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  • 17/03/2025
Les Questions au Gouvernement fêtent leur 50 ans.
Elsa Mondin-Gava reçoit pour cette émission spéciale :

En première partie :
- Roger Chinaud, ancien député,
- Bruno Fuligni, historien,
- Annabel Roger, journaliste, co-autrice de Au Perchoir, les secrets des Présidents de l'Assemblée nationale (L'Archipel)
- François de Rugy, ancien Président de l'Assemblée nationale, ancien député.

En seconde partie :
- Daniel Fasquelle, ancien député Les Républicains,
- Marc Fesneau, ancien ministre des Relations avec le Parlement, président du groupe Les Démocrates, ancien ministre,
- Mathilde Panot, présidente du groupe La France insoumise,
- Annabel Roger, journaliste, co-autrice de Au Perchoir, les secrets des Présidents de l'Assemblée nationale (L'Archipel).

LCP mobilise son antenne à l'occasion des grands évènements. Journées parlementaires, grands débats, votes et explications de vote, auditions des commissions d'enquête, congrès, session extraordinaire, discours et grandes cérémonies...la vie politique avec l'analyse des meilleurs experts et politologues.

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Transcription
00:00Et nous sommes de retour sur ces plateaux
00:02pour célébrer ensemble le 50e anniversaire
00:04des questions au gouvernement.
00:06Ils sont là pour nous aider à souffler les bougies,
00:09à revenir sur ces moments de tension,
00:11d'émotions, d'imprévus.
00:13Bruno Fuligni, bienvenue.
00:15Vous êtes historien,
00:16vous connaissez l'Assemblée mieux que personne.
00:19Roger Chineau, vous avez été député,
00:21écoutez bien, en 1973 jusqu'en 1980.
00:23Vous avez connu la transformation des questions d'actualité.
00:26Annabelle Roger, vous êtes journaliste,
00:29vous oubliez au perchoir les secrets
00:31des présidents de l'Assemblée nationale.
00:33Et François de Rugy, on peut le dire,
00:35vous avez une triple casquette, ancien député,
00:38ancien ministre, ancien président de l'Assemblée nationale,
00:41une vision à 360 degrés de ces questions au gouvernement.
00:45Le 50e anniversaire est tombé pendant la dissolution.
00:48Je vous propose de retourner en 1974
00:52pour voir la transformation des questions au gouvernement,
00:55leur naissance, celle qu'on connaît aujourd'hui.
00:59-"L'ordre du jour..."
01:00-"Appel les questions au gouvernement."
01:03-"C'est une phrase qui résonne dans l'hémicycle
01:05depuis maintenant 50 ans."
01:07-"Cette après-midi, la séance des questions..."
01:10-"Les QAG, comme on les appelle,
01:12sont devenus en un demi-siècle
01:13le temps fort de la semaine parlementaire."
01:18Le 30 mai 1974, Valérie Giscard d'Estaing,
01:22à peine élue présidente de la République,
01:24adresse un message au Parlement
01:26et suggère que l'Assemblée aménage son règlement
01:30de manière à réserver chaque mercredi
01:32une heure pour des questions d'actualité.
01:35Objectif, renforcer la vie démocratique.
01:37-"Je demanderai alors
01:39au Premier ministre et à l'ensemble des ministres
01:42d'être présents à cette séance
01:44afin de répondre directement aux questions."
01:4615 jours plus tard, Edgar Ford, alors président de l'Assemblée,
01:50tente l'expérience. Jacques Chirac explique le concept.
01:54-"Ce type de débat doit permettre
01:57au gouvernement et à l'opposition d'une part,
01:59au gouvernement et à la majorité d'autre part,
02:02d'avoir un échange bref de vues
02:04sur des sujets nationaux ou d'importance nationale."
02:07-"En 50 ans, la formule change plusieurs fois,
02:10de 1974 à aujourd'hui.
02:13Actuellement, deux séances, l'une le mardi,
02:16puis une autre, un peu plus courte, le mercredi."
02:19-"Monsieur le Premier ministre, j'ai deux questions
02:22auxquelles j'attends une réponse."
02:23-"La politique intervient par la voix d'un député,
02:26deux minutes pour poser sa question
02:28et, éventuellement, réagir à la réponse du ministre interrogé."
02:32-"Monsieur le Président..." -"Vous connaissez la règle,
02:35c'est le gouvernement qui choisit le ministre qui doit répondre."
02:39-"Monsieur le député Ciotti..."
02:41-"Un rite bien souvent fait de diatribes enflammés,
02:44parfois de brouhaha généralisé,
02:46mais souvent de débats qui permettent aux citoyens
02:50de suivre la vie politique française."
02:53-"La séance est terminée, la séance est suspendue."
02:58-"La séance reprend sur ce plateau.
03:00Bruno Fulini, comment ces questions au gouvernement
03:03se sont-elles imposées comme un moment important,
03:06phare de la semaine au Parlement ?
03:08-"Bien sûr, par la télévision.
03:10Il y avait déjà, depuis 150 ans, en fait,
03:13à partir d'aujourd'hui, à partir de 1875,
03:15un droit pour les députés d'interroger le gouvernement,
03:18mais ça se faisait selon des modalités
03:21intéressantes, pas du tout spectaculaires.
03:23Même au début de la Ve République,
03:25ce sont des séances qui ont lieu le vendredi,
03:27les ministres ne sont pas obligés de répondre immédiatement,
03:31le président lit la question avant de donner la parole aux députés.
03:34C'est tout à fait inintéressant.
03:36Et ce qui se passe en 1974,
03:38pour, comment dirais-je, effectivement,
03:40renouveler l'exercice et puis donner la parole à l'opposition,
03:44ça, c'était dans les idées nouvelles
03:46que défendait Giscard d'Estaing,
03:48qui venait d'être élu président.
03:50On imagine un système beaucoup plus dynamique,
03:52alors qu'il a été perfectionné depuis,
03:54et puis, dès la première séance, le 12 juin 1974,
03:57il y a des caméras.
03:59Alors, attention, à l'époque,
04:00il n'est pas question d'une retransmission en direct,
04:03ni d'une retransmission intégrale.
04:05On se donne le temps de faire le tri,
04:07et même, en fait, au bout d'une demi-heure,
04:10les journalistes remballent leur matériel,
04:12ce qui va susciter un rappel au règlement
04:15des députés qui avaient une question à poser.
04:17Ils veulent être filmés, eux aussi.
04:19Il faut voir qu'en 1974, passer à la télévision,
04:22c'est très important.
04:23Il y a beaucoup de chaînes, aujourd'hui.
04:26A l'époque, c'était vraiment,
04:27pour un député, passer à la télévision.
04:30Enorme frustration.
04:31Ce qui est intéressant, c'est qu'à peine
04:33la première séance de questions à gouvernement
04:36est-elle terminée, que le président de l'époque,
04:38Edgar Ford, s'engage à prendre langue
04:41avec la télévision française pour trouver des modalités telles que...
04:44C'est seulement à partir de 1981
04:46que les séances vont être intégralement retransmises
04:49et entrer dans les foyers et prendre cette importance.
04:52Je le disais, vous étiez député, justement,
04:55à ce moment de bascule, 1974.
04:57Vous l'avez vécu, cette transformation
04:59des questions au gouvernement.
05:01Ca a beaucoup compté pour les députés ?
05:03Ah oui, c'était tout à fait important.
05:05Et il faut bien replacer,
05:07je parle sous le contrôle de l'historien,
05:09parmi nous...
05:11C'était une... Giscard avait voulu...
05:13Il se trouve que j'étais un de ses collaborateurs
05:15en 1965, donc je chargeais d'affaires politiques,
05:19et donc j'avais suivi cette préparation de près.
05:22Et si vous voulez,
05:25les parlementaires ont été fidèlement surpris,
05:28d'abord, de l'initiative,
05:29et après, ceux qui ont été les plus surpris,
05:32je me souviens, effectivement, Edgar Ford,
05:34le président dont on parlait il y a un instant,
05:37et il a fallu que les présidents de groupe,
05:40qui est une fonction, à mon avis, tout à fait essentielle
05:43sur le plan du fonctionnement quotidien de l'Assemblée,
05:46apprennent aussi.
05:48Vérité. J'ai été élu, à ce moment-là,
05:50président de mon groupe parlementaire,
05:53je suis secrétaire général de notre formation avant,
05:55et il a fallu qu'on apprenne et qu'on voit
05:58comment on pouvait l'utiliser.
06:00A se familiariser avec cet exercice.
06:02A se familiariser avec l'exercice.
06:04Le problème de la télévision, c'est qu'elle s'est posée
06:07assez rapidement, comme vous l'avez dit.
06:09Ca n'a pas été la première préoccupation
06:11des parlementaires.
