Aurore Bergé, ministre de l'Égalité entre les Femmes et les Hommes était l’invitée de #LaGrandeInterview de Sonia Mabrouk dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Bonjour Aurore Berger, et bienvenue à la grande interview sur CNews et Europe 1.
00:04Vous êtes la ministre de l'égalité entre les femmes et les hommes.
00:07Vous êtes aussi en charge de la lutte contre les discriminations, nous allons en parler.
00:10Mais tout d'abord, le monde s'inquiète des droits de douane imposés par Donald Trump.
00:14Les Français s'inquiètent plus singulièrement pour leur pouvoir d'achat, les factures d'électricité,
00:19la non-maîtrise de l'immigration, la menace islamiste avec un attentat déjoué.
00:23Pourtant, hier, sous un beau soleil printanier,
00:26les politiques étaient rassemblées, trois meetings différents.
00:30En quoi cela aide à résoudre les problèmes des Français, Madame la Ministre ?
00:33Alors, il y avait trois meetings, trois salles et trois ambiances qui étaient quand même radicalement différentes.
00:38Un meeting, nous, qu'on avait prévu de très longue date.
00:40Je crois que c'est important aussi que les partis politiques
00:42essayent de rythmer la vie politique française.
00:45Un meeting en réaction à une décision de justice.
00:48Et d'ailleurs, il y a un meeting en réaction au meeting en réaction, pour être clair.
00:53Enfin, dimanche de campagne.
00:54Oui, c'était dimanche de campagne, mais je pense qu'il ne faut pas enjamber, justement.
00:57Moi, je pense qu'il ne faut pas enjamber parce qu'aujourd'hui, déjà,
01:00on a un président de la République qui préside.
01:01On est nous-mêmes au travail.
01:03Moi, je suis membre du gouvernement et donc notre enjeu, il est là.
01:06Parce que si on dit aux Français, écoutez, il ne va rien se passer pendant les deux prochaines années
01:09et attendez de voir la présidentielle,
01:12le risque, c'est le risque que les Français se détournent définitivement de la vie politique
01:16et se disent qu'en effet, on est un peu loin de la balle et un peu loin de leurs préoccupations.
01:19Il y a déjà le cas en grande partie.
01:20Ce qui risque d'être le cas.
01:22Et notre enjeu, c'est comment, justement, on les ramène à la vie politique
01:25en leur disant que la vie politique, elle est utile pour eux.
01:28Ça veut dire des partis qui doivent travailler, qui doivent travailler sur les idées,
01:31qui doivent nourrir aussi en termes d'idées et de projets.
01:34Vous nous direz quelle idée nouvelle est sortie hier.
01:35Et puis surtout, encore une fois, se dire qu'on n'enjambe pas avant l'élection présidentielle,
01:40avant que chacun ou chacune pense à l'élection présidentielle.
01:42Il faut d'abord avoir des résultats aujourd'hui.
01:44Place Vauban, c'était l'ERN, la France insoumise et l'extrême gauche, place de la République.
01:48La Cité du cinéma avec Gabriel Attal et plus largement le Bloc central.
01:52Vous y étiez. Côté Place Vauban, il n'y a pas eu de dérapage, pas de violence.
01:55Fort heureusement, d'ailleurs, pour notre pays.
01:57Il n'y a pas eu le remake de la prise du capital.
01:59Pas de volonté séditieuse affichée, je pense, du côté du Rassemblement national.
02:03Est-ce que certains ont voulu faire peur, tout simplement ?
02:07Non, je pense pas. Moi, je n'ai jamais cherché à faire peur.
02:09Moi, je suis quand même interpellée par le fait d'avoir un meeting
02:13qui est un meeting uniquement en réaction à une décision judiciaire
02:16et un meeting dont le seul propos est de dire surtout ne touche pas à ma candidature.
02:20Le seul propos, il n'est pas pour les Français.
02:22Le seul propos, il est Marine Le Pen qui dit quoi qu'il arrive,
02:25c'est moi qui dois être votre candidate et c'est moi qui dois être le président de la République.
