment très sensible à la politique monétaire
14:04est quasiment passé d'un rythme de 8% en nominal en 2022
14:08à quasiment 0% en 2023,
14:10si on lit sur tout l'ensemble de l'année.
14:11Donc on voit quand même qu'il y a un effet
14:12qui est relativement substantiel.
14:14Et oui, effectivement, les chiffres du PIB américain,
14:16il y a plein de distorsions qui sont intervenues
14:19lors du premier trimestre.
14:20Quand on regarde vraiment dans le détail du détail,
14:22en fait, on voit d'ailleurs notamment
14:23les commandes en équipement d'investissement.
14:25Si vous regardez justement la composante avion,
14:27en gros Boeing,
14:28en fait, ça pèse 0,3 points de PIB
14:30sur le premier trimestre,
14:31ce qui est absolument gigantesque.
14:33Et si vous sortez les importations américaines,
14:36en fait, qui n'est pas forcément un mauvais signe,
14:38mais la demande domestique privée,
14:39c'est-à-dire vraiment les dépenses des ménages
14:41et des entreprises en investissement,
14:44on arrive à un taux de croissance qui est de 3,1%,
14:46donc qui est tout à fait enviable,
14:49notamment pour la zone euro.
14:51Alors, on va peut-être se pencher sur l'Europe maintenant.
14:53Alors, l'inflation en Europe,
14:55elle, évidemment, elle reflue.
14:56On est quand même à 2,4%,
14:58une stabilisation conforme aux prévisions.
15:00Donc, bon, la porte est grande ouverte
15:02pour une baisse en juin.
15:03Est-ce qu'il y aura vraiment une baisse en juin ?
15:05Est-ce qu'on va avoir un découplage monétaire
15:07entre US et Europe ?
15:09Est-ce que, finalement,
15:10c'est vraiment nécessaire de baisser,
15:12étant donné que,
15:13même avec une politique restrictive,
15:15l'économie en PNL se porte plutôt bien ?
15:17Régis, vous en pensez quoi ?
15:19Alors, la baisse en juin,
15:20elle est quasiment certaine,
15:21ne serait-ce que pour une question de crédibilité,
15:23puisque la Banque centrale européenne
15:26s'est exprimée,
15:27non seulement par la voix de sa présidente,
15:30mais par la voix d'autres banquiers centraux locaux,
15:35notamment en France,
15:36Villeroy de Gallo, etc.
15:37Ils se sont déjà plus ou moins engagés
15:39sur cette baisse des taux.
15:40Ce serait vraiment assez curieux
15:42de ne pas la faire.
15:44Est-ce qu'elle est absolument nécessaire ?
15:46Même si, effectivement,
15:48on a un petit redressement des PMI en Allemagne,
15:50qui est peut-être lié à un petit redressement en Chine,
15:56la croissance de la zone euro
16:00reste quand même plus ou moins anémique
16:03par rapport aux États-Unis.
16:06Donc, de toute façon,
16:08la dynamique de la zone euro
16:10justifie moins, structurellement,
16:13des taux très élevés en zone euro.
16:17Par ailleurs, en revanche,
16:19la Banque centrale européenne
16:21ne peut pas se départir complètement
16:23de la politique de la Fed,
16:25parce que vous auriez un effet devise induit
16:28sur la hausse du dollar,
16:30qui créerait non seulement
16:32des problèmes de compétitivité aux États-Unis,
16:35mais de l'inflation importée,
16:37de la baisse de pouvoir d'achat,
16:39et finalement, un ralentissement économique
16:41induit en Europe,
16:43qui serait l'effet opposé
16:45de celui qui est cherché par la baisse des taux.
16:47Même s'il y a baisse des taux en juin,
16:49de toute façon, si la Fed, après,
16:51ne rentre pas elle-même dans un cycle
16:53de baisse des taux,
16:55cette baisse en Europe sera limitée
16:57et peut-être s'arrêtera
16:59dès la première baisse.
17:01Ce n'est pas inimaginable.
17:03La Fed bouge ensuite.
17:05Elle suivra la Fed par la suite.
17:07De toute façon, logiquement,
17:09les deux composantes inflationnistes
17:11des États-Unis
17:13et de la zone euro
17:15ne peuvent pas se découpler
17:17de manière diamétralement opposée.
17:19Il y a un point qui les départage,
17:21c'est que côté États-Unis,
17:23il y a une dépendance énergétique
17:25que nous n'avons pas,
17:27donc ça pèse.
17:29On a le retour aussi,
17:31un retour positif de l'énergie.
17:33Pas de chance, ça reviendra
17:35à la fin du premier trimestre,
17:37début du deuxième trimestre.
17:39Ça va un peu ennuyer la BCE,
17:41mais ce n'est pas trop grave.
