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Jeudi 14 novembre 2024, SMART TECH reçoit Henri d'Agrain (Délégué général, Cigref) , Louis Soris (avocat et fondateur, cabinet Soris Avocats) et Laurent Daudet (Directeur Général cofondateur, LightOn)

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00:00Bonjour à tous au Grand Débrief de la Tech. Aujourd'hui dans l'émission, on est ensemble pour une demi-heure, je vous présente les sujets et les invités juste après.
00:21C'est parti pour le Grand Débrief de Smartech. Aujourd'hui autour de la table, le délégué général du CIGREF, Henri Dagrain. Bonjour Henri.
00:28Bonjour Atheline. Porte-parole, je le rappelle, de l'association qui rassemble les grands directeurs de systèmes d'information des plus grandes entreprises et entités publiques en France.
00:37Avec vous aujourd'hui, le fondateur du cabinet, Sauris Avocat. Louis Sauris, bonjour. Bonjour Atheline. Avocat spécialiste en droit des affaires dans la Tech, vous naviguez entre la France et les Etats-Unis si j'ai bien compris.
00:47Exactement.
00:48Ça nous intéresse tout particulièrement ça aujourd'hui. Et puis le vice-président de Forrester. Bonjour Thomas Husson. Analyste principal au sein du cabinet d'études et de conseils. Bonjour, bienvenue.
00:59Bonjour Atheline.
01:00Alors on va confronter nos points de vue sur la nomination d'Elon Musk par Donald Trump. C'est pour ça que votre regard américain nous intéressera particulièrement.
01:08On va aussi parler des lunettes de réalité augmentées pour les livreurs. C'est un projet du côté de Amazon. Est-ce qu'il y a vraiment un marché ? Est-ce qu'il y a un intérêt ? Ou est-ce qu'on tombe dans la surveillance ?
01:19On débattra de ça. Mais avant, je vous propose qu'on commence par commenter l'introduction en bourse dans l'IA française. Une introduction annoncée par Layton.
01:28Projet de lancement sur Oronex Grosse Paris. Ce serait la première société européenne cotée spécialisée en IA générative. Donc on est très heureux d'être connecté avec vous Laurent Daudet. Bonjour.
01:42Bonjour Delphine.
01:43Vous êtes le cofondateur de Layton. Alors pourquoi déjà cette décision de lancement en bourse ? Pourquoi maintenant ?
01:50Alors pour Layton, c'est un moment d'accélération. C'est un moment d'accélération parce qu'on a un produit qui transforme dès aujourd'hui la vie des entreprises.
01:59On a un marché qui est absolument colossal. Le marché de l'IA générative est estimé par Bloomberg à 1 300 milliards de dollars à l'échéance de 2032.
02:10Et pour nous, on est dans cette phase d'accélération et on a besoin de lever les capitaux pour notamment renforcer nos équipes commerciales et c'est dans l'international.
02:18Rappelez quand même ce que vous proposez avec Layton. Où est-ce que vous vous situez d'ailleurs dans les gammes de services autour de ce qu'on appelle l'IA générative ?
02:27Oui tout à fait. Donc à Layton, nous on est vraiment spécialisé dans l'IA générative pour les entreprises. Vraiment ce côté B2B.
02:34Et on va construire notre plateforme Paradigm qui propose toutes les couches logicielles au-dessus des LLM, autour des LLM, pour que les entreprises, nos clients, puissent utiliser ces IAs génératives dans une multiplicité de cas d'usage.
02:49Ça peut être des cas d'usage juste utilisés comme un chatbot normal ou ce qu'on installe beaucoup en ce moment, c'est des systèmes de dialogue avec des corpus documentaires.
03:00C'est ce qu'on appelle les systèmes RAG, Retrieval Augmented Generation, où on va hybrider l'IA générative avec des moteurs de recherche interne.
03:06Et ça, ça va transformer la vie des gens par exemple pour des services de relations clients, pour des services de R&D. Dans des cas d'usage très concrets, on va répondre aux besoins des entreprises en IA générative pour faire gagner du temps tout simplement.