06:12Ca leur aurait fait plaisir, mais le fait, déjà,
06:15qu'il puisse y avoir cette action directe vis-à-vis du Parlement,
06:18et à cette époque-là, où les questions
06:21n'étaient pas transmises au préalable...
06:23Ca, on y reviendra sur ces coulisses.
06:25C'était un point, donc c'était de la matière brute,
06:28si j'ose dire, contre la présidente de l'Assemblée,
06:31et c'était difficile, mais bon,
06:33tout le monde avait à faire un apprentissage.
06:35Mais c'était un souci fondamental,
06:37je dirais, de fonctionnement des institutions
06:40pour le nouveau président de la République.
06:42C'est à la même époque qu'on a mis en chantier
06:45la possibilité, pour 60 parlementaires,
06:47de saisir le Conseil constitutionnel directement,
06:50pour le cas où il y aurait une opposition.
06:52C'était l'ouverture, en quelque sorte,
06:54améliorée, pour l'époque,
06:57du fonctionnement du débat parlementaire.
06:59Vous avez vécu plusieurs rôles dans ces séances.
07:02Un mot pour définir chacun, en tant que député,
07:05en tant que ministre, en tant que président de l'Assemblée ?
07:08Je pense que pour les députés, c'est un moment très important,
07:11parce que c'est vraiment une expression directe
07:14vis-à-vis du gouvernement.
07:16En France, on aime bien la logique d'affrontement
07:18entre le gouvernement et le Parlement,
07:21surtout entre l'opposition et le gouvernement.
07:24Donc, c'est un moment important.
07:26L'aspect, évidemment, que moi, j'ai toujours connu,
07:29d'abord sur France 3, puis sur LCP,
07:31la retransmission en direct,
07:33donc, vraiment, on intervient devant ses électeurs,
07:36entre guillemets, devant les Français,
07:38sans filtre, ça met une pression aussi,
07:40parce que si on se trompe, si on trébuche sur les mots,
07:43si on ne va pas au bout de sa question,
07:45tout le monde le voit.
07:47Après, c'est différent quand on est côté ministre.
07:49Président de l'Assemblée, c'est encore autre chose.
07:52Président de l'Assemblée, je dois dire
07:54que pour moi, c'était les séances les plus difficiles à présider.
07:58C'est vraiment des séances dans lesquelles, à tout moment,
08:01il peut y avoir du chahut, il peut y avoir, tout d'un coup,
08:04un emballement simplement autour d'un mot,
08:07un mot prononcé par un député,
08:09un mot prononcé par un ministre,
08:10et, comme il peut, ça peut être très calme,
08:13comme ça peut se dérouler sans accroc,
08:15c'est difficile à présider.
08:17On va revenir sur votre expérience de député,
08:19Annabelle Roger, François de Rugy,
08:21c'est le titre de votre livre.
08:23Le président de l'Assemblée donne la parole,
08:25mais est-ce qu'il a un rôle dans cette séance-là ?
08:28Chacun a pu imposer son style.
08:30Il a un rôle essentiel,
08:31qui est un rôle d'arbitre, finalement,
08:34puisque c'est lui qui distribue la parole,
08:37c'est lui qui, effectivement,
08:39stoppe quand ça ne va pas
08:40et quand ça va vraiment très, très mal,
08:43où il interrompt carrément la séance
08:45et on éteint les caméras, à ce moment-là,
08:47donc c'est très important.
08:49C'est une séance que le président préside,
08:51parce que vous savez que le président a six vice-présidents,
08:55il préside à tour de rôle.
08:56Ce moment-là, des questions au gouvernement,
08:59les présidents de l'Assemblée nationale
09:01tiennent tout particulièrement.
09:03Il y a tout un cérémonial, le président part du bureau,
09:07il traverse la salle des Pas Perdus,
09:09entre les gardes républicains,
09:11ce qu'on voit tous les mardis,
09:13et il y a une vraie solennité dans ce moment-là.
09:15Effectivement, tous les présidents
09:17qu'on a interrogés dans le cadre de ce livre
09:20nous disent que c'est un moment très spécifique,
09:23qu'ils ont beaucoup apprécié,
09:24avec des moments extrêmement compliqués,
09:27mais chacun y a apporté sa patte, sa manière de faire
09:30qui correspond assez souvent à sa personnalité.
09:33Sur les questions des députés,
09:34François de Rugy, vous aviez eu cette casquette.
09:37Faut ménager un certain suspense.
09:39Regardez un extrait.
09:40Vous étiez député d'opposition.
09:44Je voudrais partager avec vous, mesdames et messieurs les ministres,
09:47une petite devinette.
09:49Quels sont les agents de l'Etat qui, en 2009,
09:52se verront octroyer une augmentation de salaire moyenne
09:56de 15 300 euros chacun ?
09:59C'était un petit suspense,
10:01un petit piège que vous aviez fait au gouvernement.
10:04Expliquez-nous.
10:05Beaucoup de gens pensent qu'on envoie le texte des questions
10:09avant de les poser.
10:10Alors, ça arrive que les députés de la majorité,
10:12en soutien au gouvernement, le fassent.
10:15Pas toujours, d'ailleurs.
10:16Il arrive même, on dit, que c'est des questions téléphonées.
10:19Parfois, les ministres demandent à des députés...
10:22Les députés disent allô quand ils considèrent
10:25que c'est trop téléphoné.
10:26Moi-même, quand j'étais ministre, ça m'est arrivé de dire
10:29que ce serait bien de parler de tel ou tel sujet
10:32à travers une question d'actualité.
10:34Quand on est député d'opposition, ce qui était mon cas,
10:37j'étais dans la situation où je n'envoyais pas
10:39les textes de mes questions avant.
10:41Mais les cabinets des ministres insistent et disent
10:44quel va être le thème.
10:46J'avais dit que je parlais de l'augmentation
10:48des salaires des fonctionnaires.
10:50Ce que je visais, c'était l'augmentation
10:52du traitement du président de la République,
10:55qui avait souhaité rehausser fortement
10:57l'indemnité du président de la République
11:00parce qu'il considérait que ce n'était pas normal
11:03que le président soit moins bien indemnisé
11:05que le Premier ministre.
11:06Et donc...
11:08-"Vous aviez vu le ministre changer de tête ?"
11:10On ne le voit pas à l'écran, mais c'était Éric Woerth,
11:13ministre, à l'époque, on disait, des comptes publics,
11:16qui avait répondu.
11:17Au début, je crois qu'il se disait,
11:19c'est une question parmi d'autres sur les salaires des fonctionnaires.
11:24Tout d'un coup, je le vois, en effet,
11:26tourner la tête et dire de quoi va-t-il me parler
11:29et être un peu, en effet, cueilli à froid.
11:31Roger Chénot, vous l'aviez dit,
11:33vous avez été président du groupe.
11:35On se battait pour poser une question.
11:37Beaucoup de députés vous disaient...
11:39On n'allait pas jusqu'à la bataille,
11:41mais il fallait faire un arbitrage,
11:43parce qu'on savait par le temps combien de questions
11:46on pouvait passer.
11:47Ca fait partie des missions d'un président de groupe,
11:50c'est d'essayer de répartir sur le plan régional
11:53et sur le plan des tendances,
11:54qui peuvent être diverses dans des groupes.
11:57Ca dépend de leur importance.
11:58C'est un peu plus compliqué quand, en 78,
12:01on a créé le groupe UDF et j'ai été élu président
12:03du groupe UDF à ce moment-là.
12:05Bon, parce qu'il y a davantage de monde,
12:07mais c'est tout à fait normal.
12:10Il y avait beaucoup de volontaires.
12:12Je voudrais revenir sur le plan de la télévision,
12:15de la radio, reprenant ça.
12:16Il a fallu, effectivement, un peu de temps avant,
12:19et Edgar Ford a joué un rôle fondamental, d'ailleurs,
12:23pour essayer de faire qu'il en soit ainsi.
12:25Mais l'intérêt est devenu très, très vif, tout de suite,
12:28chez les parlementaires. Ca leur a fait plaisir,
12:31quelle que soit leur tendance politique.
12:33Je me souviens, en parlant à mon entreprisant de groupe,
12:36c'était Defer, c'était Balanger,
12:38et c'était Claude Labbé, déjà, du côté Gris.
12:41Si vous voulez, ça a été...
12:43Ils ont vu, et moi, je sais que c'est un argument
12:46pour pousser les parlementaires, au début,
12:49à être candidats pour poser une question,
12:51si vous voulez, c'est qu'ils ont...
12:53La presse écrite a tout de suite été relée.
12:56La presse écrite a tout de suite fonctionné,
12:58et la presse locale, c'est pour un député,
13:01c'est fondamental.
13:02Et...
13:03Le député prévenait, parfois,
13:05le journal de presse quotidienne en disant
13:07qu'il allait poser une question ?
13:09Il vérifiait, et c'était pris.