17:43Comme Régis l'a souligné,
17:45la première baisse de taux
17:47de la BCE a été téléphonée.
17:49Il n'y a pas de doute.
17:51La question qui reste en suspense,
17:53c'est le cycle européen.
17:55On a eu le premier chiffre de croissance,
17:57première estimation, 0,3,
17:59la croissance est certes faiblarde,
18:01mais il ne faut pas l'enterrer tout de suite.
18:03Globalement, il y a quand même
18:05pas mal d'indicateurs.
18:07En Allemagne, qui était le canard boiteux
18:09de la croissance européenne l'an dernier,
18:11l'Allemagne commence à montrer
18:13un peu plus de signes de vigueur.
18:15Ça s'améliore.
18:17On aurait pu descendre plus bas,
18:19on aurait pu seulement se contenter
18:21d'une stabilisation,
18:23mais c'est en train de s'améliorer.
18:25Pas seulement en Allemagne,
18:27en France, où la situation n'est pas non plus exceptionnelle,
18:29mais là aussi, certains indicateurs
18:31montrent que ce n'est pas si non plus mauvais.
18:33Et puis, on a toujours l'Espagne,
18:35qui, normalement, s'en tire plutôt pas trop mal.
18:37Et puis l'Italie, qui continue son rattrapage.
18:39Quand vous mettez les quatre pays
18:41de la zone euro, et qu'on met tout ça
18:43bout à bout, on se dit
18:45que le cycle européen est en train
18:47de se stabiliser. Dans le meilleur des cas,
18:49il est en train de s'améliorer.
18:51Et à un moment donné, sur un malentendu,
18:53ça pourrait même rebooster un peu
18:55la dynamique du marché du travail,
18:57qui elle-même reste extrêmement compliquée,
18:59puisqu'on a les mêmes problèmes,
19:01un décalage entre l'offre et la demande de travail,
19:03qui fait qu'on a des pressions salariales.
19:05Encore une fois, cette étude publiée par la BCE
19:07montrant qu'effectivement,
19:09les tensions salariales attendues d'ici la fin de l'année
19:11sont assez significatives en France comme en Allemagne.
19:13Et donc, in fine, on se dit
19:15une hausse de taux en juin, oui,
19:17et puis finalement, attendons. Et c'est ce qu'a dit Mme Schnabel,
19:19indiquant qu'on va faire
19:21notre première baisse de taux en juin,
19:23mais, attention,
19:25on va attendre, et on va voir,
19:27et on va mesurer effectivement
19:29le timing nécessaire pour que,
19:31finalement, nous puissions intervenir une seconde fois.
19:33Trois baisses de taux, c'est possible,
19:35deux baisses de taux, c'est aussi envisageable,
19:37à condition qu'effectivement,
19:39on ait quelque chose qui vienne
19:41de la fête.
19:43Puisque finalement, la dimension change,
19:45c'est jamais dit de manière explicite,
19:47mais de Guindos l'a indiqué,
19:49là aussi, il ne faut pas non plus négliger la dimension euro,
19:51la dimension change, qui vient évidemment
19:53peu contribuer, de manière un peu
19:55marginale, certes, mais contribuera,
19:57si jamais ce dernier se déprécie
19:59de manière beaucoup trop substantielle,
20:01à une réimportation, finalement, de l'inflation.
20:03Chose dont tout pourrait bien se passer, effectivement, en Europe.
20:05Nicolas, votre position sur la baisse
20:07de taux de la BCE ?
20:09Pour le mois de juin, effectivement,
20:11c'est plus ou moins acquis.
20:13Ce qui est aussi intéressant, c'est de voir qu'on avait quand même
20:15une opposition qui a commencé à se former
20:17au cours des derniers mois, notamment ce que vous avez dit
20:19sur François le Vieux de Vretgalo, effectivement, qui, à partir du mois
20:21de décembre dernier, a commencé à défendre
20:23une position qui était assez opposée,
20:25notamment à son ami Joachim Nagel de la
20:27Bundesbank, et de voir
20:29que les lignes ont quand même un peu bougé.
20:31Je pense que, on va dire,
20:33la majorité, on va dire, hauque, de la BCE
20:35garde tout de même la main. Ils ont accepté d'avoir
20:37cette baisse au mois de juin.
20:39On voit que, notamment, il y a
20:41quelques, notamment Robert Holtzmann,
20:43l'Autrichien, qui a commencé à dire qu'il ne voulait pas
20:45un séquençage de baisse d'inflation, et notamment
20:47une deuxième baisse au mois de juillet.