03:22Vous avez construit des modèles de langage. Qu'est-ce que ça représente en termes d'investissement quand on décide de se lancer comme ça dans l'IA générative ?
03:29Parce qu'au départ, light on, c'était surtout d'abord du calcul. Vous avez pris ce virage de l'IA générative. Qu'est-ce que ça représente comme investissement ?
03:37Effectivement, nous depuis 2020, quand on a vu arriver l'IA générative avec GPT-3, on s'est entièrement consacré sur ces technologies-là.
03:48Mais on a un background sur le calcul. Et le calcul, c'est vraiment le nerf de la guerre sur l'IA générative, mais plutôt quand on veut créer des modèles.
03:58Nous, en ce moment, on s'appuie sur des modèles qui sont open source, des modèles qui sont disponibles de différents fournisseurs pour proposer des moteurs de LLM qui soient les plus efficaces possibles,
04:12tout en ne requérant pas des puissances de calcul trop phénoménales à l'inférence.
04:17Je n'ai pas eu de chiffres, mais ma question est un peu récurrente en ce moment quand je parle d'IA. Est-ce qu'on peut encore avoir des champions dans l'IA sans engloutir des centaines de milliards de dollars,
04:30comme les grands hyperscalers qu'on connaît ?
04:34Tout à fait. Ce qui coûte vraiment des centaines de milliards de dollars, c'est quand on veut déployer et construire des énormes modèles qui sont très généralistes.
04:46Nous, on devrait se spécialiser plutôt sur des modèles qui sont un peu plus petits, qui sont spécialisés sur les cas d'usage.
04:52Et ça, ça coûte vraiment beaucoup moins cher à construire. Et ça, on va le faire en collaboration avec nos clients.
04:58Henri, un commentaire ? Peut-être une question pour Laurent ?
05:01Peut-être deux commentaires et une question.
05:04Ça va être très rapide.
05:07D'abord, c'est tout à fait intéressant parce qu'au CRF, nous avons pas mal travaillé sur ces sujets-là.
05:14Il s'avère effectivement que les plus petits modèles spécialisés sont beaucoup plus efficaces dans des tâches professionnelles bien particulières que des très grands modèles.
05:24Et donc, c'est une recommandation que nous avons pu formuler.
05:27Intéressez-vous à des modèles bien spécialisés, bien entraînés, bien ragués sur les propres documents qu'utilise l'entreprise.
05:36Ça, c'est tout à fait intéressant et c'est un sujet tout à fait positif concernant l'avenir de Light-On.
05:44Maintenant, ça pose deux sujets qui sont peut-être importants à regarder.
05:50C'est d'abord la dépendance à des grands modèles comme Lama 3 qui sont développés et opérés essentiellement par Meta.
06:01Donc là, il y a peut-être un risque de dépendance technologique vis-à-vis de Meta. C'est à vous. Effectivement, c'est une des premières questions qui se posent.
06:09Puis la deuxième, si j'ai bien compris, c'est que dans votre tour de table, là aussi, il y a une dépendance financière à Huawei qui a pris une grosse partie du capital de votre société.
06:19Ce qui peut également poser d'autres difficultés en termes de dépendance financière vis-à-vis d'un acteur chinois qui, aujourd'hui, n'est pas forcément en odeur de sainteté dans nos États démocratiques.
06:32Alors, je peux répondre par rapport à ces deux questions. Tout d'abord, le premier sur la dépendance technologique.
06:38Il se trouve qu'il y a beaucoup d'acteurs qui développent de l'open source, pas juste Meta.
06:43Les modèles Lama sont très bons, mais il y en a d'autres. Les modèles Falcon qu'on connaît très bien. Il y a des modèles chinois, des modèles américains, des modèles européens avec les modèles de Mistral, par exemple.
06:54Donc, il y a maintenant une diversité de modèles open source. Et nous, on va aller piocher ce qu'il y a de meilleur dans la technologie pour répondre sur Huawei.
07:00Huawei était venu à notre capital quand on a levé en amorçage en 2018 et qu'on faisait du hardware.