02:29Encore une fois, les millions de Français le souhaitent aussi derrière elle.
02:32Mais de toute façon, il y aura une candidature du Rassemblement national.
02:35Moi, je dis deux choses.
02:35Un, Marine Le Pen, elle est présumée innocente jusqu'à ce qu'une décision définitive la condamne,
02:40puisque nous savons qu'elle s'est pourvue en appel.
02:42Donc, il y aura un appel.
02:43Mais dans le même temps, il y a 154 pages de jugement.
02:46J'invite chacun à regarder parce qu'à la fin,
02:49le Rassemblement national a été condamné pour quoi en première instance ?
02:53Pour du détournement d'argent public.
02:55Pas d'enrichissement personnel.
02:56Mais ça, c'est toujours la formule que d'autres parties d'ailleurs ont rappelée
02:59avant que Marine Le Pen soit condamnée.
03:01Pas d'enrichissement personnel, ça se discute à partir du moment
03:03où les personnes qui étaient engagées étaient des personnes qui travaillaient directement,
03:07non pas même pour le parti, encore moins pour le Parlement européen,
03:10mais pour la famille Le Pen, le majordome de Jean-Marie Le Pen.
03:15Présumée innocente.
03:16Je dis qu'elle ne sera définitivement condamnée ou innocentée qu'au moment de l'appel.
03:21Et pourtant, Gabriel Attal, hier...
03:23Je dis juste quand même, attendez, 4,4 millions d'euros d'argent public,
03:26c'est 250 années de SMIC si vous la ramenez à ça.
03:29Les artisans qui nous écoutent, par exemple, les élus locaux qui nous écoutent,
03:33eux, si jamais ils étaient pris la main dans le sac en train de détourner de l'argent,
03:37vous pensez qu'il se passerait quoi ?
03:38Vous diriez la même chose quand il va y avoir un appel,
03:40puisque le parquet a fait appel pour le modem qui est pris dans la même affaire avec François Bayrou ?
03:44Je dis la même chose pour tout le monde.
03:46Je dis qu'on respecte l'autorité de la chose jugée,
03:50on respecte les décisions de justice,
03:52et on ne peut pas accepter que dans notre pays,
03:54nous ayons aujourd'hui des magistrats et des juges qui soient sous protection policière.
03:58Ça, ça devrait, quel que soit notre parti, quel que soit notre vote,
04:01nous interpeller, nous dire que celles et ceux qui rendent la justice
04:04peuvent être placés sous protection policière.
04:05Vous avez dit qu'elle est présumée innocente, c'est le cas avant l'appel.
04:09Pourtant, Gabriel Attal a lancé hier, au sujet de Marine Le Pen,
04:12« qui vole paye ».
04:14Là, on fout le pied à la présomption d'innocence.
04:16Ça veut dire que si une décision de justice définitive est rendue, c'est ça.
04:19Il n'y a pas de « si » dans la phrase « qui vole paye ».
04:22Moi, je tiens toujours cette même ligne-là.
04:24À partir du moment où elle s'est pourvue en appel, elle est présumée innocente.
04:27Mais pour l'instant, la condamnation, en première instance, dit quoi ?
04:30Dit 4,4 millions d'euros d'argent public détourné.
04:34Et encore une fois, il n'y a aucune raison
04:36qu'une forme de totem d'immunité au regard des sondages.
04:38Parce que c'est un peu ça que nous dit l'URN.
04:40Écoutez, comme on est haut dans les sondages,
04:42on ne mérite pas d'avoir telle ou telle condamnation.
04:44En fait, ce n'est pas une loterie et il n'y a pas un totem d'immunité
04:47parce qu'on serait haut dans les sondages.
04:49Ou alors, ça veut dire quoi ?
04:51Ça veut dire que quel que soit le type de fait sur lesquels on serait jugé,
04:54eh bien, on serait exonéré, finalement, de ses responsabilités.
