Franck Thilliez revient en librairie ce vendredi 2 mai avec "À Retardement", un thriller qu'il a préparé en visitant une unité pour malades difficiles. Pour l'occasion, il répond aux questions d'ici Nord.
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00:00Bonjour Franck Thillier, les hôpitaux psychiatriques ou si l'on veut être encore plus précis, les UMD, unités pour malades difficiles,
00:07c'est le cadre que vous avez choisi pour ce nouveau thriller qui sort aujourd'hui, qui s'intitule « À retardement ».
00:12Pourquoi avoir voulu écrire sur ces UMD en particulier ?
00:16C'est un univers qui me fascine depuis quelques années.
00:19J'écris du roman policier, donc derrière le roman policier il y a des passages à l'acte,
00:22il y a forcément un criminel qui à un moment donné va agir et ça se passe dans la tête souvent.
00:26Donc le sujet de la psychiatrie m'intéresse, là j'ai voulu vraiment pour un roman complet me plonger dans ce sujet,
00:32puis j'ai eu la chance, l'opportunité en tout cas de pouvoir rentrer à l'intérieur de ces unités.
00:38Puisque l'UMD Ulysse où débute votre roman n'existe pas, en revanche vous en avez visité une vraie,
00:42vous y avez passé même du temps au centre hospitalier du Rouvret, près de Rouen.
00:46Qu'avez-vous appris au cours de cette immersion ?
00:48Alors les UMD il faut savoir que ce sont des établissements très très clos, très fermés,
00:51il n'y en a que 11 en France et on y soigne les patients les plus dangereux,
00:55c'est-à-dire souvent ceux qui sont passés à l'acte envers eux-mêmes ou envers autrui qui ont commis des crimes.
01:01Donc j'avais énormément d'appréhension, de peur de rentrer dans ces unités.
01:06Ce qui m'a surpris quand je suis rentré, c'est que ça allait à l'inverse des clichés,
01:10c'est-à-dire on avait des images de violence, de hurlements, c'était très très calme, au contraire.
01:14J'avais en tête que les patients seraient enfermés à longueur de journée, comme dans une sorte de prison en fait.
01:19Alors ça reste un milieu clos, mais en tout cas les patients sortent de leur chambre pour être...
01:23On s'occupe d'eux toute la journée, ils font des activités.
01:25Donc quelque chose quand même finalement de très humain où on sent quand même la notion de soin.
01:30On essaye de comprendre ce qui arrive à ces gens qui sont en proie aux maladies les plus psychiques, les plus effroyables.
01:37Et c'est ça qui m'a aussi marqué, c'est effectivement la force de ces maladies.
01:40Et qu'est-ce que vous cherchiez en étant comme ça en contact du personnel, mais en contact surtout des malades ?
01:45Vous cherchiez l'inspiration, vous cherchiez des choses précises à intégrer dans le roman ?
01:49Oui, plusieurs choses. Alors déjà de savoir ce qui se passe à l'intérieur, parce que je voulais mettre une UMD au cœur de mon roman,
01:55donc il faut savoir comment ça fonctionne.
01:56J'ai un personnage de psychiatre qui occupe la moitié du roman, donc il fallait comprendre ce qu'était un psychiatre dans une UMD,
02:04pourquoi il travaille là, qu'est-ce qu'il recherche dans ses environnements,
02:06et puis rencontrer les patients aussi, ça c'était extrêmement important.
02:09Pour voir comment se manifeste la maladie psychique, on parle souvent de, par exemple, de schizophrénie,
02:14c'est quoi une schizophrénie, par quoi elle se manifeste.
02:16Par exemple, quand je suis rentré, il y avait des patients qui marchaient dans la cour avec des gros casques de musique sur les oreilles,
02:21et je lui ai dit, mais pourquoi ils ont des casques ?
02:23En fait, ils mettaient des casques parce qu'ils entendaient des voix,
02:26et en fait, le fait de mettre un casque, ça permettait pendant quelques minutes d'entendre de la musique à la place des voix,
02:32mais dès qu'ils enlevaient le casque, les voix revenaient.
02:33Donc c'est ça en fait ce que je voulais découvrir.
02:35Tous ces éléments que vous intégrez ensuite dans une trame policière, exercice dont vous avez l'habitude,
02:40quand on travaille comme ça, comme vous le faites, sur une matière qui est réelle au départ,
02:43qu'on en tire une fiction à la fin, que reste-t-il du réel dans ce livre ?
02:46Il y a beaucoup de réel, en fait, c'est vraiment le sujet de fond.
02:51Il y a des médecins qui s'expriment, des psychiatres, il y a des maladies mentales,
02:55il y a des actes qui sont commis.
02:56Ça, c'est vraiment au plus proche.
