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Covid-19 : "Les gens sortent de l'avion et puis s'éparpillent. C'est pas possible !"

Le coup de gueule de Philippe Juvin, chef de service des urgences de l'hôpital Georges-Pompidou, sur la gestion du virus dans les aéroports français.
Transcription
00:00Les avions atterrissent en France, les gens sortent de l'avion et puis s'éparpillent, c'est pas possible, ça c'est pas possible.
00:05Là, je trouve qu'on n'est pas très très sérieux et qu'on devrait améliorer les choses.
00:10En France, c'est le Club Med, donc je ne comprends pas pourquoi il y a des tas de gens qui atterrissent sur le territoire national
00:17et qui s'éparpillent comme ça et qu'on perd de vue.
00:22Non, dans tous les pays sérieux, quand vous arrivez d'un pays épidémique,
00:27on vous demande où vous allez, où vous allez habiter, qui vous envisagez de voir, pourquoi vous êtes là.
00:33En France, c'est le Club Med, et bienvenue, et puis voilà.
00:38Non, c'est pas possible. Donc ça, je pense qu'il faut qu'on change notre cuisse d'épaule et qu'on soit un peu plus sérieux.
00:44On a, nous, à tel point que nos instructions, tenez-vous bien, c'est quand quelqu'un se présente aux urgences
00:51pour n'importe quoi, ça peut être une entorse de la cheville parce qu'il a fait du foot,
00:54dès lors qu'il vient d'un pays étranger, il faut le tester, qu'on lui demande de le tester, ce qui est normal.
01:00Et ça, il faut le tester dès lors qu'on le garde à l'hôpital.
01:04Pourquoi on ne l'a pas fait quand il a quitté l'avion ?
01:07Alors, ça va être fait sur la base du volontariat, mais ce n'est pas suffisant.
01:11C'est-à-dire que ça doit être imposé, clairement, pour vous, aujourd'hui, on n'est pas à la hauteur sur ce point-là ?
01:14Oui et non, oui et non. Moi, je comprends qu'on ne puisse pas imposer à tous les gens qui sortent de l'avion,
01:18tac, venez là, tac, je vous mets un truc dans le nez et je vous teste, je comprends.
01:23Toutefois, que ça reste sur la base du volontariat, le test à la sortie de l'avion, c'est une bonne chose.
01:29D'ailleurs, mon hôpital d'assistance publique, c'est lui qui organise ça, avec l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, donc c'est bien.
01:35Mais ça ne suffit pas, parce que ceux qui disent « je ne veux pas être testé », eux, pour le coup, ils disparaissent.
01:40Et ça ne peut pas être tout ou rien.
01:43Donc moi, ce que je crois, c'est que ceux qui ne se font pas tester, on prend au moins leurs coordonnées
01:47et on les rappelle tous les deux ou trois jours pour savoir comment ils vont et puis qu'on ne les perde pas de vue.
01:52Parce que là, si ça se trouve, on a des gens qui sont infectés qui vont se balader et infecter d'autres personnes.
01:55Et l'idée, justement, de ceux qui arrivent sur le territoire, d'imposer une quarantaine, on sait que certains l'ont fait,
02:00de dire « vous arrivez sur notre territoire, on vous met à l'abri pendant quelques jours, entre 7 et 14 jours,
02:06parce qu'on sait que c'est en moyenne ce moment où on peut contracter le virus et les premiers symptômes ».
02:12Est-ce que ça peut être une idée aussi ou est-ce que c'est contre la société ?
02:14Alors, c'est fait par d'autres pays. Par exemple, je sais que le Liban le fait.
02:18Quand vous atterrissez au Liban, il faut non seulement avoir un test de moins de 48 heures, je crois, ou de 72 heures,
02:23et puis en plus, on vous garde dans votre chambre d'hôtel bien fermée et vous ne devez pas aller vous balader.
02:29Est-ce faisable ? Moi, je pense que c'est assez compliqué.
02:32En revanche, je vous redis, ce qui n'est pas du tout compliqué, ce qui est tout à fait faisable,
02:37ce qui n'entrave pas les libertés individuelles, c'est de dire aux gens « vous allez où vous voulez, mais attention, je vous préviens,
02:43nous, on vous passe un coup de fil tous les jours pour savoir comment vous allez ». Et vous répondez à un questionnaire.
02:47Au moins ça. Au moins ça. Vous voyez ? Au motif qu'on ne veut pas contraindre les gens à quelque chose de très dur, effectivement.
02:54Le test obligatoire, moi, je ne serais pas très content si on faisait ça au fond du nez, je ne vous le cache pas.
02:58C'est l'idéal. C'est l'idéal. Mais entre ça et rien du tout, non, ce n'est pas possible.
03:04Il faut qu'on redevienne un pays sérieux et parfois, on a un peu tendance à l'oublier.

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