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Vendredi 29 mars 2024, ART & MARCHÉ reçoit Yves-Bernard Debie (Directeur, Parcours des mondes) et Solenne Blanc (Directrice générale, ArtNova et Groupe Beaux Arts)

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Transcription
00:00 [Musique]
00:08 Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans Art et Marché, votre émission hebdomadaire
00:12 consacrée au marché de l'art.
00:14 Commençons par l'actualité, à l'image de la Fashion Week ou la Design Week.
00:18 Les musées parisiens voulaient avoir leur semaine et donc la Paris Museum Week va commencer
00:24 la semaine prochaine en même temps que la foire Art Paris et Solène Blanc,
00:28 qui est directrice générale du groupe Beaux-Arts, va nous en dire un peu plus.
00:32 Elle est en visio dans un instant sur ce programme.
00:35 Pour l'interview de la semaine, nous recevons Yves-Bernard Deby,
00:39 qui est avocat et directeur de Parcours des Mondes, cette foire consacrée à l'art extra-européen,
00:45 pour revenir sur la vente exceptionnelle de la collection Barbier-Müller,
00:49 orchestrée par Christies.
00:51 Alors que 2023 n'a pas été une très bonne année pour le marché de l'art extra-européen,
00:55 cette vente remet cette catégorie sous le feu des projecteurs.
00:59 C'est tout de suite sur Arrêt Marché.
01:01 La Paris Museum Week ouvre ses portes dans une semaine et je reçois Solène Blanc,
01:09 qui est directrice générale du groupe Beaux-Arts, pour nous en dire un peu plus sur cette initiative.
01:16 Merci beaucoup d'être avec nous.
01:18 D'après ce que j'ai compris, la Paris Museum Week englobe de nombreux événements,
01:23 tous reliés au musée parisien, à l'économie des musées.
01:28 Oui, tout à fait. Bonjour, Cybille.
01:30 L'idée, c'était, avec cette Paris Museum Week, dont c'est la première édition,
01:34 c'était vraiment de faire de Paris l'épicentre international
01:38 de rencontres des professionnels, des musées, des monuments, des lieux de culture.
01:42 Et effectivement, ça englobe à la fois le CITEM, qui est le salon professionnel des musées et monuments,
01:47 qui réunissent en 70 exposants et une trentaine de conférences sur la transformation des musées,
01:51 Communicating the Arts, qui est une conférence internationale
01:56 qui se réunit à différents endroits du globe, et cette année,
01:59 qui vient à Paris sur cette même semaine, du 2 au 5 avril,
02:03 et puis les rencontres annuelles, la rencontre annuelle du CLIC, le Club d'Innovation Culture,
02:08 avec également en toile de fond Art Paris, qui sera également partenaire de la Paris Museum Week cette même semaine.
02:14 Alors, vous avez parlé de transformation des musées.
02:17 Quels sont les grands enjeux auxquels ils doivent faire face dans les prochaines années ?
02:23 Alors, c'est vrai que ce soit à Communicating the Arts, au CITEM ou aux rencontres du CLIC,
02:29 la question, c'est vraiment aussi la transformation des musées,
02:32 que ce soit sur les sujets d'éco-responsabilité, décarbonation, inclusion sociale.
02:38 C'est aussi leur rôle dans les territoires et comment ils se réinventent,
02:41 réinventer aussi la gestion des flux, l'expérience de visite.
02:45 Donc, on a beaucoup de choses qui sont liées aussi à la scénographie,
02:48 mais aussi à l'immersif, à la façon aussi dont les musées et les lieux de culture peuvent se servir
02:54 et vraiment s'imprégner des nouvelles technologies pour réinventer aussi cette expérience de visite.
02:59 Et puis, voilà, donc ce sont tous les sujets, on va dire, qui transforment l'expérience de ce que sera le musée de demain
03:05 et puis sa place dans les territoires et dans la ville.
03:08 Et en termes d'économie de musée pour les professionnels, est-ce qu'il y a des enjeux particuliers à ce niveau-là ?
03:17 Bien sûr, alors ça pose évidemment les questions aussi de faire face à tous ces enjeux de transformation.
03:23 Ça peut être aussi tout ce qui est autour de la diversification de ces ressources.
03:26 Ça peut être aussi comment toucher les publics.