02:57Je me suis renseigné auprès des psychiatres,
02:59j'ai dit par exemple à un psychiatre qui est en pleine crise et qui va passer à l'acte,
03:04à quoi ça ressemble ?
03:05Comment ça se passe ? Est-ce qu'il rentre chez quelqu'un ?
03:07S'il est face à quelqu'un, qu'est-ce qui va arriver ?
03:10Donc tout ça est très réel.
03:11Alors évidemment, il y a toute la partie fiction, ça reste un roman,
03:13ce n'est pas un doc en fait.
03:15Donc là, c'est tout l'auteur qui construit une trame.
03:18J'adorais écrire cette trame parce que la folie est en milieu,
03:22j'ai pu vraiment me lâcher dans la construction,
03:25il y a beaucoup de fils qui se recoupent, c'est assez extra,
03:28et je sais que l'électeur adore.
03:29Il faut que ça reste quand même une fiction,
03:31mais basée quand même sur...
03:32Quand on lit ce livre, on sait à peu près à quoi ressemble aujourd'hui la psychiatrie.
03:36Ici Nord, 7h49, et nous sommes en direct avec l'auteur nordiste Franck Tillier,
03:40dont le nouveau livre sort aujourd'hui.
03:42À retardement, Franck Tillier, c'est le 25e roman que vous sortez,
03:45vous en avez écrivé quasiment un par an.
03:47Il vous en reste combien en stock ?
03:49Zéro.
03:50Non, zéro parce qu'en fait, je fonctionne vraiment...
03:52C'est-à-dire que vous en terminez un et vous commencez le suivant,
03:54combien de temps après, généralement ?
03:56Deux, trois mois après, parce qu'en fait,
03:59quand je suis dans un livre, je ne sais pas du tout ce que je vais écrire l'année d'après.
04:03Je fonctionne coup par coup,
04:05et une fois que je termine le livre,
04:06je pose le mot fin sur mon ordinateur,
04:09le lendemain, je me dis mais qu'est-ce que je fais maintenant ?
04:11Je prends une petite pause,
04:12parce que c'est vrai qu'écrire un roman, c'est quand même très prenant,
04:16mais mon cerveau se remet un peu à fonctionner,
04:18parce que c'est vrai que j'ai horreur du vide,
04:20donc j'ai toujours peur de me dire,
04:21mais le suivant, qu'est-ce que ça va être ?
04:23Donc sans rien faire finalement,
04:24parce qu'il n'y a rien à faire,
04:25quand on a fini un livre,
04:26on ne peut pas se remettre à écrire,
04:27il faut trouver une nouvelle idée.
04:28Vous n'avez pas encore l'idée du prochain,
04:30alors que si jamais je vous posais la question,
04:32vous n'avez pas la...
04:33Alors, sauf que je suis en train de l'écrire,
04:34parce qu'en fait,
04:34entre le moment où le livre sort
04:38et le moment où moi,
04:39dans mon cycle à moi, c'est très décalé,
04:40donc en général, je finis mes romans vers septembre,
04:43donc vous voyez, on est déjà bien avancé,
04:45mais par contre, c'est celui après
04:46lequel je suis en train d'écrire,
04:48là, je ne sais pas du tout,
04:49c'est vraiment coup par coup,
04:50je ne sais pas ce qui arrivera aux personnages,
04:52qu'on retrouve la Charcot et toute la bande,
04:54dans le suivant.
04:55Cela vous aide d'ailleurs d'avoir des personnages récurrents,
04:58Franck Charcot, en l'occurrence Lucien Bell,
04:59qui reviennent dans vos lignes,
05:00vous n'avez plus besoin de les présenter,
05:01d'une certaine manière,
05:02et en même temps,
05:03vous devez avoir une certaine cohérence avec eux,
05:04ils ne peuvent pas faire des choses dans le précédent
05:06qu'ils ne font plus.
05:06Cela vous aide dans votre processus d'écriture
05:08d'avoir des personnages qui reviennent ?
05:10Oui, oui,
05:10alors c'est à la fois plus simple et plus compliqué,
05:12alors plus simple parce qu'effectivement,
05:13ils existent,
05:14donc on n'a pas à les créer,
05:15on n'a pas à leur créer un caractère,
05:16une psychologie, un passé,
05:18et ça, c'est extrêmement compliqué,
05:21mais c'est plus compliqué justement,
05:23quand on utilise des personnages récurrents,
05:25parce qu'il faut leur trouver de nouvelles aventures,
05:27c'est-à-dire ce sont des personnages qui existent depuis...
05:28Vous avez une responsabilité vis-à-vis d'eux,
05:30d'une certaine manière ?