04:57Non, on assume ses responsabilités jusqu'au bout
05:00et on laisse faire le travail de la justice puisqu'il y aura un appel.
05:04Est-ce qu'il y a un totem d'immunité, pour reprendre votre formule,
05:07pour la gauche qui aurait le monopole de la manifestation ?
05:10Vraisemblablement non, puisque pour le coup, la participation était résiduelle.
05:13Ça provoque des cris d'orfraie quand le RN manifeste, reconnaissez-le.
05:16Non, mais pour reprendre une expression de Jean-Luc Mélenchon,
05:18là, c'était très résiduel sur la mobilisation qui était celle d'une partie de la gauche.
05:23D'ailleurs, toute la gauche n'a pas appelé à manifester.
05:25Le Parti socialiste semble enfin et définitivement se détacher de la France insoumise.
05:29Et tant mieux, parce que moi, je préfère qu'on ait une gauche républicaine.
05:32C'est peut-être plus difficile dans les urnes pour nous,
05:34mais c'est mieux pour le pays d'avoir une gauche qui croit en la République,
05:37qui croit en la laïcité et qui refuse de se mélanger,
05:39avec d'ailleurs assez peu de drapeaux français dans cette manifestation.
05:43D'ailleurs, je le dis à nos auditeurs européens qui ne voient pas l'image,
05:46effectivement, beaucoup de drapeaux, notamment palestiniens et d'autres syndiqués.
05:51Quel est le plus grand danger pour la République à vos yeux ?
05:54Le RN ou Alafi ?
05:55Je vous pose la question parce que sur Alafi, vous avez été assez claire.
05:57Vous avez dit que cet acronyme, la France insoumise,
06:00représentait le nouvel antisémitisme.
06:02Est-ce que vous y voyez un même danger avec le RN ?
06:04Parce que moi, j'ai la responsabilité, notamment au gouvernement,
06:06de la lutte contre l'antisémitisme.
06:08Donc, je suis bien obligée de voir ce qui existe dans notre pays.
06:11Et ce qui existe dans notre pays, c'est une explosion de l'antisémitisme.
06:15Et cette explosion, elle est attisée par ceux qui, finalement,
06:17autorisent, libèrent, voire encouragent cette parole antisémite,
06:21Jean-Luc Mélenchon, en étant, malheureusement, le porte-drapeau.
06:25Et il faut le reconnaître.
06:26Il faut avoir la lucidité de le reconnaître pour le combattre.
06:29Mais je dis dans le même mouvement qu'il ne faut pas oublier
06:31qu'il y a quelques semaines, quelques mois,
06:33lors des élections législatives de 2024,
06:36Jordan Bardella a passé sa campagne à s'excuser
06:38des candidats qu'il avait lui-même choisis et investis.
06:40S'excuser parce qu'ici, il y avait eu un propos raciste.
06:43Ici, il y avait eu un propos négationniste.
06:45C'est déjà reconnaître les faits ou les propos.
06:48C'est quand même un peu étonnant de les avoir investis.
06:50Donc, est-ce qu'il s'est excusé uniquement parce que les médias
06:54ont vu qui étaient les candidats ou est-ce qu'il espérait
06:56que ça passe entre les gouttes ?
06:57Je mets en garde aussi nos compatriotes de confession juive
07:00dont je sais qu'aujourd'hui, ils subissent des phénomènes
07:03qui sont absolument insupportables d'insultes,
07:06d'intimidations et d'agressions.
07:07Pour leur rappeler que la République, elle sera toujours avec eux
07:10et toujours de leur côté et qu'elle ne cèdera rien.
07:13Mais que ce n'est pas parce qu'il y a un danger immédiat,
07:16imminent qu'est celui de la France insoumise qu'il faut oublier,
07:19encore une fois, non pas juste le passé, mais le présent QRL.
07:22Est-ce que vous allez vous excuser ?
07:24M'excuser de quoi ?
07:25Pas vous-même, le Bloc central.
07:26Sûr.
07:27Gabriel Attal, vous venez parler de la campagne des législatives
07:30pour Jordan de Bardelage.
