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Jeudi 10 avril 2025, retrouvez Alain Garnier (Président fondateur, Jamespot), Henri d'Agrain (Délégué général, Cigref) et Éric Le Quellenec (Avocat spécialiste en numérique, Cabinet Flichy Grangé) dans SMART TECH, une émission présentée par Delphine Sabattier.

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Transcription
00:00Bonjour à tous, bienvenue dans la 800e de Smartech, 800e édition aujourd'hui consacrée au grand débrief de l'actu tech.
00:16Merci beaucoup, on regarde nos sujets et nos commentateurs que vous découvrez juste après.
00:21800e édition de Smartech pour un grand débrief aujourd'hui avec Henri Dagrin, délégué général du CIGREF, Henri Le Kellenek, avocat spécialiste en numérique au cabinet Flichy-Grand-G, bienvenue également.
00:41Et Alain Garnier, bonjour Alain, président fondateur de Jamespot, voilà la super team avec qui on va confronter nos points de vue sur les surtaxes douanières et les impacts dans la tech,
00:55même si on a d'un seul coup un petit répit, trois mois de répit pour y réfléchir.
00:59On va parler aussi de GaiaX, il paraît qu'il faut qu'on crée plein d'espaces de données, on va voir ce qu'il y a derrière ce projet.
01:05Mais on commence avec la loi Résilience qui passe côté Assemblée Nationale.
01:13Alors pour lancer cette discussion, je propose qu'on réécoute Clara Chappaz, c'était à propos du texte qui venait d'être voté au Sénat.
01:21La question n'est donc plus de savoir si, mais quand elle sera attaquée.
01:27Nous devons collectivement sortir de la logique du ça n'arrive qu'aux autres et apporter une réponse forte.
01:33C'est ce que je vous propose aujourd'hui avec le projet de loi Résilience.
01:36Ce projet de loi s'articule autour de trois grands axes.
01:40Le titre premier s'attache à transposer la directive REC afin de renforcer la...
01:44Alors, donc ce texte est une réponse nécessaire, ambitieuse face à la menace croissante qui pèse sur notre nation.
01:52Elle parle des ingérences étrangères qui testent nos limites dans les airs, en mer, dans l'espace derrière nos écrans.
01:58Est-ce que ce texte vous semble évidemment essentiel, Henri Dagrin ?
02:03Je crois que c'est un texte effectivement qui est tout à fait essentiel, qui a été attendu par beaucoup de monde
02:10et notamment par tous ceux qui se posent la question de la résilience des chaînes de valeur.
02:16Il y a eu beaucoup de travail qui a été fait sur ce qu'on appelle les opérateurs d'importance vitale,
02:21sur les opérateurs de services essentiels à travers la loi de programmation militaire ou la directive NIS-1.
02:28Aujourd'hui, il s'agit d'aller beaucoup plus loin dans les chaînes de valeur, dans les collectivités territoriales,
02:34les collectivités hospitalières et de renforcer globalement la résilience de l'ensemble,
02:40de ce qui fait, qui constitue le fonctionnement de la société et de son économie.
02:44Alors, ce texte, il est passé au Sénat. Là, il va y avoir des travaux à l'Assemblée nationale
02:50menés par les députés Philippe Platon, Eric Bottorel, Anne Louénanf, qui ne s'occupera plus particulièrement de NIS-2.
02:58Qu'est-ce qui va faire débat ? Sur quoi ils vont travailler, d'après vous ?
03:01Parce qu'on a l'impression qu'il y a une sorte de consensus quand même.
03:04Ce projet de loi Résilience, c'est la transposition de trois textes européens.
03:09Le règlement REC sur la résilience physique des infrastructures critiques.
03:17DORA, qui concerne directement tous les établissements financiers.
03:23Et ce n'est pas rien.
03:25Et donc, c'est la résilience des systèmes numériques financiers.
03:29Comment ça va s'articuler aussi entre NIS-2, DORA ?
03:32Et puis, NIS-2. Et NIS-2, c'est Network and Information Security, numéro 2, qui suit NIS-1.
03:40En fait, ce qui intéresse tout le monde, c'est NIS-2. C'est la transposition de NIS-2.
03:45Et donc là, il y a plusieurs sujets qui sont importants.
03:49C'est d'abord qu'il y ait une transposition qui soit homogène sur l'ensemble des pays européens,
03:54qui n'est pas des États, qui fassent de la surtransposition, qui fassent du zèle sur cette transposition.
03:59Et notamment, quand on est une entreprise qui travaille sur plusieurs pays européens, c'est essentiel.
04:06Deuxièmement, il y a un calendrier qui doit être réaliste de mise en œuvre.
04:09Et ça, ça appartient également aux législateurs.