20:49Je pense qu'il va quand même y avoir une confrontation
20:51entre les différents gouverneurs,
20:53parce que, quand on regarde la zone euro, oui, le chiffre
20:55du PIB n'était pas
20:57mauvais pour le premier trimestre,
20:59c'était même plutôt bon. Quand on regarde
21:01les grands pays, l'Allemagne,
21:03en dehors de la France, quand on regarde l'Espagne,
21:05l'Italie et l'Allemagne,
21:07on voit que ça vient surtout de la balance externe
21:09et que, par contre, la demande intérieure,
21:11dont dépend vraiment,
21:13sur laquelle la politique monétaire
21:15a le plus grand effet,
21:17on voit que ça reste quand même très faiblard, et quand on regarde
21:19la demande domestique américaine par rapport à la demande
21:21européenne depuis la période Covid,
21:23on a un écart de quasiment 10 points
21:25entre les deux. Donc, si l'ABCE
21:27voudrait avoir un petit peu de croissance,
21:29qu'on n'a toujours pas eu depuis 18 mois,
21:31c'est-à-dire depuis la hausse de taux, il faut commencer
21:33à baisser les taux, et justement, si on avait
21:35le début d'une reprise qui commençait à s'amorcer,
21:37de pouvoir accompagner cette reprise par une baisse
21:39de taux pour pouvoir enfin essayer de rattraper
21:41un petit peu le retard colossal qu'on a accumulé
21:43aujourd'hui, ça me semblerait quand même
21:45de bonne politique.
21:47D'autant plus que,
21:49quand on regarde les fondamentaux
21:51aujourd'hui de l'économie européenne,
21:53si vous prenez les chiffres d'inflation
21:55aujourd'hui pour pouvoir justifier des taux à 4%,
21:57dans une règle de Taylor,
21:59il vous faudrait considérer
22:01que l'économie européenne aujourd'hui
22:03est supérieure à son niveau potentiel, ce qui me semble
22:05absolument absurde. Donc, dans ces conditions-là,
22:07il me semble effectivement urgent de leur part
22:09de baisser les taux. Je pense qu'ils auraient même
22:11déjà dû le faire précédemment,
22:13et de pouvoir continuer à amorcer
22:15ce virage-là pour pouvoir
22:17accompagner une reprise européenne, qu'elle soit
22:19un peu plus vigoureuse que ce qu'on avait connu
22:21aussi bien
22:23sur les derniers trimestres que lors de la décennie précédente.
22:25Alors, est-ce que ça va être le bon moment
22:27justement, ce deuxième semestre, pour commencer
22:29à investir en Europe ? Alors, si on a une baisse de taux
22:31en juin, est-ce que ça peut pousser quand même
22:33le marché d'action européen,
22:35le faire se relever un peu ? Est-ce qu'il y a des perspectives ?
22:37Est-ce qu'il y a des valorisations
22:39extra-actives, quand même un peu plus
22:41qu'aux U.S. non, Régis ? Alors, d'abord,
22:43se relever un peu, vous êtes un peu dur, parce que le marché
22:45européen, il n'est quand même pas très loin de ses plus
22:47historiques. Donc,
22:49la performance n'est pas
22:51si épouvantable que
22:53cela, bien au contraire.
22:55Elle a même été assez agréablement
22:57surprenante
22:59depuis le
23:01premier mai. Mais effectivement,
23:03il y a toujours
23:05une décote
23:07significative
23:09du marché européen par rapport
23:11aux actions américaines. Cette décote,
23:13elle est quand même historique.
23:15Elle n'est pas non plus absolue,
23:17parce que secteur par secteur,
23:19la décote n'est pas si importante que cela. Il se trouve
23:21que la pondération des actions
23:23américaines,
23:25de la technologie aux Etats-Unis,
23:27des valeurs qui sont à la mode,
23:29on va dire, aux Etats-Unis, est beaucoup plus importante
23:31que celle de l'Europe. L'Europe n'a pas créé de géants
23:33numériques, ou très peu.
23:35Et donc,
23:37le marché a effectivement eu une performance
23:39qui est moindre à cause de cela, mais à cause de
23:41sa composition. Pas tant que cela
23:43à cause de la comparaison des deux.
23:45Après, il y a un autre secteur qui est beaucoup plus décoté en Europe
23:47qu'aux Etats-Unis, c'est celui des banques,
23:49évidemment, parce que...
23:51Mais ça, c'est lié à la réglementation
23:53européenne qui a été extrêmement lourde
23:55après la crise de 2011,
23:57notamment, la crise
23:59de la zone euro. Il y a eu vraiment une réglementation
24:01européenne qui a énormément
24:03pesé sur le secteur, qui a alourdi le secteur.
24:05On est arrivé au bout de ce cycle
24:07là, de nouvelles
24:09réglementations, mais très clairement,
24:11le secteur des banques européennes
24:13aura beaucoup de mal
24:15à rejoindre la valorisation
24:17des banques américaines. Donc là, il y a une
24:19dynamique qui est beaucoup plus forte.
