Passer au playerPasser au contenu principalPasser au pied de page
  • il y a 3 jours
Dans les derniers mois de la deuxième guerre mondiale, Hitler nie l'évidence d'une défaite annoncée. Dans une tentative démente d'inverser le cours de la guerre, il alimente son armée par des recrues de plus en plus jeunes. Soumis à la propagande nazie dès leur plus jeune âge, ces petits soldats sont envoyés dans des combats perdus d'avance où ils se battent pour la plupart, avec fanatisme. Environ 10 000 de ces jeunes combattants seront faits prisonniers par l'armée américaine et envoyés dans le camp d'Attichy, dans l'Oise, où ils seront séparés des adultes afin d'être rééduqués dans une section spéciale appelée « Baby Cages ». A l'initiative des responsables du camp très inquiet de leur degré d'endoctrinement, ils sont considérés et traités comme des victimes du régime nazi. Une école est alors créée au sein des Baby Cages encadrées par des théologiens et des professeurs allemands prisonniers triés sur le volet, afin de les guider vers un esprit de tolérance et de démocratie. C'est au cours d'une conversation que Winfried Börsch, notre témoin principal, a raconté à sa fille, réalisatrice de ce film, l'histoire des « Baby Cages » où il fût interné au printemps 1945. Aujourd'hui âgé de 92 ans, Winfried Börsch est l'un des derniers témoins vivants de ce fait historique tombé dans l'oubli. Il nous raconte cette expérience qui fût pour lui, un premier pas vers la liberté. Année de Production :

Catégorie

📺
TV
Transcription
00:00Musique
00:301944, la domination de l'Allemagne nazie touche à sa fin.
00:40Pourtant, dans les derniers mois d'un conflit dévastateur,
00:43Hitler nie l'évidence d'une défaite annoncée.
00:46Dans une tentative démente d'inverser le cours de la guerre,
00:50malgré la débâcle de la Wehrmacht sur le front de l'Est
00:53et une pluie de bombes des forces alliées qui s'abattent sur l'Allemagne,
00:56il alimente son armée affaiblie par des recrues de plus en plus jeunes.
01:05Après cinq ans de guerre et de violents combats,
01:08le régime nazi est anéanti sous le feu des alliés.
01:13L'Allemagne est désormais un pays sans état
01:16dont la plupart des villes ne sont plus qu'un tas de cendres.
01:23Avec l'effondrement de la Wehrmacht,
01:25des milliers de soldats allemands sont capturés
01:28dans toutes les zones de combats d'Europe
01:29et parqués dans des camps créés à la hâte
01:32par les différents vainqueurs.
01:38Il y eut 11 millions de prisonniers de guerre allemands,
01:419 millions de déplacés et 1 million de disparus.
01:46Parmi eux, des enfants âgés de 8 à 17 ans.
01:49Surpris par la jeunesse de ces petits soldats,
02:09les Américains les traitent d'emblée
02:11avec une attention particulière
02:12malgré leur statut de prisonniers de guerre.
02:15Jamais auparavant, des enfants n'avaient été utilisés
02:21de cette façon à des fins militaires.
02:24Ils furent donc considérés comme des victimes du régime nazi
02:27ayant été embrigadés et fanatisés dès leur plus jeune âge.
02:32Environ 10 000 de ces enfants issus des jeunesses hitlériennes
02:36seront envoyés en tant que prisonniers de guerre
02:38dans le camp d'Attichy, dans l'Oise,
02:40où ils seront séparés des adultes et regroupés
02:43afin d'être rééduqués dans une section spéciale
02:47appelée « Baby Cage ».
02:48« Baby Cage ».
02:51Non, c'est nous seulement qui connaît ça.
02:58« Baby Cage », ça a été quelque chose,
03:04oui, comment dire,
03:05quelque chose de spécial pour Attichy.
03:06Attichy, c'est un petit village
03:11entre Reims et Soissons en France, Attichy.
03:15Et là, à cette époque-là,
03:18donc en 1945,
03:23il y avait un très grand camp de prisonniers allemands
03:28réalisé, pour ainsi dire, par les Américains.
03:32Un très, très grand camp de prisonniers.
03:36Ça a été très certainement, pour les Américains,
03:39aussi, le camp où ils ont réuni, pour ainsi dire,
03:45tous les gosses, quoi, tous les enfants.
03:47J'ai eu mon 17e anniversaire au camp d'Attichy.
03:53Mon 17e anniversaire au camp d'Attichy.
03:57Les générations qui ont connu la guerre
04:03ont bien souvent du mal à en parler.
04:06C'est au hasard d'une conversation
04:07que mon père, Winfried Börsch,
04:09m'a parlé de l'école des Baby Cage
04:11et de son premier séjour en France
04:13au printemps 1945,
04:15dans le camp d'Attichy,
04:16en tant que prisonnier de guerre.
04:19Je me suis donc intéressée
04:20à cet épisode historique singulier
04:22et je me suis aperçue
04:24que pratiquement personne
04:25n'en avait jamais entendu parler.
04:28Sachant que le temps était compté
04:29et que les derniers témoignages
04:30se feraient de plus en plus rares,
04:32j'ai décidé de suivre mon père
04:34avec ma caméra
04:35afin de recueillir son récit.
04:39Aujourd'hui, âgé de 92 ans,
04:41son expérience de prisonnier de guerre
04:43fut pour lui, paradoxalement,
04:45un premier pas vers la liberté.
04:47Comme ma gamme, comme ça.
04:51À partir de 1943,
04:56pratiquement toutes les grandes villes allemandes
05:02ont été régulièrement, régulièrement bombardées
05:07par les Américains, les Reims et les Anglais,
05:10n'est-ce pas ?
05:11Hamburg, Köln, München,
05:15finalement Dresden.
05:18Et donc, il manquait de personnel.
05:23C'est pour ça que la Wehrmacht
05:25ou la Laufsaffer, etc.
