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Lundi 14 avril 2025, retrouvez Hervé Le Jouan (Fondateur, Advisory), Diane Rambaldini (codirigeante et fondatrice, Lumérique), Patrice Brudieu (expert du spatial français et européen) et Sylvain Bataillard (cofondateur et directeur de la stratégie, HyPrSpace) dans SMART TECH, une émission présentée par Delphine Sabattier.

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Transcription
00:00Générique
00:00Bonjour à tous, dépendance aux technologies américaines, peut-on en sortir ?
00:12On continue dans notre série avec un troisième épisode aujourd'hui, on va s'intéresser au domaine du spatial avec deux invités exceptionnels, vous verrez c'est à la une de Smartech.
00:21Et on aura également un point de vue sur le sujet de la privacy avec cette question de la confiance au cœur de la cybersécurité.
00:29Mais d'abord on va s'intéresser à un nouveau mouvement pour justement sensibiliser à l'éducation au cyber, c'est tout de suite trois questions à dans Smartech.
00:41Bonjour à tous, je suis en compagnie de Diane Rambaldini, bonjour.
00:45Bonjour.
00:46Vous êtes la présidente de Crossing Skills et vous lancez cette année l'Umérique, c'est un mouvement citoyen qui est porté par votre association ISSA France Security Tuesday.
00:54Vous dites que vous voulez faire bouger les lignes de l'éducation cyber des enfants et des parents, c'est-à-dire en fait, quel est le problème actuellement ?
01:02Je vais commencer par une petite question.
01:04Ah, c'est vous qui avez posé des questions ?
01:05Exactement, on va renverser la tendance.
01:09Est-ce que déjà il vous est arrivé de vouloir regarder une info sur votre téléphone portable pour deux secondes et 20 minutes plus tard d'y être toujours et de ne même plus vous rappeler forcément ce que vous vouliez faire au début ?
01:20Si on pose la question à tout le monde, je pense qu'il y a une forte probabilité que tout le monde dise oui, ça m'est arrivé.
01:25Exactement.
01:26Ben voilà, en gros c'est ça, l'Umérique, et c'est ça qu'on fait depuis très longtemps au sein de l'ISA France.
01:32C'est-à-dire ?
01:32C'est une association effectivement qui oeuvre à la sensibilisation des enfants sur un volet de protection en ligne, de sécurité numérique.
01:41En gros, on leur donne des clés de compréhension et de réflexion sur le monde numérique, sur ce qu'ils utilisent en tant beaucoup que consommateurs.
01:54Et je dois dire que...
01:55Vous voulez dire que la cybersécurité, en fait, ce n'est pas juste la protection des systèmes d'information, c'est aussi apprendre à se servir du numérique, à éviter les pièges, c'est ça ?
02:04Exactement. Alors c'est un vrai débat, c'est vrai que la cybersécurité telle qu'on l'imagine, c'est beaucoup effectivement la tech, l'innovation, les solutions de cybersécurité.
02:13Mais aujourd'hui, nous on prône effectivement ce volet de protection et de protection du citoyen.
02:18C'est bien pour ça aussi que sont nés, par exemple, le cybermalveillance.gouv.fr, c'est aussi pour s'occuper de la cybersécurité des citoyens.
02:28Et nous, très tôt, ça fait maintenant 10 ans qu'on s'occupe des jeunes.
02:31Et je dois dire que la jeunesse de la chose, c'est qu'avec mon associé, donc Adi Elkouri, quand on a lancé l'association et quand on a commencé à s'intéresser aux jeunes,
02:43eh bien nous, vaillants, on est allés dans les établissements scolaires en parlant de cybersécurité, très fiers.
02:49Et puis on a vu que ça rentrait par là, ça sortait par là, qu'il n'y avait pas d'écoute et on a essayé de comprendre pourquoi on passait complètement à côté.
02:58Et c'est là qu'on s'est rendu compte, eh bien, que finalement, il y avait un gros manque.
03:04Et ce manque, c'était une culture numérique.
03:07Tout bêtement, je vais vous donner un exemple qui nous avait beaucoup surpris à l'époque.
03:12Quand on demandait aux enfants, par exemple, tes réseaux sociaux, qui est derrière ?
03:18Alors les enfants, c'est-à-dire quel âge ?
03:19Alors de 7, même jusqu'au lycée, donc nous, on fait école primaire, collège et lycée.
03:26Et ils étaient incapables forcément de répondre.
03:29Ils disaient, c'est quelqu'un de sympa qui a créé les réseaux sociaux.
03:32Ou bien c'est avec nos impôts qu'on paye les réseaux sociaux.
03:35Et là, on s'est dit, comment voulez-vous qu'ils se rendent compte des dangers et des risques numériques
03:39si déjà, ils n'ont pas cette culture, cette couche de culture numérique ?