24:21Tout cela étant posé,
24:23oui, il y a encore
24:25des opportunités en
24:27Europe, sans doute plus qu'aux Etats-Unis.
24:29On a eu une concentration des
24:31indices ces deux dernières
24:33années qui s'étaient
24:35interrompues en 2022.
24:37Il y avait une normalisation
24:39des marchés en 2022. Après
24:41la bulle de 2020-2021,
24:43post-Covid, il y avait une normalisation.
24:45Et puis, curieusement,
24:47alors que les taux restaient élevés,
24:49le marché s'étant mis à anticiper
24:51de nouvelles baisses des taux,
24:53on a eu à nouveau une poussée sur
24:55la partie la plus chère
24:57de la cote et les valeurs
24:59de croissance qui, en tant que
25:01telles, n'ont rien
25:03de détestable,
25:05mais se trouvent être dans des niveaux de valorisation
25:07qui sont excessifs en relatif
25:09par rapport au reste du marché.
25:11Globalement, le marché dans son ensemble
25:13a encore beaucoup d'attraits,
25:15localement, secteur par secteur,
25:17entreprise par entreprise, en particulier
25:19parmi la partie
25:21la plus basse de la capitalisation
25:23de la cote.
25:25Effectivement,
25:27cette dynamique de baisse des taux
25:29peut être l'occasion pour les investisseurs
25:31étrangers, qui sont ceux
25:33qui font la tendance,
25:35de s'y intéresser,
25:37avec un petit warning tout de même,
25:39c'est effectivement, si la devise
25:41européenne, si l'euro
25:43s'affaiblit trop, pour l'investisseur
25:45en dollars, même s'il a une hausse
25:47des cours de bourse,
25:49il n'a pas un retour qui est extraordinaire.
25:51Donc, il y a une limite, si vous voulez, à attirer les capitaux
25:53de cette manière-là.
25:55Mamrouk ?
25:57Il y a un point, je pense, que les investisseurs
25:59ont été un peu, comment dire,
26:01ils ont eu cette espèce de fatigue, finalement,
26:03je pense, du thème de croissance.
26:05Parce que finalement, tout le monde a joué la croissance,
26:07un peu, à fond recte, si je puis dire.
26:09Et donc, maintenant, on se dit,
26:11OK, on a effectivement,
26:13si on regarde un peu la valorisation, même si c'est une métrique que j'aime pas
26:15beaucoup, parce qu'à la grèce, j'ai des choux et des patates.
26:17Et donc, au fond,
26:19fondamentalement, quand on a finalement
26:21épuisé un peu cette thématique,
26:23vers quoi on se retourne ? Sur une thématique un peu value.
26:25Il y a de la place pour la value, alors ?
26:27Oui, quand vous regardez, effectivement, la performance des
26:29bancaires, quand vous regardez la performance du secteur de l'énergie,
26:31etc.,
26:33toute la value, effectivement,
26:35les grands secteurs value, ont quand même
26:37bien tiré leur épingle du jeu.
26:39Et donc, du coup, nous, ce qu'on a décidé de faire,
26:41c'est se dire, on va
26:43peut-être un peu se mettre un peu à côté,
26:45finalement, de cette thématique croissance, puisque on a
26:47quelques hésitations sur la croissance,
26:49effectivement, américaine. On se dit, bon, ça va continuer,
26:51avec quelle amplitude, quel rythme ?
26:53On a quelques hésitations sur la croissance européenne, on vient d'en discuter.
26:55Est-ce que ça va continuer, et avec quel rythme ?
26:57Donc, on se dit, jouons, effectivement, d'autres
26:59thématiques, notamment sur la partie
27:01value, où il y a encore un peu plus de choses,
27:03un peu plus d'espace, et puis, on va essayer
27:05de tirer parti de ce retard.
27:07Alors, c'est vrai que les indices européens
27:09ont quand même bien tiré leur épingle
27:11du jeu, par ailleurs, notamment par rapport aux indices américains.
27:13Mais donc, je pense qu'il y a encore assez
27:15d'espace pour
27:17jouer la carte européenne.
27:19Et nous, c'est ce qu'on a fait dans nos portefeuilles, on a remis, tout simplement,
27:21on a été surpondérés sur les Etats-Unis,
27:23logiquement, thématique croissance,
27:25on a acheté cette thématique-là depuis
27:27le début de l'année, ça nous a réussi,
27:29un peu moins d'avril, bien évidemment, mais on a
27:31décidé de réduire
27:33cette surpondération au profit,
27:35effectivement, de l'Europe. Et un autre
27:37marché, finalement, qui
27:39reflète, finalement, le fait que
27:41la value marche plutôt bien,
27:43même si c'est encore une autre histoire, c'est le marché japonais,
27:45où on voit qu'effectivement, là encore,
27:47la thématique value revient, elle aussi,
27:49et elle porte une partie, effectivement,
27:51de la cote. Donc, au fond,
27:53jouer la rotation, fondamentalement, c'est ce qu'on
27:55est en train de faire, et on se dit, là,
27:57il faut être tactique, bien évidemment, c'est pas un call
27:59stratégique, mais on se dit que jouer l'Europe,
28:01effectivement, ça peut tout à fait
28:03apporter de la valeur au portefeuille.