03:29 Il y a une dimension de communication aussi qui est forte à travers ces sujets-là.
03:35 Et puis c'est surtout aussi le fait que les professionnels du monde entier, que ce soit les décideurs des musées
03:42 et puis toutes les start-up et les prestataires, tous ceux qui inventent ces nouvelles expériences-là,
03:47 puissent se rencontrer dans un mode partenarial et inventer aussi de nouvelles façons de travailler ensemble.
03:53 Donc c'est vraiment cette vertu aussi de se dire on va avoir là plus de 5000 professionnels du monde entier
03:58 qui se réunissent sur cette semaine-là et de faire de Paris et de ces événements vraiment une fenêtre ouverte sur l'innovation,
04:05 qu'elle soit dans les pratiques, dans les expériences muséographiques,
04:13 mais aussi dans les modèles économiques qu'il faut savoir réinventer.
04:16 Et la vertu de ces événements, c'est que ça va faire se rencontrer des acteurs du public et du privé.
04:21 Et puis décloisonner aussi, on ne parle pas que musée, monument, mais aussi salle de spectacle,
04:26 tous ceux qui partagent ces mêmes enjeux de faire venir des publics,
04:30 que ce soit des publics français, internationaux, touristiques.
04:34 Donc c'est vraiment cet enjeu-là que va porter la Paris Museum Week.
04:38 C'est une première édition et on voudrait vraiment que ça fasse date
04:40 et que ce soit aussi une façon de valoriser et de faire rayonner l'expertise et les savoir-faire français en la matière.
04:47 Merci beaucoup Solène Blanc. Je rappelle que vous êtes directrice générale du groupe Beaux-Arts.
04:51 Merci de nous avoir présenté ce beau programme de la semaine prochaine.
04:54 Et tout de suite, on passe à l'interview de la semaine.
04:56 C'est un nouveau record pour une collection d'art d'Afrique et d'Océanie.
05:05 La collection Barbier-Muller s'est envolée pour un total de 73 millions d'euros,
05:10 dépassant ainsi la collection prestigieuse de Michel Périnet, qui a été vendue en 2021 pour 66 millions d'euros.
05:16 Et Yves-Bernard Deby, qui est avocat et aussi directeur du Parcours des Mondes,
05:20 qui est la foire de cet art extra-européen, est avec nous pour décrypter cet événement.
05:25 Merci beaucoup d'être avec nous.
05:26 Merci de m'avoir invitée.
05:27 Est-ce que vous pouvez nous dire tout simplement pourquoi, en quoi, cette collection a été exceptionnelle ?
05:32 Qu'est-ce qui explique ces envolées ?
05:35 La qualité de la collection explique l'envolée.
05:40 Et puis il y a la qualité de la maison de vente et de ce qui a été fait par la maison de vente.
05:44 Mais si on prend d'abord par la collection, c'est une collection extraordinaire qui est ancienne,
05:49 qui s'établit sur quatre générations.
05:52 Elle est éclectique.
05:55 D'ailleurs, quand on voit la vente, c'est assez remarquable pour le dire.
05:59 Il y avait 100 lots, 50 lots d'art africain, 50 lots d'art océanien.
06:04 Donc peu de collections sont de ce niveau.
06:07 C'est une collection aussi qui avait été beaucoup montrée.
06:10 Barbier-Muller a fait un musée privé à Genève.
06:14 Donc c'est une collection très prestigieuse.
06:17 Est-ce qu'il y a eu des surprises au sein de cette vente ?
06:23 Parce que c'est vrai que, comme vous le disiez, des œuvres qui sont exceptionnelles, forcément ça fait des prix exceptionnels.
06:29 Est-ce qu'il y a eu des surprises, des zones d'intérêt où on s'est dit
06:34 « Tiens, peut-être qu'on n'attendait pas à ce que cette œuvre fasse une telle envolée ? »
06:39 Je ne sais pas s'il y a eu des surprises.
06:42 Globalement, c'était une vente très attendue, d'objets très connus.
06:47 J'ai eu la chance d'être invité la veille, dans le dîner que donnait Christies,
06:53 et d'être dans la salle lors de la vente.
06:57 Il planait comme, comment dirais-je, on était détendu.
07:01 On savait du côté de Christies qu'il y avait eu un intérêt sur chaque lot.