04:13Et puis, il y a un sujet qui est important, c'est celui de l'information.
04:17Parce que passer de 300 opérateurs concernés à plus de 15 000, nous, notre conviction, c'est que la majorité des entreprises,
04:26des PME ou des ETI qui sont censées être concernées, elles ne sont même pas au courant de ce que c'est NIS-2.
04:33Elles ne savent même pas que ça existe et qu'elles vont être concernées.
04:35Il faut qu'elles regardent Spartak un petit peu.
04:37Absolument.
04:38Alors précisément, très attendue cette transposition de la directive NIS-2.
04:43Moi, ça fait deux ans que je travaille sur ce sujet-là, mais avec des clients internationaux, figurez-vous.
04:47Ils sont très stressés parce qu'il y a cette nouvelle sanction qui va apparaître sur le défaut de notification auprès du régulateur
04:54qui est donc l'ANSI en France, 2% du chiffre d'affaires annuel mondial jusqu'à 10 millions d'euros.
04:58Et on prend évidemment ce qu'il y a de plus important selon les cas.
05:01Défaut de notification de ?
05:02Violation de sécurité.
05:04Un petit peu comme on l'avait sur les violations de données personnelles dans le RGPD.
05:07Et là, effectivement, on voit que par rapport à ces acteurs au capitaux étrangers,
05:13il faut dire les choses vraiment telles que je les perçois sur le terrain,
05:17il y a une grande fébrilité et il y a aussi le souhait d'avoir l'appui du régulateur
05:22qui est donc encore une fois l'ANSI en termes de supervision proactive.
05:25Donc il y a une grande attente.
05:27Il y avait une déception sur le fait que le délai de transposition, normalement, c'était en octobre l'an dernier.
05:32Voilà, mais avec les soubresauts politiques, il a fallu attendre un petit peu.
05:35Donc c'est vraiment très attendu et on souhaite avoir la feuille de route.
05:39En même temps, tout le monde a envie que le législateur prenne son temps, j'ai l'impression.
05:42Oui, sachant qu'évidemment...
05:43Pas qu'il travaille.
05:44Voilà, d'une part, on sait bien, et je crois que la ministre elle-même a dit qu'il n'y aurait pas de gold plating,
05:50donc pas de surtransposition.
05:52Et que sur cette base-là, ensuite, c'est bien entendu au niveau de l'ANSI qu'on va avoir les bons interlocuteurs aussi,
05:58selon les secteurs concernés, puisqu'évidemment, la cybersécurité dans la défense, l'aéronautique,
06:04la médecine ou les collectivités territoriales, ce n'est quand même pas tout à fait les mêmes enjeux.
06:08Oui.
06:09On espère plutôt y échapper, quand on est une entreprise française, on se dit,
06:12bon, vu que je ne sois pas dans le scope, mais finalement, qui va pouvoir y échapper ?
06:15Parce que ça ruisselle à chaque fois, on parle des grandes entités,
06:19mais finalement, qui travaillent avec des sous-traitants, qui sont des plus petites boîtes, des PME,
06:23qui peuvent être concernés, finalement.
06:24Complètement. Mais je pense qu'échapper, non.
06:27Non, on ne peut pas.
06:27C'est très juste. Je pense qu'il faut séparer.
06:29On ne peut pas et il ne faut pas, c'est ça.
06:31Il ne faut pas. Je pense que le fameux, ça n'arrive qu'aux autres.
06:33Mais simplement, il est où le problème ?
06:36Et on a quand même une opportunité, justement, à travers tout ça.
06:38C'est que, oui, les problèmes de cybersécurité sont de plus en plus importants.
06:42Oui, il faut que les entreprises montent en capacité, en savoir-faire, se doter d'outils.
06:47Se doter, on parle de résilience aussi, de backup.
06:50C'est-à-dire pas d'avoir un seul outil qui fait une chose, parce que sinon, ça, on est en risque.
06:53Ça, dans le Dora, c'est très explicite.
06:55Mais ça, c'est très explicite.
06:57Or, par exemple, aujourd'hui, on connaît l'habitude des boîtes françaises d'être que sur un seul outil.
07:02Voilà, ça, c'est bien.
07:03Justement, il va falloir changer de cette logique-là.
07:05Donc ça, ça ouvre aussi des questions intéressantes de diversité.
07:09Mais le problème, c'est que ce n'est pas seulement faire la sécurité,
07:12mais c'est souvent le problème de la norme, de la documentation.
07:14Et on a, par exemple, des études qui montrent des fois qu'on peut dépenser plus d'argent,
07:21plus de temps à expliquer ce qu'on fait que le faire.
07:24Et donc, ce qui se passe, c'est qu'à la fin...
07:25Ça, pour une PME, ça peut être très problématique.