28:05Nicolas, sur la value et l'Europe ?
28:07Sur l'Europe, je pense qu'il y a...
28:09Non, non, l'Europe, c'est très bien,
28:11mais il y a
28:13une question qui est
28:15peut-être plus politique,
28:17on a les élections européennes le 9 juin,
28:19et je pense que c'est pas tout à fait
28:21anodin, parce qu'en fait, je pense qu'il y a
28:23l'écart de valorisation entre
28:25le marché américain et le marché européen,
28:27ça fait quand même pas mal d'années que ça dure,
28:29les Etats-Unis fonctionnent sur
28:31une stratégie de croissance qui est orientée vraiment sur sa demande
28:33domestique, donc les entreprises américaines peuvent
28:35bénéficier d'un marché domestique extrêmement fort,
28:37quasiment, enfin, pas captif,
28:39mais quasiment captif,
28:41elles peuvent rayonner sur une base très forte
28:43au niveau international, ce qui les avantage
28:45largement, et quand on
28:47regarde les entreprises européennes, elles ont un marché
28:49domestique qui est à tonnes depuis 20 ans,
28:51et donc elles doivent essayer de se débrouiller
28:53pour essayer de capter des marchés à l'extérieur,
28:55et donc elles ont une situation qui est vraiment,
28:57c'est une rupture de concurrence énorme entre ce qui se passe
28:59pour une entreprise européenne sur son sol et par rapport
29:01à une entreprise américaine sur son sol. Je pense
29:03que les dirigeants européens en auront le bol
29:05d'avoir une stratégie qui soit vraiment basée
29:07comme celle-ci, je pense que c'est un peu le sens
29:09des discours de Mario Draghi depuis quelques mois,
29:11aujourd'hui,
29:13le sens du discours
29:15d'Emmanuel Macron la semaine dernière,
29:17qu'on va voir les élections européennes, après les élections
29:19européennes, il y a une réunion du Conseil,
29:21du Conseil européen,
29:23et je pense qu'il y aura une volonté, à partir de ce moment-là,
29:25d'essayer au moins de changer et de modifier la stratégie
29:27économique européenne, justement pour la faire basculer...
29:29— D'avoir plus une souveraineté européenne économique, quoi.
29:31— On va dire d'essayer d'avantager un peu plus
29:33le marché domestique européen, notamment avec une BCE
29:35qui soit un peu plus souple que ce qu'elle a été depuis 20 ans.
29:37Si jamais on arrivait à cela, après,
29:39alors, encore une fois,
29:41Mario Draghi l'a déjà dit,
29:43Macron le dit maintenant, ça va être très difficile de convaincre
29:45certains dirigeants, notamment l'Allemagne,
29:47évidemment, mais si on a une orientation
29:49comme ça, on aura au moins une perspective
29:51d'avenir pour la croissance européenne
29:53qui sera un peu plus favorable que ce qu'on a depuis 20 ans,
29:55et à mon avis, effectivement, si ça, ça commence à
29:57prendre forme, on peut avoir des perspectives très intéressantes
29:59sur le marché européen. — D'accord. — Juste un point,
30:01parce que, dans votre raisonnement, vous avez invoqué
30:03la BCE, alors je pense que la BCE n'a
30:05pas grand-chose à faire avec la politique de
30:07souveraineté et de protection des intérêts,
30:09ce qu'assument parfaitement, finalement, les Américains,
30:11et c'est à leur force également, parce qu'eux, ils se disent clairement
30:13nous, on va protéger nos intérêts, protéger
30:15notre marché intérieur, et donc le débat autour...
30:17Enfin, il y a Xi Jinping qui vient, effectivement, rendre visite
30:19à Emmanuel Macron... — Lundi, quoi.
30:21— Lundi. — Lundi, voilà.
30:23Et donc, du coup, toute cette thématique-là,
30:25comment on fait pour protéger nos industries, comment on fait pour protéger
30:27notre marché intérieur, finalement,
30:29les Américains assument pleinement d'aller attaquer
30:31frontalement la Chine, ils en ont les moyens,
30:33effectivement, mais l'Europe, je pense, n'a pas à
30:35bouger, finalement, si elle se réunit,
30:37à aller directement
30:39parler à la Chine pour dire, ça va pas se passer
30:41comme, effectivement, vous le laissez compter,
30:43et donc, nous aussi, on est capables,
30:45effectivement, de protéger notre marché. Et c'est là,
30:47véritablement, la différence... — Ça assusiperait que l'Europe
30:49exporte beaucoup en Chine, quand même, et en particulier
30:51la France. — Oui, mais les États-Unis
30:53sont un partenaire, effectivement, privilégié
30:55de la Chine, ça n'empêche pas de leur taper dessus.