03:44Donc c'est effectivement ce qu'on fait.
03:47Et grâce à ça, ça permet de beaucoup mieux appréhender après les discours de protection et de sécurité numérique.
03:53Comment vous comptez vous y prendre ?
03:54Parce que là, vous m'avez apporté quelques exemples de petites bouclettes que vous avez distribuées, j'imagine, dans les écoles.
04:01Oui, tout à fait.
04:02Donc nous, on a deux pôles.
04:04Dans le pôle éducation, on fait effectivement des ressources pédagogiques.
04:07Et les As du Web sont notre première production qui remonte à 2018.
04:13C'est notre best-seller puisqu'on a eu 2 millions d'exemplaires de distribués à ce jour.
04:18Et donc on a fait un manga, effectivement, Snake News, qui allie vraiment des sujets sur la désinformation et aussi l'hygiène numérique.
04:28Les As du Web, c'était vraiment pour les petits de 7 à 11 ans leur faire découvrir ce monde-là.
04:32Donc toujours en veillant à utiliser un langage qui va être compréhensible de ce public-là.
04:40Et puis le dernier, Envie de cyber, qui est un livre beaucoup plus conséquent, qui est pour finalement les plus de 15 ans,
04:47où on retrouve effectivement un tas de...
04:49Ah oui, je l'ai déjà vu celui-ci.
04:50Voilà, un tas de sujets sur la protection, sur comment réagir.
04:54Avec Sudirama, c'est ça ?
04:55Oui, exactement.
04:57J'en ai entendu parler.
04:58Alors là, quels sont vos objectifs très concrètement ?
05:01Alors, à côté effectivement de ces ressources pédagogiques, nous, notre besoin, c'est d'aller voir, d'aller rencontrer ce public de jeunes.
05:11Donc depuis maintenant 6-7 ans, on fait des ateliers en établissement scolaire notamment.
05:16Et en gros, pour faire des ressources pédagogiques qui marchent, il faut déjà comprendre son public.
05:24Et ça, c'est vraiment notre force, c'est d'aller discuter avec ces jeunes-là.
05:29Et donc aujourd'hui, on a mis en place un atelier totalement éprouvé sur la base de visuels qui marchent extrêmement bien, sans écran.
05:36Et on les fait réagir.
05:40On cherche à délier les langues.
05:42Et je dois dire que ça marche extrêmement bien.
05:44Donc on a là un objectif, puisque pourquoi on s'appelle Lumérique aujourd'hui ?
05:48Parce qu'on lance effectivement ce mouvement.
05:51On veut un passage à l'échelle.
05:54On veut cette bascule collective chez les citoyens.
05:58C'est-à-dire qu'une majorité de parents aujourd'hui soient conscients de tous ces risques.
06:02Donc pareil pour l'école, qui déjà est quand même très attentive à ces sujets.
06:09Merci beaucoup Diane Rambaldini d'avoir été avec nous.
06:11Et donc de faire la lumière sur ce numérique avec Lumérique.
06:16C'est l'heure de notre débat.
06:17On va parler d'autonomie technologique dans le spatial.
06:25Dépendance aux technologies américaines, peut-on en sortir ?
06:27Troisième épisode aujourd'hui.
06:29On s'intéresse au secteur du spatial avec deux personnalités.
06:33Patrice Brudieu est à distance avec nous.
06:35Merci beaucoup d'être connecté.
06:36Bonjour.
06:37Bonjour.
06:38Vous êtes ingénieur, ancien élève de l'école polytechnique, docteur en astrophysique.
06:42Et puis 43 ans de carrière au service du spatial français et européen.
06:48Vous avez travaillé à des postes de direction au CNES, à l'ESA, également au sein de la DGA.
06:53Entre 2015 et 2020, vous avez été directeur du département en charge de la politique spatiale au ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
07:02On va discuter ensemble de ce secteur que vous connaissez bien et de son évolution.
07:06Avec vous pour ce débat, Sylvain Bataillard est en plateau.
07:08Bonjour Sylvain.
07:09Bonjour.
07:09Merci beaucoup, ingénieur aérospatial de formation.
07:13Vous débutez votre carrière dans les systèmes complexes pour les secteurs de la défense, de l'aéronautique et du spatial au sein du CEA, d'ATR puis d'Ariane Group.
07:22Aujourd'hui, vous êtes le cofondateur et le directeur de la stratégie Diaperspace.
07:26C'est une société qui développe un micro lanceur capable d'amener en orbite 250 kg de charges utiles.
07:33C'est bien ça ?
07:34Tout à fait, c'est bien ça.