05:27ont décidé,
05:29s'il n'y a plus de soldats,
05:32on n'a qu'à recourir à des élèves.
05:35La soi-disant, entre guillemets,
05:39naturellement, patrie allemande,
05:41nous a envoyés dans la DCA,
05:44ça veut dire dans une partie de la Laufsaffer.
05:48Moi, j'y étais à partir du 5 janvier 1944
05:52jusqu'au 6 avril 1945.
05:56Parce que le 6 avril 1945,
06:00nous, comme Luftwaffenhelfer,
06:07on a été libérés, pour ainsi dire,
06:12par les Américains
06:15qui nous ont fait prisonniers de guerre.
06:21On n'a pas eu de jeunesse,
06:23on n'a pas eu d'une évolution normale,
06:26on n'a pas eu de possibilités
06:28de se développer, etc.
06:31Moi, personnellement,
06:32j'aurais aimé faire une carrière de musicien.
06:36Mais on a été envoyés à la DCA,
06:40n'est-ce pas ?
06:40Pourquoi ça ?
06:41pour défendre une ville
06:45des bombes américaines ou anglaises, etc.
06:49Incroyable.
06:52Incroyable.
06:55Incroyable.
06:57Au moment où j'ai été envoyé à Kassé,
07:01comme Luftwaffe,
07:02j'avais 15 ans.
07:0315 ans.
07:11Au moment où les Américains
07:20se sont approchés de Kassé,
07:22nous, surtout les jeunes,
07:26nous avons dit,
07:27alors maintenant,
07:28de toute façon,
07:28la guerre est finie,
07:30on va s'en aller.
07:31Et puis la SS avait dit
07:34que nous,
07:35on devrait monter
07:38sur un champ
07:39près de Kassé
07:41pour défendre
07:43la région
07:44contre une attaque
07:46prévue
07:47des chars américains.
07:54Et il y avait
07:56un champ
07:57où il y avait
07:57des troupes
07:58partout déjà préparées.
08:00Donc on était
08:03comme ça,
08:04dans les trous,
08:05avec des fusils,
08:07etc.
08:08Mais personne
08:09ne savait
08:09comment
08:10s'en servir,
08:12n'est-ce pas,
08:13de ces fusils-là.
08:24Dans chaque batterie
08:25de la DCA,
08:28il y avait
08:28toujours un sous-officier
08:32et puis chez nous,
08:34ça a été
08:34un sous-officier
08:36qui,
08:36dans sa vie privée,
08:38n'est-ce pas,
08:39a été étudiant
08:40de médecine.
08:41Il s'est appelé
08:42d'ailleurs
08:42Manfred Vaudrich.
08:48Et puis à ce moment-là,
08:50il a décidé,
08:51à partir de maintenant,
08:53vous allez entendre
08:54uniquement
08:55tout ce que je vais
08:56vous donner.
08:57Moua !
08:58Et puis on va
09:00s'en aller
09:01vers la forêt
09:02près de Casseuil.
09:04On s'est cachés
09:05du matin jusqu'au soir
09:07sous des arbres,
09:08etc.
09:09Et puis à peu
09:10peut-être
09:10de cinq ou six jours,
09:15on a rencontré
09:17une sorte de hutte.
09:19Et puis celle-ci
09:20a été
09:20pleine
09:22de femmes,
09:24de famille,
09:25de femmes,
09:25et tout le monde
09:26a crié.
09:27« Ah, surtout pas ça !
09:29Vous êtes des soldats,
09:30allez-vous-en ! »
09:31N'est-ce pas ?
09:32S'il y a encore
09:32des erreurs,
09:33les Américains,
09:34alors tout ce monde
09:36sera tué.
09:39« Allez-vous-en,
09:40allez-vous-en,
09:40etc. »
09:41Et puis lui,
09:42Manfouzi,
09:43j'allais
09:43« Regardez,
09:45regardez les soi-disant
09:46soldats,
09:49ce sont des enfants
09:50comme vous,
09:51ce sont des enfants
09:52comme vous,
09:53laissez-les dormir
09:54une fois,
09:55ça fait longtemps
09:56qu'ils n'ont pas eu
09:57la possibilité
09:58de dormir. »
10:00Alors physiquement,
10:01on a été acceptés,
10:04on s'est reposés
10:05un peu,
10:05on a pu se mettre
10:07comme ça,
10:08pour pouvoir dormir
10:10un peu.
10:11Et puis le matin,
10:13vers 6h,
10:15oui,
10:15vers 6h à peu près,
10:17il y avait un bruit
10:19de moteur dehors.
10:21Et puis à ce moment-là,
10:22on s'est dit,
10:23nous,
10:24le Fafnef,
10:26alors ça,
10:27c'est très certain.
10:28Maintenant,
10:29la SS,
10:31et puis si,
10:34si ils vont nous trouver
10:37ici,
10:37avec nos uniformes,
10:41de la DCA encore,
10:44alors,
10:45on s'aurait très certainement
10:47exécutés aussitôt,
10:48on s'aurait exécutés aussitôt,
10:51et puis on s'est dit,
10:54au revoir,
10:55n'est-ce pas,
10:55tout le monde comme ça,
10:57au revoir,
10:58au revoir,
10:58bonne chance,
11:00etc.
11:01Et puis,
11:02la porte s'est ouverte,
11:04et c'est un un officier américain.
11:09Ça a été un officier américain.
11:12et il nous a dit,
11:19à nous,
11:21les Waffenhelfer,
11:22qui avaient des uniformes,
11:25naturellement,
11:26vous,
11:27vous êtes maintenant
11:28des prisonniers de guerre.
11:32Des prisonniers de guerre.
11:33Et à partir de ce moment-là,
11:35nous,
11:36on a été des prisonniers de guerre,
11:39et c'est comme ça que,
11:41finalement,
11:42on a été transportés
11:44jusqu'en France,
11:46dans le grand camp américain
11:50pour prisonniers de guerre allemands.