13:11Les correspondants de presse, au Parlement,
13:13faisaient admirablement leur métier.
13:15Il y avait, à ce moment-là,
13:17une représentation de l'agence France Presse,
13:20formidable, c'était un couple,
13:21homme-femme, qui menaça, c'était Pageot,
13:24je recherche malheureusement le nom de sa complice,
13:27et il y avait une base, tout de suite,
13:29et un bureau très actif,
13:31et, ça a dû vous arriver, Yannick,
13:33c'est les...
13:35Comment dirais-je ? Les parlementaires
13:38allaient tout de suite voir, au bureau de presse,
13:40que la liaison...
13:42La question était bien reprise.
13:43Il faut choisir le thème, c'est savamment orchestré,
13:46parfois, des questions sur la circonscription,
13:49écoutez ce que disait Jacques Chirac,
13:51le conseil qu'il donnait sur les questions gouvernementales.
13:54Ce type de débat ne doit pas se limiter
13:57à des affaires de circonscription.
13:59Je suis tout prêt, je vais néanmoins répondre.
14:02On l'a redit, ces questions, elles ont leur importance,
14:05puisque tous les électeurs les regardent.
14:08On revient, Bruno Fuligny, avec vous sur les différentes étapes.
14:11Vous le disiez, à partir de 1974, on les filme.
14:14Diffusées en 81 sur France 3 et sur LCP,
14:16Cocorico, c'est François de Rugy
14:18qui avait aussi pris cette décision.
14:20Ca change quoi, vraiment, pour les députés,
14:23la médiatisation et pour les médias, aussi, de leur côté ?
14:26Il y a un intérêt rapide sur cet exercice ?
14:29Il y a un intérêt pour les médias, pour l'institution
14:32et pour le député qui est mis en valeur
14:35parce qu'il pose sa question,
14:36pour les présidents d'Assemblée, qui apparaissent,
14:39comme ça a été dit, en pivot de ce moment-là.
14:42Et pour les ministres, ils sont bons.
14:44Ces questions ont lieu le mercredi,
14:46c'est-à-dire très peu de temps après la fin du Conseil des ministres.
14:50Ca permet d'interroger le gouvernement
14:52sur ce qui vient d'être décidé au Conseil des ministres
14:55avec très peu de temps entre la fin du Conseil des ministres
14:58et l'ouverture de la séance.
15:00Ca, c'est tout à fait important.
15:02A l'origine, le mercredi, c'était aussi un jour
15:04un peu différent des autres,
15:06parce qu'un jour, les enfants n'avaient pas à court.
15:09Il y avait aussi une dimension d'éducation civique.
15:12Les questions au gouvernement, dans les années 70-80,
15:15c'est aussi un spectacle.
15:16On disait aux lycéens de regarder ce qui se passe à l'Assemblée.
15:20Avec leurs parents ou leurs grands-parents.
15:22Ca a beaucoup popularisé l'Assemblée,
15:24avec un effet de miroir grossissant.
15:27Les questions au gouvernement,
15:28c'est même pas 2 % du temps parlementaire dans l'année,
15:32mais c'est comme ça que le grand public
15:34voit les débats parlementaires,
15:36d'où les commentaires, des fois, un petit peu amers,
15:39qui peuvent circuler.
15:40C'est la question que j'allais vous poser.
15:42On le suit bien, évidemment, sur LCP.
15:45Il y a tout le travail en séance publique,
15:47les questions au gouvernement,
15:49mais pour un député, il le sait,
15:51ou une députée, c'est le moment-clé dans la semaine.
15:54C'est le moment où on peut briller,
15:56finalement, et puis où on peut briller surtout
15:59vis-à-vis de ses concitoyens
16:01et des citoyens de sa circonscription.
16:04Vous disiez tout à l'heure l'évolution des médias
16:07et de l'intérêt des médias.
16:08Quand on est encore en tribune à la place des journalistes,
16:12il y a encore des petites étiquettes
16:14avec La Dépêche du Midi, Nice Matin,
16:16Ouest France, qui sont un peu au-dessus de l'hémicycle.
16:19Là où s'installent les journalistes.
16:21On a une vue plongeante sur l'ensemble de l'hémicycle.
16:24C'était avant les journalistes de ce qu'on appelle la PQR,
16:28des journaux locaux,
16:30et aujourd'hui, le mardi,
16:33à partir de 14h30 jusqu'à 16h15,
16:35les journalistes politiques sont à l'Assemblée nationale.
16:38François de Rugy est fait immédiat dans la circonscription.
16:42Quand on a posé une question, la veille ou l'avant-veille ?
16:45Oui et non. D'abord, parce que Jacques Chirac le disait
16:48au tout début, il avait tout de suite perçu le risque
16:51que des députés viennent poser des questions
16:53uniquement à leur circonscription.
16:55Je crois que ça existe toujours, moi, je l'ai toujours connu,
16:59et c'est un peu dommage que dans une enceinte nationale,
17:02on s'adresse à toute la France, il y ait ce sujet.
17:05Ca peut sensibiliser les gens dans la circonscription,
17:08mais je vais vous raconter une anecdote qui permet de relativiser.
17:11J'ai rencontré ma fille à l'école, dans ma circonscription,
17:14et un parent que je voyais souvent me dit
17:17que je lui avais vu l'autre jour intervenir à la télévision,
17:20à l'Assemblée.
17:21J'avais pas le souvenir d'une intervention récente.
17:24Il me dit que je lui avais vu hocher la tête pendant la séance.
17:27Vous voyez que pour un citoyen qui regarde la séance,
17:30alors que je n'avais pas posé de question,
17:33le simple fait que j'ai été filmé hocher la tête
17:35par rapport à ce que disait un collègue,
17:37pour lui, c'était une intervention.
17:39Bruno Fulini, j'en viens, certains étaient spécialistes.
17:43Il faut se faire remarquer, Bruno Fulini.
17:46Les députés savent que parmi les bonnes places,
17:48il y a celles qui sont dans le champ, pas loin des micros.
17:51Même si vous ne posez pas la question,
17:53vous êtes dans le champ, c'est bien.
17:55Si vous n'avez pas une place libre,
17:57comme vous n'êtes pas obligés d'occuper votre siège,
18:00on voit parfois des députés qui migrent
18:02parce qu'ils savent qu'un collègue va poser une question.
18:06Vous avez les grands pros, ceux qui, pour les questions au gouvernement,
18:10sont très voyants pour qu'on les voie de loin.
18:12Regardez cet exemple.
18:14C'est une anecdote que tout le monde connaît,
18:16la veste jaune. Regardez ces images.
18:18On le voit, on le repère tout de suite.
18:21Moi, je l'ai vue immédiatement à l'image.
18:23La veste jaune, Bruno Fulini, du député de Gauchy, spécialiste.
18:27Lucien de Gauchy.
18:28Il ne posait quasiment jamais de questions.
18:30Pour lui, être à la séance des questions au gouvernement
18:33consistait non seulement à mettre une veste jaune,
18:36je l'ai croisée des dizaines de fois,
18:38jamais il n'avait une veste jaune pour le reste du temps.
18:41Il la mettait uniquement pour la séance des questions.
18:44En effet, lui, il bougeait au fil de la séance
18:47pour se mettre à côté d'un député de son camp
18:49qui posait une question.
18:51Il y avait aussi un autre député socialiste,
18:53qui est mort malheureusement, Patrick Roy,
18:56qui lui avait une veste rouge.
18:58Il avait décidé de mettre une veste rouge
19:00dans l'hémicycle pour montrer qu'il était de gauche.
19:03Il l'interpellait chaque fois qu'un ministre parlait,
19:06et il disait le ministre du Travail et du Chômage.
19:09C'est comme ça qu'il s'est fait connaître dans l'hémicycle.
19:12Zavier Retenu, comme anecdote,
19:14on se fait remarquer comme on peut.
19:16Il y avait des députés, peut-être moins maintenant,
19:19parce que c'est rentré dans les mœurs,
19:21mais il y avait des députés qui demandaient,
19:23c'est Jean-Louis Debré qui me racontait ça,
19:26quand il y avait des gens de leur circonscription,
19:28par exemple, dans les tribunes,
19:30il disait, il ne posait pas forcément de questions,
19:33mais est-ce que tu peux me citer ?
19:35Jean-Louis Debré, il faisait,
19:37taisez-vous, monsieur untel,
19:38il n'avait rien fait, mais au moins, il avait été cité.
19:41C'est une anecdote confirmée par André Chasseigne,
19:44président du groupe, qui m'explique qu'un jour,
19:47il fait passer un petit papier par les huissiers à Jean-Louis Debré
19:50qui dit, vous savez, les papiers et les mamies de ma circonscription
19:54ne savent pas que je suis dans l'hémicycle.
19:56Il continue le débat, il entend, taisez-vous, Chasseigne.