07:31Je vous rappelle que pour une autre campagne des législatives,
07:33second tour, Gabriel Attal avait appelé à faire barrage au Rennes,
07:36même avec un bulletin LFI.
07:38Vous savez que ce n'était pas ma position.
07:39Enfin, vous faites partie d'un Bloc central.
07:41Oui, mais moi, j'ai assumé d'avoir une position différente.
07:43Et l'un des premiers ministres a-t-il assumé ?
07:45J'ai assumé, alors que j'étais au gouvernement et qu'il était Premier ministre,
07:47j'ai assumé dès le soir du premier tour des élections législatives
07:50qu'on ne combat pas le Rassemblement national avec un bulletin de vote LFI.
07:54Mais vous étiez hier à son meeting.
07:56Oui, parce que j'appartiens au Bloc central.
07:58Édouard Philippe aussi était présent, François Bayreau était présent.
08:00Et je pense que c'est important de montrer qu'on doit travailler ensemble
08:04parce qu'aujourd'hui, on gouverne ensemble
08:06et que j'espère que demain, on aura une candidature commune
08:08pour l'élection présidentielle et que ça, ça ne se ferait pas.
08:10Et pour ça, faut-il que Gabriel Attal soit au clair sur ce sujet ?
08:12J'entends qu'une ministre est claire sur ce qu'incarne la France insoumise.
08:15Mais je pense que ce sera un point central de la campagne présidentielle de 2027
08:19et que quiconque envisagerait de se présenter en 2027 doit clarifier sa position.
08:23Pour moi, elle est très claire.
08:24On ne combat pas l'ERN en appelant à voter pour la France insoumise.
08:27Je l'ai toujours dit et je l'ai dit dès le soir du premier tour des législatives.
08:30Je n'ai pas attendu les débordements actuels pour le dire.
08:33Encore un mot sur ce sujet, au sujet de l'exécution provisoire.
08:36Justement, le président du groupe UDR, Eric Ciotti, allié du Rassemblement national,
08:40va donc déposer une proposition de loi pour supprimer cette exécution provisoire
08:44des peines d'inéligibilité.
08:46C'est l'un des leviers à travers lequel Marine Le Pen pourrait se présenter en 2027.
08:50Vous y êtes favorable ?
08:52Il y aura un débat au Parlement si vraiment la proposition de loi est inscrite.
08:55J'entends qu'au Sénat aussi, peut-être que cette proposition de loi serait proposée.
08:59Moi, je pense qu'il faut vraiment, là, laisser totale liberté de vote aux députés.
09:03Je suis aujourd'hui membre du gouvernement et je pense que nous,
09:06quand vous êtes membre du gouvernement, en s'exprimant sur ce sujet,
09:08donne le sentiment qu'on voudrait d'une quelconque manière influer sur une décision de justice.
09:11Vous député, vous diriez oui ou non ?
09:13Mais moi, je suis membre du gouvernement.
09:15Ça s'appelle la langue de bois, ne plus vouloir répondre.
09:16On ne vous connaît pas pour ça.
09:17Un peu, mais parce que je pense aussi que toute parole que je dirai sur la question
09:21de l'exécution provisoire sera vue comme une manière d'interpréter une décision de justice.
09:25Mais ministre, c'est dit troublé.
09:27Vous avez été troublé par le trouble du Premier ministre ?
09:29Je n'ai pas entendu le Premier ministre dire ça.
09:30J'ai lu des entourages disant ça.
09:32Donc moi, je me méfie aussi de ça.
09:33Et vous savez très bien comment ces choses-là existent aussi dans la presse.
09:36Je sais juste que quand une décision de justice est rendue,
09:38on n'a ni à s'en réjouir, ni à manifester une opposition.
09:42On a à acter cette décision de justice.
09:44On a à rappeler encore une fois la présomption d'innocence,
09:47tant que l'appel n'est pas prononcé,
09:48mais ne jamais oublier ce pour quoi, en première instance,
09:51ils ont été condamnés, 4,4 millions d'euros d'argent public.