30:57Donc, à un moment donné, il faut assumer...
30:59— Oui, mais je veux dire, il y a une limite à...
31:01— Mais c'est un jeu d'équilibre, c'est la théorie
31:03des jeux. Et donc, c'est
31:05tout simplement, à mon sens... Et là, l'ABCE,
31:07je pense, pour le coup, ne peut rien faire.
31:09— Je pense que l'ABCE, elle peut... Enfin, on a
31:11une rupture de tendance
31:13entre la demande domestique européenne et américaine
31:15depuis 20 ans, et absolument... Enfin, c'est
31:17magistral. — Mais c'est pas du ressort de l'ABCE, ça.
31:19Avec les taux d'intérêt négatifs,
31:21qu'est-ce qu'on peut faire de plus, à la limite ? Je vois pas,
31:23parce que, finalement, quand même, une politique monétaire peut être plus souple que celle-ci.
31:25— Ah ben, je pense que depuis 20 ans, il y a
31:27eu une succession d'erreurs
31:29dans les politiques monétaires causées par l'ABCE.
31:31Que ces erreurs-là ont provoqué
31:33des ruptures de tendance assez fortes. Et en fait,
31:35quand vous regardez ces moments de creux,
31:37en fait, c'est ces moments de creux-là
31:39qui expliquent quasiment l'intégralité
31:41du différencier de croissance entre les deux zones.
31:43— En fait, de manière générale, à chaque fois qu'on a une crise en Europe,
31:45de toutes les manières, on n'arrive
31:47jamais à redémarrer, effectivement, aussi
31:49vite que les Américains. Ça, de manière structurelle.
31:51BCE ou pas BCE, finalement, quand on regarde
31:53les stats... — Et surtout, ce qui s'est passé
31:55notamment l'année dernière, c'est de voir qu'on avait
31:57une économie qui était beaucoup plus fragile que celle des États-Unis.
31:59Malgré tout, on a considéré qu'il fallait absolument
32:01monter les taux comme les Américains, alors que la situation
32:03sous-jacente n'était pas du tout la même. Même aujourd'hui,
32:05l'ABCE reconnaît, notamment dans ses papiers de recherche,
32:07que la cause de l'inflation, à ce moment-là,
32:09était largement due à l'énergie,
32:11que finalement, c'était beaucoup du supply-side et finalement
32:13pas de demande, alors que la composante de demande
32:15est très importante aux États-Unis, ce qu'on n'avait pas en Europe.
32:17Et malgré ces différences quand même fondamentales
32:19dans la génération de l'inflation,
32:22du côté américain et du côté européen,
32:24l'ABCE a choisi de réagir comme les Américains,
32:26comme si c'était la Fed,
32:28mais avec un résultat qui, à mon avis, n'est pas tout à fait...
32:30Oui, la politique de taux négatif
32:32était particulièrement délétère et était quand même
32:34vraiment longtemps dans son environnement.
32:36Je pense que c'est la seule chose
32:38qu'ils ont fait de bien, entre guillemets.
32:40Ce n'est pas mon avis, mais bon...
32:44Ça a été terrible.
32:46C'est qu'on avait l'Allemagne qui était exposée
32:48finalement à deux grands chocs massifs,
32:50le choc chinois et le choc énergétique.
32:52Et là-dessus, encore une fois, on ne va pas demander à l'ABCE
32:54de régler tous les problèmes.
32:56Le choc chinois, finalement, c'est un problème de stratégie industrielle
32:58de l'Allemagne. Ils ont mis, entre guillemets,
33:00tous leurs œufs industriels, si je puis dire,
33:02dans le panier chinois.
33:04C'est problématique, effectivement, quand l'économie ralentit
33:06de manière très forte. Et fondamentalement,
33:08le choc énergétique, ils ne peuvent pas le résoudre
33:10immédiatement.
33:12Ça prend beaucoup de temps. Ils sont en train de reconstituer
33:14des capacités, de diversifier, effectivement,
33:16leurs ressources d'approvisionnement. Mais, encore une fois,
33:18ça, c'est possible, effectivement, avec une BCE,
33:20si je puis dire, qui favorise
33:22l'investissement et le financement.
33:24Mais il y a d'autres canaux, et on le sait.
33:26Et, fondamentalement, encore une fois, je pense que
33:28le procès est un peu trop facile concernant l'ABCE.