07:27On peut se retrouver avec le fait que, du coup, les PME arbitrent plutôt pour faire du papier et de l'audit
07:33plutôt que de faire de l'amélioration de système.
07:35Et là, on voit le problème.
07:36Et ça, c'est le problème de la surréglementation.
07:40On a une opportunité, par contre.
07:42On a cité les noms.
07:43On a Philippe Latombe, Éric Bottorel et Anne, qui sont des gens qui...
07:47Anne Léneuve.
07:48Anne Léneuve.
07:49Merci.
07:50Je disais son prénom tout de suite, mais c'est des gens, d'ailleurs, qu'on connaît dans le domaine.
07:55Et longtemps, on a dit que les politiques ne s'intéressaient pas au numérique, etc.
07:58Ce n'est pas vrai.
07:59On a des gens qui sont...
08:00Là, on a des experts.
08:00Alors, après, ils ont des positions qui sont des fois, par rapport, justement, aux acteurs en présence, pour ou contre, en bon politique.
08:11Ils amènent une vision politique.
08:12Mais c'est des gens qui connaissent l'action du numérique.
08:14Et ça, je pense qu'il faut dire aussi qu'on n'est plus dans le temps où il fallait expliquer aux députés ce qu'était le numérique.
08:19On a des gens vraiment qui sont...
08:21Enfin, à quelques députés, parce que ça reste quand même une poignée de députés.
08:24La poignée, on les connaît tous.
08:26Non, mais Anne Léneuve, notamment, c'est elle qui va être rapporteure sur la transposition de la directive NIS2.
08:33Et elle a conduit un groupe de travail très important et auquel j'ai participé, avec de nombreuses, notamment, organisations professionnelles,
08:42sur, justement, dans le cadre de la Commission supérieure du numérique et des postes, un groupe de travail sur la transposition de la directive NIS2.
08:49Elle a écouté, entendu et auditionné tous les gens concernés d'une manière ou d'une autre.
08:57Ça a été un très gros travail qui a été réalisé.
08:59Et moi, j'invite à aller voir, lire son rapport, son avis qui est publié sur le site de la Commission supérieure du numérique et des postes,
09:07publié en octobre 2024.
09:10Travail remarquable.
09:13Anne Lénenf, elle connaît super bien le sujet.
09:15Et je pense que ça va être un rapporteur particulièrement intéressant.
09:19Bon, je précise qu'on devait l'avoir avec nous, là, dans le débrief, mais elle a été retournée à l'Assemblée pour un vote important.
09:26On en a fini, sinon, avec les polémiques autour du chiffrement, là, quand...
09:30Quelle polémique ?
09:31Certaines articles au CESBIS, par exemple.
09:35Donc, en effet, on revient sur cette question de, est-ce qu'il faut ouvrir ou pas, obligatoirement, une bac d'or,
09:41sur tous les systèmes de messagerie instantanée, tout particulièrement.
09:44Alors, on a eu des tentatives contre le narcotrafic d'introduction, précisément, d'une disposition législative permettant ou obligeant les éditeurs de ce type de services de messagerie
09:58qui a créé une telle bac d'or, en fait, qui concerne finalement une clé de déchiffrement maîtresse.
10:03Et puis, à l'inverse, dans ce projet de loi de transposition de la directive NIS2,
10:09des députés ont cru beau introduire le fait que ça devait être interdit, quelle que soit, effectivement, la raison à tout jamais.
10:16Donc, on voit quand même qu'on est dans deux logiques totalement irréconciliables
10:20et qu'à ce niveau-là, on est quand même tenu, au niveau européen, de rappeler que la Cour européenne des droits d'homme,
10:26de toute façon, a déjà jugé que c'était interdit de manière générale et absolue.
10:31Ah, ben ça, c'est bien de le rappeler.
10:33Donc, est-ce qu'il est vraiment utile ?
10:33Ben voilà, c'était en février 2024, c'est pas si vieux.
10:36Et est-ce qu'il est vraiment...
10:37On a la mémoire courte, parfois, sur certains sujets.
10:39Je suis là pour ça.
10:40Oui, mais pas le législateur.
10:42Enfin, le législateur ne devrait pas avoir cette mémoire courte.
10:44Il n'est pas censé avoir la mémoire courte.
10:47Absolument.
10:47Absolument.
10:47Donc, on voit qu'on est peut-être dans une inflation législative.
10:52Est-ce vraiment si indispensable que ça ?
10:54Est-ce qu'il ne faut pas laisser aussi le juge faire son métier
10:56et appliquer des textes qui sont déjà, par ailleurs, très précis,
10:59que ce soit sur les écoutes, sous toute leur forme, comme dans leur application concrète ?