20:00Jean-Louis Debré avait reçu ce petit mot
20:02et avait pointé le député.
20:03Il y avait aussi certains députés dans votre groupe
20:06qui faisaient tout pour se faire entendre
20:09ou se faire voir lors de cette séance.
20:11On n'a pas connu les couleurs de l'uniforme encore,
20:14mais c'était le début, donc il y avait des hésitations,
20:17mais ceci dit, ils ont rapidement vu
20:19qu'il fallait essayer de s'exprimer malgré tout,
20:22même pendant la séance.
20:23C'était l'air de pousser du cou d'un copain,
20:26de se faire remarquer.
20:27Ils ont tout à fait repéré.
20:29Le plus difficile, à mon avis, au début,
20:31c'était d'essayer d'équilibrer
20:33les questions d'intérêts circonscriptions
20:36ou départementales, si vous voulez.
20:38Il fallait absolument qu'il y en ait.
20:40Et puis, de travailler aussi,
20:41parce que vous avez les groupes à l'Assemblée,
20:44mais vous avez les commissions.
20:46Et on avait tous, en fonction de nos formations politiques,
20:50on désignait des WIP de commissions,
20:52leur permettre, en fonction, précisément,
20:54vous y faisiez allusion tout à l'heure,
20:57de l'ordre du jour du Conseil des ministres
20:59la semaine précédente ou du jour même,
21:01au début, c'était le mercredi,
21:03de faire poser une question qui relance
21:05ou qui complète le débat de commissions
21:08et surtout la question qui créait un problème
21:10entre le ministre compétent et la majorité de sa commission.
21:14Il fallait essayer d'équilibrer,
21:16d'ailleurs, pour les présidents de groupe,
21:18la répartition des questions.
21:20Il pouvait y en avoir 7 ou 8, ça dépendrait du temps.
21:23De fond, un peu plus politique, parfois.
21:25François de Rugy, surtout par rapport au brouhaha
21:28qu'il peut avoir dans l'hémicycle,
21:30c'est pas trop qu'on les sermonne.
21:32Vous aviez demandé à certains députés,
21:34quand vous étiez le président de l'Assemblée nationale,
21:37de ne pas invectiver à haute voix.
21:39Oui, j'ai beaucoup bagarré là-dessus,
21:41sans arriver à avoir plus de calme
21:45et de respect mutuel dans l'Assemblée.
21:47Vous aviez des députés dont c'était vraiment le sport
21:50à chaque séance.
21:51Par exemple, je me souviens très bien
21:53d'Eric Stroman, qui avait une voix très forte.
21:56Il était en bas, assez proche du gouvernement,
21:58et il interpellait régulièrement les ministres qui répondaient.
22:02Quand j'étais président de l'Assemblée nationale,
22:04il y avait Aurélien Pradié, on peut le nommer,
22:07ça a été public à l'époque,
22:09qui invectivait aussi beaucoup
22:10soit les autres députés, soit les ministres.
22:13Il était un jeune député, il venait juste d'être élu.
22:16C'est pas une histoire de vieux parlementaires.
22:18Le président de l'époque, Christian Jacob,
22:21de son groupe, me dit,
22:22tu peux le convoquer dans ton bureau à l'Assemblée
22:25et lui dire qu'il faudrait se respecter mutuellement.
22:28Ce que j'ai fait, c'était un échec total,
22:31il est allé dire à la presse que je m'étais comporté
22:33comme un maître d'école, mais moi, je tiens à cette idée,
22:37je vois bien qu'aujourd'hui, ça continue
22:39à être des séances très perturbées,
22:41qu'on se respecte, on respecte le temps de parole.
22:44J'avais été traité par un journaliste de l'Express
22:47de Seriol Cooper, parce que je coupais la parole
22:49tant aux députés communistes lorsqu'ils dépassaient
22:52les deux minutes, parce que sinon, on ne peut pas avoir
22:55C'est toujours compliqué,
22:57la présidente de l'Assemblée annonce qu'elle va réunir,
23:00travailler avec les groupes parlementaires
23:02pour réduire la pression.
23:04Il y a aussi l'imprévu, l'inattendu.
23:06Bruno Félini, on va revenir là-dessus.
23:08On regarde les images, c'était en décembre 2003,
23:11séance interrompue, perturbée par les intermittents du spectacle.
23:14La séance est suspendue.
23:17Acclamations
23:19...
23:24Il fallait bien s'y attendre, malgré les dispositifs de sécurité
23:27qui sont prêts à l'Assemblée nationale.
23:29Les intermittents ont réussi à entrer dans les tribunes du public.
23:33C'est panique à bord, Bruno Félini, dans l'Assemblée ?
23:36De façon générale, ce n'est pas propre
23:38aux questions au gouvernement.
23:40Les séances sont publiques, il y a du public dans les galeries,
23:43mais ce public n'est pas censé se manifester
23:45ni oralement, ni gestuellement.
23:47Il arrive souvent, quand il y a un problème politique,
23:50quand il y a une polémique,
23:52que des gens enfreignent cette règle,
23:54balancent des tracts dans l'hémicycle...
23:56Ca n'est jamais allé aussi loin qu'au Sénat,
23:59où un militant s'est mis tout nu et a sauté dans l'hémicycle.
24:02On n'a pas encore eu ça.
24:04Il y a eu une militante de Greenpeace
24:06qui est descendue avec une corbe depuis les tribunes du public.
24:09C'était pas lors d'une séance de questions au gouvernement,
24:13c'était pendant un débat sur les accords de l'environnement.
24:16Bernard Acoyer, qui présidait la séance,
24:18a suspendu la séance.
24:20Cette essuie de Greenpeace avait fait une grosse action
24:23puisque le matin, ils avaient tendu une banderole
24:25sur la toiture de l'Assemblée avec un faux camion de pompiers.
24:29L'après-midi, ils sont intervenus
24:30dans la séance de questions au gouvernement.
24:33Les séances de questions au gouvernement
24:35donnent une très grande visibilité à toute manifestation
24:38qui n'est plus un discours, d'où les drapeaux,
24:41d'où les costumes symboliques.
24:43Jean Lassalle avait, par exemple, une fois chanté
24:46et une autre fois revêtu un gilet jaune.
24:50Pas besoin de parler, on comprend.
24:51Toutes petites précisions.
24:53Là, c'est encore filmé à l'époque.
24:55On voit les journalistes qui commentent à l'image.
24:58Aujourd'hui, la réalisation de l'Assemblée coupe tout.
25:01Il n'est plus question de voir
25:02ce qui passe dans l'hémicycle.
25:04C'est très simple, à partir du moment
25:06où les micros sont coupés par le président,
25:09les caméras sont éteintes
25:10pour éviter, justement, de donner cette image de bazar
25:14qu'on a malgré tout, y compris au sein même de l'hémicycle,
25:17maintenant, avec des députés assez perturbateurs.
25:20On pense aux drapeaux palestiniens,
25:22peut-être qu'on y reviendra,
25:24de Sébastien Deloglu, des députés insoumis
25:26qui sortent les courses pour dénoncer
25:28une coupe des APL pour les étudiants.
25:31Il y a aussi, au sein de l'hémicycle,
25:33maintenant, des happenings.
25:34C'est un peu une sorte de théâtre,
25:36de nombreux politiques le disent.
25:38C'est du stand-up en direct.
25:40Une ultime question pour vous,
25:42est-ce que vous les regardez encore,
25:44les séances de QAG ?
25:45Qu'en pensez-vous ?
25:46Pas toutes, mais j'en regarde quelques-unes,
25:48à certains moments, si vous voulez.
25:50J'aime bien voir comment la mécanique marche,
25:53et puis ça permet surtout de voir
25:55comment tel ou tel ministre répond.
25:57Ca me paraît tout à fait important.
25:59Je dois reconnaître la seule chose
26:01qu'il fera pour quelqu'un d'âgé comme moi,
26:04c'est qu'en vérité, il y a une crise du Parlement
26:07dans toutes ces affaires.
26:09Le Parlement d'aujourd'hui
26:12ne respecte pas le minimum de règles
26:15qu'il faut rester.
26:16Ca n'a rien à voir avec la présidence,
26:18qui fait ce qu'elle peut,
26:20mais je ne veux citer personne.
26:22Ici, nous n'avons pas à faire des politiques actives.
26:25Mais c'est insupportable de ne pas se rendre compte
26:27à quel point ridiculiser,
26:29diminuer la qualité de l'image du Parlement,
26:32c'est-à-dire faire que cette institution,
26:34en elle-même,
26:35souffre du désordre parlementaire
26:39créé par des gens qui pensent d'abord à s'agiter
26:41plutôt qu'à discuter,
26:43et ceci en ne respectant jamais l'autre.
26:46C'est un problème de la société,
26:48il faut d'abord penser à l'autre, aujourd'hui.
