Marie-Cécile Tardieu, directrice générale déléguée de Business France est l'invitée éco de franceinfo mercredi 9 avril, alors que les droits de douane annoncés par le président américain viennent d'entrer en vigueur.
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00:00L'invité éco, Isabelle Raymond.
00:04Bonsoir à toutes et à tous. Comment les entreprises françaises vont-elles faire face à la hausse des droits de douane décidés par les Etats-Unis ?
00:11Plus 20% sur tout ce qui entre sur le territoire américain en provenance de l'Union Européenne.
00:16Bonsoir Marie-Cécile Tardieu.
00:18Bonsoir.
00:18Vous êtes la directrice générale déléguée de Business France, l'organisme public qui accompagne les entreprises à l'export notamment.
00:25Qu'est-ce que vous conseillez aujourd'hui à ces entreprises qui exportent vers les Etats-Unis ?
00:31Le premier conseil est de se renseigner pour savoir dans quelles mesures elles seront affectées par les droits de douane et les différentes mesures qui seront prises par les autorités américaines.
00:41Se conseiller parce qu'il faut d'abord vérifier si on est affecté par ces droits de douane.
00:47Donc différents dispositifs publics ont été mis en place.
00:50Business France a créé une hotline, un réglementaire at businessfrance.fr, le service des douanes.
00:55Aussi, en région, a mis à disposition un numéro pour que les entreprises puissent se renseigner.
01:01Parce que ce n'est pas si simple aujourd'hui de savoir si on est concerné ou pas.
01:04Exactement.
01:04Il faut regarder ligne tarifaire par ligne tarifaire.
01:07Il ne faut pas se fier à des informations concernant tout un secteur.
01:10Il ne faut pas se fier non plus aux déclarations qui peuvent être faites.
01:14Puisqu'il y a tout d'abord la question de savoir si on est concerné.
01:16Et deuxièmement, de savoir dans quel délai les mesures seront mises en place.
01:20Comme vous le voyez, c'est assez chaotique.
01:22Il y a contre-ordre et contre-ordre de façon récurrente.
01:26Donc la première chose, c'est vraiment se renseigner.
01:29Deuxième chose...
01:30Mais pardon, juste sur ce point-là, pour l'instant, cette information, est-ce qu'elle existe ?
01:33Est-ce qu'il y a une ligne des produits qui sont concernés par cette première hausse de droits de douane décidés par les Etats-Unis ?
01:41Vous avez effectivement un certain nombre de produits qui sont concernés.
01:45Et la Commission européenne a mis en place, elle aussi,
01:48c'est disponible sur les différents sites internet du ministère des Finances,
01:52de la Direction générale du Trésor,
01:54une information ligne tarifaire par ligne tarifaire.
01:56Donc vous pouvez aller chercher cette information pour vérifier si votre produit est concerné.
02:01Et donc c'est, j'imagine, une mise à jour au fur et à mesure que les informations vous parviennent.
02:05Exactement, il y a des mises à jour.
02:07Ensuite, il faut être conseillé.
02:08Conseillé par les équipes de Business France qui sont présentes aux Etats-Unis,
02:12parce que la pire des choses serait, un, de prendre des décisions trop impulsives,
02:16de se retirer brutalement.
02:18Alors ça, vous ne le conseillez pas ?
02:19Non, il ne faut surtout pas se retirer brutalement,
02:22dans la mesure où, comme le mouvement est généralisé,
02:26tout le monde va être touché d'une certaine façon.
02:29Donc il n'y a pas de raison de perdre les positions qu'on pouvait avoir sur le marché américain.
02:35Est-ce que ça, ça vous revient ? C'est-à-dire que vous avez cette inquiétude qui se traduit par des gens qui appellent les services de Business France,
02:42notamment, et qui disent « qu'est-ce que je fais ? Est-ce que je m'en vais demain ? »
02:45Pour l'instant, on n'a pas de panique.
02:47Et ce qui est très important, c'est de garder son sang-froid.
02:50On n'a pas de panique.
02:51Certaines entreprises s'interrogent, par contre, c'est vrai, sur les coûts supplémentaires qui vont affecter leurs produits.
03:00Mais nos équipes aux Etats-Unis sont aussi en capacité de les aiguiller.
03:04Un certain nombre de ces coûts seront partagés par les distributeurs, par les importateurs.
03:08Donc il ne faut pas non plus raisonner de façon trop générale.
03:12Vous avez une possibilité de partage de la charge, de l'imposition qui sera mise par les autorités américaines.
03:20C'est-à-dire que la hausse des droits de douane, elle n'est pas forcément supportée par celui qui fabrique le produit ?
03:25Voilà, elle n'est pas nécessairement supportée par celui qui exporte.
03:29Vous avez aussi, on l'a vu récemment, toutes les questions aussi du fret.
03:34On a vu des personnes qui voulaient se précipiter pour exporter sur le marché américain avant la hausse des droits de douane,
03:43mais qui ont dû faire face à des hausses du coût du transport.
03:45Donc quand on exporte, il y a tout un ensemble de dispositifs à examiner.
03:51Et donc la première chose vraiment, c'est se renseigner, être conseiller sur sa stratégie d'exportation,
03:56mais surtout ne pas renoncer à l'international.
03:59Alors ne pas renoncer à l'international, mais il faut-il pour autant suspendre ses investissements aujourd'hui aux Etats-Unis,
04:05comme l'a demandé en quelque sorte le président français Emmanuel Macron,
04:10alors que Donald Trump invite aujourd'hui les entreprises à aller s'installer aux Etats-Unis.
04:14Vous avez dû le voir.
04:15C'est une question différente.