11:54La France est libérée,
11:55mais les souffrances ne s'arrêtent pas pour autant
11:57avec la fin des hostilités,
11:59et le sort des prisonniers allemands
12:01n'intéresse personne.
12:02Le contexte de la libération
12:20dès la fin de la guerre 1945
12:22en France,
12:23au sujet des prisonniers de guerre allemands,
12:26on peut dire qu'en fait,
12:27c'est une question
12:28à la fois française,
12:31à la fois américaine,
12:31en ce qui concerne
12:32les camps de prisonniers de guerre allemands
12:34en France.
12:36Une question française,
12:38parce que ça se passe
12:39sur le territoire français,
12:41une question américaine,
12:41parce que ce sont des camps
12:42installés par l'armée américaine,
12:44avec des prisonniers de guerre allemands
12:46sous autorité américaine,
12:48et pour lesquels
12:49les Français, finalement,
12:51n'ont aucune autorité.
12:52à partir de mai 1945,
12:59mais aussi avant,
13:00bien sûr,
13:00il y avait des interrogations
13:02à ce sujet-là.
13:03Que faire de l'Allemagne
13:04après la guerre ?
13:06Que faire de ce pays problématique
13:08en plein milieu de l'Europe ?
13:10Est-ce qu'on va refaire
13:12les mêmes erreurs
13:13qu'au sortir de la Première Guerre mondiale ?
13:15Donc,
13:15d'imposer une paix dure
13:16à l'Allemagne ?
13:17Est-ce qu'on essaye justement
13:19d'injecter un esprit démocratique
13:21en l'Allemagne ?
13:22Et finalement,
13:24que ce soit la France,
13:25la Grande-Bretagne
13:26ou les États-Unis,
13:27pour ce qui concerne
13:28l'Allemagne de l'Ouest,
13:29prennent des politiques
13:30très différentes.
13:33Et c'est finalement
13:34les Américains
13:34qui ont la conception
13:35la plus pragmatique
13:36de cette vision
13:37de l'Allemagne d'après-guerre
13:38en voulant en faire
13:39un bloc de résistance
13:42contre le bloc communiste.
13:45Pour les Américains,
13:46la guerre se poursuit
13:47dans le Pacifique.
13:48Et à partir
13:51de mai 1945,
13:53tout est fait
13:54pour réachiminer
13:56les troupes
13:56qui ont combattu
13:57en Europe.
13:58Il faut essayer
13:58de soulager
13:58toute cette machinerie
13:59de l'armée américaine.
14:01Et pour faire ça,
14:02on se sert
14:02de centaines de milliers
14:03de prisonniers
14:04de guerre allemands
14:05qui vont travailler
14:06à la construction
14:07de camps,
14:08non seulement
14:08pour leur propre usage,
14:10mais aussi pour
14:11le rapatriement
14:12des troupes américaines.
14:16Et puis,
14:16il y a le problème
14:17des jeunes allemands,
14:18des Hitler-Jungen.
14:19Et Gunther Grass,
14:20qui a été l'un d'eux,
14:22qui a été prix Nobel
14:23de littérature,
14:24l'auteur du tambour,
14:25disait
14:25« Nous étions trop jeunes
14:27pour être nazis,
14:29mais nous étions assez âgés
14:30pour être modelés
14:31par le régime. »
14:33Ce qui montre bien
14:34que dans l'Allemagne
14:35d'après-guerre
14:36qu'il va falloir reconstruire,
14:38il va falloir changer,
14:40si possible,
14:41la mentalité
14:42de ces jeunes allemands.
14:43Les Américains
14:44découvrent cette réalité-là
14:46au moment
14:47d'entrer en Allemagne
14:49et de prendre en captivité
14:52ces soldats allemands
14:54dans leur masse,
14:56par exemple,
14:56dans la poche de la Roure
14:57au printemps 1945.
14:59Mais ces prisonniers-là,
15:01même les prisonniers très jeunes,
15:03dans un premier temps,
15:04ils sont éloignés
15:05de la zone de combat
15:06comme tous prisonniers de guerre.
15:08Ils sont emmenés
15:08dans des camps en France
15:09essentiellement pour ensuite
15:11être triés selon leur âge.
15:15Comment est-ce que vous avez
15:16le train de l'arrivée
15:17de ce jeune homme, Sgt?
15:19Quelle étude vous avez obtenu?
15:22Un harttack.
15:24Et quoi n'est-ce pas?
15:26Un diesel.
15:29Vous avez eu l'air d'un et vous avez
15:31vous avez eu l'air d'un objet
15:32pour en faire
15:33l'air d'un objet
15:34de l' networking.
15:35N'y a pas.
15:36Parfois, on n'a pas été
15:37de l'air d'un objet
15:38en rang des ordres
15:40mais ils n'ont pas prouvé
15:41de l'un objet.
15:41L'un objet
15:41a déjà eu l'air vous 방송
15:42n'ait pas un combat
15:43ou pas une race
15:44avec les armes
15:44des armes
15:45?
15:46Vous avez déjà rencontré
15:46des armes
15:47des armes
15:48des armes
15:49?
15:50Vous avez PLAYED
15:50des armes
15:50des armes
15:52?
15:53Ils ont battu contre les Américains.
15:57Ils ont battu contre les Américains.
16:00Ils ont battu.
16:02Nous n'avons battu.
16:04Ils disent qu'ils n'ont jamais battu.
16:06Ils n'ont pas battu.
16:07Qu'est-ce que l'âge de ce corps ?
16:09Qu'est-ce que l'âge de ce corps ?
16:1012.
16:1112 ans.
16:1312 ans.
16:14Il a 3 ans de militaire.
16:16Il s'agit d'un jeune homme.
16:18Il s'agit d'un jeune homme.