26:51Je vous remercie à tous les quatre
26:53d'avoir accepté de regarder dans le rétroviseur
26:55ces 50 ans d'histoire des questions au gouvernement.
26:58Restez avec nous dans un instant de nouveaux invités,
27:01évidemment, mais je vous propose
27:03un petit best-of, un magnéto de l'Assemblée,
27:06on l'a intitulé du rire aux larmes.
27:08A la sortie de la toute première séance de questions au gouvernement,
27:12en 1974,
27:13voici ce que disait ce député.
27:15-"Ca donne la place à un certain humour
27:17qui est toujours indispensable à la vie politique."
27:20-"Et de l'humour, il y en a eu, parfois, involontaire."
27:23-"Monsieur le président, mesdames et messieurs les retraités,
27:26monsieur le député Jean-Philippe Nys..."
27:28Cris de la foule
27:30...
27:40-"S'agissant des autorisations
27:43qui ont été données en matière d'exploration et d'exploitation
27:46de gisements de gaz de schiste,
27:49compte tenu des méthodes
27:53qui sont actuellement employées
27:56pour exploiter ces gisements de gaz de schiste,
28:00et compte tenu..."
28:02-"Nous sommes en train de recueillir
28:04toutes les demandes des communes concernées,
28:07avec le ministre de l'Intérieur, Christophe Collomb,
28:10et avec les deux que nous aurons l'intégralité des demandes..."
28:13Gérard Collomb.
28:14...
28:19-"De l'humour, mais aussi des traits d'esprit."
28:22-"Monsieur le député Éric Ciotti,
28:25si c'était du temps de ma fréquente jeunesse,
28:28j'aurais supposé un sentiment contrarié.
28:31Mais cet hémicycle tout entier
28:35a déjà constaté à quel point
28:38je vous obsède
28:40dans toute votre expression publique,
28:43avec une constance qui appelle quand même l'admiration."
28:46-"Les QAG, c'est aussi de la solidarité,
28:49et avec le retour de ce député,
28:52premier parlementaire atteint du Covid,
28:54un mois dans le coma."
28:56-"Pour tous ceux qui se battent aujourd'hui contre le virus,
28:59je n'ai qu'un message à leur donner,
29:02ils vaqueront ce virus et vivent la vie !"
29:04Applaudissements.
29:05-"De la compassion, également,
29:07quand un député malade fait ses adieux."
29:10-"J'ai été autant bouleversé,
29:13autant bouleversé par le soutien tout aussi humaniste
29:18du gouvernement, de vous, monsieur le président.
29:21Alors que je vous vilipende à longueur de séance,
29:25vous avez été à mes côtés sans faille.
29:29Je vais vous le redire,
29:31je vais vous le redire,
29:33je vous aime toutes et tous, la vie est belle."
29:36Applaudissements
29:38-"Et puis de l'émotion,
29:39lors de la toute dernière intervention
29:42d'une personnalité politique."
29:44-"Dire aussi que dans ces 20 années d'exercice
29:47du travail parlementaire comme ministre ou comme député,
29:51j'ai toujours essayé de faire au mieux,
29:53mais chacun sait que face à la rudesse des choses
29:56et des défis, quand on essaie de faire au mieux,
29:59on n'est jamais sûr de bien faire.
30:01Et c'est aussi l'immense fierté qui a été la mienne
30:03d'être si longtemps à vos côtés."
30:05Applaudissements
30:08...
30:10-"Et on accueille à présent nos nouveaux invités.
30:13Annabelle Roger, vous vous êtes restée sur ce plateau.
30:16Vous êtes journaliste, autrice du livre
30:18Au perchoir, les secrets des présidents
30:20de l'Assemblée nationale.
30:21Mathilde Panot, vous êtes présidente
30:23du groupe La France insoumise, députée depuis 2017.
30:26Marc Fesneau, plusieurs casquettes,
30:28président du groupe Les Démocrates.
30:30On vous invite pour votre expérience d'ancien ministre
30:33des Relations avec le Parlement.
30:34Vous avez aussi été ministre et député.
30:37Daniel Fasquell, vous avez été député
30:39Les Républicains du Pas-de-Calais de 2007 à 2020.
30:42S'il fallait vous inviter, Daniel Fasquell,
30:44c'est quand on se remémore ces grands moments
30:47des questions au gouvernement.
30:48On pense souvent à la question que vous aviez posée
30:51à Jérôme Causac, en décembre 2012.
30:55-"Il est essentiel que vous disiez toute la vérité
30:58cet après-midi devant la représentation nationale
31:01et devant les Français." Merci.
31:04La parole est au ministre délégué chargé du Budget,
31:07Jérôme Causac.
31:09Merci, monsieur le président.
31:12Monsieur le député,
31:14j'appartiens au gouvernement de Jean-Marc Ayrault,
31:16investi par la représentation nationale.
31:19Votre question est légitime. Il est normal que j'y réponde.
31:22Je dément catégoriquement les allégations
31:24contenues sur le site Mediapart.
31:28Je n'ai pas, monsieur le député,
31:30je n'ai jamais eu de comptes à l'étranger.
31:32C'est donc devant la justice
31:34que je m'expliquerai devant ces contradicteurs
31:37en attendant, deux, des éléments probants
31:39qui, à ce jour, font manifestement défaut.
31:42Merci de m'avoir permis de le dire
31:44devant la représentation nationale.
31:48Daniel Fasquell, vous vous souvenez
31:50des coulisses de la préparation de cette question ?
31:53Je m'en souviens très bien.
31:55C'était au mois de décembre,
31:56je crois que c'était un 4 décembre.
31:58Vous voyez, ça m'a marqué.
32:00Mediapart diffuse cette information
32:02comme quoi Jérôme Cahussac pourrait avoir un compte en Suisse.
32:06Et immédiatement,
32:09moi, je propose qu'au sein de mon groupe,
32:12on pose une question à ce sujet,
32:14parce que c'était important que les Français
32:16aient la réponse du ministre
32:18devant la représentation nationale.
32:20J'ai eu quelques réticences au départ,
32:22parce que le même site Mediapart
32:24avait causé quelques ennuis à certains d'entre nous.
32:28Pour votre formation politique.
32:30Mais pour autant, moi, j'ai toujours été
32:33partisan de la vérité, de toute la vérité sur tous les sujets.
32:36J'ai réussi à convaincre, je m'en souviens,
32:39c'était en toute fin d'après-midi, en début de soirée,
32:42dans l'hémicycle même, à l'époque,
32:44Christian Jacob et Jean-François Copé,
32:46qu'il fallait à tout prix qu'on pose cette question.
32:49Donc, ils ont donné le feu vert.
32:51Ensuite, il a fallu préparer cette question.
32:54Alors, par chance ou par malchance,
32:56pour monsieur Cahuzac,
32:58vous savez que l'ordre des questions
33:00dépend d'un tirage au sort,
33:01et là, la première question à 15h
33:03est attribuée à mon groupe.
33:05J'ai pu poser la question immédiatement à 15h.
33:09Les collaborateurs du ministre ont cherché à savoir,
33:11comme c'est souvent le cas,
33:13quelles questions j'allais poser.
33:15Mothus et bouche cousue.
33:17Et puis, là aussi, pour que les choses soient...
33:21Je voulais pas en faire un sujet polémique.
33:24J'ai posé une question dans ces deux minutes,
33:26mais en une minute, très technique, très précise,
33:29très concrète, pour avoir, de la part du ministre,
33:32également une réponse technique et factuelle.
33:35Il m'a fait cette réponse.
33:36Vous le croyez quand il vous répond ?
33:38On le rappelle, après, Jérôme Cahuzac avouera, effectivement...
33:42Moi, je n'ai pas été pleinement convaincu,
33:47mais toujours est-il que c'est sa réponse.
33:49Il va répondre devant les tribunaux.
33:51Je suis juriste, je suis professeur de droit,
33:54donc je fais confiance dans la justice de mon pays.
33:57Mais le fait est qu'il a fait cette réponse,
34:00qu'elle était inexacte, bien évidemment,
34:02que c'était même un mensonge devant la représentation nationale.
34:06S'il avait fait une autre réponse à ce moment-là,
34:08peut-être que l'histoire aurait été différente,
34:11mais nous avons demandé une commission d'enquête.
34:14Malheureusement, elle n'a pas pu aller jusqu'à son terme.
34:17En tous les cas, nous avons, nous, quitté la commission d'enquête
34:21parce que nous avions voulu interroger
34:23le Premier ministre et des collaborateurs
34:25du président de la République,
34:27parce que nous pensions qu'à ce niveau-là,
34:29ils étaient informés du sujet, contrairement à ce qu'ils disaient.
34:33C'est un regret que j'ai.