04:17Sur les entreprises qui exportent, le point fondamental, c'est qu'elles continuent à aller à l'international,
04:22parce que nous vivons des crises successives, nous l'avons vu avec le Covid,
04:26donc quelqu'un qui attendrait d'aller à l'international, qu'il n'y ait plus de crise,
04:29s'exposerait finalement à rester dans l'immobilisme et ne plaît dans la course.
04:32Mais si on n'est pas aux Etats-Unis aujourd'hui, est-ce qu'il vaut mieux se tourner vers d'autres marchés ?
04:37Aujourd'hui, les Etats-Unis, c'est le deuxième marché, je crois, à l'export des entreprises françaises,
04:42mais il y en a d'autres, et notamment en Europe.
04:44Vous leur conseillez quoi aujourd'hui ? De se tourner plutôt vers d'autres marchés que les Etats-Unis ?
04:48On conseille, au cas par cas, à la fois de continuer à diversifier ces destinations,
04:53parce qu'avoir une activité export diversifiée, c'est ce qui garantit de pouvoir faire face aux différents rythmes de croissance des marchés,
05:01mais ça de façon générale. On vit des crises aujourd'hui.
05:03On a vécu le Covid, on a vécu des crises énergétiques, les entreprises doivent être agiles, savoir s'adapter.
05:08Donc il ne faut surtout pas renoncer au marché américain.
05:10Il ne faut pas renoncer au marché américain.
05:11Il ne faut pas renoncer à exporter vers le marché américain.
05:14Il faut penser à diversifier ces exportations.
05:19Et en ce qui concerne votre question portant davantage sur les investissements vers le marché américain,
05:26c'est un autre sujet. La question qui a été évoquée, c'était le patriotisme.
05:30Aujourd'hui, c'est d'avoir une vision globale de la situation, des rapports de force entre l'Europe, la Chine et les Etats-Unis.
05:41Donc aujourd'hui, les entreprises doivent vérifier comment elles peuvent continuer à investir en Europe,
05:47qui est un très grand marché, un marché qui a de la sécurité juridique, qui a aussi des infrastructures, qui a une main d'œuvre.
05:55Donc les entreprises internationales qui examinent où investir ne doivent pas céder à un chantage qui les pousserait vers les Etats-Unis.
06:04Mais regardez aujourd'hui le marché qui peut leur offrir une vraie perspective de croissance.
06:10Et c'est le marché européen.
06:12Alors justement, investir en Europe notamment, est-ce que vous craignez aussi que les Etats-Unis renoncent à investir en France ?
06:22Ils font partie des premiers investisseurs aujourd'hui.
06:25D'ailleurs, c'est le premier investisseur étranger en France.
06:28On ne voit pas de reflux des investissements américains en France aujourd'hui.
06:33Les investissements qui sont faits en France sont des investissements pour le long terme.
06:37Quand vous décidez de choisir de mettre des millions d'euros dans des entreprises en Europe,
06:43vous n'avez pas une volonté de faire ça pour quelques mois, quelques années.
06:48Donc on est dans une logique de long terme.
06:50Les entreprises américaines qui ont choisi le marché français l'ont choisi parce que c'est un marché très porteur,
06:56c'est un marché avec beaucoup de compétences, c'est un marché avec des consommateurs
07:00qui leur donnent à la fois accès au marché français mais aussi au marché européen.
07:04Des consommateurs matures qui sont souvent porteurs de nouvelles tendances de consommation.
07:08Et c'est aussi un marché avec des technologies qui aujourd'hui sont en train de se développer,
07:13y compris dans la transition écologique, y compris dans des secteurs porteurs pour l'avenir.
07:18Mais avec cette guerre commerciale qui est entamée entre la Chine et les Etats-Unis surtout,
07:24mais on va voir comment ça va se passer entre l'Union européenne et les Etats-Unis.
07:28Est-ce que vous ne craignez pas de voir les investissements américains ralentir en Europe et surtout en France ?
07:34Ce que l'on peut craindre, c'est l'effet rebond des produits chinois qui n'auront plus accès au marché américain,
07:41qui pourraient se déverser sur le marché européen.
07:44Donc l'Europe doit bien sûr avoir une discussion franche avec les autorités chinoises
07:50sur la façon de gérer cette guerre commerciale.
07:53L'Europe doit aussi être extrêmement vigilante sur la protection de son marché.
07:58Mais n'entrons pas dans une guerre qui ne sera finalement bénéfique à personne.
08:04Le marché européen reste un marché essentiel pour de nombreuses entreprises.
08:09Il n'y a pas de raison qu'elles y renoncent.
08:11Vous avez vu depuis le Covid une régionalisation des chaînes de valeur.
08:14Cette régionalisation des chaînes de valeur fait que le marché européen garde toute sa pertinence.
08:19Et comme je le disais tout à l'heure, il faut garder son calme.
08:24Il faut prendre le temps de la réflexion.
08:25Il faut regarder les différents impacts.
08:28Puisqu'on a aujourd'hui à la fois par l'évolution du taux de change,
08:34l'évolution du cours du pétrole,
08:37énormément d'effets dont on a du mal à mesurer ce qu'ils apporteront finalement à l'économie mondiale dans les quelques semaines.
08:43Mais ce qui est certain, c'est que les choix des investissements sont des choix de long terme.
08:47Et il faut donc que les entreprises françaises qui vont à l'export n'y renoncent pas,
08:52mais qu'elles se renseignent des renseignements que vous leur apportez.
08:56Merci beaucoup Marie-Cécile Tardieu, directrice générale déléguée de Business France.
09:01Vous étiez l'invité éco de France Info ce soir.