07:06Et maintenant, ce n'est plus qu'un investisseur financier chez nous qui va d'ailleurs être dilué dans cette opération levée de fonds.
07:14C'est un des objectifs de l'IPO ?
07:17Oui, entre autres.
07:19Louis, qui veut commencer ?
07:22Merci de me donner la parole là-dessus. Moi, je trouve que ce qui est remarquable dans l'annonce qui a été faite, c'est qu'on change de paradigme.
07:30Puisque des sociétés comme la vôtre, Laurent, d'habitude, pour se financer, faisaient appel au private equity et à des fonds d'investissement.
07:38Et donc, du coup, aux investisseurs privés qui investissent dans des sociétés.
07:42Là où c'est nouveau, où l'annonce est très intéressante, en tout cas de mon point de vue qui est un expert du financement des entreprises,
07:50c'est effectivement de voir que vous vous orientez vers la bourse pour vous financer.
07:56Et ça, je trouve ça intéressant, je trouve ça courageux aussi, puisque chacun le sait peut-être, ou ceux qui ne le savent pas doivent savoir
08:04qu'il y a des exigences réglementaires qui sont plus importantes, de la transparence qui doit être faite, des gouvernances qui doivent être mises en place.
08:11Et ça, je trouve que c'est très courageux.
08:13Et peut-être que, Laurent, vous pouvez nous en dire plus sur la raison pour laquelle vous avez décidé de choisir ce modèle de financement,
08:20qui est assez rare, puisqu'aujourd'hui, on compte sur les doigts d'une main les sociétés qui ont décidé de se lancer cette année sur Euronext Gross.
08:30Après les levées de fonds, l'IPO, pourquoi alors ?
08:35Oui, il y a plusieurs raisons qui nous ont fait choisir cette voie de financement.
08:38Tout d'abord, le fait de pouvoir rester souverain, s'accrocher en Europe, aller chercher des capitaux européens principalement.
08:47Et ça, ça nous tient vraiment à cœur.
08:50On le voit d'ailleurs dans la géopolitique.
08:52Vous l'avez mentionné en introduction de cette émission.
08:55Il y a besoin de créer des champions européens.
08:58Et on pense que maintenant, les marchés ont été éduqués grâce à Chad GPT et tout le travail d'OpenAI qui a fait connaître cette idée générative,
09:07qui était précurseur dans le domaine.
09:09Les marchés ont été éduqués à cette technologie.
09:11Et les entreprises voient qu'il y a maintenant un vrai besoin.
09:14La raison principale, c'est de se dire qu'on peut aller créer des champions européens en allant chercher des capitaux européens.
09:21Mais il faut aller le chercher sur la place la plus large possible.
09:24Et pour ça, il n'y a rien de plus large que les marchés publics.
09:27Et pour un lancement à l'international, prendre de l'envergure internationale, c'est incontournable.
09:33Thomas ?
09:34Oui, c'est une bonne nouvelle de voir un acteur français avec une approche pragmatique.
09:38Parce que c'est vrai que nous, on voit chez Forrester qu'on va vers une IA plus pragmatique.
09:42Au sens où on va vers de la fonction, on va vers des modèles spécifiques qui sont moins gourmands.
09:47Et je crois que c'est une spécialité justement de Lighton, si je ne dis pas de bêtises.
09:50Et c'est très important parce qu'il faut passer du POC à la production.
09:54On a vu, il y a des tas et des tas de cas d'usage sur l'IA générative.
09:57Maintenant, les entreprises qui vont se différencier sont celles qui sont un peu plus matures dans leur capacité à passer à l'échelle.
10:03Donc moi, je trouve que c'est une excellente nouvelle.
10:05Et ça fait plaisir de voir un acteur français qui est reconnu dans ce domaine.
10:09Cette première cotation de Lighton, c'est pour le 26 novembre.
10:14On vous souhaite le meilleur, bien évidemment, Laurent Daudet.
10:17Comment vous voyez la suite sur l'IA générative ?
10:20L'IA générative est en train d'évoluer déjà d'un point de vue technique.
10:26C'est vrai que maintenant, on est en train de travailler à la prochaine génération d'IA générative.