07:34Une innovation d'ailleurs qui a été expertisée par l'ADGA, la Direction Générale de l'Armement et l'ONERA.
07:41Et vous êtes soutenu financièrement par le CNES, l'Agence Spatiale Française, l'Agence Spatiale Européenne, l'ADGA et la Région Nouvelle-Aquitaine.
07:49Voilà, j'ai promis des personnalités de haut vol dans ce débat.
07:53Vous pouvez constater que c'est le cas.
07:55Alors déjà, première question, quelle est la situation du spatial aujourd'hui en Europe selon vous ?
08:00Dans le rapport Draghi, on insiste sur la perte de compétitivité de l'industrie spatiale européenne.
08:07Dans le rapport l'État, sur le marché commun, on conclut un manque d'investissement privé dans le spatial.
08:13Alors est-ce que le spatial va si mal, Patrice ?
08:16Bonjour tout le monde. Écoutez, oui et non. Le spatial français et le spatial européen, aujourd'hui, sont moins compétitifs sans doute.
08:30Il faut rappeler quand même que depuis le départ, il y a un facteur à peu près 6 de budget entre le budget américain spatial et le budget européen.
08:39En un plan d'investissement ?
08:42En budget institutionnel, disons.
08:44Les finances publiques données dans ce secteur.
08:48Avec un facteur 6, je trouve qu'on se débrouille très bien.
08:50Grâce en partie à la France, grâce maintenant à la Commission, qui est un nouvel acteur du spatial, un acteur important aux côtés de l'Agence spatiale européenne,
09:01on a quand même maintenu une certaine autonomie, même une réelle autonomie européenne.
09:06Moi, je peux donner quelques exemples.
09:08Les lanceurs. Alors aujourd'hui, on n'a que des gros lanceurs.
09:11Ariane 1, jusqu'à Ariane 6, Vega, qui est un lanceur moyen.
09:15On manque de lanceurs flexibles, on manque de petits lanceurs grâce à Iberspace et peut-être d'autres.
09:22On aura bientôt, j'espère, et je les félicite sûrement, des petits lanceurs très réactifs.
09:30Aujourd'hui, on est quand même dans les satellites également.
09:33On a ou on a eu, on a encore aujourd'hui, deux des quatre leaders mondiaux en satellite, avec Airbus et Thales Aleniaspès,
09:40qui ont quand même des difficultés de compétitivité face aux Chinois, face aux Américains,
09:46qui sont très subventionnés.
09:48Mais on y arrive.
09:49Aujourd'hui, on est un petit peu, je dirais, obnubilé par les capacités assez extraordinaires,
09:55il faut reconnaître, de SpaceX avec ses lanceurs réutilisables,
09:59un lanceur qui vont, qui reviennent.
10:01Bon, c'est spectaculaire.
10:02Avec la constellation Starlink, avec ses 8000 satellites et bientôt 32 000,
10:08ce qui est une folie, je pense, en termes de débris spatiaux.
10:13En Europe, on a quand même ce qu'il faut.
10:15En constellation, on a Wenweb, aujourd'hui, avec 650 satellites,
10:19qui fait à peu près la même fonction que Starlink, en moins réactif pour Internet,
10:23mais qui fait l'essentiel.
10:27On a, je répète, les lanceurs.
10:28Et cette autonomie est essentielle, et il faut la maintenir.
10:33Je peux redonner juste trois exemples, puis après, je vous rends la parole.
10:37C'était en 74, ça a commencé à dater un petit peu, moi, j'étais encore à l'école,
10:43mais en 74, la France et l'Allemagne ont voulu lancer, pardon, pas Symphonie,
10:48oui, Symphonie, c'est ça, le premier satellite de télécom européen.
10:53C'était un petit machin de 300 kilos, satellite géostationnaire.
10:57On a développé ça avec les Allemands, et le lanceur Europa ne marchait pas,
11:01et on n'est pas Ariane encore.
11:03Donc on a demandé aux Américains de le lancer avec un Thor Delta,
11:06et ils ont dit, écoutez, pas de problème, on vous le lance,
11:08mais alors vous signez en bas le petit astérisque,
11:12interdiction de l'utiliser à des fins commerciales, seulement pour faire de la science.
11:18Comme d'habitude, ça a été, je dirais, la goutte d'eau qui a permis de lancer Ariane,
11:24mais les Américains nous ont aidés une fois de plus, un coup de pied au derrière, si je puis dire.
11:28On s'est rendu compte qu'il ne fallait pas être dépendants,
11:31et c'est ça qui a permis à la France de pousser les Européens à lancer,
11:36à développer le lanceur Ariane pour être vraiment autonome.
11:39Un autre exemple, c'est la guerre en Irak, en 2003, lancée par Georges de Belloumbouche.
