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00:00Il est 7h10 sur Europe, un très bon début de journée.
00:02Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin le maire d'Hivergauche d'Alençon
00:06et ancien directeur de prison, Joachim Pueyo.
00:09Oui, et pas n'importe lesquelles prisons, les centres pénitentiaires de Frennes et Fleury-Mérogis
00:14soient de très très grosses prisons, je pense que c'est les deux plus gros centres pénitentiaires français.
00:18Bonjour Joachim Pueyo.
00:19Bonjour.
00:20C'est ça, Frennes, 2000 places, Fleury-Mérogis, 3500 plus grandes prisons d'Europe.
00:25Alors, on parle avec vous ce matin, Joachim Pueyo, de cette question.
00:28Faut-il rétablir les frais d'incarcération pour les détenus ?
00:32Gérald Darmanin, ministre de la Justice, estime qu'en effet, les prisonniers doivent contribuer
00:37compte tenu des investissements nécessaires dans le système carcéral qui coûte 10 millions d'euros par jour.
00:43Alors, vous avez connu, vous, les frais d'incarcération, Joachim Pueyo ?
00:47Oui, alors j'ai connu évidemment jusqu'en 2003 les détenus qui travaillaient, participaient à leurs frais d'entretien.
00:54Moi, je préfère le mot frais d'entretien plutôt que frais d'incarcération.
00:58Donc, sur leurs produits, de leur travail, à raison de...
01:02À l'époque, c'était 10 francs par jour, vous voyez, c'était 1,6€, 45€ par mois environ.
01:07Mais uniquement les détenus qui travaillaient dans les ateliers.
01:11Ceux qui travaillaient au service général ne payaient pas, ceux qui étaient indigents ne payaient pas.
01:15Alors, pourquoi ça a été supprimé ? Il faut revenir un petit peu au niveau de l'histoire.
01:19Il y a eu un rapport parlementaire, je ne sais pas si vous vous en souvenez, dans les années 2000, du Sénat.
01:23Moi, je me souviens, j'avais accueilli les sénateurs quand je dirigeais FREN à l'époque.
01:27Et dans ce rapport, les sénateurs avaient demandé la suppression de ce prélèvement,
01:33estimant qu'ils pénalisaient les détenus qui travaillaient par rapport à ceux qui recevaient des subsides,
01:39ou qui ne voulaient pas travailler, ou qui étaient plus riches en réalité.
01:44C'est-à-dire que si vous aviez les moyens de ne pas travailler en prison, vous aviez des moyens à l'extérieur,
01:48on ne vous prenait rien ? Il n'y avait pas de frais d'entretien ?
01:52Il n'y avait pas de frais d'entretien.
01:53Je rappelle quand même que le travail a été obligatoire dans les prisons français jusqu'en 1987,
01:59et que depuis 1987, le travail n'est plus obligatoire,
02:02et que, effectivement, ça pouvait se comprendre lorsque le travail est obligatoire,
02:05lorsque un maximum de détenus travaillait, on pouvait comprendre, et les détenus comprenaient d'ailleurs.
02:11Or, actuellement, la mesure qui est envisagée par le garde des Sceaux,
02:16je rappelle que le code de précieuseur pénal indique que le produit du travail des détenus
02:19ne peut faire l'objet d'aucun prélèvement.
02:21Il faut changer la loi.
02:23Et puis, les modalités d'application sont encore floues.
02:25Parce qu'effectivement, est-ce qu'il s'agit de prélever sur les salaires des détenus pour ceux qui travaillent ?
02:32Mais vous savez très bien qu'en France, très peu de détenus travaillent.
02:3522 000 détenus travaillent sur les 80 000 qui sont écroués.
02:38Donc, c'est une première question.
02:41Et les modalités d'application, pour moi, sont encore floues.
02:44Et puis, est-ce que c'est une mesure...