16:20Il s'agit d'un jeune homme.
16:22C'est tout.
16:28Contrairement à la plupart des autres enfants,
16:30mon père avait grandi sous l'influence de son père
16:32qui s'était ouvertement opposé au nazisme
16:35à travers le mouvement de résistance de l'Église confessante.
16:39Une fois pour prier,
16:41ça a été en 1936.
16:43En 1936,
16:45que mon père est mort
16:47comme pasteur de l'Église confessante
16:50contre les lois des nazis.
16:54Hitler avait essayé de conquérir le camp protestant
17:02en formant une Église à son obéissance.
17:07Mais tous les protestants n'étaient pas d'accord.
17:09Au contraire.
17:10Et il y a eu tout un groupe de pasteurs
17:14et de protestants convaincus
17:16qui sont entrés en résistance.
17:19Il y avait en 1935 ici les lois.
17:26Les lois contre les Juifs.
17:29Et puis mon père,
17:32comme pasteur,
17:34il a dit
17:36qu'on ne peut absolument pas accepter ça.
17:38Dans le village où il a été pasteur,
17:40il y avait un instituteur
17:43qui est un super nazi.
17:45Et puis il est toujours allé dans l'Église.
17:49Et puis lui, l'instituteur,
17:52il a écrit tout ça,
17:54ce que mon père a dit.
17:57Et puis avant que mon père ait été rentré à la maison,
18:02il y avait déjà la Gestapo.
18:05Et ça a été comme ça chaque dimanche.
18:08Les têtes pensantes de la becaine de Kirch
18:14ont été massacrées,
18:16décapitées par Hitler.
18:19C'est le sermon donc de mon père
18:22du 24 mars 1935,
18:28dans l'Église à Pizzavitz.
18:31Et le titre a été
18:34« Warum wehren wir uns als christliche Deutsche
18:37gegen eine neue Religion ? »
18:40Et la nouvelle religion,
18:42ça a été l'idéologie du nationalsocialisme.
18:49Le 6 juin 1936,
18:52dans la même année où les Américains
18:54et les Anglais et les Français
18:57ont reconnu, n'est-ce pas,
18:59ont reconnu encore le gouvernement nazi, n'est-ce pas.
19:03Mon père a été déjà tué, pour ainsi dire,
19:07par la Gestapo.
19:09Je pense avec émotion, Marie,
19:12à votre grand-père,
19:14qui ne savait pas
19:16que c'était sa dernière prédication,
19:18mais qui, quand même,
19:20est allé là ce dimanche
19:23à dire « Hier, j'te, ich kann nicht anders.
19:27Me voici debout, autrement je ne puis. »
19:34Après m'être ainsi plongée dans l'histoire
19:36à travers les récits de mon père,
19:38j'ai décidé de me rendre sur les lieux du camp d'Attichy,
19:41dans l'espoir d'obtenir de nouvelles informations
19:43sur ces fameuses baby cages.
19:46C'est à la gare d'Attichy,
19:48devenue entre-temps une maison privée,
19:50que je me suis d'abord arrêtée,
19:52afin de visualiser l'endroit
19:54où les masses de prisonniers de guerre allemands
19:56avaient été débarquées.
20:09Depuis la gare,
20:10j'ai suivi le chemin emprunté par les prisonniers
20:12jusqu'à l'immense plateau,
20:14aux abords des villages de Croutois et Haute Fontaine,
20:17où plus rien ne laisse imaginer la charge
20:19d'un passé mouvementé,
20:20sinon les ruines d'une ancienne tour de contrôle.
20:25En 1939, l'armée française
20:28exproprie quelques cultivateurs
20:30pour créer un terrain d'aviation de secours.
20:34Il n'aura pas l'occasion de servir,
20:37mais après la victoire des troupes allemandes,
20:40ce terrain secondaire va être réactivé.
20:44Pendant un peu plus de deux ans,
20:46c'est une escadrille de reconnaissance
20:48qui va s'installer sur ce plateau
20:51complètement dépourvu d'arbres.
20:53qui va s'installer sur ce plateau
20:55et qui va s'installer sur ce plateau.
20:57Ce terrain va connaître un changement de nature
21:03puisqu'il va servir à abriter
21:06le plus grand camp de prisonniers allemands
21:10d'Europe occidentale.
21:12Il est clair que ce camp-là se situe
21:15près du chemin de fer,
21:18donc pour deux raisons.
21:19D'abord pour acheminer les prisonniers de guerre
21:21de façon pratique et la moins contraignante possible,
21:24et la plus rapide possible,
21:25mais aussi pour pouvoir ensuite
21:27les réacheminer vers d'autres camps.
21:29On est arrivés en train dans des wagons ouverts,
21:39et puis quand on a passé des ponts en Belgique et en France,
21:44c'était des gens qui se sont mis là sur les ponts
21:50pour jeter des pierres sur nous dans les wagons là.
21:55Les Américains vont avoir très vite une utilisation très pragmatique
22:00de ces camps-là en les transformant en viviers de main-d'œuvre
22:04pour la logistique essentiellement de l'armée américaine
22:08le long des axes de communication.
22:13Les Américains ont dû ramasser tous les soldats allemands, etc.
22:18Et puis nous aussi, on a été dans un grand camp américain
22:23du côté du Rhin à Andernar.
22:26Et puis après, on a été envoyés en train à Namur en Belgique.
22:35Et puis de Namur, on a été transportés en train de nouveau en France.
22:43Et le train s'est arrêté dans une petite gare près d'Atichy.
22:50Les prisonniers avaient très peu de contact avec l'extérieur, on va dire vraiment l'extérieur du camp.
22:56D'ailleurs, certains prisonniers ne savaient même pas qu'ils étaient à Croutois.
23:00Donc, débarquant des trains, ils voyaient marqué Atichy.
23:04Après, ils remontaient le Mont de Torche, donc la côte, pour aller se diriger vers le camp,
23:09pénétrer à l'intérieur du camp, et puis voilà, c'était leur vie.