11:03Voilà. Et là, sur ces trois textes, justement, il y a déjà suffisamment de travail.
11:08On passe à notre autre sujet, c'est la majoration des droits de douane.
11:11Alors, répit accordé par Donald Trump hier soir, pendant trois mois, on va pouvoir retourner cette question.
11:19Moi, ça m'intéressait d'avoir votre sentiment, déjà, votre première réaction, pour le secteur du numérique et de la tech.
11:26Quels seraient les impacts ?
11:28Les impacts sont déjà arrivés, en fait.
11:32C'est-à-dire que d'un système mondialisé dans lequel on avait construit notre système numérique en interdépendance complète,
11:39sachant que dans le même temps, il y avait cette volonté d'autonomie stratégique qui monte,
11:43parce qu'on sent bien qu'il y a ces risques,
11:44Donald Trump nous montre qu'il est capable, à n'importe quel moment,
11:46de prendre des décisions d'arrêt, de stop and go sur les systèmes.
11:50Ça, on l'a vu sur l'Ukraine.
11:51Et donc, ça, c'est un vrai sujet de fond.
11:54Et sur l'action du prix.
11:55Donc, la disponibilité du produit et son prix.
11:58Donc, en fait, tout d'un coup, tout le monde se réveille en se disant,
12:01maintenant, il va falloir peut-être réfléchir autrement,
12:03ce rapport à cette logique de mondialisation dite heureuse et intriquée.
12:08Donc, on est là sur le moment.
12:11Et donc, chacun, entre ceux qui pensent que rien n'est possible et qu'il faut faire comme avant,
12:15vite, il faut retrouver le modèle d'avant.
12:17Ceux qui pensent que rien ne sera jamais comme avant.
12:18Ceux qui pensent qu'effectivement, il faut justement profiter de cette opportunité
12:22pour, d'une certaine manière, transformer notre dépendance numérique.
12:28Moi, je pense qu'effectivement, ça y est, ça fait bouger les lignes très fortement.
12:31Et que ça a des conséquences économiques.
12:34On en parlait typiquement.
12:37Nos amis d'OVH Cloud ont eu leur co-rembourse qui a explosé.
12:41On a nos cloudistes français, Scaleway, Outscale et OVH, qui ont le grand sourire.
12:45Parce qu'effectivement, ils ont un afflux aujourd'hui de demandes.
12:49Nous, pour la première fois, on voit des sorties GAFAM.
12:51C'est-à-dire des gens qui n'imaginaient pas être en dehors du GAFAM,
12:55venir voir ce qui existe en dehors du GAFAM en se disant « Hum, et alors ? »
12:59Pour des raisons, encore une fois, de risque et de prix.
13:01Donc, moi, je pense qu'on est en cette évolution-là.
13:03Et après, on a Trump qui joue chaud-froid.
13:05C'est-à-dire que hier soir, effectivement, on avait des taxes à 30%.
13:08C'est plus que 10%.
13:09Demain, ça peut revenir.
13:11Il peut toucher à un truc.
13:12Enfin, là-dessus, l'imprévisibilité trumpienne, elle est encore là.
13:16Oui.
13:16J'ai quand même une réaction de Maya Noël, la directrice générale de France Digital,
13:20qui dit qu'en gros, quand même, le secteur est sidéré.
13:24Oui.
13:25Enfin, il faut sidérer.
13:26D'abord, il faut garder la tête froide.
13:29Je crois qu'il faut raisonner avec son cerveau et non pas avec ses tripes.
13:34Raisonner de manière rationnelle et pas émotionnelle.
13:36Ça, c'est la première chose.
13:37Deuxièmement, je crois qu'il ne faut pas confondre deux objectifs.
13:42Il y a un objectif de long terme qui nécessite des politiques publiques de long terme,
13:49fermes, ambitieuses, pour restaurer une certaine forme de maîtrise de nos dépendances technologiques.
13:54Ça va prendre du temps.
13:55Mais il ne faut surtout pas confondre ces objectifs avec les objectifs conjoncturels de réponse
14:02aux oses tarifaires imposées par les États-Unis dans le cadre de ces droits de douane.
14:08Parce que quand on amène des mesures dans la négociation, parce que le but, c'est de négocier,
14:14si on veut qu'il enlève ses droits de douane, il faut qu'on soit capable d'enlever les mesures que l'on aura proposées.
14:20Or, si ce sont des mesures pour restaurer notre autonomie technologique à long terme,
14:24on se retrouve gros gens comme devant en disant « Bon, finalement, on va les retirer parce que vous retirez vos droits de douane ».
14:31Ça n'aurait pas de sens.
14:31On ne peut pas monnayer, en fait, cette économie.
14:34Et enfin, il ne faut pas la monnayer et il faut donc disjoindre les deux objectifs.