10:31C'est ce qu'on appelle les agents qui permettent d'automatiser des workflows plus complexes.
10:35Et ça, ça va rentrer progressivement dans nos produits à partir de l'an prochain.
10:39Et puis, ce qui a été dit, effectivement, on voit que les deux prochaines années,
10:45ça va être les années où il va y avoir des vrais passages en production après les phases de POC.
10:50Et ça va être assez crucial, effectivement, pour l'adoption.
10:53Merci encore, Laurent Daudet, d'avoir été avec nous dans le grand débrief de Smartech.
10:58On vous libère. On continue, nous, à débattre en plateau d'autres sujets.
11:02Il y a évidemment cette actualité qui est la nomination d'Elon Musk.
11:05On ne pouvait pas passer à côté par Donald Trump, nouveau président des Etats-Unis,
11:09qui nous dit qu'il est ravi d'annoncer que le grand Elon Musk,
11:13en conjonction avec son patriote américain Vivek Ramaswamy,
11:20dirigera le département de l'efficacité gouvernementale.
11:24C'est ce qu'a écrit Donald Trump sur son propre réseau social, d'ailleurs, Trousse Sociale.
11:29Comment vous avez accueilli cette nouvelle ?
11:32Ce n'est pas vraiment une surprise, mais enfin, c'est une confirmation qui est importante.
11:37Henri ?
11:39D'abord, c'est un libertarien, ou quelqu'un qui a fait un virage libertarien relativement récent,
11:44parce qu'il y a encore quelques années, il était plutôt un soutien des démocrates.
11:48Donc, il a pris ce virage libertarien il y a peut-être un, deux ans, ou quelques mois.
11:54Et donc, ça va être déjà une source de tension au sein de l'administration Trump,
12:02où, par exemple, un libertarien, les frontières, c'est quelque chose qui relève de l'État,
12:07et donc qui devrait être supprimé.
12:09Manifestement, ça n'aura pas été le cas,
12:11donc il va peut-être y avoir quelques sujets de friction au sein de cette administration.
12:15Ensuite, eh bien, il y a quand même une situation de conflit d'intérêts
12:21qui va certainement apparaître, ou qui apparaît déjà.
12:25C'est une part substantielle du financement des activités de Donald Trump.
12:30Ce sont des administrations fédérales, c'est la NASA, notamment à travers SpaceX.
12:39Et donc, là, il va y avoir quand même des activités intéressantes à observer,
12:46qui pourront être par ailleurs étonnantes.
12:49Et puis, enfin, peut-être qu'il y a eu la place de l'Europe dans cette affaire.
12:53Il va falloir quand même s'interroger.
12:56Tout le monde s'interroge.
12:57J'étais hier au Collège de France pour assister à une table ronde entre Mario Draghi
13:03sur son rapport sur la compétitivité de l'Europe,
13:05sur le futur de la compétitivité de l'Europe avec Emmanuel Macron.
13:08Eh bien, on sent au moins que la prise de conscience de l'intérêt pour l'Union européenne
13:16de rester unie et d'accélérer sur sa capacité à desserrer les dépendances technologiques
13:22que l'Europe a consenties depuis une trentaine d'années, elle est là.
13:25Maintenant, comment faire ?
13:26C'est là où, effectivement, il peut y avoir une certaine accélération
13:34grâce, justement, à Elon Musk.
13:36C'est ce que pensent certains observateurs.
13:39C'est qu'Elon Musk pourrait servir l'Europe sur ce sujet avec quand même...
13:44Alors, le servir parce qu'on va s'inquiéter des décisions qui peuvent être prises
13:48ou parce que, aussi, ça montre qu'un champion, finalement, de la tech, du numérique
13:53peut avoir autant d'importance, donc que ça devient hyper stratégique ?
13:56Plutôt parce que l'Europe va être mise en tension par les Etats-Unis
14:01pour déréguler, notamment, les activités des big tech en Europe.
14:06Et ça, il va y avoir des pressions extrêmement sévères.
14:10Ça a déjà été le cas.
14:12J'avais lu une note diplomatique qui avait été envoyée par Anthony Blinken
14:17à Ursula von der Leyen.