23:14C'était une masse énorme de prisonniers de guerre allemands dont les Américains ont dû s'occuper.
23:25On ne savait pas comment faire pour survivre.
23:30Comment ça se passait avec les habitants du village ?
23:33Il n'y avait pas du tout de problème avec les habitants du village,
23:36puisqu'ils étaient enfermés là-bas, derrière les barbelés.
23:41Je me rappelle qu'il y en avait des jeunes.
23:43Ils montaient de la gare d'Atichy, au début, et ils passaient là au village.
23:47Et nous, on était gamins, on suivait toujours derrière si jamais ils laissaient tomber quelque chose pour le ramasser.
23:54Les civils ont connu, même après la libération, une pénurie, l'étiquet de rationnement.
24:00Quant aux prisonniers, ils ont connu un subtil changement de dénomination.
24:05Ils ont perdu leur statut de prisonniers de guerre,
24:08qui, selon la Convention de Genève, leur permettait d'obtenir la même ration alimentaire que les soldats au front.
24:16A partir de ce moment-là, leur ration alimentaire a diminué.
24:20Et le camp de Croutois, qui était déjà surnommé le camp de la faim, a mérité définitivement son surnom.
24:28Il faut imaginer ce camp, un quadrilatère grossièrement 1200 mètres sur 600 mètres de côté.
24:33où il ne pousse absolument rien, l'herbe a disparu.
24:38Alors, il faut imaginer ce camp, un quadrilatère grossièrement 1200 mètres sur 600 mètres de côté,
24:58où il ne pousse absolument rien, l'herbe a disparu sous le piétinement des prisonniers.
25:06On a planté des tentes à perte de vue, et il y a un axe médian qui traverse l'ensemble du camp.
25:14Donc, le camp est divisé en 10 parties, 10 campons.
25:18Et à l'intérieur de chaque campons, il y a des cages.
25:25Dans ce camp d'Attichy, conçu pour 60 000 prisonniers,
25:30certains disent qu'on a eu jusqu'à 100 000 prisonniers, c'est peut-être un petit peu exagéré,
25:35il a d'abord fallu soustraire les jeunes à la concupiscence des plus âgés.
25:40On est dans le contexte de camp de prisonniers de guerre très vaste,
25:44et où on a des prisonniers qui sont les uns sur les autres à longueur de journée,
25:50âgés de 40, 50, 60 ans, avec des prisonniers très jeunes.
25:54Moi, j'avais à ce moment-là 16 ans.
25:5716 ans à ce moment-là.
25:59Et puis, les Américains ont décidé donc de séparer les enfants,
26:12qu'ils ont appelés des « babies » dans un camp spécial.
26:18Les Américains ont appelé ça les « baby cage ».
26:23Dans certains rapports de la Croix-Rouge, on peut lire entre les lignes
26:27et ça se fait aussi pour ce qu'ils appellent des questions morales.
26:31Parce que ce qui se passe dans ces camps de prisonniers de guerre,
26:34c'est en fait souvent une économie sexuelle qui se met en place entre hommes,
26:38avec des échanges de nourriture contre des faveurs sexuelles.
26:44Voilà pourquoi ils ont été regroupés dans ce qu'on appelle les « baby cages ».
26:50La documentation concernant les fameuses « baby cages » étant très rare,
26:55chaque témoignage en est donc d'autant plus précieux.
26:58« La cage aux enfants, datichie ».
27:01Ce rapport d'expérience écrit par l'un des prisonniers
27:04choisi comme enseignant par l'administration du camp,
27:07raconte la mise en place d'un programme de rééducation,
27:10alors qu'aucune armée au monde n'avait encore été confrontée
27:13à des prisonniers aussi jeunes et endoctrinés.
27:16La jeunesse pendant la Seconde Guerre mondiale,
27:19c'est une page très sombre de l'histoire de l'Europe.
27:24Ce choc de la défaite est tellement grand qu'il n'y a pas de perspective.
27:30Cette perspective-là va se construire doucement par des acteurs
27:33qui vont avoir été rééduqués par les alliés,
27:36mais aussi par les églises, par les Allemands qui reviennent de l'exil,
27:41les rares survivants des camps de concentration,
27:46les politiques qui reviennent,
27:48les social-démocrates qui reprennent leur rôle dans l'Allemagne d'après-guerre.
27:52Donc ce sont ces gens-là qui vont redonner une perspective à l'Allemagne.
27:56D'après ce témoignage, ce serait Joseph Wirth,
28:00un ancien chancelier de la République de Weimar,
28:03de confession juive, exilé aux États-Unis depuis 1933
28:07et membre du service de renseignement militaire,
28:10qui aurait demandé à Karl Schiffer, lui aussi classé anti-nazi,
28:14d'organiser l'école des baby cages.
28:17C'est ainsi qu'il raconte.
28:23Le commandant du camp d'Adjishi, le major William McGrath,
28:26était le père spirituel des baby cages.
28:30Avant d'être affecté au grand quartier général américain de Reims,
28:34il était à la fois l'ami paternel et l'assistant social des garçons,
28:38qui se trouvait dans une grande détresse corporelle et psychique.
28:42Par la suite, le capitaine Alfred C. Johnson a continué l'action de son prédécesseur
28:54avec tout autant de bienveillance.
29:00D'après un rapport de la Croix-Rouge datant du mois d'août 1945,
29:04il y aurait eu 7 421 jeunes prisonniers de guerre
29:08internés dans le camp d'Adjishi.
29:12Mais d'après ce témoignage, leur nombre aurait en fait largement atteint les 10 000 enfants.
29:24L'idée, c'est que l'organisation du camp,
29:26les Américains gèrent la partie administrative avec l'extérieur
29:30et il y a une certaine autogestion interne.