09:54Donc de l'argent des Français qui auraient été détournés.
09:57Je voudrais qu'on évoque à présent, Aurore Barges,
09:59ce qui s'est passé à l'université Lyon 2.
10:00Les ministres affirment que la République ne cèdera rien,
10:02mais n'a-t-elle pas déjà cédé ?
10:04Lorsque des étudiants, si ce sont des étudiants,
10:06parce qu'ils étaient encagoulés d'extrême gauche,
10:08s'en prennent un professeur en scandant,
10:10sioniste, raciste qu'il soit mis,
10:12et qu'il soit mis d'ailleurs sous protection fonctionnelle.
10:14Ce même professeur, maître de conférence,
10:16qui s'est exprimé dans Le Parisien et qui affirme qu'il lui-même,
10:19évidemment, ne reculera pas.
10:21Mais est-ce que la République elle-même n'a pas reculé ?
10:23On est dans un pays où plusieurs enseignants
10:25ont payé de leur vie le fait d'enseigner.
10:27On a eu aux oratorats Toulouse,
10:29où un enseignant et des enfants ont été pris pour cible
10:31et ont été assassinés à bout portant dans une école.
10:34On a connu Samuel Paty, on a connu Dominique Bernard.
10:37Donc prendre pour cible des enseignants,
10:39qu'ils soient à l'université, qu'ils soient au collège,
10:41qu'ils soient au lycée, est absolument insupportable, intolérable.
10:45Il faut qu'il y ait une réponse implacable et systématique.
10:47Moi, ce qui m'a le plus choquée dans ces images,
10:49au-delà, en effet, je ne sais pas s'ils sont des étudiants
10:51parce qu'ils n'ont pas le courage de se montrer à visage découvert,
10:54c'est le silence dans cette salle.
10:56Il n'y a pas un étudiant, deux étudiants, trois étudiants
10:59qui sont venus prendre la défense de leurs enseignants.
11:00De quoi est-il révélateur, ce silence ?
11:02D'une forme d'indifférence.
11:04D'une forme d'indifférence, encore une fois.
11:06Mais l'indifférence, elle est complice.
11:09À partir du moment où vous laissez faire
11:10dans un pays qui a connu des attentats islamistes,
11:14qui ont ciblé délibérément des enseignants qui enseignaient,
11:17qui l'ont payé de leur vie,
11:18oui, je pense que l'indifférence, le silence devient complice.
11:21Et il ne faut en aucun cas qu'il y ait un silence de l'État.
11:24Il n'y a pas de silence de l'État,
11:25il y a évidemment une protection fonctionnelle.
11:26Le fait que nous-mêmes, État, on se porte partie civile
11:29et on est aux côtés de nos enseignants,
11:31de manière à ce que ce ne soit pas eux
11:32qui ensuite soient en première ligne d'un point de vue judiciaire,
11:36mais ça veut dire qu'il faut être très lucide sur les menaces,
11:39très lucide sur l'ancrisme islamiste
11:42qui malheureusement existe dans notre pays.
11:44Et ce n'est pas un hasard si l'université,
11:46si l'école sont des lieux pris pour cibles
11:48puisque ce sont des lieux de transmission de savoir
11:50et la manière avec laquelle certains chercheraient à détourner.
11:54Justement, c'est le lieu de…
11:55Non, par exemple, après avoir demandé à une élève de retirer son voile,
11:58une enseignante a été prise à partie et filmée à son insu,
12:00là encore, les mêmes mots,
12:01mots que vous avez utilisés assez clairement,
12:03en vous disant « nous ne céderons rien »,
12:05« la laïcité ne se négocie pas »,
12:06êtes-vous sûre que la laïcité n'a pas été négociée pendant des années
12:09via des accommodements raisonnables
12:11qui sont très déraisonnables dans notre pays ?
12:12En fait, il n'y a aucun accommodement qui peut être raisonnable
12:14sur la question de la laïcité.