14:39Ce sont des objectifs fondamentalement différents.
14:41Et vous pensez qu'il y a des pressions, Henri, quand vous dites ça ?
14:44Vous pensez qu'il y a des pressions sur ces sujets ?
14:45Moi, j'ai rencontré, il y a beaucoup de gens qui nous ont sollicité au CIF pour nous dire « C'est le moment, il faut associer les deux sujets ».
14:53Nous, au contraire, on pense qu'il faut les dissocier parce que ça serait terrible de les associer,
14:58parce qu'à un moment, ça voudrait dire que ce sont des instruments de négociation.
15:01Ce n'est pas de la négociation.
15:03On ne négocie pas sur la restauration de cette autonomie technologique, sur la maîtrise de nos dépendances numériques.
15:10Et enfin, les réponses, elles ne peuvent être qu'européennes.
15:15Il n'y a pas de voie pour des réponses qui soient désordonnées entre les différents États membres.
15:22Et si ça commence comme ça, Trump aura gagné et il aura mis le coin qu'il cherche à mettre entre les Européens.
15:29Bon, et après, de toute façon, si on voulait taxer...
15:32Parce qu'attention, les tarifs, ce n'est pas Trump qui va mettre des droits de douane sur les services numériques
15:37qu'il exporte des États-Unis vers l'Europe.
15:39Ce n'est pas comme ça que, en général, les choses se passent.
15:42C'est l'inverse.
15:44Mais les Européens, est-ce qu'on va mettre des droits de douane sur des flux commerciaux ?
15:48Il n'existe pas, ces flux commerciaux.
15:51Et comment on fait pour taxer des services numériques ?
15:53Parce que les services numériques, d'abord, ils sont commercialisés en intra-européen.
15:58On ne sait bien taxer que ce que l'on mesure bien.
16:00Alors, les voitures, dans un sens, on sait les mesurer à l'unité près.
16:03Les tonnes de blé également, ou le nombre de carcasses, les tonnes de carcasses de bovins ou d'auvins, enfin bref.
16:12Mais le temps passé sur Instagram...
16:15Mais les services numériques qui viennent des États-Unis, il n'y a pas de flux commerciaux.
16:21Ce sont des flux intra-européens.
16:23Et il y a des flux financiers également très opaques, qui ne repartent pas d'ailleurs vers les États-Unis directement,
16:28mais via des paradis fiscaux, tout ça étant sciemment organisé, de manière consciente,
16:34pour faire de l'évasion fiscale, ou de l'optimisation, si on va être poli, par ces grands opéraux.
16:41Dans la mondialisation heureuse, il y avait l'OMC, qui pouvait réguler un petit peu et permettre aux États,
16:47ce n'étaient pas les acteurs eux-mêmes qui intervenaient, d'obtenir des arbitrages
16:51lorsque, manifestement, on était en dehors, précisément, des règles de liberté du commerce.
16:56C'est fini, parce que depuis 2019, il n'y a plus de nomination de juge,
17:00il n'y a plus les fonds qui y vont bien, et en plus, tout est paralysé.
17:03En revanche, je pense que, même si la mondialisation n'est plus heureuse, il reste la mondialisation.
17:08Et il y a un adage qui s'applique toujours, c'est « think global, act local ».
17:12Donc je pense qu'en effet, c'est en cultivant son jardin auprès de son marché et de ses clients
17:16qu'on peut survivre et sortir la tête haute.
17:19Je vous propose qu'on écoute Jean-Noël Barraud à l'Assemblée nationale.
17:22Vous avez cité les services et nous disposons, depuis 2023, d'instruments qui permettent à la Commission européenne,
17:29lorsque les intérêts européens sont en jeu, de s'en prendre, si je puis dire, à l'accès au marché public,
17:36à l'accès de certains services sur le marché unique européen.
17:39Mais je crois que vous avez...
17:40Donc Jean-Noël Barraud parle quand même des décisions dévastatrices de droits de douane extravagants.
17:46Il nous dit « mais on a les instruments aujourd'hui ».
17:48Oui, c'est là où j'entends ce que dit Henri.
17:50Simplement, c'est que ce qui se passe, c'est que dans la tête déjà des consommateurs,
17:54déjà, les deux sujets ont un petit peu... il y a eu un petit court-circuit.
17:58C'est-à-dire que tout d'un coup, on se dit...
18:00Il faut faire de la pédagogie, il faut expliquer que ce n'est pas lié les deux.
18:03Mais la pédagogie, de toute façon, c'est toujours bien.
18:06Après, la pédagogie, c'est la pédagogie de quoi ?
18:08Je pense que ce que dit juste Jean-Noël Barraud, c'est qu'on ne peut pas...