07:06 C'est une vente qui a fait 100% de vente.
07:09 Un objet seulement en after sale, mais 100 objets vendus.
07:13 Il n'y a pas vraiment eu de surprise.
07:15 Après, on est dans des envolées terribles.
07:18 Il y a 13 lots qui dépassent le million d'euros.
07:20 La tête fang fait 14 700 000.
07:23 Le fétiche à clous au Congo fait record, 9 000 000.
07:27 Le masque Baoulé, record absolu pour une œuvre Baoulé, 6 600 000.
07:31 L'année d'avant, Christies avait déjà fait très fort avec un masque à 2 000 000,
07:34 mais là on est à 6 600 000.
07:36 On passe du côté de l'Océanie, vous avez un masque des îles de Torres qui fait 5 500 000.
07:41 Peut-être que la surprise est là.
07:43 C'est quand même que pour cette qualité d'objet, l'art océanien se tient très bien.
07:48 - Oui, justement, l'art océanien, ça n'a pas toujours été...
07:52 Là vraiment, est-ce qu'on peut dire qu'il y a eu un regard d'intérêt ?
07:55 Peut-être parce que si l'art provenant de certains pays africains,
08:02 on sait déjà quelles sont les œuvres majeures, etc.
08:04 Peut-être que là, on est dans une découverte plus creusée de l'art océanien ?
08:08 - En fait, classiquement, c'est la statuaire africaine qui tire les prix vers le haut, toujours.
08:14 Encore dans cette vente, d'ailleurs.
08:16 L'art océanien a toujours fait des prix moindres,
08:20 alors qu'il y a un intérêt des collectionneurs aussi grand pour l'art océanien que pour l'art africain.
08:25 Oui, peut-être que l'un des enseignements à tirer de cette vente,
08:30 c'est que l'art océanien, quand il est à ce niveau de qualité,
08:34 à ce niveau de provenance et à ce niveau de présentation,
08:36 j'y tiens beaucoup, par une grande maison comme Christie's,
08:39 eh bien, il y a des envolées.
08:40 - Et justement, revenons à cette tête d'heureux liquère FANG qui a fait 14 millions.
08:44 Qu'est-ce qui explique ce prix ?
08:47 Qu'est-ce qui fait qu'on peut atteindre un tel montant ?
08:51 - Les têtes FANG sont toujours dans des prix très importants.
08:55 - Parce que c'est très rare ?
08:56 - Oui, parce que c'est très rare.
08:58 Il faut pas oublier, on l'oublie souvent,
09:01 il y a entre l'art africain et l'art moderne occidental des liens très très forts.
09:08 Donc les têtes FANG très tôt ont été vues et reconnues par les artistes occidentaux,
09:13 donc le lien est très très fort depuis très longtemps.
09:15 Les têtes FANG, les reliquaires FANG, ont toujours des valeurs importantes.
09:22 Celui-ci était particulièrement beau, particulièrement bien documenté,
09:25 et ça explique les 14 700 000, donc on est presque à 15.
09:28 - Et justement, vous étiez présent dans la salle.
09:31 J'ai cru entendre qu'il y avait une typologie collectionneur
09:35 qui pouvait être différente de ce qu'on voit d'habitude.
09:37 Est-ce que vous pouvez témoigner de la présence ?
09:40 Qui était là ?
09:41 S'il y avait des collectionneurs différents de ce qu'on voit d'habitude ?
09:44 - Alors tout d'abord, la salle était pleine.
09:46 C'est assez souvent le cas.
09:48 C'est vrai que quand on est collectionneur, ce qui est mon cas,
09:51 on retrouve souvent les mêmes collectionneurs,
09:55 les mêmes musées qui sont présents.
10:00 Là, on avait des gens nouveaux, des gens qu'on ne connaissait pas.
10:03 Il y avait beaucoup de jeunes, il y avait une effervescence,
10:05 c'était très joyeux.
10:07 Oui, différents d'autres ventes, une vraie énergie.
10:10 - Qu'est-ce qu'on peut dire de cette vente pour le marché ?
10:15 Est-ce qu'il y a des enseignements qu'on peut tirer ?
10:17 - Oui, il y a plusieurs enseignements.
10:20 D'abord, un enseignement évident, c'est que quand les objets sont beaux,
10:25 qu'il y a une belle provenance, ils trouvent toujours acquéreur.