12:15Il n'y en a pas eu ?
12:16Il ne faut pas qu'il y en ait, jamais,
12:18mais ça veut dire qu'il faut des enseignants courageux
12:19comme cette enseignante qui dit à partir du moment, mademoiselle,
12:22où vous êtes dans l'enceinte de l'établissement scolaire
12:24et l'enceinte de la République,
12:26vous n'avez pas à porter un voile,
12:27vous n'avez pas à porter un signe religieux ostensible
12:30parce que c'est la loi.
12:31Et la loi, elle s'impose à tous.
12:32Et la loi, elle s'applique pour tous et partout
12:35sur le territoire de la République.
12:36Donc cette enseignante, elle a été courageuse
12:38et elle a fait son travail.
12:39Et ce qui est insupportable, c'est qu'ensuite,
12:41c'est à elle qu'on met une cible dans le dos
12:43parce qu'immédiatement, sur les réseaux sociaux,
12:45des images circulent.
12:46C'est comme ça que Samuel Paty a été pris pour cible.
12:49C'est parce que sur les réseaux sociaux,
12:51il y a eu un emballement et qu'ensuite, malheureusement,
12:54il y a eu ce drame absolu.
12:55Donc il faut, là encore, qu'il y ait une réponse très claire.
12:58Lucidité.
12:58Mais alors, quelle est votre position, madame la ministre,
13:00dans le gouvernement au sujet du voile ?
13:02On a du mal à comprendre.
13:03Malgré les demandes répétées de la droite,
13:05le Premier ministre tarde à inscrire le texte
13:07interdisant le port du voile dans les compétitions sportives.
13:09Il paraît que ce sera avant l'été.
13:11François Bayrou qui a affirmé qu'il ne fallait pas stigmatiser
13:15nos 9 millions de compatriotes musulmans.
13:17En quoi faire appliquer une loi,
13:19c'est stigmatiser des millions de musulmans ?
13:21Je pense qu'il n'y a aucune stigmatisation
13:23parce que d'abord, en effet, on est français
13:25avant d'être musulmans, juifs ou que sais-je.
13:27Et je pense qu'il faut assumer de dire que la religion,
13:30c'est une opinion et que la religion dans notre pays,
13:33évidemment, elle ne doit pas être...
13:33Vous l'assumez ?
13:34Oui, mais parce que c'est la loi...
13:35Parce que c'est la ligne du gouvernement.
13:36C'est la loi de la République.
13:37Il n'y a pas de secret que...
13:39C'est pas un secret distinct.
13:40Donc, ce n'est pas la même ligne que la ministre des Sports,
13:43que la ministre de l'Éducation.
13:44Oui, mais la ligne, elle a été tranchée et arbitrée.
13:46Il y a une proposition de loi qui a été adoptée au Sénat.
13:48Il y a une proposition de loi,
13:49et le Premier ministre l'a lui-même dit dans une interview,
13:52qui sera adoptée avant l'été.
13:54Donc, c'est très clair.
13:55Encore une fois, quand on est sur un terrain de sport,
13:58on laisse ses idées, qu'elles soient religieuses
14:01ou politiques, au vestiaire.
14:03Et je pense d'ailleurs que dans notre société,
14:05il devrait y avoir un peu plus de discrétion
14:07sur le fait religieux.
14:08Je pense que les Français sont lassés
14:10d'avoir en permanence du commentaire sur des faits
14:13qui sont des faits religieux et qui sont des faits d'antrisme
14:15et parfois même d'idéologies qui ne sont même plus religieuses,
14:18mais d'idéologies politiques.
14:19Il faudrait aller plus loin.
14:20Il y a quelques années, vous étiez même pour l'interdiction du voile
14:22pour les accompagnatrices scolaires.
14:23Vous aviez d'ailleurs ému votre camp.
14:25Je ne sais pas si vous êtes dans la même ligne.
14:26Moi, je continue à assumer les convictions qui sont les miennes
14:28et je n'en ai pas changé parce que je suis devenue ministre.