29:33Justement, c'est une manière aussi de réintroduire de la démocratie,
29:39de réintroduire du débat, de réintroduire du vote et de réintroduire également des « procès » équitables.
29:47Le capitaine Francis Tourtelot, un professeur d'allemand originaire de l'État de Rhode Island,
29:53fut chargé d'appliquer le programme de rééducation
29:55selon les méthodes qui avaient été utilisées aux États-Unis dès 1944
29:59dans le camp de prisonniers de guerre allemands de Forgetti.
30:03Toutes les autres matières furent enseignées par les 150 professeurs désignés parmi les prisonniers du camp.
30:09On fait du sport, on chante et puis on apprend de l'histoire.
30:19Mais on apprend l'histoire des États-Unis et non pas l'histoire de l'Allemagne.
30:23Parce que cette histoire, elle est chargée de véhiculer les valeurs de la démocratie.
30:29Donc les Américains ont une histoire riche et ancienne à ce sujet.
30:34En revanche, les Allemands, en guise de démocratie,
30:37n'ont que la république de Weimar, qui a été très courte et qui a été honnie.
30:43Elle a été pointée du doigt.
30:45Alors comment faire comprendre aux Allemands quelles sont les valeurs de la démocratie ?
30:50Il fallait justement apprendre ces jeunes à obéir, mais autrement que de manière militaire.
30:57C'est pourquoi d'ailleurs Francis Tourtelot a institué comme salut,
31:02non pas le salut militaire, mais bonjour monsieur.
31:05Une fois par semaine, c'était des soldats américains noirs, des noirs toujours,
31:15qui nous ont accompagnés pour sortir par exemple du camp.
31:22Alors comme ça, on a l'impression d'être un peu véritablement en liberté, etc.
31:28Et puis les soldats américains noirs nous ont distribués, n'est-ce pas, des chocolats et des sucreries, etc.
31:37Tout ça, on a pu se promener dans la Champagne.
31:42Les États-Unis, pendant la Seconde Guerre mondiale, sont un pays où règne la ségrégation raciale.
31:47Et ça, ça s'applique aussi à l'armée américaine qui se bat en Europe contre l'Allemagne nazie.
31:52Donc en fait, on a une situation en beaucoup d'endroits où les soldats allemands sont surtout en contact avec des soldats noirs américains.
32:04Et on se retrouve dans le contexte de deux groupes de soldats qui sont mis en marge de l'armée américaine,
32:13puisque les prisonniers de guerre sont des prisonniers de guerre.
32:16Les soldats noirs américains sont discriminés au sein de leur propre armée
32:21et vont se créer parfois des liens de solidarité entre ces deux groupes.
32:26Les soldats noirs américains étaient plus compréhensifs,
32:30ayant l'interdiction de donner une cigarette aux prisonniers.
32:33Ils l'allumaient et la jetaient par terre.
32:38Pour ne pas faire voir qu'ils donnaient une cigarette,
32:42ils ne l'avaient pas donnée en fin de compte.
32:45Mais il se trouve que le professeur Tourtelot avait décidé que pour leur santé,
32:50ces jeunes ne devaient pas fumer.
32:53Et donc il a supprimé les rations de cigarettes.
32:56Il faut croire que la démocratie avait commencé à faire son chemin
32:59puisque quelques 300 jeunes sont venus se plaindre en délégation,
33:04en demandant qui avait décidé ça.
33:06Et quand il les a renvoyés de manière assez abrupte,
33:11ils se sont révoltés en criant « battez-le, jetez-le au fossé ».
33:15Donc il y a eu ce mouvement d'humeur qui est un bon signe finalement,
33:19un bon signe finalement, un signe que peut-être le projet fonctionnait.
33:22Et la punition qui s'en est suivie a été privée de petit-déjeuner.
33:26Pour nous, on se dit toujours,
33:29espérons que nous, on sera libérés avant notre 17e anniversaire.
33:41parce qu'après le 18e anniversaire,
33:46les Américains ont eu l'habitude d'envoyer tous ces gens-là dans les camps français.
33:56Et puis, ça n'a pas été drôle dans les camps français.
34:04Finalement, à Atichy, dans ces deux camps,
34:07le camp des hommes militaires adultes, prisonniers de guerre,
34:13et les baby cages où il y avait les jeunes qui avaient bien participé à la guerre
34:21et pour lesquels les Américains faisaient des efforts énormes
34:25pour les aider à sortir de leur vécu atroce.
34:31Cette juxtaposition entre ces deux forces,
34:38à la fois de destruction par la faim
34:42et de sauvetage par l'éducation des jeunes dans les baby cages,
34:48c'est d'une certaine façon très, très questionnant.
34:53Alors, c'est vous, monsieur Armelin ?
34:55Mon père était prisonnier dans le camp, à côté.
34:59Voilà, donc c'est pour ça que je viens vous voir.
35:01Pardon ?
35:02Vous aviez des contacts parfois avec les prisonniers ?
35:04Oh non, très peu.
35:06Très peu ?
35:07Oh non, ils étaient carrément clodonnés sur le plateau, vous voyez.
35:10Il y avait une entrée, une entrée du camp,
35:13et l'administration était là, groupée dans des barquements.
35:20Il y avait très froid, il était très mauvais, très chaud.
35:24Et est-ce que vous avez entendu parler des baby cages ?
35:30De ?
35:31Des baby cages.
35:36Ce qui est certain, c'est que ces jeunes ont bénéficié
35:39de conditions de vie un peu meilleures que celles des autres prisonniers,
35:44notamment au niveau de la nourriture.
35:47Alors l'ennui, il n'y a rien de plus terrible pour des prisonniers.
35:50Et ces jeunes disposaient bien sûr de quelques jeux,
35:54mais on les voit très souvent dans le reportage de Life,
35:57allongés sur des couvertures, essayant vainement de dormir.