14:19C'était sur le sujet des schémas de certification de sécurité des services cloud
14:24où Anthony Blinken disait de manière très claire à Ursula von der Leyen
14:31si vous adoptez dans ce schéma de certification
14:34des critères d'immunité aux législations non européennes
14:38à portée extraterritoriale, notamment américaine,
14:42si vous adoptez ce schéma de certification en l'Etat,
14:45ça ne sera pas sans conséquence sur les relations sécuritaires et économiques
14:49entre les Etats-Unis et l'Europe.
14:51Menace à peine voilée dans une note diplomatique.
14:53Donc ça, je pense que ça va encore monter d'un cran avec l'administration Trump
14:57et sous l'influence d'Elon Musk.
15:00Est-ce que des Etats-Unis, vous avez l'impression que cette annonce est aussi importante
15:06qu'on le perçoit, nous, de l'autre côté de l'Atlantique ?
15:10Écoutez, il va falloir déjà voir combien de temps ça dure tout cela
15:13parce qu'effectivement, Elon Musk est un entrepreneur.
15:16Il rentre dans le jeu politique qui est un jeu complètement différent
15:19de celui de l'entreprenariat.
15:21Peut-être qu'il va nager comme un poisson dans l'eau dans cet environnement politique,
15:27pas sûr, parce qu'on connaît aussi beaucoup d'entrepreneurs
15:30qui se sont lancés en politique et qui, après cette expérience,
15:34l'ont beaucoup regretté.
15:35Donc voyons ce que ça donne.
15:37Rien que l'élection américaine, par exemple, il y a quelques jours,
15:41lui ont permis de valoriser ses titres à quelques vingtaines de milliards supplémentaires.
15:46Donc déjà, c'est un pari gagnant pour lui.
15:48Maintenant, on va voir d'un point de vue purement opérationnel
15:53ce que ça donne sur le long terme.
15:55Ça, ça ne gêne pas trop, j'imagine, les Américains
15:58qui ont un bénéfice économique autour de décisions politiques ?
16:03Ça ne les gêne pas trop.
16:05Je pense qu'ils ont beaucoup moins de pudeur que nous là-dessus.
16:09Pareil sur les conflits d'intérêts, ils le font de manière en grande pompe
16:14et en grande communication.
16:15D'ailleurs, ils sont très fiers de présenter cela comme une bonne nouvelle
16:22et comme quelque chose qui va révolutionner un peu leur façon de voir les choses.
16:26C'est des Américains beaucoup plus pragmatiques.
16:29Mais voyons sur la durée ce que ça donne.
16:31Mais ça peut faire accélérer quand même les choses dans le domaine de la voiture autonome,
16:35ça peut faire accélérer les choses dans la conquête de l'espace.
16:39S'il y a davantage de dérégulation...
16:42En tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'il n'y va pas pour rien probablement
16:44et qu'il y va pour ses intérêts et que probablement, il n'oubliera pas de servir.
16:49Je le pense et c'est naturel à mon avis.
16:52Ça sera naturel pour lui, ses propres intérêts.
16:54Mais voyons.
16:55Oui, le conflit d'intérêts, il est flagrant.
16:57Après, pour regarder du point de vue des Américains,
17:01je crois qu'il faut avoir en tête les ordres de grandeur.
17:03Le budget fédéral américain, c'est 6 500 milliards de dollars.
17:06Je ne sais pas si on se rend bien compte, nous en France, de ce que ça représente.
17:09Et on parle de 1 000 milliards d'économies.
17:11On parle d'un tiers d'économies.
17:13Donc, c'est très très important.
17:15Et oui, à ce côté, c'est un entrepreneur génial.
17:18Il fait décoller, atterrir des fusées.
17:20Il a créé Tesla.
17:21Il ne faut pas oublier non plus sa méthode de cost-killing.
17:24Elle n'a pas porté ses fruits.
17:25C'est ça qu'on vient chercher.
17:26C'est le cost-killer.
17:28Oui, mais ça n'a pas toujours bien fonctionné.