14:30Je pense notamment au voilement des petites filles.
14:32Je pense que c'est intolérable de se dire qu'aujourd'hui,
14:35dans la République française, on a des enfants de 7 ans, 8 ans, 10 ans
14:38qui sont couvertes comme si leurs cheveux étaient indécents ou impudiques.
14:42Et comment vous voulez que nos enfants grandissent de la même manière
14:45si, dès toutes jeunes, on leur explique qu'en fait,
14:48elles doivent se limiter ?
14:50Et les accompagnatrices ?
14:51Ça, c'est un débat qu'on a déjà eu.
14:53Malheureusement, il n'y a pas eu une majorité pour le voter.
14:57Non, je n'ai pas changé d'avis parce que je persiste à penser
15:00que l'école doit être un sanctuaire absolu
15:02et que sur le temps scolaire,
15:03sur des moments qui sont des moments obligatoires,
15:05eh bien il faut que la laïcité puisse s'appliquer
15:08parce qu'il ne faut aucune influence autre
15:10que l'influence qui est celle de l'école et des valeurs éducatives.
15:13Je voudrais conclure, mais c'est important,
15:14c'est une seule question sur un autre sujet
15:16qui fait partie de vos priorités, qui est ô combien important.
15:19Vous avez vu la série sur Netflix autour de Bertrand Cantat
15:22intitulée « De rockstar à tueur, le cas Cantat ».
15:25Plus de 20 ans, c'est ça, après le meurtre de Marie Treintenier.
15:28Vous l'avez vue cette série ?
15:28Oui, je l'ai vue, je l'ai vue ce week-end.
15:30J'allais dire, qu'en avez-vous pensé ?
15:32J'ai noté que les médias, à l'époque, évoquaient un accident,
15:35une dispute de couple qui a mal tourné, bref, un crime passionnel.
15:39On retiendra peut-être certainement d'ailleurs le courage de Lio,
15:42qui en a parlé sous les ricanements de certains.
15:45Déjà, je remercie la journaliste qui a d'abord écrit un livre
15:49et qui a ensuite réalisé ce documentaire,
15:51qui nous réinterroge nous-mêmes sur nos propres comportements à l'époque,
15:54parce qu'à force d'avoir entendu les médias dire
15:56que tout ça n'était qu'un accident,
15:57on a oublié qu'il l'avait brutalement frappé à plusieurs reprises
16:01et qu'il l'a laissé mourir toute une nuit,
16:03puisqu'il a refusé de lui porter secours.
16:06Et Marie Trintignant, elle n'est pas morte d'amour.
16:09Marie Trintignant, elle est morte sous les coups d'un homme,
16:11les coups répétés d'un homme qui l'a assassinée.
16:14Et puis, il y a une autre femme, ensuite, qui est morte.
16:17Et on l'a reconnue, nous, dans la loi, qui est la question du suicide forcé,
16:20suite justement à ce drame de cette épouse de Bertrand Cantat,
16:23qui ensuite s'est donnée la mort parce que vraisemblablement,
16:26elle avait subi des violences répétées, physiques et psychologiques.
16:29Donc, encore une fois, on ne meurt jamais d'amour.
16:31Il n'y a pas de crime de passion, il n'y a pas de crime passionnel.
16:34Il y a malheureusement des femmes qui sont mortes
16:37et qui sont mortes sous les coups de leur conjoint ou de leur ex-conjoint.
16:4020 femmes sont mortes depuis le début de l'année dans le cas de féminicide.
16:43Aujourd'hui, on n'est plus crime passionnel, on dit féminicide.
16:46Donc, il y a des choses qui ont évolué dans la société,
16:48il y a des lois qui ont progressé,
16:49mais il y a aussi toute une culture qu'il faut qu'on continue à modifier.
16:52Merci, Aurore Barger.
16:53C'est l'occasion de penser, évidemment, à la mémoire de ces femmes
16:55et à la mémoire de Marie Trintignant.
16:57Merci à vous. Bonne journée, à bientôt.