34:34Dans l'affaire Cahuzac, il y a eu cette question,
34:37ça a été le point de départ,
34:39mais on n'a pas pu faire pleinement notre travail ici,
34:42s'agissant de Jérôme Cahuzac, qui, à la fin,
34:44finit par avouer...
34:46-...être coupable de fructifier.
34:47Annabelle Roger, c'est aussi le mensonge
34:50devant la représentation nationale.
34:52Il y a eu l'enquête, les aveux,
34:54mais qui a coûté cher au ministre ?
34:56L'histoire a coûté cher.
34:57Il a menti, il a menti, d'abord,
34:59dans la représentation nationale.
35:01On parlait tout à l'heure du côté très important,
35:04très solennel de ces questions au gouvernement.
35:07Donc oui, on ne ment pas, peut-être moins en France
35:10qu'aux Etats-Unis, mais on ne ment pas
35:12devant la représentation nationale
35:14mais ceux qui représentent l'ensemble des citoyens.
35:17Mathilde Pannot, vous êtes présidente
35:19d'un groupe d'opposition.
35:20C'est votre but, lors d'une question au gouvernement,
35:23de mettre au pied du mur des ministres,
35:26de les pousser dans leur retranchement ?
35:28Je crois qu'on a un exemple assez récent,
35:30justement, avec un même système,
35:32c'est-à-dire une révélation de Mediapart
35:35sur le fait d'avoir couvert des abus,
35:39en tout cas, de ne pas avoir dénoncé
35:41des abus de pédocriminalité
35:43faits sur des enfants.
35:45C'est le scandale Betaram,
35:46sur lequel nous, nous avons posé plusieurs questions,
35:49avec d'autres articles qui s'en sont suivis.
35:52Je dois dire, puisque beaucoup nous ont reproché
35:54d'avoir fait une sorte d'instrumentalisation
35:57en demandant la démission de M. Bayrou de ce scandale,
36:00d'abord, que, un, le fait que cette affaire
36:02soit portée politiquement a permis à d'autres victimes
36:05de porter plainte, puisque le porte-parole des victimes
36:08dit qu'il y a 40 plaintes supplémentaires
36:11et qu'ils pensent que, dès 112 à 160,
36:12c'est arrivé jusqu'à 300 plaintes,
36:15donc ça permet de libérer la parole.
36:17Y compris, il y a eu d'autres scandales
36:19qui ont été dévoilés dans d'autres établissements.
36:22Je crois que, face à un fléau
36:23qui touche des centaines de milliers d'enfants
36:26dans notre pays, il faut être à la hauteur de cela
36:29et, effectivement, redire qu'il n'est pas possible
36:31de pouvoir mentir devant la représentation nationale.
36:34Quand on voit les éléments qu'a apporté Mediapart,
36:37il y a eu un mensonge.
36:39On ne refait pas l'enquête sur ce plateau.
36:41Marc Fesneau, sur ces questions au gouvernement,
36:44qu'on soit de l'opposition, de la majorité,
36:46on ne sait pas du tout les mêmes objectifs,
36:49c'est pas les mêmes thèmes,
36:50thèmes locaux, thèmes plus politiques,
36:52questions-pièges, comment on les envisage,
36:55ces séances ?
36:56Peut-être que, à la fois pour rebondir
36:58et pour dire, avec l'expérience de ministre des Relations,
37:01ce que j'ai vécu, parfois, reconnaissons-le,
37:04quand on est dans la majorité, on a tendance à poser des questions,
37:08quand on n'est pas carrément téléphoné
37:10on a tendance à faire quelque chose
37:12qui vient conforter l'action d'un ministre.
37:14J'ai pu voir des ministres appeler pour dire
37:16que ça serait l'occasion de mettre en valeur
37:19telle ou telle politique publique.
37:21On s'en aperçoit un peu.
37:22Parfois, ça se voit. Il y a beaucoup de allo, allo.
37:25Les députés de l'opposition disent allo.
37:27Je ne pense pas que ce soit un exercice.
37:30On est là pour contrôler l'action du gouvernement.
37:32On peut le soutenir et dire qu'il y a un problème
37:35dans sa circonscription.
37:36Il y a d'autres endroits pour le faire.
37:39Je parlais à l'instant avec, je trouve, justice et justesse.
37:42C'est-à-dire des sujets qui méritent à la fois l'attention
37:45mais peut-être pas dans les questions gouvernement.
37:48De l'autre côté, on est dans un exercice
37:50qui est parfois un peu figuré,
37:52qui est un exercice où on essaie de tester
37:54la capacité de résistance du ministre.
37:57On essaie de regarder les nouveaux, comment ils se débrouillent.
38:00C'est un test qui est parfois un peu compliqué
38:03pour les impétrants, comme on dit.
38:05Deux, pour mettre en défaut,
38:06on ne peut pas attendre une réponse,
38:08mais essayer de faire une controverse politique.
38:11C'est le jeu des questions au gouvernement.
38:13Il faut aussi accepter cette règle-là,
38:16mais on pondèrerait de part et d'autre les choses,
38:18ce serait pas si mal.
38:20Un peu plus de sincérité pour la majorité ?
38:22Il y a une part de théâtralisation dans ce moment-là,
38:25parce qu'il est télévisuel, vous parliez de l'affaire Cahuzac.
38:28C'est le mensonge devant la représentation nationale
38:31et des centaines de milliers de Français.
38:34On avait une affaire judiciaire.
38:36Il revoit les images.
38:38Ce sont des choses qui peuvent poursuivre.
38:40C'était vraiment un mensonge,
38:42mais à Michel Eliomari et à ses relations
38:44avec des dignitaires tunisiens
38:47au moment de la chute du président tunisien,
38:50où quasiment toutes les semaines, elle y avait droit.
38:53On voit l'état-ministre de l'Intérieur,
38:55où elle a de plus en plus de mal à répondre,
38:58parce que les infos sortent
39:00et il faut qu'elle reste sur sa ligne.
39:03C'est compliqué.
39:04Chaque semaine, on le voit, les groupes doivent faire des choix.
39:08Quelle question posait le groupe écologiste et social
39:11à accepter de nous ouvrir les coulisses
39:13de la fabrication d'une question ?
39:15La parole est à M. Hendrik Davy,
39:17pour le groupe écologiste.
39:18Merci, madame la présidente.
39:20Madame la ministre,
39:22vendredi dernier, des scientifiques
39:24se sont mobilisés partout sur la planète.
39:27Hendrik Davy prend la parole pour interroger le gouvernement.
39:31Une question loin d'être spontanée,
39:34fruit d'un travail fourni tout au long de la journée.
39:37Sur les sujets qui ont été proposés...
39:40Il est un peu plus de midi, au 9e bureau de l'Assemblée,
39:43comme chaque mardi matin, réunion des écologistes.
39:48La veille, les députés ont proposé une série de questions.
39:52Trois ont été présélectionnées,
39:54l'une sur le changement climatique,
39:57une autre sur Mayotte, et enfin...
39:59Sans surprise, mais il faut marquer le coup.
40:03Je trouve que ça fait partie des sujets importants,
40:07que ce soit l'attaque aux Etats-Unis
40:09et la question du soutien en France.
40:11Je pède aussi pour Stand Up for Science,
40:14parce qu'il y a vraiment une actualité brûlante
40:18et qu'on a des choses originales à dire sur le sujet.
40:21Merci. Hendrik, tu peux passer.
40:24Sur les questions, je veux les trois,
40:27et je pense que Stand Up for Science est vraiment très important.
40:31Ce jour-là, tout le monde est d'accord
40:33pour apporter son soutien aux scientifiques américains
40:36face aux mesures prises par Donald Trump.
40:39Une thématique choisie, et un député aussi.
40:43Ce qui s'est passé, c'est que je n'avais pas fait remonter ce sujet,
40:46mais très vite, une autre collègue, Sandrine Rousseau,
40:50l'avait remonté, mais j'ai appuyé juste la demande.
40:53Si c'est moi qui l'ai fait, c'était parce que j'ai fait moins de QAG
40:57et qu'on a un équilibre.
40:58Vendredi dernier, des scientifiques se sont mobilisés
41:01partout sur la planète à l'appel de chercheurs américains.
41:05Avec ses collaborateurs, le député écrit un premier G
41:07et puis le retravaille.
41:09C'est plus stressant que le reste.
41:11Il y a deux raisons.
41:13D'abord, parce que c'est plein, c'est un peu vu par le public.
41:16Deuxièmement, on a tout le panel des ministres.
41:19C'est le grand spectacle.
41:20C'est un moment assez particulier et stressant.
41:23Le chronomètre en main,
41:24le député sait qu'il n'aura que deux minutes
41:27pour poser sa question au gouvernement.
41:30Mathilde Panot, comment ça se passe chez les Insoumis ?
41:33Comment vous déterminez les thèmes, les orateurs ?