11:44Vous vous rappelez peut-être de cette altercation entre Dominique de Villepin,
11:50et puis les Américains à l'ONU.
11:51Ce grand discours de Villepin, oui.
11:53Voilà, et la France n'a pas voulu y aller, et on s'est appuyé sur ça,
11:58et on l'a dit aux Américains, sur nos propres images satellites.
12:02Les Américains prétendaient, avec leurs images satellites,
12:06que Saddam Hussein avait des armes de destruction massive.
12:09Les Anglais, qui n'avaient pas les moyens de vérifier,
12:11se doutaient qu'ils avaient un glisseau roche, mais ont été obligés d'y aller.
12:14Ça leur a coûté quand même 200 morts, quelques dizaines de milliards de livres,
12:18et la chute du gouvernement.
12:20Nous, on avait nos images grâce à Spot.
12:23On a montré que les images américaines étaient truquées.
12:26Là aussi, l'autonomie, l'indépendance d'analyse pour la défense étaient essentielles.
12:32Et puis un dernier exemple que j'ai vécu personnellement,
12:35quand j'étais dans mes fonctions, c'était Galiléo.
12:38Galiléo qui était le concurrent, enfin concurrent ou un supplément au GPS,
12:41qui est l'équivalent du GPS américain.
12:44Galiléo, c'est européen.
12:45Les gens ne savent pas que quand ils prennent leur téléphone portable,
12:48ils ont tous le su, Galiléo et GPS.
12:52Et que la précision de Galiléo est meilleure, et surtout que c'est indépendant.
12:55Imaginez aujourd'hui que nous soyons totalement dépendants du GPS américain,
12:59qui est piloté par la défense américaine,
13:01et donc piloté quelque part par M. Trump,
13:05qui peut décider du jour au lendemain d'arrêter le GPS au-dessus de l'Europe.
13:09Et là, l'économie s'effondre totalement.
13:11Tout dépend du GPS.
13:13Cette autonomie, Patrice, vous nous dites, elle est absolument stratégique.
13:17On en a pris conscience fort heureusement il y a longtemps.
13:20En tout cas, la France a mené ce combat-là depuis de nombreuses années.
13:25Vous nous dites aussi que finalement, on a les technologies,
13:28qu'on a peu de dépendance.
13:30Mais enfin, vous pointez quand même du doigt
13:32notre capacité d'investissement qui ne sont pas du tout les mêmes
13:35que celles des Américains.
13:38Et puis, il y a cette capacité d'investissement public,
13:41mais il y a aussi ce new space que vous représentez aujourd'hui
13:44sur le plateau de Smartech, Sylvain.
13:47Est-ce qu'aujourd'hui, à travers ces initiatives privées,
13:50cette ouverture du spatial finalement au monde des start-up,
13:54est-ce que ça permet de rattraper ce déficit d'investissement ?
14:00Oui, je pense que ça permet en tout cas d'aller dans le bon sens.
14:05Puisque l'initiative France 2030, qui permet justement de financer
14:08les start-up du spatial, le new space en général,
14:11via le CNES, avec l'aide de la DGA et puis plein d'autres institutions,
14:15ça permet en fait de favoriser l'émergence de nouvelles technologies.
14:22Puisque une start-up, elle est là pour développer une nouvelle technologie,
14:25une brique technologique vraiment innovante, une innovation de rupture,
14:28ce qui permet de tester des nouvelles choses.
14:31Et puisque les start-up sont là en fait, on a une structure qui soit
14:34en fait la prise de risque, c'est ça ?
14:36C'est exactement ça. Elles sont là pour prendre des risques
14:37et pour aller vraiment à 100% dans une innovation technologique.
14:41Ça marche ou ça marche pas, en tout cas on y est allé.
14:43Et toutes les start-up font ça sur un très large spectre d'innovation.
14:46Et donc ça permet de favoriser l'émergence de technologies diverses
14:51et ensuite de choisir celles qui ont fonctionné
14:53pour les intégrer à l'industrie spatiale, entre guillemets, classique.
14:56Et pourquoi est-ce qu'on doit passer par les start-up pour ça,
14:59pour cette prise de risque ? C'est culturel ?
15:01Oui, je pense que c'est culturel.
15:02Pour un grand groupe, une entreprise établie,
15:05c'est difficile de tout miser sur une technologie.
15:08Parce qu'il y a des contrats, ça représente des milliers d'emplois,
15:10donc on ne peut pas se permettre de prendre autant de risques.
15:12Et ce qui est normal, j'ai envie de dire, même fort heureusement.
15:16Tandis qu'une start-up, elle est là même.
15:18Enfin, une start-up qui ne prend pas de risques technologiques,
15:21elle n'a aucune raison d'exister, selon moi.
