Xerfi Canal a reçu François de March, Docteur en gestion, chercheur associé à l’IRG de l’Université Paris Est Créteil) et ancien élève de l’Ecole Normale Supérieur de Cachan, pour parler de l'entreprise avec Georges Bataille.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
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00:00Bonjour François Demarche. Bonjour Jean-Philippe Denis. Je tiens une somme entre les mains. Vous
00:13êtes chercheur associé à l'Institut de Recherche en Gestion de l'Université Paris-Escréteil. Un
00:18regard critique sur la gestion avec l'œil de Georges Bataille. Mais quel projet ? Donc question
00:27immédiate. Pourquoi Bataille ? Je dirais qu'il y a des raisons un peu personnelles. Au point de départ,
00:38moi j'étais critique, enfin en difficulté avec les sciences économiques parce que j'ai une triple
00:45formation en fait. Économie, gestion, littérature. Et donc par rapport à l'économie, j'essayais de
00:54trouver d'autres voies qui prennent en compte une réalité, qu'ils ne soient pas des modèles,
00:59etc., mathématiques et tout. Et je suis tombé un peu sur Bataille, assez tardivement. Et voilà,
01:07donc je me suis rendu compte qu'il permettait de poser toute une série de questions et de répondre,
01:12enfin de répondre, oui de répondre un peu à certaines des questions que je me posais. On va
01:16s'y intéresser à ces questions-là. Mais d'une manière générale, finalement, Bataille penseur critique,
01:23et notamment de l'économie et de la gestion. C'est ce que vous nous proposez, c'est-à-dire
01:30insuffisamment mobilisé en gestion pour développer une pensée critique. Alors effectivement, il n'a pas
01:36du tout été mobilisé en gestion, en tout cas en France jamais. Il y a peut-être un article qui a
01:40été publié, mais c'était un philosophe qui l'a publié. Il a été mobilisé un petit peu dans les pays
01:47anglophones avec les Critical Management Studies. Les Critical Management Studies ont beaucoup mobilisé,
01:54on sait, des penseurs de la French Theory, comme Derrida, comme Foucault, comme Deleuze. Et donc,
02:04Bataille, lui, qui était le père spirituel de plusieurs de ses auteurs de la French Theory,
02:10lui, a été pas du tout pris en compte, sauf de façon marginale. Il y a quelques articles, il y a
02:17même un livre qui a été fait, d'ailleurs par un des contributeurs, qui était les têtes sur lesquelles
02:24on peut s'appuyer pour critiquer la gestion, je ne sais plus, il est cité dans l'ouvrage, mais autrement,
02:31il n'y avait pratiquement rien. Et donc, en France, il n'y avait rien. Donc moi, comme je m'étais
02:35intéressé à Bataille, j'ai dit, il faut, je pense que Bataille permet de répondre toute une série de
02:41questions posées en gestion. En tout cas, de les aborder, pas de répondre, mais de les aborder.
02:47Abordons deux questions, deux concepts, plus exactement, pour montrer comment Bataille
02:51aussi nous amène à penser différemment. Souveraineté d'un côté, vous évoquiez dans la
02:55préface, souveraineté d'un côté, non savoir de l'autre. Aujourd'hui, pourquoi c'est, qu'est-ce que ça
03:01nous change de recourir à ces deux concepts en référence à Bataille ?
03:05Alors, je dirais que la question de la souveraineté, c'est effectivement un concept qui me semble
03:10essentiel. Alors, lui, il dirait une notion, bon, je ne prends pas la discussion sur l'opposition
03:14entre concept et notion, mais au sens où ça représente un désir humain de liberté. Je simplifie
03:23les choses, mais de liberté de ne plus être assujetti à des obligations et donc pouvoir
03:31exprimer son être profond et rentrer en communauté, rentrer en communication avec
03:42les autres. Parce que Bataille disait, c'est par nos blessures qu'on rentre en communication
03:47les uns les autres, par les blessures. Et non savoir ? Alors, le non savoir, c'est
03:52le fait qu'il n'y a pas de solution, il n'y a pas de solution miracle. Il y a le fait
03:59que le savoir est toujours une approche du réel, mais évidemment jamais, et arrive même
04:06à tordre le réel et à faire autre chose. Donc, il faut instaurer, enfin permettre à ce
04:14qui relève des émotions, ce qui relève des apories aussi, d'être capable de traiter
04:20des apories sans dire que ça n'a pas de sens. Mais justement, si ça n'a pas de sens,
04:25c'est très intéressant, justement. Le non-sens est intéressant, non pas pour le valoriser
04:30toujours, mais pour essayer de voir ce qui permet de mettre en évidence.
04:35Alors, des fake news, alors de la post-vérité, etc. Le message est très, très fort. Un ouvrage
04:41remarquable, un regard critique sur la gestion avec l'œil de Georges Bataille, François
04:45Demarche, Jean-Paul Dumont, directeur de cet ouvrage. Merci à vous.
04:49Merci Jean-Philippe Dany.
04:51Sous-titrage Société Radio-Canada