02:46Pardonnez-moi, mais on a à présent aussi, Joaquim Pueyo, à l'esprit,
02:50ces détenus de luxe, si je puis dire,
02:52ceux qui ont gagné des grandes fortunes dans le narcotrafic,
02:56et qui, pour certains d'ailleurs, en fait, sont aussi éligibles aux prestations sociales,
02:59parce que leur argent, ils le gagnent au noir.
03:01Ça n'est pas de l'argent déclaré.
03:02Mais c'est vrai que ce que dit Gérald Darmanin semble marquer au coin du bon sens.
03:06Se dire que la prison, ça coûte 4 milliards d'euros par an aux contribuables français,
03:10il paraîtrait normal que ceux qui en ont les moyens, en tout cas,
03:13participent à leurs frais, en l'occurrence, d'entretien ou d'incarcération.
03:16Bien sûr, c'est un argument.
03:18Comme vous voyez, effectivement, il y a des détenus qui se procurent des portables
03:20avec plus de centaines d'euros de la drogue qui continuent leur trafic.
03:24Où les vidéos, on les voit dans leurs cellules, parfaitement décorées, très bien équipées.
03:28Je peux comprendre.
03:29Moi, j'attends un petit peu les modalités d'application qui sont encore floues.
03:33Parce qu'effectivement, envisager une telle mesure, par exemple,
03:37dans les maisons centrales, dans les centres de détention,
03:40où là, les détenus sont sur les cellules.
03:43Là où les détenus sont seuls en cellule,
03:47dans l'établissement, les conditions de détention sont meilleures.
03:51Mais envisager une telle mesure dans les maisons d'arrêt,
03:54où vous avez une surpopulation pénale,
03:57deux, trois détenus par cellule,
03:59ça va quand même poser beaucoup de difficultés.
04:01Et je pense qu'envisager une telle mesure,
04:03avant d'avoir réglé les questions de l'enseignement,
04:07les questions du parc pénitentiaire,
04:09ça ne me paraît pas tout à fait adapté actuellement.
04:13C'est la question que je me pose.
04:14Parce que vous verrez que dans, peut-être, le projet de loi,
04:17vous avez des parlementaires qui font référence à la Suisse,
04:21au Danemark, à la Suède, ou à la Norvège.
04:25Mais dans ces pays-là...
04:25Vous êtes des pays où on incarcère bien, correctement en tout cas,
04:28c'est un peu l'idée.
04:29Oui, voilà.
04:29Les conditions de détention sont bonnes.
04:32Au Danemark, les détenus sont seuls en cellule.
04:35Au Danemark, les détenus doivent travailler,
04:37ou doivent signer un programme d'insertion professionnelle,
04:41soit le travail, soit la formation.
04:43Et les détenus peuvent comprendre qu'ils participent à leur frais d'entretien
04:46parce que les conditions de détention sont de bonne qualité.
04:49Mais dans les maisons d'arrêt françaises,
04:51avec une surpopulation telle qu'on le voit actuellement,
04:55trois détenus dans une cellule de 9 mètres carrés,
04:575 000 détenus qui dorment par terre sur des matelas.
05:01Cette mesure ne sera pas comprise.
05:02Alors, en plus, très peu de détenus travaillent.
05:05Très peu de détenus travaillent.
05:06C'est ce que disait l'ancien garde des Sceaux,
05:07Éric Dupond-Moretti,
05:08qui trouvait choquante en substance l'idée de faire payer des détenus
05:11qui dorment par terre et qui partagent leurs cellules avec des rats.
05:15De ce point de vue-là, on peut le comprendre.
05:16Mais on attend, effectivement, les détails autour de ce qui pourrait être
05:21un rétablissement des frais d'entretien ou d'incarcération.
05:24En tout cas, ça dépend comment c'est appliqué, finalement,
05:26Joachim Pueyo.
05:28Oui, ça dépend comment c'est appliqué.
05:30Pour moi, quand même, je préfère le dire ici à vos auditeurs,
05:33je peux comprendre qu'effectivement,
05:35quand je vois la façon dont les nargotrafiquants se comportent dans les prisons,
05:39c'est vrai que ça ne me choquerait pas qu'ils participent à leurs frais d'entretien.