33:30On a tendance, effectivement,
33:32et on l'entend un peu partout, c'est de la faute de l'ABCE.
33:34Bon, pas vraiment. Il y a absence
33:36de volonté politique. Le problème des États-Unis,
33:38vous l'avez parfaitement souligné, c'est que
33:40c'est une fédération, et ça marche
33:42beaucoup plus vite, beaucoup mieux.
33:44Dernier exemple en date. Les budgets qui ont été
33:46développés pour l'Ukraine, ça a été fait,
33:48entre guillemets, à une vitesse... Dès l'instant où
33:50les parlementaires se sont mis d'accord,
33:52les fonds ont été quasiment débloqués.
33:54En Europe...
33:56Et ça marche très vite.
33:58Et nous, en Europe, on n'est pas capables de faire ça.
34:00Et donc, c'est plus une réforme,
34:02finalement, des institutions, qui nous faudrait
34:04pour pouvoir, effectivement, faire avancer
34:06beaucoup plus vite l'Europe, et faire bénéficier
34:08de tout ce réservoir.
34:10On le voit partout, l'union des marchés de capitaux,
34:12enfin, on voit des montants colossaux, finalement,
34:14un peu partout dans la presse, et pourtant,
34:16tout ceci reste complètement dormant,
34:18en jachère, en quelque sorte.
34:20Ce qui me choque profondément, c'est de voir,
34:22notamment, enfin...
34:24Quand je vois le patron de la Bundesbank, Joachim Nagel,
34:26qui est arrivé au début de l'année 2022,
34:28de voir les efforts qu'il a
34:30entrepris, justement, pour mettre en place
34:32ce cycle de hausse des taux, et de dire,
34:34je crois qu'il avait dit ça aux Etats-Unis,
34:36en gros, la récession fait partie de la solution.
34:38Si un banquier central américain dit ça,
34:40je pense qu'il est dehors demain. C'est pas
34:42acceptable de dire ce genre de choses. La croissance est
34:44vraiment, je pense, l'orientation principale
34:46de la Fed.
34:48C'est pas du tout le cas en zone euro. C'est une différence de culture
34:50qui est quand même assez importante. Et quand on voit
34:52le résultat sur les différenciés de croissance entre les deux zones
34:54au bout de 20 ans, enfin, 25 ans
34:56d'existence aujourd'hui, il y a quand même de quoi
34:58se poser un peu des questions, et
35:00de voir sur les
35:02dynamiques, c'est pas possible. Et encore une fois, quand je pense
35:04aux entreprises européennes, qui ne bénéficient
35:06pas du tout du même soutien de leur
35:08demande domestique, alors que les entreprises américaines en bénéficient,
35:10et sont en concurrence avec ces mêmes entreprises,
35:12je pense qu'il y a véritablement un problème.
35:14On va passer
35:16sur les small limit cap.
35:18Est-ce que,
35:20elle, est-ce que ça pourrait être leur année,
35:22enfin, en 2024 ? Enfin,
35:24est-ce que si les baisses d'étaux se
35:26profilent, effectivement, est-ce qu'on
35:28va enfin pouvoir élargir
35:30ces choix d'investissement et
35:32se tourner vers des plus petites
35:34capitalisations ? Alors, en avril, le
35:36CAC small a survécu parfois, mais le CAC large, ce qui n'était pas
35:38arrivé depuis longtemps, est-ce que la tendance peut
35:40se poursuivre, étant donné les
35:42baisses d'étaux qui pourraient arriver ? Je ne sais pas si
35:44ça a un rapport véritablement
35:46avec les baisses d'étaux.
35:48Je pense que les petites
35:50capitalisations sont aujourd'hui dans
35:52un état de valorisation
35:54qui est le plus faible par
35:56rapport aux grandes capitalisations,
35:58le plus faible
36:00des 15-18 dernières
36:02années, puisqu'il n'y a
36:04plus de primes aujourd'hui sur les petites
36:06capitalisations par rapport aux grandes capitalisations,
36:08alors qu'il y en a toujours eu, parce que
36:10elles étaient supposées, ces petites capitalisations,
36:12croître de manière plus dynamique que
36:14les grandes. Peut-être aussi que
36:16cette croyance n'était
36:18pas finalement fondée, puisqu'on
36:20s'est aperçu que des très
36:22grandes entreprises,
36:24alors aux Etats-Unis,
36:26effectivement, l'esthète magnifique qu'on connaît bien,
36:28mais en Europe aussi, des très
36:30grandes entreprises comme Novo Nordisk
36:32dans le diabète et l'obésité,
36:34ou encore ASML dans les
36:36semi-conducteurs, où finalement des niveaux de
36:38croissance et de rentabilité,
36:40de croissance rentable, donc de croissance
36:42qui continuait de générer beaucoup
36:44de rentabilité, sur une base
36:46elle-même très élevée. Donc finalement,
36:48l'idée même que
36:50le fait de partir de bas
36:52permettait de croître plus,
36:54est peut-être une idée qui était structurellement
36:56fausse, ou en tout cas
36:58qui n'est pas constante dans le temps.