36:04Alors ils pouvaient trouver un réconfort auprès de la religion,
36:08notamment de pasteurs qui avaient été recrutés,
36:11d'abord parce qu'ils étaient garantis anti-nazis.
36:16On avait vérifié avant qu'ils ne propageraient pas la mauvaise parole.
36:20Et ils permettaient à ces jeunes une évasion, un contact finalement avec le pays,
36:27qui n'était plus un contact de guerre, mais qui était au contraire un message de paix et un message d'espoir.
36:32La mission des théologiens devait donc permettre à ces enfants restés sans nouvelles de leur famille,
36:39d'atténuer leurs angoisses et de les aider à se reconstruire selon les valeurs chrétiennes.
36:44L'administration américaine du camp avait ramassé tous les prisonniers
36:54qui avaient quelque chose à faire avec la théologie.
36:59Et eux, ils étaient réunis dans le baby cage.
37:07C'était le tripling américain.
37:12Et puis ça, ça c'était des pasteurs prisonniers qui étaient dans la tente des théologiens.
37:20Les théologiens avaient une véritable tente.
37:25Là, on pouvait descendre dans le fond de la terre et puis c'était presque comme une salle d'audience.
37:34Avec une grande bibliothèque, offert par la Croix-Rouge de Suisse et par la Croix-Rouge de Paris.
37:43Geschenk de l'Ekumenische Commission pour la pasteurisation des Kriegsgefangènes.
37:51Il était possible pour les plus courageux de reprendre leurs études,
38:01mais il ne faut pas oublier que beaucoup les avaient interrompu pour faire la guerre.
38:06Et ce fossé qui s'était creusé entre leur vie de jeunes étudiants et puis la réalité brutale de la guerre a été très difficile à combler.
38:19Ce qui m'a touché, ce sont les poèmes qu'ils ont écrits.
38:36Si j'étais un oiseau, je m'envolerais comme une flèche dans les airs à travers le pays natal tant attendu.
38:42Les parents sont-ils encore vivants ? La maison tient-elle encore debout ?
38:47Sont-ils tous en bonne santé ? Aucune réponse ne me parvient.
38:51Je suis prisonnier et je dois attendre.
38:54C'est aussi leur désir de faire de la musique.
38:59Ils découvrent ainsi les grands compositeurs, les artistes et les écrivains juifs qui avaient été interdits par le régime nazi.
39:06On leur avait fait venir des instruments de musique de Paris.
39:12Certains d'entre eux ont écrit des morceaux de musique.
39:17Et ça, je trouvais que c'était extraordinaire.
39:20Il y avait également une scène pour les concerts et les représentations de pièces de théâtre.
39:27L'apprentissage de la liberté passait donc par la culture, mais aussi par l'application des lois démocratiques
39:33à travers un tribunal organisé et géré par les jeunes prisonniers.
39:38Ce tribunal était composé de 12 jeunes juges, d'un président âgé de 17 ans
39:43et d'un avocat de la défense pour chaque accusé ayant outrepassé les règles du camp.
39:49Tous les rapports de la Croix-Rouge font état d'une discipline exemplaire dans la cage des enfants.
39:55Il y avait un programme philosophique assez ambitieux, avec des ouvrages de Platon par exemple.
40:01Et donc pour des jeunes qui avaient une quinzaine d'années et qui avaient été déscolarisés,
40:06peut-être ne mesurait-on pas justement le décalage, les dégâts que la guerre avait pu faire.
40:11Mais finalement, ce qui était important, c'est que chacun puisse trouver une voie.
40:16Ce qui m'a impressionnée aussi, c'est leur confirmation.
40:19Ils étaient donc encadrés, ça vous le savez, par des théologiens.
40:24Et j'ai appris que l'évêque de Beauvais, Mgr Réédard, était venu un 15 août pour la confirmation de ces jeunes.
40:40Et ça, c'était aussi vraiment extraordinaire.
40:44J'ai eu la chance de voir les deux côtés.
40:47Les deux côtés, premièrement donc, le côté normal des représentants dans le Baby Cave.
40:58J'en faisais partie, mais en dehors de ça, j'ai pu profiter aussi d'une situation spéciale au milieu du Baby Cave.
41:13Mais alors donc, des gens comme toi qui ont profité de la situation spéciale de ton âge, il y en avait combien dans la tente ?
41:20Il n'y avait qu'une seule personne, c'était moi.
41:23Il n'y avait que toi dans cette tente ?
41:26Moi, j'ai été le seul Baby dans la tente.
41:29Ah oui.
41:30Oui, qu'on l'ait mis, lui, le seul jeune dans cette tente des pasteurs, lui-même fils de pasteur, ça me paraît assez probable.
41:44Parce que les membres de l'église confessante, qui étaient évidemment secrètes, mais se connaissaient entre eux.
41:52Et donc, je suppose qu'avec son nom de famille, on a su tout de suite que c'était un fils de pasteur.
42:01J'ai retrouvé des photos.
42:05Des articles ?
42:06Oui.
42:08Des camps ?
42:10Oui.
42:11Des camps, oui.
42:14Tu veux les voir ?
42:15Oui.
42:16Ça, c'était un article d'un journal américain de Life Magazine.
42:24Achteliebe Goethe.
42:25Achteliebe Goethe.
42:26Achteliebe Goethe.
42:27Achteliebe Goethe.
42:32Tu reconnais ?
42:33Ah, tu reconnais ?
42:42C'est formidable.
42:44C'est ça ? Qu'est-ce que c'est ? Que ça ?
42:46C'était des caisses de nourriture.
42:48Achteliebe Goethe.
42:50C'est ça, c'est ça.
43:20C'est terrible.
43:50Il y avait des questionnaires remis aux Allemands, jeunes ou vieux, qui rentraient au pays.
44:06Et on les interrogeait par exemple avec des questions comme « Hitler méritait-il d'être pendu en place publique ? »
44:16Eh bien, on avait quand même parmi ces jeunes plus de 20% qui disaient non.