15:23Donc, en fait, l'aversion au risque n'est pas la même.
15:29Mais ça quand même sous-entend qu'il faut être capable de soutenir ce risque.
15:33Parce qu'on ne peut pas monter des entreprises, s'effondrer
15:36et reprendre son chemin vaillant.
15:40Non, il faut aussi pouvoir être soutenu financièrement.
15:43Il faut que, justement, les institutionnels comprennent
15:46que ce risque est nécessaire.
15:48Est-ce que c'est le cas aujourd'hui ?
15:49Est-ce que vous êtes suffisamment soutenu ?
15:51Je pense que le soutien qu'on a via l'État, via le gouvernement,
15:56sincèrement, je ne vais pas me plaindre.
15:58J'estime qu'il est quand même assez fort, assez conséquent, assez suivi aussi.
16:03Après, il y a les finances publiques.
16:06J'ai cité effectivement tous ceux qui vous soutenaient.
16:07Oui, voilà.
16:08Après, il y a l'État des finances publiques, qu'on les connaît.
16:11Donc, ce qu'il faut aussi, c'est s'appuyer sur les investissements privés,
16:15que ce soit les fonds d'investissement ou les plus grandes entreprises.
16:17Et là, il y a aussi, je pense, une éducation de certains investisseurs privés à faire
16:21pour qui le spatial, c'est un petit peu inconnu, ça fait peur.
16:26Alors qu'il faut aussi pouvoir s'appuyer sur deux jambes, les institutions et le financement privé.
16:31Et en termes de technologie, donc Patrice nous disait, on a les bonnes technologies.
16:34Est-ce qu'on a les innovations demain ?
16:36Je pense.
16:39Je pense qu'on a parmi toutes les innovations...
16:40Est-ce qu'on est là ou d'autres ne sont pas, déjà, dans le spatial ?
16:44Est-ce qu'on peut se dire ?
16:45Oui, on peut dire qu'on a un coup d'avance.
16:49Un coup d'avance sur les technologies, je pense, puisqu'on peut...
16:52En fait, on se permet un petit peu tout type d'innovation dans tous les domaines.
16:57Après, la question, c'est est-ce que chacune de ces innovations aura le financement qu'il faut
17:02pour la faire suivre, la faire éclore, émerger pleinement et pouvoir transformer ça
17:06en vraiment en industrie, en réindustrialisation, en vraiment quelque chose d'utilisable ?
17:10Pour ça, il faut, Patrice, avoir aussi des grands programmes, des programmes souverains
17:14au niveau de l'Europe.
17:15On en est où de la politique du spatial et de ces programmes ?
17:18Je vais vous répondre.
17:19Juste avant, je voudrais insister sur ce que disait Sylvain, qui est très important
17:23et que je partage totalement, c'est la culture, la culture du risque.
17:27C'est vrai qu'en France, on a des individus, des gens, des petites boîtes,
17:32qui font le new space, qui arrivent, qui y vont, donc l'esprit y est.
17:37Mais les grandes institutions, les politiques ont quand même une certaine appréhension au risque.
17:43On le voit dans les lanceurs.
17:45Elon Musk, qui est un type avec qui je ne partirai pas en vacances très volontiers,
17:50mais à part ça, Elon Musk est un visionnaire.
17:54Quand il a créé SpaceX, il a commencé à lancer, il a été très aidé par la NASA quand même,
17:58il a lancé ses Falcon 9 en disant, écoutez, si ça explose dans plus de 30 secondes,
18:05on n'aura souhaité pas de tir, c'est génial, on aura beaucoup appris.
18:08Ça démarre, ça explose au bout de deux minutes, il est très content, tout le monde applaudit,
18:12et il relance 15 jours après.
18:14Chez nous, quand on lance Ariane 5, par exemple, 500, elle explose,
18:18parce que ça arrive, les premiers lancements.
18:20On a mis deux ans à relancer, et on a dépensé des milliards,
18:24et tout le monde avait peur de serrer les fesses, il y a eu des infarctus, etc.,
18:28parce qu'on n'a pas cette culture du risque, on dit que c'est l'échec.
18:32L'échec, c'est une catastrophe chez nous.
18:33Aux USA, la culture américaine, et ça commence dès l'école, dès l'école,
18:38la culture américaine, c'est qu'il y a un échec, on n'a plus.
18:42En France, en Europe, il y a un échec, c'est une catastrophe, il faut punir des gens.
18:45Pourtant, le spatial, je dirais, c'est le secteur peut-être dans lequel
18:49il faut avoir le plus le goût du risque, quand même,
18:52pour oser s'aventurer dans l'espace, Patrice.