18:12Étant donné le déficit aussi, il faut voir la question des balances commerciales.
18:17Notre problématique, effectivement, c'est qu'on a plus de 260 milliards
18:19sur la question des services numériques au niveau européen.
18:22Alors là, Jean-Jean-Henri, il faut être au niveau européen.
18:24Pour moi, il n'y a pas de sujet là-dessus.
18:27Mais simplement, c'est qu'une fois qu'on a dit ça, oui, il faudra bien aller sur ce terrain-là,
18:31à un moment donné, en négociation, pour peut-être à la fin baisser en intensité.
18:37Mais en attendant, aller en négociation.
18:38Ce n'est pas juste avec le fameux bourbon qu'on met, qu'on enlève, qu'on met, qu'on enlève,
18:42qu'on va régler les problèmes systémiques de notre économie, qui aujourd'hui est dépendante.
18:47Donc quelque part, Trump nous donne aussi l'opportunité là-dessus de reprendre pied sur cette chose-là.
18:55Est-ce qu'on pourrait imaginer que l'accès à certains services,
19:01numériques, soit rendu plus compliqué, plus cher ?
19:05Si c'est plus cher, je prends un exemple.
19:07Allez, on va dire M365 versus Jamespot, Microsoft 365.
19:13Dans une grande entreprise, sortir de Microsoft 365,
19:17c'est un projet industriel extrêmement coûteux,
19:19en ressources, en compétences et en change management.
19:23C'est un projet sur plusieurs années.
19:26Allez, on va dire 5 à 7 ans pour une très grande entreprise.
19:29Une hausse de 20% du tarif, vous pensez que ça va être un signal pour sortir ?
19:35Non, ce n'est pas ça qui va être un tarif, qui va être un signal pour une entreprise.
19:39De toute façon, on est déjà sur, tendanciellement, des hausses tarifaires de 10% par an.
19:47Allez, 20% d'un coup, parce que...
19:49Et puis, ça vient dans une négociation, et puis demain, c'est supprimé comme droit de douane.
19:54Ce n'est pas sérieux, d'autant plus que la situation politique, diplomatique, relationnelle, commerciale,
20:00entre l'Europe et les Etats-Unis dans 5 ans, qui peut prédire ce qu'elle sera,
20:04et puis se retrouver, mener un projet comme ça, complètement stérile,
20:08en termes de compétitivité pour l'entreprise elle-même.
20:10Je ne sais pas, je pense que ce n'est pas un bon signal.
20:13Bon, c'est un argument intéressant.
20:15Ah mais complètement.
20:16Oui, Google, elle vient, elle va, enfin...
20:18Ce que je veux dire, c'est que l'effet prix, on peut le voir dans l'autre sens.
20:23On a cité les noms de produits.
20:24Microsoft, par exemple, s'est déployée avec Teams, parce qu'il a donné gratuitement.
20:27Donc, il a fait du dumping.
20:29Quelque part aussi, aujourd'hui, les entreprises ont bénéficié de ce dumping-là,
20:33et aujourd'hui, effectivement, quelque part, pour passer à une autre solution,
20:37non seulement, effectivement, il faut mettre ce manpower,
20:39mais effectivement, il faut payer peut-être le prix juste, et non pas un prix avec du dumping.
20:42Quelque part, l'augmentation de tout ça en termes de prix, c'est de ramener à des prix de marché,
20:46et non pas à des prix de dumping.
20:48Donc, je comprends que pour les entreprises, en particulier les grandes entreprises,
20:50qui sont très dépendantes de ça...
20:52Oui, mais les prix de marché, est-ce que ça passe par des majorations de droits de douane ?
20:56Pas forcément.
20:57Ça, c'est de la régulation, comme on peut le faire à Bruxelles.
21:00Ah mais oui, mais il aurait encore fallu que Bruxelles, là-dessus, s'arme,
21:05et non pas mettre en place un DMA, par exemple un Digital Market Act,
21:08dans lequel on s'est réveillé le matin,
21:09et, par exemple, le fameux Microsoft, qui détient 80% du marché, n'était pas dans le DMA.
21:14Donc, il y a aussi des choses qui n'ont pas été faites, d'un point de vue juridique,
21:18pour nous protéger, selon nos règles, on va dire, les plus...
21:21Un petit peu, quand même.
21:21On donne la parole à la défense.
21:23Oui, voilà, dans le Data Act, vous avez déjà quelques dispositions,
21:26qui, précisément, en termes de tarification des services cloud,
21:30viennent un petit peu...
21:31Dans le Data Act.
21:32Eh bien oui, c'est un peu un camélier législatif, on a introduit...
21:35Mais c'est à la marge.
21:37Le Digital Market Act...