17:30Quand on regarde ce qui se passe chez Twitter,
17:32il y a eu une valorisation de ses titres récemment.
17:34Il a acheté la boîte 44 milliards.
17:36OK, plateforme libertarienne pour véhiculer les idées du candidat qu'il a fait élire.
17:41Mais au final, on parle d'un tiers d'utilisateurs en moins sur Twitter en Angleterre.
17:47On parle de revenus qui vont passer de 4,5 milliards en 2021 à 2 milliards.
17:53On parle de la moitié des salariés virés limite par SMS.
17:57Ça laisse des traces.
17:59Je ne suis pas sûr qu'aujourd'hui, l'opération Twitter,
18:02par cette arrivée politique, soit si successfoule que ça.
18:07Et on parle quand même de projets fédéraux qui ont un impact sur le quotidien de beaucoup d'électeurs
18:13qui n'ont pas forcément voté Trump.
18:16Le sujet qui me paraît essentiel, au-delà de ce qui va se passer aux États-Unis,
18:24qui est important pour nous, pour les Européens, pour notre économie,
18:28compte tenu de la désinhibition complète de ce couple Trump-Musk,
18:36me paraît porter des risques assez sévères géopolitiques.
18:41S'il y a effectivement, et notamment sur le sujet de l'Ukraine, par exemple,
18:45ou de la relation avec la Russie, un désalignement entre le bloc européen et les États-Unis,
18:53est-ce qu'il n'y aura pas une tentation d'utiliser le robinet de l'énergie numérique
18:58qui alimente aujourd'hui de manière extrêmement massive toute l'économie européenne
19:02pour mettre en tension les Européens, pour mettre en tension notre économie ?
19:06Et je pense que, compte tenu de la brutalité dont sont capables ces gens,
19:11nous serions bien inspirés à réfléchir comment est-ce que l'on peut très vite
19:16mettre en place les dispositions qui vont nous permettre de détendre
19:20ces dépendances technologiques que nous avons laissées s'installer.
19:23– Il y a une prise de conscience, je ne sais pas, chez les DSI par exemple,
19:27là d'un moment encore plus sensible sur la dépendance technologique ?
19:32– Oui, mais c'est un sujet qui doit être traité de manière collective
19:36et quand on a pu écouter, mardi soir, l'audition d'Ena Virkunen
19:43qui est la vice-présidente exécutive désignée par ThunderLion
19:48pour les sujets notamment numériques, eh bien ce n'est pas fait pour nous rassurer.
19:55C'était un bel exercice de langue de bois, ça c'est sûr,
19:58mais elle a répété à plusieurs reprises,
20:00les États-Unis sont notre partenaire technologique principal
20:06et le partenaire technologique principal de l'Union Européenne.
20:10Elle l'a répété deux fois, et donc de la part d'une Finlandaise
20:14qui a rejoint l'OTAN pour bénéficier du parapluie sécuritaire américain,
20:18ce n'est pas complètement anormal.
20:21– Et très concrètement, il y a déjà un impact,
20:24Trump n'est pas encore dans le bureau Oval, il y sera en janvier,
20:28Musk ne sera pas membre du gouvernement, et depuis deux jours,
20:32de quoi parle-t-on, d'ingérence politique dans la politique italienne,
20:35notamment avec un système d'information qui dépend du gouvernement
20:39et de discussions avec l'Ukraine sur Starlink et la communauté de satellites.
20:45Donc on voit déjà en très peu de temps qu'il y a un impact absolument énorme
20:49sur les enjeux informatiques et numériques de l'Europe.
20:51– Et ça peut modifier les rapports de force, même en France,
20:53parce qu'on a les éditeurs en ce moment qui se bagarrent,
20:56qui portent plainte contre X, mais aussi Microsoft,
21:00sur ce manque de transparence finalement des grandes plateformes de numérique
21:06sur la manière dont ils tirent des revenus des contenus
21:09qui sont générés par ces éditeurs français,
21:11et donc qui ne permettent pas des négociations normales.
21:15Est-ce que ce rapport de force peut justement être encore plus compliqué pour les Français ?