18:54Ça, ça commence à l'école, et là, on pourrait en faire tout un sujet,
18:57vous pourriez en faire une émission, l'éducation à l'école,
19:00dès la maternelle, dès le primaire, si vous échouez, vous êtes mauvais.
19:04Au lieu de dire, aux USA, à l'école, on leur apprend,
19:07ma fille a fait des études aux USA, vous n'êtes jamais en échec,
19:11vous avez toujours appris quelque chose.
19:12C'est une question de Claudie Hénuré, qui incitait justement la jeunesse
19:16à retrouver ce goût du risque pour s'engager dans le spatial.
19:20Mais alors, je voudrais qu'on revienne, parce qu'on n'a plus que trois minutes,
19:22déjà, sur le débat, qu'on revienne quand même sur la politique spatiale européenne
19:27et ses grands programmes. On en est où ?
19:30Les grands programmes, ils sont portés par deux institutions,
19:33l'Agence spatiale européenne, pour tout ce qui est scientifique,
19:35et pour les lanceurs, et puis maintenant, la Commission européenne,
19:38depuis quelques années, et la Commission a lancé des grands programmes.
19:41Elle a lancé Galiléo, elle a lancé Copernicus,
19:44qui sont ces sentinelles de la Terre extraordinaire que le monde entier utilise gratuitement.
19:48Et puis maintenant, Iris Square, donc Iris au carré,
19:52qui est un ensemble de constellations, en s'appuyant sur OneWeb et autres,
19:57pour avoir une autonomie en télécommunication et Internet au niveau européen.
20:02Et grâce à la Commission, qui met quand même des milliards et des milliards là-dedans,
20:06on tient ces grands programmes, qui vont ensuite irriguer les entreprises,
20:13les institutions et la technologie.
20:16Et par ailleurs, la Commission a aussi, ainsi que la France, avec France 2030,
20:20des fonds pour, justement, pour les entreprises, pour le New Space,
20:23pour aider à démarrer ces projets en vision.
20:25Alors rapidement, je voudrais une réaction de votre côté.
20:27Sylvain, qu'est-ce que vous pensez aujourd'hui de la politique spatiale européenne ?
20:30Je pense que, en tout cas, moi, ce qui me rassure, c'est de voir qu'elle est en pleine refonte.
20:37Tout le monde en Europe a compris qu'il fallait changer quelque chose,
20:40qu'il y avait un fort décrochage vis-à-vis des États-Unis
20:43et qu'on était trop dépendant un petit peu de leur technologie.
20:46Quand on voit, maintenant, tout le monde utilise, dans le monde entier,
20:49tout le monde utilise Starlink.
20:50Bon, maintenant, il faudrait aussi avoir ça en Europe.
20:52Donc avec Iris Square, justement, c'est quelque chose qui se développe.
20:56Mais en tout cas, moi, je suis assez optimiste sur le fait que,
20:58bon, tout le monde se réveille et se dit, bon, en fait, il faudrait qu'on soit autonome,
21:02il faut qu'on soit ensemble et qu'on fasse quelque chose de nouveau.
21:05Et voilà, il y a la politique spatiale française qui est en train,
21:08et qui va, il y a une refonte complète, qui va être publiée en juin, je crois,
21:11qui prend aussi en compte l'aspect défense,
21:13puisque le spatial et la défense, c'est deux domaines qui sont très, très proches.
21:17Et on a autant besoin d'autonomie dans le spatial civil,
21:19mais aussi dans tout ce qui est défense.
21:21Et donc, pour moi, c'est primordial.
21:22– Très bien, merci beaucoup à tous les deux.
21:24Patrice Brudieux, donc, expert du spatial français et européen,
21:28merci encore d'avoir été avec nous sur ce débat.
21:31Et Sylvain Bataillard, cofondateur, directeur de la stratégie Diaperspace.
21:35Voilà, on a compris qu'on avait des armes, on a une politique,
21:38donc on va être optimiste sur ce sujet du secteur spatial
21:41et de son autonomie technologique.
21:44Merci encore.
21:45Juste après, on parle de cybersécurité et de la confiance au cœur de ce sujet.
21:49On termine cette édition avec Hervé Lejouan, advisor.
21:59Bonjour Hervé.
22:00– Bonjour Delphine.
22:01– Vous êtes donc de retour du forum InCyber 2025 qui s'est tenu à Lille.
22:05Le thème cette année, c'était le zéro trust et la confiance.
22:09– Tout à fait.
22:11La confiance a été un thème majeur, en fait, de cette conférence.
22:14Et quelle coïncidence, en fait.
22:15Ce thème a été choisi il y a plusieurs mois
22:17et c'est avéré étant plein dans l'actualité.
22:20Et pour cause, le forum, il s'est déroulé, en fait,
22:22au beau milieu d'un bras de fer engagé par le président des États-Unis
22:26avec une bonne partie du monde.