05:42Mais pour moi, la priorité, c'est d'avoir suffisamment de place
05:46pour héberger les détenus dans des bonnes conditions.
05:47Donc, il faut continuer la construction des nouvelles prisons.
05:5115 000 places, le garde des Sceaux a annoncé 3 000 places
05:53dans des modules bétonnés.
05:56et ça pourrait être rapide.
05:57Je crois que c'est pour moi une priorité.
05:59Une priorité, également, c'est de sécuriser les établissements pénitentiaires.
06:03Parce qu'actuellement, quand vous voyez que des détenus continuent
06:07leur délit pour lequel ils sont écroués en prison,
06:10ce n'est pas acceptable.
06:11Le sens de la prison est remis en question.
06:14Et puis, ça permet...
06:15On pourrait parler aussi de la sécurité des agents pénitentiaires.
06:19D'ailleurs, Jean-Darmanin...
06:19Absolument, la sécurité des agents et leurs conditions de travail,
06:22également, qui est en difficulté.
06:25Et puis, il y a un autre sujet, parce que quand on parle de prélèvement,
06:29moi, je pense également aux victimes et aux partis civils.
06:33Vous savez, lorsqu'un détenu a un pécule, par exemple, de 200-300 euros,
06:38il y a un pourcentage qui doit aller envers les victimes.
06:43Et je pense que là, il y a du travail à faire,
06:46parce que la mise en œuvre, elle est difficile, elle n'est pas efficace.
06:49Et donc, par rapport aux victimes, là, je voudrais qu'on y travaille énormément.
06:53Voilà, parce qu'effectivement, la mise en œuvre est difficile.
06:56Voilà les questions que moi, je me pose.
06:58Moi, j'ai vécu, effectivement, à l'époque, qu'on prélevait sur le produit du travail.
07:02Ce n'était pas, pour ma part, choquant à l'époque.
07:04Mais il y avait plus de travail dans les prisons dans les années 1990-95 qu'actuellement.
07:10Donc, 80 000 détenus, 60 000 places, très peu de détenus travaillent.
07:16C'est 20 000 détenus qui travaillent.
07:18Donc, si cette mesure s'adresse uniquement aux détenus qui travaillent,
07:22eh bien, elle ne sera pas juste.
07:24Parce qu'effectivement, on ne va pas forcément inciter le détenu à travailler.
07:28Donc, ça, c'est une question que les sénateurs...
07:30Et je rappelle qu'à l'époque, le gouvernement a été dirigé par Jean-Pierre Raffarin.
07:34Et le garde des Sceaux n'était pas un garde des Sceaux.
07:36L'Axis était M. Berben.
07:37Donc, c'était un garde des Sceaux qui appartenait, d'ailleurs, à la même famille que M. le garde des Sceaux actuellement.
07:43Merci.
07:43Donc, c'est un débat qui est intéressant.
07:46Mais je voudrais qu'on examine la mise en œuvre et qu'on règle...
07:50Il faut pousser, il faut travailler.
07:51Je sais que ce n'est pas facile de revenir rapidement.
07:53Mais la question du parc pénitentiaire, pour redonner à la prison son sens.
07:58Son sens, c'est d'écarter, c'est de sécuriser la société.
08:02Mais c'est également de mettre en place des programmes pour réhabiliter, pour insérer le détenu.
08:06Merci.
08:06Comme on le fait en Suède, comme on le fait au Danemark, comme on le fait en Norvège.
08:10Merci Joachim Puyot.
08:11Ça, c'est une priorité pour ma part.
08:12Merci d'avoir été avec nous sur l'antenne d'Europe 1.
08:14Je rappelle que vous avez été directeur des prisons de Freyne et Florie Mérogy,
08:19c'est actuel maire d'Hiver-Gauche d'Alençon.
08:20Merci d'avoir été avec nous ce matin sur Europe 1.
08:22Bonne journée.
08:23Merci.

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