44:20Hitler a été un grand idéaliste.
44:25Donc, il y a eu 2254, oui, et 4024, non.
44:34Quand on mettait sous les yeux de ces jeunes des films, dans le programme, il y avait quelques films de libération, de camp de concentration, des images horribles.
44:45On aurait pu penser que tous auraient abandonné leur endoctrinement.
44:50Eh bien non.
44:51La plupart, quand on leur demandait « Trouvez-vous normal qu'un Allemand épouse une Juive ? »
44:57La plupart répondaient oui.
44:58Mais ils étaient plus d'un tiers à dire que ça les dérangeait quand même.
45:02« Si l'Allemagne avait gagné la guerre, nous serions en ce moment en train d'acclamer le Führer. Réponse. 3138, oui. 2414, non. »
45:18Ça, c'était des réponses. C'était des réponses de quelques-uns de ces jeunes.
45:26Voilà, c'est ça.
45:27C'est ça.
45:28Alors ça, il paraît qu'il y avait quelques-uns qui ont dit « We hate Hitler ».
45:39« We hate Hitler ».
45:43Donc ce programme de rééducation qui a duré quelques mois, il est très difficile d'en faire une évaluation.
45:51Peut-être a-t-il été surtout mené aussi à des fins de propagande.
45:54Nous étions déjà dans les prémices de la guerre froide.
46:00L'objectif était certainement de montrer les bienfaits de la démocratie à ces jeunes pour éviter qu'ils ne tombent dans le communisme,
46:09alors que justement les relations avec l'ancien allié devenaient exécrables.
46:14À la fin de l'été, qui avait été très chaud, il y eut une tempête qui inonda le camp et il a paru évident que les cours ne pourraient pas se poursuivre en hiver, ni même en automne.
46:27Face à la nervosité grandissante des garçons, et afin d'accélérer le processus d'un éventuel retour au pays,
46:35plusieurs assemblées furent organisées entre les responsables allemands des Baby Cage et le commandement du camp,
46:41où il fut finalement décidé que tous les jeunes prisonniers devaient rentrer chez eux.
46:45Début septembre, une trompette sonna le moment tant attendu du retour au pays,
46:57et des cris de joie résonnaient dans tout le camp.
47:04À propos de l'expérience de rééducation des Baby Cage,
47:08Robert Levinson, médecin de l'armée américaine, écrit une lettre à un ami.
47:15Nous sommes parvenus à remporter les batailles qui nous ont fait gagner la guerre,
47:19or je ne suis pas aussi optimiste quant à l'enjeu de gagner la paix.
47:23Aujourd'hui, en tant qu'inspecteur médical, j'ai accompagné à leur train le premier groupe de prisonniers de guerre allemands,
47:30des jeunes âgés de 12 à 17 ans, pour leur rapatriement en Allemagne.
47:35Mon sentiment, dans ces derniers moments passés avec eux, est celui d'un échec.
47:39Le peu qui a été accompli est grâce à l'initiative individuelle de deux ou trois officiers de l'armée américaine qui gèrent le camp d'Attichie.
47:50Ces jeunes Allemands ont bien assimilé le catéchisme nazi.
47:55La notion et l'application de la démocratie demandent bien trop d'efforts à des esprits si profondément engourdis.
48:02Cette histoire d'Attichie d'un côté et de l'autre, et surtout l'histoire des baby cages, il faut la raconter parce que c'est une histoire d'humanité, d'amour.
48:20Il n'y a plus de personnes encore vivantes qui pourraient relater tous ces faits du moment.
48:26C'est mon père.
48:27Ou votre papa, oui.
48:28Le seul qu'on ait trouvé.
48:29Je suis même ébahi qu'un monsieur de 16 ans était prisonnier là-haut, j'imaginais pas.
48:39Le baby cages des Américains a été une œuvre de l'humanité et de l'amour du prochain réalisé vis-à-vis de la jeunesse allemande.
48:52À la différence de ce que la jeunesse allemande a connu avant, c'était la prédication de la haine.
49:02De la haine.
49:03Haine pour tout le monde, sauf pour les nazis eux-mêmes.
49:11Mon père, qui avait eu la chance d'habiter Marbeau, l'une des rares villes allemandes épargnées par les bombardements alliés, retrouva donc sa famille à son retour.
49:21Après avoir repris ses études au sein des baby cages, il décida d'apprendre le français et se maria quelques années plus tard avec une Française.
49:33Vous savez ce que mes parents ont fait quand ils se sont mariés ?
49:37Non.
49:38Notre voyage de noces a été à Verdun.
49:46Ça voulait dire quelque chose.
49:51Oui.
49:51À Verdun, là donc alors au Fort-Dourmont.
49:59Waouh.
50:02Waouh.
50:03Voyage de noces à Verdun.
50:09Oui, je trouve ça très... Je suis bouche-pée.
50:12Et puis, on s'y est installé pour se dire, plus jamais ça.
50:22Vive la paix.
50:24Vive la paix.
50:25Si l'expérience des baby cages n'a peut-être pas obtenu les résultats escomptés de par sa nature improvisée et éphémère,
50:33elle aura malgré tout permis à ses 10 000 enfants soldats d'oublier pendant quelques mois les horreurs de la guerre
50:39et d'entrevoir par la fenêtre de l'éducation la perspective d'une autre voie possible.
50:45Par le prisme des universités, Winfried Börsch fera partie des premiers artisans des jumelages entre les villes françaises et allemandes.
50:54On a été tenus par les Américains vraiment d'une façon presque humaine.
51:03Une fois par semaine, on a pu quitter la présence des barbelés.
51:11Finalement, je me suis dit, j'aimerais bien connaître au moins la langue de ce pays qui nous a donné à plusieurs moments l'expérience de la liberté.
51:41Sous-titrage Société Radio-Canada
52:11...

Recommandations