21:22On l'a dit pour les systèmes d'information, cette dépendance technologique,
21:26on le voit pour les éditeurs, c'est le sujet de l'information.
21:29C'est vrai que tout ça ne rend pas très optimiste.
21:32– Il va falloir se battre et justement aussi montrer les muscles,
21:36puisque évidemment l'Europe doit s'unir et doit faire face à tous ces enjeux
21:42qui sont des enjeux économiques, des enjeux diplomatiques,
21:45et il est évident que face à tout cela, si on monte les muscles,
21:49il va falloir qu'on le fasse aussi à l'évidence.
21:51– Alors il y a les milliards d'investissement, c'est ça les muscles,
21:54c'est ce qu'il en faut au niveau européen.
21:56Il y a aussi le sujet open source qui revient, qui ne cesse de revenir en disant
22:00c'est une voie aussi pour l'Europe, pour gagner du temps,
22:03pour avoir une force de frappe suffisante.
22:05Il y a une pétition qui a été lancée par un Autrichien pour appeler l'Europe
22:09à davantage utiliser l'open source.
22:12Est-ce que ça, ça vous semble une voie intéressante ?
22:15– L'open source crée également d'autres types de dépendance.
22:20Il n'y a pas qu'une seule voie, la voie principale,
22:24et l'open source peut y participer,
22:26mais c'est que l'Europe soit capable de se créer des champions technologiques,
22:32pas uniquement dans les couches hautes,
22:34mais également dans les couches d'infrastructures
22:36qui sont celles qui sont les plus capitalistiques.
22:38Parce qu'à la fin, le numérique, et notamment tout ce qui concerne
22:42l'intelligence artificielle, c'est du hardware,
22:45c'est de l'énergie, et de l'énergie décarbonée.
22:48Donc ne pas oublier ça, et se dire que c'est là-dessus
22:51que sont réalisés les principaux investissements par les big tech américaines.
22:57C'est là-dessus qu'il y a chaque année des centaines de milliards
23:00qui sont déversés pour construire ces infrastructures.
23:03Et ces infrastructures, il faut qu'on les maîtrise,
23:05et il faut qu'on crée une situation d'interdépendance avec les États-Unis,
23:14où on est toujours des alternatives qui permettent de détendre
23:17ces tensions qui sont mises du fait de ces dépendances technologiques.
23:20C'est absolument essentiel.
23:22Allez, on termine avec un sujet peut-être plus léger quand même.
23:25Les lunettes de réalité augmentées, bientôt utilisées pour aider les livreurs,
23:30en particulier chez Amazon, le nom de code du projet c'est Amélia,
23:33ça pourrait simplifier le travail des coursiers
23:37sur les cent derniers mètres du parcours de livraison.
23:41Est-ce que vous voyez ça comme un progrès,
23:43comme plus de surveillance numérique ?
23:46Est-ce que vous pensez que le marché est mature,
23:48ou que c'est encore les lunettes en réalité augmentée
23:51dont on a parlé il y a plusieurs années qui vont encore faire un flop ?
23:55Un petit point de vue là-dessus rapidement.
23:57Non, je vois qu'effectivement il y a eu beaucoup de tentatives
24:00pour essayer de conquérir le marché avec des lunettes connectées.
24:04Snapchat avait essayé de le faire, c'était un camouflet pour eux.
24:08On a eu les Google Glass il y a encore plus longtemps.
24:11Apparemment ça commence à revenir et les tendances de marché sont meilleures.
24:16Maintenant dans l'application au quotidien pour des travailleurs,
24:20c'est à voir sur l'exercice.
24:22Il est évident qu'il ne faut pas que ça devienne un outil
24:25qui permette de tracer les salariés, de trop les contrôler,
24:29ou de mettre encore davantage de pression sur eux.
24:32Si c'est un outil pour leur simplifier le quotidien
24:36et les livraisons qu'ils doivent réaliser
24:38et qui ne sont probablement pas faciles sur les derniers mètres,
24:41pourquoi pas ? Maintenant il va falloir regarder ça de près.
24:45Oui je pense que ça s'inscrit dans l'innovation.