22:28Et même si, effectivement, il y a ce revirement d'hier sur les tarifs douaniers
22:31qui va probablement calmer la situation,
22:34il n'en demeure pas moins que cette période doit rester comme un marqueur
22:37de notre dépendance très forte à leurs sociétés et solutions technologiques,
22:41comme les GAFAM et autres géants de la tech américaine,
22:44et incluant, bien entendu, dans le domaine de la sécurité,
22:46des acteurs comme Palo Alto Networks ou Fortinet, pour ne citer qu'eux.
22:50Alors oui, nous parlons de souveraineté depuis plus de 15 ans,
22:55surtout dans le numérique, car nous avons conscience de cette dépendance depuis longtemps.
22:59Mais comme un participant, c'était intéressant, du salon me l'a dit,
23:02institutionnel en plus,
23:04nous vivions dans un confort certain
23:06avec des solutions américaines qui répondent à nos besoins,
23:10confiants que rien ne pourrait altérer cette relation forte.
23:12Donc, il n'y avait pas de raison de dépasser le stade de parole.
23:16Maintenant, c'est fini.
23:17Donc, c'était vraiment très, très clair.
23:19Et donc, ces événements géopolitiques, finalement,
23:21et c'était un peu le sens,
23:23ce qui ressortait, on sonnait comme un réveil brutal,
23:26finit la confiance,
23:27et le doute vient de s'inscrire pour une période significative.
23:30Et la notion de souveraineté, dans ce cas-là, reprend tout son sens.
23:34Concrètement, aussi, il y avait des exemples.
23:35J'ai accompagné des sociétés, une délégation de sociétés irlandaises,
23:39lors de cette conférence,
23:41et je les ai présentées à des sociétés,
23:43à des intégrateurs,
23:44à des grandes associations dans le domaine de la cybersécurité.
23:48Et indépendamment de leurs solutions respectives,
23:51les questions étaient toujours les mêmes.
23:53Votre siège est-il en Europe ?
23:55Où sont vos données ?
23:57Et ça, c'était des points absolument clés dans les discussions.
24:00Et vous regardez ça, il y a six mois, c'était pas du tout ça.
24:04Il y a encore six mois, c'était pas du tout ce cas-là.
24:07Oui.
24:08Bon, le réveil.
24:09Peut-être un petit peu tardif, disons.
24:11Mais est-ce qu'il y a eu derrière cette prise de conscience,
24:13qu'il y a eu des propositions ?
24:16Alors, ce qui était intéressant,
24:17c'est qu'il y avait un nombre de délégations étrangères,
24:20à la fois européennes, africaines, asiatiques et nord-américaines,
24:24assez importantes,
24:24qui ont été représentées par de nombreux institutionnels,
24:27des ministres, des secrétaires d'État et autres.
24:30Et donc, finalement, tous, dans ce monde interconnecté et global,
24:36la cybersécurité, c'est un aspect critique
24:38qui est maintenant pris au niveau politique
24:40par certains pays au plus haut niveau.
24:43Donc, il y avait des représentants à très haut niveau
24:45qui étaient des ministres de la cybersécurité,
24:48comme en Malaisie ou au Québec.
24:50Et donc, en fait, ça, ça a été vraiment mentionné
24:53comme on doit obtenir une relation publique-privée très forte,
24:59renforcer et sensibiliser les populations,
25:03soulignées par de nombreuses délégations aussi,
25:05comme l'Estonie, le Québec ou la Malaisie.
25:08Et lors des interventions, d'ailleurs, c'était intéressant,
25:10des représentants européens,
25:12il y a plusieurs fois été mentionné
25:13qu'au regard de la nouvelle situation géopolitique,
25:15il le mentionnait,
25:16la collaboration pan-européenne devenait critique
25:19et devait se renforcer.
25:22C'est-à-dire qu'il fallait, par exemple,
25:23aider les start-up européennes à collaborer ensemble
25:26pour les faire grandir
25:28et peut-être même les faire s'intégrer ensemble
25:31et non plus les céder rapidement.
25:33C'était mentionné comme ça.
25:34Et non plus les céder rapidement, souvent aux Américains.
25:38Et aussi, la question de la localisation des données s'est posée
25:40tout en mentionnant que les sociétés gérant ces données,
25:43et c'était intéressant parce qu'on peut être local,
25:45mais être une société chinoise américaine,
25:47non, non, devait être également majoritairement détenue
25:50par des sociétés européennes.
25:52Donc là, on revient sur...
25:54Donc il y a des sujets qui sont...
25:56Et les institutions étaient là aussi,
25:57des grandes institutions européennes de la cybersécurité
26:00en disant qu'il fallait justement revenir à ça.