05:31Oui, oui, oui,
05:31ils existent depuis 20 ans,
05:33et puis on se dit,
05:34ben voilà,
05:36il y a une attente des lecteurs par rapport à l'histoire
05:38qu'on va écrire,
05:39mais aussi par rapport à ses personnages,
05:40c'est-à-dire qu'il y a un lien très très fort,
05:42moi les lecteurs viennent me voir,
05:43ils me disent,
05:44ah mais Franck Charcot,
05:45on l'aime beaucoup,
05:46ne le mettez pas à la retraite par exemple,
05:49ou alors attention,
05:51ne lui réservez pas de malheur,
05:52donc les gens viennent me voir comme ça,
05:54c'est assez fascinant de voir à quel point
05:56un personnage de papier
05:57prend vie chez le docteur,
05:59donc j'ai un peu cette responsabilité de me dire,
06:01bon, il faut que je déménage un peu mes personnages.
06:03Avec vos livres ces 20 dernières années,
06:05vous avez dépassé désormais les 10 millions d'exemplaires vendus,
06:08celui-ci est tiré à 200 000 exemplaires,
06:11à partir de quand ces chiffres commencent à devenir pour vous vertigineux ?
06:15Ben là, ce sont des chiffres vertigineux,
06:17parce que les livres,
06:18vous savez,
06:18les romans publics,
06:19en moyenne,
06:19ça se vend à 2 000 exemplaires,
06:20ça c'est la moyenne de vente des romans,
06:23donc 200 000,
06:24on est quand même sur des volumes incroyables.
06:26Ça vous met une pression supplémentaire ou pas ?
06:28Oui,
06:28ça met une pression parce qu'on se dit,
06:30il y a une confiance de mon éditeur,
06:31c'est-à-dire l'éditeur,
06:32lui,
06:32il mise gros,
06:34et ces livres-là,
06:35effectivement,
06:35il va falloir qu'à un moment donné,
06:37il se vende.
06:38Mais ça a aussi un gage de confiance,
06:39parce que ça veut dire qu'ils ont confiance dans le livre,
06:42c'est une bonne histoire,
06:44et c'est vrai que ces 200 000,
06:45c'est le plus gros tirage en fait.
06:46Donc je suis assez heureux,
06:47parce que ça fait 20 ans que j'écris,
06:49c'est quelque chose qui s'est construit progressivement,
06:51ça a monté un peu tous les ans,
06:54donc on verra jusqu'où ça va aller.
06:55Vous avez peur qu'un de vos livres se plante un jour ?
06:57Non, parce qu'en fait,
06:59moi je mets vraiment,
07:01c'est une question de confiance,
07:02ça fait plus de 20 ans que je fais ça,
07:04quand je me lance dans une histoire,
07:06c'est que j'ai confiance en fait en l'idée que j'ai,
07:09j'aurais plus peur de ne plus avoir d'idées,
07:10c'est-à-dire à un moment donné,
07:11de ne pas trouver,
07:12et je prendrais peut-être plus de temps
07:15pour trouver la bonne idée,
07:15mais en tout cas,
07:16au moment où je me lance,
07:17je sais que normalement,
07:18c'est une histoire qui va plaire,
07:19après,
07:20sur 25 livres,
07:21il y en a un qui peut plus plaire
07:22à certains lecteurs,
07:23à d'autres,
07:24mais ça c'est normal,
07:25et je dirais que c'est même plutôt bénéfique
07:26d'avoir une espèce de moyenne
07:27comme ça,
07:27qui fait que globalement,
07:29les livres plaisent aux lecteurs.
07:30Et donc,
07:30est-ce que vous avez trouvé la bonne idée
07:31pour le prochain ?
07:32Pas encore ?
07:33Vous pouvez nous dire quelque chose ?
07:34Oui,
07:34je suis dans l'écriture,
07:35donc ça sera,
07:36comme on dit,
07:37un one shot en dehors des personnages.
07:39Ça va être dans le milieu
07:39un peu des traumas,
07:40de la mémoire,
07:41un peu le somnambulisme,
07:42enfin tout ce qui est autour du sommeil,
07:43ça me fascine aussi ça.
07:44Et a priori,
07:44c'est toujours au mois de mai
07:45que sortent vos livres,
07:46donc rendez-vous au mois de mai prochain ?
07:47Oui,
07:48avec plaisir.
07:49Merci beaucoup,
07:49en tout cas d'ici là.
07:50Franck Thillet,
07:51d'avoir accepté notre invitation ce matin
07:52pour nous présenter ce nouveau livre
07:54à retardement
07:55qui sort aujourd'hui.
07:56Peut-être un livre un jour sur la radio ?
07:58Oui,
07:58il se passe plein de choses.
08:00Je ne peux pas tout vous dire,
08:01Franck.
08:03Il va falloir trouver
08:04qui meurt au début,
08:05dans la radio,
08:06c'est là où on va se battre.
08:08J'ai des idées.
08:11Je vais vous interroger.
08:147h54.