24:47Vous pensez que le marché est mature ?
24:49Aujourd'hui pas encore, on est encore dans du test.
24:52Après oui je pense qu'on va y aller parce que finalement on est sur des chauffeurs
24:56dont on est sur des interfaces tactiles jusque là,
24:59donc tout ce qui va être audio et vision.
25:02Si on a un écran avec, il y a un micro dans les branches,
25:05on peut être guidé, navigué,
25:07donc on va utiliser les sens différemment
25:09et les approches multimodales vont permettre de le faire.
25:11Après il faut qu'il y ait une acceptabilité par le salarié
25:14parce que là on ne parle pas du tout du grand public,
25:17on parle de chauffeurs-livreurs qui livrent des dizaines,
25:20centaines de colis par jour,
25:22donc il faut que ça leur soit utile dans le quotidien.
25:24Et qu'ils pourront en livrer davantage visiblement avec ces lunettes ?
25:26C'est le but, mais encore faut-il que ce soit inscrit dans leur quotidien,
25:29que ce soit confortable, que ça se combine avec des lunettes de vue.
25:32Et donc là on est dans une logique de baisse des coûts logistiques
25:35d'abord et avant tout pour Amazon
25:37et on est sur des sous-traitants au final.
25:39Donc il y a un enjeu effectivement important d'acceptabilité
25:43et d'enjeu de vie privée autour de ça.
25:45Et là encore c'est un marché sur lequel on n'est pas du tout, nous.
25:48En Europe on a Meta avec ses lunettes,
25:51on a Google qui évidemment connaît et maîtrise cette technologie,
25:55là c'est Amazon,
25:57c'est encore là pour nous un marché totalement absent, inexistant.
26:03Alors il y a aussi des difficultés techniques
26:05parce que ça semble simple de dire finalement
26:07augmenter dans une paire de lunettes,
26:09mais il faut être capable de collecter les informations aussi,
26:12devant le pas de porte de chaque client d'Amazon par exemple.
26:16Oui, autant il y a un an on avait travaillé sur le sujet
26:24pour voir effectivement ces sujets,
26:26réalité virtuelle, réalité augmentée,
26:28quelle place on pouvait trouver dans l'économie.
26:32Autant on a beaucoup de doutes sur les usages récréatifs
26:36parce que ça nécessite des déploiements d'infrastructures
26:39qui sont considérables
26:41et il y a derrière un besoin de puissance de calcul très important
26:47qui fait qu'en tous les cas aujourd'hui
26:50il y a une consommation d'énergie
26:52qui au regard de l'intérêt récréatif peut être questionnée.
26:57En revanche il y a beaucoup d'applications professionnelles
27:00qui nous semblent tout à fait intéressantes.
27:02Il y a des sociétés qui utilisent cette réalité augmentée
27:07dans des tâches très professionnelles,
27:09par exemple le groupe Airbus
27:11pour faire les montages dans les avions,
27:16pour faire des opérations de maintenance complexes,
27:19pour faire de la formation.
27:21Tous ces usages nous paraissent tout à fait pertinents
27:24lorsqu'ils sont bien ciblés et bien compris
27:27dans un environnement professionnel
27:30où ça apporte d'abord de la simplification,
27:34de la rapidité, donc de la productivité
27:37et de la sécurité.
27:40C'est souvent ça démarre dans le domaine professionnel
27:43et puis ça devient le futur du smartphone, on verra.
27:46Mais là encore on a un ticket d'entrée
27:48qui est déjà très élevé sur l'innovation.
27:52Je pense que là aujourd'hui
27:54pour arriver à développer un produit fini
27:57qui puisse être utilisé dans un environnement professionnel,
28:00la marge me paraît assez haute.
28:03Je voulais terminer sur une note positive,
28:05je ne suis pas sûre en fait.
28:06Merci beaucoup à tous les trois.
28:08Merci Henri Dagrin, Louis Sauris et Thomas Husson.
28:11Merci beaucoup à vous de nous suivre
28:13sur la chaîne Bsmart for Change.
28:15C'était Smartech, on se dit à très bientôt.
28:17Bonne journée à tous.