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Dans son édito du 06/05/2025, Paul Sugy revient sur le discours d'Emmanuel Macron sur l'euthanasie.

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Transcription
00:00Oui, Emmanuel Macron avait longtemps boudé la franc-maçonnerie comme il le faisait de façon générale avec les corps intermédiaires.
00:06Il essayait de se réconcilier avec certains d'entre eux et donc hier, effectivement, pour la première fois devant la Grande Loge de France,
00:11le président de la République était invité et prononçait un discours dans lequel Emmanuel Macron a fait d'ailleurs quelque chose d'assez surprenant.
00:17Il a au début dénoncé ceux qui accusent la franc-maçonnerie de vouloir peser sur les discussions sur la fin de vie,
00:23en disant même que la franc-maçonnerie était ici victime des complotistes.
00:27Et puis ensuite, il les a encouragés en disant que les francs-maçons s'emparent de ce débat fondamental est une bonne chose.
00:32On ne sait donc plus très bien si les francs-maçons doivent le faire ou non et si c'est du complotisme que de le dire.
00:38Quoi qu'il en soit, il a profité de cette occasion pour exprimer sa position morale sur l'euthanasie en des termes assez surprenants.
00:45Le président de la République a prononcé une phrase qui vous a marquée sur le bien et sur le mal.
00:50Oui, à ses yeux, aux yeux du président de la République, le débat sur cette promesse de campagne ne peut pas être réduit
00:56à la question de savoir si on est pour ou contre la vie.
00:58Donc, il essaye de dépasser la simplification du débat en disant qu'il faut penser le moindre mal.
01:04Et là, il prononce cette phrase, il dit face à certaines situations, il n'y a plus le bien d'un côté et le mal de l'autre.
01:10Et c'est vrai qu'à titre personnel, je me suis arrêté sur cette phrase que je trouve assez terrifiante.
01:14Au fond, la politique n'a pas d'autre but que de servir le bien commun.
01:17Et c'est la difficulté de l'entreprise, c'est de le définir ou de faire émerger un consensus sur ce que recouvre cette notion.
01:23Là, on n'est plus dans le « en même temps » un peu jésuitique, ce qu'Emmanuel Macron a été formé chez les jésuites,
01:28mais dans le « ni l'un ni l'autre ».
01:30Tout se vaut parce que plus aucune valeur, plus aucune vérité éthique n'a plus de valeur qu'une autre.
01:35Si chacun décide pour lui ce qui est bien, ce qui est mal, la possibilité même d'un monde commun vacille.
01:40C'est-à-dire qu'on ne peut pas faire société si chacun a sa conception à lui du bien et du mal.
01:44On est coincé au fond, dans notre époque, entre deux idéologies.
01:47Vous avez ce relativisme moral absolu qu'exprimait Emmanuel Macron hier devant la Grande Loge de France,
01:52qui nie l'existence du bien et du mal.
01:54Et puis à l'extrême gauche, chez les insoumis, il y a une vision différente, mais presque extrinsèque de la morale.
01:58C'est-à-dire que la société tout entière est mauvaise, c'est structure économique, politique, c'est le mal absolu.
02:03Et le peuple, c'est le bien absolu.
02:05Ce qui n'est pas beaucoup plus arrangeant non plus, parce que c'est aussi un écueil.
02:08Dans ces cas-là, on ne peut pas penser la responsabilité individuelle.
02:11Donc, entre les deux, je crois que la bonne manière de penser le bien et le mal au XXIe siècle,
02:16ce serait de rappeler que la frontière entre le bien et le mal, elle passe dans chaque personne.
02:20Elle n'est pas extérieure aux individus.
02:21Et une société saine, c'est une société justement qui aide chacun à choisir le bien,
02:25sans prétendre le faire à la place des gens.
02:27Et cette société-là, si on revient sur le sujet de la fin de vie,
02:29c'est une société qui encourage le soin, l'accompagnement, la solidarité,
02:32et en particulier auprès des plus fragiles, puisque c'est bien de ça dont il est question.
02:36C'est les personnes les plus fragiles, les plus essolées, aux derniers jours de leur vie.
02:40Ce qu'Emmanuel Macron veut dire, c'est qu'il faut chercher le moindre mal dans des situations individuelles.
02:46Oui, bien sûr, on comprend l'idée.
02:47Chercher le moindre mal en disant qu'au fond, il n'y a pas de solution idéale
02:50face à une personne qui vit ses derniers jours dans d'atroces souffrances.
02:54C'est évidemment tous les termes du débat.
02:56Mais abolir définitivement la frontière entre le bien et le mal,
02:59c'est nous précipiter au fond dans un monde Nietzschien.
03:02Par de l'albien et mal, c'est un des livres majeurs de Nietzsch.
03:05C'est-à-dire un monde où la puissance et la volonté gouvernent.
03:08Nietzsch était habité par une haine de la société judéo-chrétienne
03:12qui avait une morale, selon Nietzsch,
03:14qui fondait sur le ressentiment du faible contre le fort.
03:18Mais vouloir balayer cette société justement
03:20qui dessine une frontière claire entre le bien et le mal,
03:22c'est livrer le faible à la merci du plus fort.
03:25Et s'agissant du débat sur l'euthanasie, c'est exactement ce qui nous guette.
03:28On voit le débat parlementaire avancer et rejeter même un certain nombre d'amendements de prudence.
03:33Par exemple, des amendements qui permettraient d'éviter
03:34qu'une personne qui est déficiente intellectuellement,
03:36qui n'est pas en pleine possession de ses moyens,
03:38puisse demander l'euthanasie.
03:40Vous voyez, ce sont des amendements, des précautions morales
03:43qui dessinent une frontière entre ce qui est bien et ce qui est le mal,
03:45mais dans le but de protéger les plus faibles.
03:47Et je crois qu'une société évoluée, une société civilisée,
03:49c'est une société pour laquelle tout ce qui sert à protéger les plus fragiles,
03:54c'est ce qui concourt au bien public, au bien commun.

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