41:36Je pense que c'est à peu près comme ça dans tous les groupes.
41:39On a un bureau du groupe qui se tient la veille
41:42de la réunion de groupe du mardi,
41:44avec les députés qui font remonter leurs propositions.
41:47Nous avons aussi une liste des députés
41:50qui ont déjà posé ou pas posé de questions
41:52pour faire tourner le plus de députés possible
41:55et que chacun et chacune puisse avoir un moment solennel
41:58autour des questions du gouvernement,
42:00qui sont un moment de contrôle de l'action du gouvernement,
42:04donc un moment très important.
42:05Et puis, à partir des différentes propositions,
42:08on fait des choix, notamment, nous, chez les Insoumis,
42:11il y a l'idée qui est très fortement ancrée
42:13dans la manière dont on se représente,
42:16d'être représentant du peuple, d'avoir un pied dedans,
42:19c'est-à-dire de faire rentrer à l'intérieur de l'hémicycle
42:22les luttes populaires qui sont menées à l'extérieur
42:25sur des questions de licenciement,
42:27lorsqu'il y avait les mobilisations retraites,
42:29et de porter aussi des questions que, sinon,
42:32peu de groupes vont poser, par exemple,
42:34depuis octobre 2023, nous avons posé quasiment chaque semaine
42:38une question au gouvernement sur le génocide en cours en Palestine,
42:42et pour nous, c'est très important
42:44de pouvoir porter aussi l'écho de ces voix-là,
42:46donc en utilisant, voilà, en faisant attention,
42:49d'avoir aussi des thèmes écologistes,
42:51des thèmes...
42:52Mais en tout cas, d'avoir un pied dedans, un pied dehors.
42:56Vous ne donnez aucun thème au gouvernement ?
42:58Jamais.
42:59Justement, Marc Fesneau,
43:01quand on est ministre des Relations avec le Parlement,
43:04le mardi matin, vous appelez chaque groupe,
43:06chaque ministre, pour connaître les questions,
43:09avez-vous la liste ?
43:10Non. Alors, quand on est avec des groupes
43:12qui sont plutôt à soutenir le gouvernement,
43:15généralement, ils nous disent le thème,
43:17voire parfois, ils nous donnent la question.
43:19C'est un vrai débat.
43:21Comme ministre des Relations avec le Parlement,
43:23j'ai toujours eu...
43:24Il y a des sujets, on parlait de l'affaire Cahuzac,
43:27j'imagine que même si vous avez appelé,
43:30il pouvait imaginer que la question porterait sur ça
43:33que sur la situation budgétaire,
43:34quand bien même il n'avait pas la question
43:37et que les collaborateurs avaient déduit
43:39que ça serait peut-être sur ce sujet-là.
43:42J'ai vu parfois des questions au gouvernement
43:44qui étaient très précises, venant de l'opposition,
43:47d'entreprises qui ferment,
43:49même si les ministres, par nature,
43:51sont omniscients, savent de tout ce qui se passe,
43:53dans toutes les entreprises,
43:55j'ai parfois le regret qu'on ne puisse pas avoir
43:58une réponse complète et qu'après, on peut occuper
44:00les deux minutes, mais c'est un peu regrettable
44:03quand on veut faire le travail de contrôle légitime.
44:06Après, on déduit, parfois, les parlementaires
44:08disent eux-mêmes les questions qu'ils vont poser,
44:11on voit bien, le travail d'une ministre de relations
44:14et de l'actualité, une fois qu'on sait
44:16quels sont les orateurs, et de se dire ce sur quoi il est
44:19à poser des questions d'habitude ou pas.
44:21C'est comme ça qu'on essaye de travailler,
44:24mais on n'a pas les questions au gouvernement,
44:26donc on essaie de déduire, et c'est tout le travail
44:29du ministre des Relations avec le Parlement,
44:32mais le nombre de fois où je travaille avec la Feuille...
44:35Quand vous êtes au banc, c'est de flécher.
44:37Il y a quelqu'un d'un pôle pour ne pas envoyer
44:40un porte-parole du gouvernement ou le ministre des Relations
44:43avec le Parlement, dont c'est pas le rôle stricto sensu,
44:46mais aller répondre à une question sur laquelle il n'est pas le plus armé.
44:50C'est vous qui faites un signe à la présidente de l'Assemblée
44:53pour dire qu'il répond.
44:55Parfois, les ministres n'ont pas envie de répondre,
44:58les collègues le font.
44:59Parfois, ils se refilent un peu la responsabilité.
45:02Il arrive que, selon la nature de la question,
45:04le degré de bienveillance, on ait plutôt envie
45:07de le filer aux collègues.
45:08On l'a vu dans le reportage, c'est deux minutes,
45:11c'est à la fois court et long.
45:13Il y a aussi un droit de réplique.
45:15Le député peut disposer de ces deux minutes
45:17comme il l'entend.
45:19Une première question, la réponse du ministre,
45:21et une réplique à la fin.
45:23C'est compliqué, on le voit depuis que ça a été mis en place.
45:26Deux minutes, c'est très court si on veut poser
45:29une question précise en donnant le contexte.
45:31Il faut que ce soit très court pour avoir 30 secondes,
45:3440 secondes, une minute pour répondre derrière.
45:38Je pense que c'est une question de temps.
45:41C'était trois minutes, il y a quelques années,
45:43maintenant, c'est deux minutes.
45:45C'est très court pour faire une question
45:47et rebondir sur la réponse du ministre.
45:49Mathilde Pannot, vous gardiez le secret
45:52sur vos questions au gouvernement et aussi sur parfois
45:55des manifestations dans l'hémicycle.
45:57Regardez, c'était en mai 2024.
45:58Acclamations
46:00-"Monsieur Delongue !
46:01Acclamations
46:03-"Monsieur Delongue !
46:04Acclamations
46:07-"Vous avez un rappel à l'ordre avec inscription
46:10au procès-verbal jusqu'à saisine du bureau.
46:12C'est inadmissible."
46:14Acclamations
46:15Mathilde Pannot, est-ce que vous étiez au courant
46:18de l'initiative du député de votre groupe ?
46:20Est-ce que vous l'aviez validée ?
46:22Oui, alors, généralement, on ne met pas au courant
46:25forcément tout le monde du groupe,
46:27mais je suis très fière de cette action
46:29qui a été menée dans l'Assemblée,
46:31qui a fait le tour du monde entier et qui montre
46:33qu'il existe aussi une autre voie de la France
46:36qui s'oppose de toutes ses forces au génocide en cours
46:39et qui, surtout, soutient la reconnaissance
46:42de l'Etat de Palestine.
46:43En général, parce que j'ai entendu ce qui a été dit
46:46dans le plateau précédent sur le fait
46:48que nous ferions des coups d'éclat.
46:50Certes, on dirait des coups d'éclat puisqu'on en parle,
46:53mais le but, au départ, n'est pas de faire des coups d'éclat,
46:57même si on a envie qu'on en parle,
46:58mais le but, c'est aussi de réenclencher
47:01un cercle vertueux où le peuple est de retour en politique
47:04et où la visibilité des citoyens et des citoyennes
47:07retrouve le goût de la politique, re-regarde la politique.
47:10Je ne sais pas si vous vous rappelez, en 2022,
47:12les audiences record ont parlé, LCP notamment,
47:15sur les moments de question au gouvernement
47:17qui sont les plus visibles, mais pas que.
47:20Et nous, nous voulons aussi,
47:21nous sommes les partisans d'une 6e République
47:24où les citoyens retrouvent un moyen d'intervenir
47:27tout le temps dans la politique
47:28et ne sont plus exclus de cette politique.
47:31Une précision, c'est interdit dans l'hémicycle,
47:33dans l'instruction générale du bureau à l'Assemblée nationale.
47:37L'expression est orale, on n'a pas le droit
47:39de s'appuyer sur un objet, sur une pancarte.
47:42Vous vous assumez aussi de transgresser
47:44le règlement ici à l'Assemblée.
47:46D'ailleurs, rappelez-vous que le règlement a été changé
47:49à de nombreuses reprises pour que ça devienne interdit.
47:52Par exemple, lorsque nous mettons des courses,
47:54vous en parliez tout à l'heure, lors de la question au gouvernement
47:58sur le fait qu'on baisse les APL dans ce pays.
48:00C'est une manière de rendre concret
48:02le fait que ce dont nous parlons,
48:05ce ne sont ni des chiffres,
48:07ni... C'est la question de la vie des gens.
48:09Après tout, la politique, ce n'est que ça.
48:12Comment est-ce qu'on organise notre société en commun
48:15pour vivre ensemble ?
48:16Lorsque nous faisons cela, c'est aussi une manière de rappeler
48:19que des millions de gens vont se retrouver en difficulté,
48:22alors que, je le rappelle, nous sommes maintenant...