26:03Donc maintenant, finalement, il faut agir.
26:05Oubliez les querelles de chapelle intra-européennes
26:08parce qu'on a toujours eu...
26:09Qui ont fait le jeu, en finale,
26:11des deux grandes puissances que sont les États-Unis
26:13et la Chine d'un point de vue technologique.
26:15Et par contre, c'est clair,
26:18et c'était dit, mais un petit peu moins,
26:19mais c'était quand même dit,
26:20il ne faut pas négliger un point.
26:22Si on dispose d'un terreau d'innovation
26:24qui est probablement unique au monde,
26:26il faut finalement...
26:28Il faut du financement
26:29pour accompagner toutes ces innovations
26:31et pas uniquement au début.
26:33L'Europe, de ce point de vue,
26:34on a un gros retard
26:35et on a un chotier colossal devant nous.
26:38Et ce n'est pas uniquement une question d'argent,
26:39c'est aussi une question d'état d'esprit
26:41par rapport au risque.
26:43Les Américains, on l'a vu,
26:44et même les Chinois,
26:45ils prennent énormément de risques.
26:46Ils parient sur des choses
26:48qui ne sont pas forcément là tout de suite.
26:50Et donc, tout cela a été mentionné
26:51et reconnu durant plusieurs interventions.
26:53Donc, on voit bien quand même
26:53qu'il y a une volonté.
26:54Oui, on vient juste d'en parler,
26:56justement, de la question du risque
26:57dans notre talk sur le spatial
26:59et l'autonomie stratégique.
27:01Est-ce qu'il y a eu d'autres événements
27:02particuliers sur ce salon
27:04qui vous ont marqué ?
27:05Bien entendu.
27:06Et d'abord, le Grand Prix de la Start-up
27:08et là, entre guillemets, un cocorico,
27:09rempli de la Start-up 2025
27:11et est revenu à la société française
27:13Patrol.io,
27:15donc qui a été créée en 2020
27:16et spécialisée dans la gestion
27:18de la surface d'attaque externe.
27:20Et donc, encore une fois,
27:21espérons que cette société grandira
27:22et restera européenne
27:23pour de nombreuses années.
27:25Aussi, j'ai participé,
27:27comme ces dernières années,
27:28au Trust & Safety Forum,
27:30qui est un événement
27:31à l'intérieur du Forum in Cyber.
27:33Et celui-ci regroupe des entreprises,
27:35organisations et instances internationales
27:36impliquées dans la lutte
27:38contre toute forme de criminalité,
27:40de violence, de harcèlement,
27:41de fraude, de désinformation
27:42ou autre aspect sombre
27:44de l'Internet, malheureusement.
27:45Et avec l'avènement de l'IA,
27:46c'était un des sujets, justement,
27:49qui est apparu,
27:51de l'IA génératrice,
27:52nous sommes entrés, là,
27:53dans une nouvelle phase
27:54de cette lutte.
27:55Et dans ce domaine,
27:55la collaboration internationale
27:57entre les instances politiques,
27:58judiciaires, privées et organisations
28:00est encore une fois absolument critique.
28:03et tout cela,
28:05parce qu'on l'a bien vu récemment,
28:07sans mettre à mal
28:07les grands principes
28:08de protection de la vie privée
28:09et des citoyens,
28:10typiquement le chiffrement
28:11des informations.
28:12Et puis, il y a eu d'autres événements
28:13à côté, au sein du salon,
28:14il y a toujours d'autres événements
28:15autour de l'identité,
28:16la cybersécurité pour l'industrie,
28:18le Web3,
28:19l'OSINT,
28:20open source
28:21sur la partie sécurité,
28:23la conférence sur la réponse
28:24des incidents
28:25et investigations numériques
28:26en cas d'attaque,
28:27quand on se fait attaquer.
28:27Et puis, bien sûr,
28:29en toile de fond,
28:30toujours,
28:31cette nouvelle directive
28:32LIS2,
28:33très présente
28:33dans de nombreuses conférences
28:34et discussions
28:35compte tenu de ses implications
28:36dans tous les domaines.
28:37Et oui,
28:37à l'actualité
28:38de l'Assemblée nationale
28:39en ce moment même.
28:40Merci beaucoup,
28:41Hervé Lejean,
28:41d'avoir été avec nous.
28:42Merci de vos éclairages
28:43sur ce forum in cyber.
28:44C'était Smartech.
28:45Merci à tous
28:46de nous suivre
28:47avec fidélité
28:48sur la chaîne
28:48Be Smart for Change.
28:49A très bientôt
28:50pour une nouvelle discussion
28:51sur la tech.
28:51Sous-titrage Société Radio-Canada