21:38Mais c'est quand même, au niveau pan-européen, j'ai envie de dire,
21:41et c'est un début, je ne dis pas que ça suffit.
21:43C'est vraiment très à la marge.
21:45Mais sur le Digital Market Act, pourquoi, par exemple,
21:48les systèmes à la fois cloud, et là, les outils dont on vient de t'en parler...
21:51Ah, sur les cloud services ?
21:52... n'ont pas été intégrés, et ça, par exemple, c'est...
21:55Que AWS, Google Cloud et Microsoft Azure n'aient pas été désignés comme gatekeepers
22:00au titre du DMA sur les cloud services, c'est absolument scandaleux.
22:04Voilà, il reste un chemin à parcourir, c'est sûr.
22:06Voilà.
22:06Ça, c'est une arme qu'on n'a pas encore utilisée.
22:08Mais il ne faut pas l'utiliser dans le cadre des droits de douane,
22:10parce que ce n'est pas un sujet de négociation.
22:12Exactement, c'est une arme différente.
22:13J'aurais préféré qu'on le fasse dans le cadre du DMA,
22:15et là-dessus, on va se retrouver avec Henri,
22:16plutôt que sur le cadre des droits de douane.
22:17Ce que je veux juste te dire, c'est que,
22:19quand une situation devient totalement anormale,
22:22il faut sortir aussi des modèles, j'ai envie de dire,
22:25bien pensants et positifs.
22:27Moi aussi, je préfère la mondialisation heureuse,
22:29moi aussi, je préfère qu'on n'ait pas des droits de douane,
22:31moi aussi, je préfère qu'il y ait la circulation des hommes,
22:33des capitaux et des produits,
22:34et non pas la fermeture des frontières.
22:36Moi, je ne vois absolument pas dans tout ça
22:38un truc positif en soi.
22:40Ce que je dis, c'est que nous, en tant qu'Européens,
22:43on a en face quelqu'un qui a un comportement,
22:45et il faut qu'on adapte notre comportement.
22:47C'est tout.
22:47Mais il faut agir de la même façon.
22:48Bon, on passe à notre dernier sujet,
22:49parce qu'il ne reste plus que 5 minutes,
22:51et je voulais quand même qu'on parle de Gaia X,
22:52parce qu'on a le CIGREF qui est avec nous
22:56et qui est désormais le coordonnateur
22:58avec l'Institut Mine Télécom
23:01de ce hub français, Gaia X France.
23:04Vous avez tenu une conférence à Bercy.
23:08Alors moi, du coup, j'ai découvert
23:09qu'on recensait 180 projets de...
23:13Oui, même 200, un peu plus de 200.
23:15Ok, d'accord.
23:16En Europe.
23:17Très bien.
23:18À quoi ça sert ?
23:19Est-ce que c'est ça Gaia X, finalement,
23:20le projet ?
23:21C'est créer des espaces de données ?
23:23C'est pour qui ?
23:23Gaia X, au départ, n'est pas un cloud provider,
23:29ni même un fournisseur de services cloud.
23:31Est-ce que j'ai dit ça ?
23:32Non, il ne l'a jamais été.
23:33Non, mais il y a beaucoup de gens qui le pensent.
23:35Gaia X, c'est une association...
23:37C'est la même idée de créer un cadre de règles communes dans le cloud.
23:40Gaia X est une association qui produit des frameworks de techniques juridiques,
23:47de gouvernance, d'organisation sur les business models
23:51pour créer des espaces de données pour ceux qui en ont besoin,
23:55pour tout secteur d'activité, créer des espaces de données
23:58dans lesquels on peut partager des données de manière sécurisée
24:01afin de créer de la valeur,
24:04notamment en utilisant des systèmes d'intelligence artificielle
24:08qui vont pouvoir exploiter ces données de manière sécurisée
24:11pour celui qui est le propriétaire de la donnée
24:13et non pas se faire phagocyter ses propres données.
24:17Donc, ça marche vachement bien.
24:18Il y a quoi dans ces espaces de données aujourd'hui ?
24:20Eh bien, vous avez des espaces de données.
24:22Par exemple, il y en a un qui est particulièrement intéressant,
24:24il s'appelle Eona X,
24:26qui a été créé notamment par Aéroports de Paris, Air France, SNCF, Renault, Accor,
24:34et qui a eu une première utilisation de ces espaces de données
24:39dans le cadre des Jeux olympiques.
24:41C'est pour partager de la donnée
24:42et offrir à l'utilisateur de tout ce qui est mobilité-tourisme,
24:48eh bien, des données, des services à valeur ajoutée
24:54en partageant ces données avec tous ces acteurs.
24:57Et ça se multiplie dans plein de domaines différents,
25:00la culture, l'éducation.