37:00Donc peut-être qu'il y a cette
37:02idée qui s'est finalement répandue
37:04dans le marché. Il y a eu aussi
37:06le phénomène
37:08de la gestion passive, qui a effectivement
37:10été plus porté sur les
37:12grandes capitalisations que sur les petites.
37:14Et puis
37:16il y a eu un autre phénomène, sans doute
37:18une tendance un peu de fond, qui est
37:20l'amplification
37:22de l'ESG
37:24et de l'ISR,
37:26qui a pénalisé les
37:28entreprises qui étaient moins à même
37:30de répondre à tous les
37:32questionnaires, d'être moins
37:34dans les listes, etc. Et donc probablement
37:36ça a créé un peu de flux sortant.
37:38Et ce phénomène-là
37:40touche sans doute à sa fin
37:42parce que
37:44les opinions se rééquilibrent autour
37:46de l'ESG et de l'ISR, et puis que les
37:48petites entreprises ont pu, à leur tour,
37:50répondre aux questions
37:52qui leur étaient posées. Donc très probablement
37:54ça s'apaise, et c'est peut-être ce phénomène-là
37:56qui se termine, qui permettrait aux
37:58petites entreprises de retrouver
38:00la prime
38:02historique qu'elles avaient sur les grandes
38:04capitalisations. Quand cette prime a été jusqu'à
38:0670%, c'était sans doute
38:08excessif, et peut-être qu'une prime
38:10de 10 à 20% est
38:12possible à retrouver si
38:14la dynamique de résultats
38:16revient. Et donc oui, très très probablement
38:18il y a intérêt à s'intéresser
38:20aux small caps actuellement.
38:22Très rapidement, d'un point de vue allocataire,
38:24non, parce qu'en fait le problème c'est que
38:26quand on est allocataire, on doit
38:28faire rentrer sur ces marchés
38:30qui ont des liquidités assez
38:32restreintes, et donc du coup,
38:34on commence, on fait
38:36de tout petits mouvements pour pouvoir effectivement
38:38être sur le marché, mais pour le moment, on n'a pas la conviction
38:40que c'est le moment. Encore une fois, il y a deux éléments
38:42qui sont requis
38:45pour la croissance des small caps, c'est de la croissance
38:47économique, pour voir ces entreprises croître,
38:49et des conditions monétaires et financières favorables.
38:51La croissance, il y en a un tout petit peu, effectivement
38:53en Europe, des conditions monétaires et financières,
38:55il n'y en a pas. Et ce n'est pas avec une ou deux
38:57baisses de taux que ça va changer. Donc à mon sens,
38:59tant que les taux américains resteront élevés,
39:01la traction qu'ils vont exercer sur les taux européens restera
39:03forte, et donc ça va peser effectivement sur les small caps.
39:05Donc il faut attendre que la Fed se décide.
39:07Je suis d'accord avec ça,
39:09d'autant plus que, quand vous êtes une grande
39:11entreprise, que vous bénéficiez d'un marché, si vous prenez
39:13Nvidia, qui est à 40% de croissance,
39:15évidemment des taux à 5%,
39:17ce n'est pas très grave. Si vous êtes
39:19une entreprise qui n'a pas accès
39:21aux crédits et que vous avez une croissance sur le reste
39:23de l'économie qui est relativement faible, vous ne pouvez pas vous en sortir,
39:25d'autant plus avec des entreprises qui sont
39:27les grandes entreprises qui sont gavées de cash,
39:29qui peuvent très bien passer à travers
39:31l'orage sans trop de problèmes,
39:33et qui en plus, dans ce moment-là, vont justement
39:35récupérer les parts de marché des plus petites entreprises, donc c'est pas
39:37forcément le moment. Il faut attendre vraiment à avoir
39:39des conditions financières qui soient
39:41au moins neutres, pour que ça devienne
39:43vraiment véritablement intéressant.
39:45Et on n'y est pas encore.
39:47Donc ce sera peut-être plutôt pour 2025.
39:49On verra. On attendra encore un peu.
39:51Merci messieurs, merci d'avoir été
39:53les invités de Smart Bourse
39:55ce soir. Merci à Mabrouk Chetouan,
39:57responsable de stratégie marché
39:59globaux chez Netix 6IM.
40:01Merci à Régis Beguet, partenaire et gérant
40:03chez Zedigame, et Nicolas
40:05Gutsmann, responsable de la stratégie macroéconomique
40:07de la financière de la Citi.
40:09Merci beaucoup. Merci à vous.

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