10:28 Quand les objets sont d'une qualité exceptionnelle,
10:31 ils trouvent acquéreur et à des prix exceptionnels.
10:33 Ça, c'est le premier enseignement.
10:35 Et peut-être qu'on discutera statistique tout à l'heure
10:37 parce qu'il y a des rapports qui sont sortis.
10:40 Au-delà de tout ce qui est question de statistique,
10:42 il y a une certitude, c'est que les grands objets se vendent extrêmement bien.
10:46 Ça, c'est le premier enseignement.
10:47 Le second enseignement, c'est la place de Paris.
10:50 Paris est la première place en matière d'arts premiers,
10:54 très certainement en raison d'un atrium vira dont on a déjà parlé,
10:57 qui est des maisons de vente importantes.
11:00 La plus importante est Christis, clairement.
11:02 Le musée du Quai Branly, qui a cette place si importante
11:06 et si particulière dans les arts premiers.
11:08 Et puis, la foire que j'ai la chance de présider,
11:10 qui est le parcours des mondes,
11:11 qui réunit tous les marchands et tous les collectionneurs du monde
11:14 à un moment précis à Paris.
11:16 Donc, Paris, c'est vraiment devenu la première place mondiale pour les arts premiers.
11:20 Et justement, avec beaucoup de musées qui étaient présents
11:22 et beaucoup de préemptions réalisées.
11:24 Alors, il y a cinq préemptions des musées nationaux du Quai Branly.
11:27 Ils ont préempté des objets océaniens.
11:30 Oui.
11:31 Parce que, bon, peut-être qu'ils ont déjà pas mal servi en objet africain.
11:34 Mais, alors, Christis, c'est un devoir de confidentialité, ne communique pas.
11:39 Mais pour ceux qui étaient dans la salle,
11:40 on a très bien compris que beaucoup de musées internationaux avaient acheté.
11:43 Alors, chaque musée pourra annoncer au moment,
11:45 mais vous verrez qu'il y a eu beaucoup de musées internationaux
11:47 qui ont également acheté à ces demandes.
11:49 Justement, terminons par quelques chiffres.
11:52 C'est vrai que le rapport Arcade,
11:54 qui collecte toutes les données d'art extra-européen chaque année,
12:00 2024, est sorti sur l'année 2023.
12:03 Et donc, il parle de cette année qui, plombée par les chiffres, etc.,
12:08 qui n'a pas été très bonne.
12:09 Là, juste avec la vente,
12:11 on a déjà atteint presque le double du chiffre d'affaires de l'année dernière.
12:16 Comment expliquer cette baisse, cette fluctuation ?
12:22 D'abord, il faut saluer Arcade,
12:23 parce que c'est les seuls à le faire et que c'est un outil important pour nous.
12:26 Je crois néanmoins, je ne suis pas fan des chiffres,
12:31 encore moins de ce qu'on peut essayer de leur faire dire.
12:33 Si vous prenez le rapport,
12:35 ils expliquent qu'en fait, en 2021, il y a 107 millions.
12:38 Puis en 2022, vous avez une consolidation à 60.
12:41 Et puis, un effondrement à 37 millions en 2023.
12:45 Et ils essaient d'expliquer.
12:47 C'est sur ces explications que je ne pourrais pas être d'accord.
12:49 En fait, c'est simple.
12:51 La vente Barbie Mueller qui est en mars,
12:52 si elle s'était tenue en décembre 2023,
12:55 on aurait explosé tous les compteurs.
12:57 Et 2023 aurait été bien meilleur que 2021.
12:59 Donc, voilà, très compliqué de tirer des analyses intelligentes, je pense, des statistiques.
13:04 Un point quand même positif,
13:06 parce que comme à l'échelle du marché de l'art entier aussi,
13:09 les transactions, en revanche, elles, continuent d'être très dynamiques.
13:12 Ça veut dire pareil que l'intérêt, en tout cas, est toujours là.
13:16 Merci beaucoup Yves-Bernard Demy.
13:18 Je rappelle que vous êtes avocat et directeur de Parcours du Monde.
13:21 Merci d'avoir été avec nous.
13:22 Et quant à nous, on se retrouve la semaine prochaine
13:24 pour un nouveau numéro d'Art et Marché.
13:26 [Musique]