25:02Mais l'idée, on est d'accord, c'est qu'on peut créer des règles communes.
25:05Est-ce qu'on peut dire que ça pourrait être une alternative à l'EU-CS, par exemple ?
25:08Des règles communes au niveau européen sur le cloud, la sécurité et le partage de données ?
25:13Le UCS, l'EU-CS, c'est un schéma de certification de sécurité des services cloud à valeur légale.
25:20Donc là, il n'y a pas de valeur légale.
25:21GAIA-X est une association européenne qui a produit un référentiel,
25:26effectivement, où en matière de sécurité sur les labels de sécurité,
25:30eh bien, le niveau 3 correspond à ce qu'on appelle les UCS I+,
25:34c'est-à-dire des critères d'immunité aux législations non européennes à portée extraterritoriale.
25:38Mais c'est une recommandation d'une association qui fait de la normalisation.
25:42Voilà, c'est un facilitateur.
25:44Ça a permis aussi le rapprochement de certains acteurs industriels.
25:47Après, si vous êtes en France et que vous voulez sécuriser vos données,
25:49de toute façon, on en reviendra à Secnum Cloud version 3.2.
25:53Il n'y a pas mieux actuellement sur le marché.
25:54Oui.
25:55Parce qu'on veut échanger en France.
25:56On met le score.
25:57En Europe, ça ne marche pas et l'échelle doit être européenne.
26:00C'est pour ça que nous, Secnum Cloud, ça reste un petit truc national.
26:07Et ça ne permet pas de travailler.
26:08Un petit truc national qui fait ramer beaucoup de gens.
26:11Oui, mais qui ne permet pas de travailler au niveau européen de manière sécurisée.
26:15C'est pour ça qu'on a besoin de l'UCS I+.
26:17Oui.
26:18Mais pour revenir à ce sujet de Gaia X, là, ça se passe au niveau européen.
26:24Et vous travaillez avec les big tech américaines.
26:27Et ?
26:28Eh bien, je ne sais pas, ça ne pose pas des problèmes sur les niveaux de règles et d'exigences que vous vous fixez ?
26:33Ce que l'on demande à tout opérateur qui veut travailler dans le cadre de Gaia X,
26:37suivant les frameworks de Gaia X, c'est d'adopter ces frameworks et de faire en sorte qu'ils soient mis en œuvre.
26:43Et si, ensuite, chaque producteur de données qui veut partager ces données a des exigences,
26:49eh bien, si les hyperscalers américains ne répondent pas à ces exigences, eh bien, ils seront exclus des travaux.
26:56Ça n'a rien changé, la nouvelle situation géopolitique au sein de Gaia X ?
27:00Non. Je ne pense pas qu'il n'y a pas de raison, pour l'instant, en tous les cas. Il y a tous les cas de figure qui sont prévus par les frameworks.
27:07Après, c'est à chacun des utilisateurs de les prévoir. Et il faut savoir qu'il y a plus de 2,3 milliards d'euros qui sont déjà engagés
27:15pour la création de ces espaces de données au niveau européen d'argent public.
27:19Comment vous voyez ça, justement, ces initiatives telles que Gaia X ?
27:24Moi, je trouve que... Enfin, Gaia X, pour moi, c'est un revival, en fait. Je vais le dire comme ça. Gaia X, la première...
27:30Le revival de quoi ?
27:31Le revival de l'idée d'un cloud, au départ européen. Pas forcément opérateur, mais de se mettre d'accord.
27:35Il y a eu, après l'entrisme des Américains. Et après, par contre, il y a eu des gens de bonne volonté qui se sont dit,
27:40mais qu'est-ce qu'on peut faire ? Et quelles sont nos problématiques ? Et la question des data space, c'est un vrai sujet.
27:45Et là, par contre, on a un peu plus d'autarcie et, effectivement, d'autonomie.
27:48Et donc, c'est ce qui, effectivement, fait que Gaia X a un revival, pour lequel, d'ailleurs, là, on voit bien qu'il y a, à nouveau, une autre dimension.
27:55Mais oui, il y a Gaia X 1 et Gaia X 2. Et ils n'ont pas grand-chose à voir.
27:59Et c'est pour ça qu'on reste avec le vieux Gaia X, qui était peut-être une chimère.
28:03Mais en tout cas, on a un nouveau Gaia X qui, peut-être, est prometteur, mais sur d'autres sujets que celui initiaux, et qui sont moins intéressants.
28:09Voilà. C'est pour ça que j'avais envie de faire un point.
28:11On ne m'a jamais changé.
28:12Il est terminé. Point final de ce Smartech 800e.
28:15Merci d'avoir été avec moi pour ce débrief.
28:18À très bientôt sur la chaîne Smart for Change.