48:25Là, nous sommes plutôt en 2017, mais nous sommes dans un moment
48:28où les enfants se privent régulièrement de repas
48:31pour pouvoir nourrir ses enfants,
48:33où la faim revient dans la 7e puissance économique au monde.
48:36C'est aussi une manière d'interpeller fortement
48:39sur ce qui se fait et de rendre visible le peuple en politique.
48:42Quand il se passe ce genre de moment,
48:44que fait la présidente de l'Assemblée nationale ?
48:47Que font les journalistes ?
48:49Vous êtes souvent en tribune
48:50quand il se passe quelque chose d'inattendu, d'imprévu.
48:53Les journalistes hallucinent, déjà, même si on a pris l'habitude,
48:57et surtout, on regarde, on regarde,
48:59on note, comme on l'a dit déjà,
49:01les caméras s'éteignent à ce moment-là.
49:04Il faut savoir aussi que, je pense que vous partagerez,
49:07quand on est dans l'hémicycle, ça n'a rien à voir
49:09avec ce qu'on perçoit quand on est à la télévision.
49:12C'est très bruyant, il y a une ambiance
49:15qui est complètement unique au sein de cet hémicycle,
49:18donc on est vraiment très, très concentrés
49:20pour redire finalement aux gens,
49:24réexpliquer derrière, dans nos papiers,
49:26dans nos reportages, ce qui s'est passé
49:28avec la sensation qu'on a eue à ce moment-là.
49:31Daniel Fasquel, on parle souvent du décalage
49:33qu'on peut avoir dans l'hémicycle et sur les retransmissions.
49:37Dans l'hémicycle, il y a souvent beaucoup de bruit,
49:39beaucoup d'invectives, c'est aussi un hémicycle
49:42qui est construit de manière à ce que les voix portent,
49:45et on a, à la télévision, une version parfois édulcorée,
49:48au son, en tout cas.
49:49J'ai été député pendant 13 ans.
49:51Les questions au gouvernement, c'est un moment important,
49:54pour rappeler notre rôle de parlementaire,
49:57c'est non seulement de voter la loi,
49:59mais également de contrôler l'action du gouvernement.
50:02Par une question ou par la répétition de la même question,
50:05on peut effectivement faire gérer la vérité,
50:07obliger le gouvernement aussi, parfois,
50:10à évoluer sur ses positions.
50:11Je pense que, de ce point de vue-là,
50:13c'était une bonne idée, en 1974, de créer ces questions.
50:17Moi, j'ai pas du tout été convaincu, d'ailleurs,
50:20quand on a ramené les deux séances du mardi, du mercredi,
50:23au mardi, on est revenu au mercredi.
50:25Il y avait une séance unique.
50:27La possibilité de répondre, dont on s'est inspiré
50:29par rapport au Sénat, finalement,
50:32n'a pas eu les effets qu'on espérait.
50:35Ce que j'ai souvent entendu aussi,
50:37et je pense qu'il faut en avoir conscience,
50:39c'est, de la part de mes électeurs,
50:42de mes concitoyens, des Français,
50:44c'est que, parfois, on donne aussi l'image
50:47d'un défouloir, d'un foutoir, certains diront,
50:51et c'est tout à fait dommage.
50:53Il faut prendre conscience que, si on peut parfois,
50:56pour se faire entendre, être dans la provocation,
50:59le résultat, à la fin, c'est de donner une image
51:02qui est négative de la politique, négative de l'Assemblée nationale
51:05et négative du travail des députés,
51:07parce que ça fait vraiment pas sérieux,
51:10ça fait vraiment cours d'école.
51:12Je pense que certains n'en ont pas conscience.
51:14S'il y a un désintérêt des Français pour la politique,
51:17s'il y a de moins en moins de Français qui vont voter,
51:20si des Français portent ce regard sur la classe politique,
51:23c'est aussi parce que, parfois, on leur offre un spectacle
51:26qu'on ne devrait pas offrir.
51:28Alors, on se fait plaisir, on se défoule sur le moment,
51:32voilà, on est peut-être satisfait de ce qu'on a fait,
51:35mais le résultat, à la fin, il n'est pas bon
51:38en termes d'image pour la politique.
51:40Il y a des moments de tension,
51:42il y a des moments d'émotion aussi, d'union.
51:44Je vous propose de regarder cette séquence.
51:47C'était juste après les attentats qui avaient touché Charlie Hebdo.
51:50...
51:54Le jour de gloire est arrivé
51:57Contre nous de la tyrannie
52:02L'étendard semblant est levé
52:07L'étendard semblant est levé
52:09C'était parti d'un député de Vauran
52:11qui s'était mis à chanter la marseillaise.
52:14Je m'en souviens très bien, j'étais présent,
52:16et ça fait partie des moments qui m'ont marqué
52:19dans le cadre de ma vie de parlementaire.
52:21Ces moments où la représentation nationale
52:23se retrouve après une tragédie,
52:26ils sont importants aussi,
52:27c'est pas forcément le lieu...
52:29Il y a beaucoup d'hommages,
52:31il y a aussi un lieu de questions,
52:33il y a ces moments d'union dans l'Assemblée ?
52:35Oui, ça compte, ça vient parfois contrebalancer,
52:38sur ce que disait Daniel Fasquell,
52:40sur la capacité aussi, dans des moments qui sont souvent graves,
52:43souvent tristes, souvent importants,
52:45la capacité que nous avons à montrer aussi
52:47ce que nous pouvons avoir en commun au-delà de toutes les divergences.
52:51L'Assemblée, c'est le lieu du débat.
52:53Il y a quelque chose qui me gêne un peu,
52:56mais c'est l'objet de votre émission,
52:59n'est pas d'être dans la controverse.
53:01Je trouve qu'on est dans une société de l'image,
53:04et le Parlement, c'est le lieu où on parlemente et on parle,
53:08où c'est les mots qui doivent avoir de la puissance.
53:10J'ai entendu, y compris chez Jean-Luc Mélenchon,
53:13des discours dont la puissance du mot,
53:15moi, je trouve, c'est important,
53:17et les grands débats à l'Assemblée ou au Sénat,
53:20et quand on le remplace trop par le visuel,
53:22on finit par accréditer la thèse que c'est ça qui pourrait compter,
53:26et on se retrouve avec un président argentin
53:28qui se balade avec une tronçonneuse.
53:31Et je trouve que, attention,
53:32pas de jugement, chacun fait comme il veut,
53:35mais je trouve que c'est tellement beau, la puissance des mots.
53:38J'ai entendu, sur tous les bancs, des gens qui,
53:41dans leurs questions, dans leurs émotions,
53:43ont été très puissants par les mots.
53:45Mathilde Panot, je vous laisse répondre,
53:48puisque souvent, les insoumis sont accusés, justement,
53:51de mettre le bazar et de donner une mauvaise image.
53:54Il y a plusieurs choses, on va se retrouver sur la puissance des mots,
53:57car on ne peut pas dire que dans le groupe insoumis,
54:00il n'y a pas beaucoup d'oratrices et d'orateurs,
54:03et le fait que nous nous accordons beaucoup d'importance
54:06au fait de porter la parole et le programme pour lequel on est élu.
54:10Je voudrais redire ce que Jean-Louis Debré,
54:12qui disait à l'époque,
54:14qu'on n'est pas à l'Assemblée pour boire le thé,
54:17il avait cette phrase dans une interview.
54:19C'est dans les pays totalitaires que les Assemblées sont sages.
54:22Chez nous, il est plus sain que tout cela s'exprime
54:25dans l'hémicycle plutôt qu'ailleurs.
54:28Il faut se rappeler qu'au départ, la démocratie représentative
54:31est faite pour régler pacifiquement les antagonistes.
54:34Je préfère largement que nous ayons des mots
54:37qui, certes, peuvent être très durs,
54:39mais très durs sur les projets politiques
54:41et sur le retour du plus de monde possible et du peuple,
54:44notamment dans le vote et dans le choix de notre destin commun,
54:48plutôt que ça se passe autrement dans des affrontements.
54:51C'est ça, la démocratie.
54:52On voudrait partager un dernier moment avec vous
54:55puisque dans ces 50 ans, il y a eu aussi la crise,
54:58la crise du Covid, mais les questions gouvernementales
55:01étaient maintenues coûte que coûte.
55:03La France lutte et elle surmontera cette épreuve.
55:06C'est pour cela que nous siégeons, certes, en format très restreint,
55:11mais nous siégeons pour assurer notre mission constitutionnelle
55:15et faire vivre notre vie démocratique.
55:17Marc Fesneau, à l'Assemblée, a été un des premiers clusters.
55:20Comment est venue la décision de dire
55:22qu'il faut maintenir la séance des questions au gouvernement ?
55:25C'était partagé par l'ensemble des groupes.
55:28La démocratie ne pouvait pas être mise totalement en suspens.
55:31Le ministre avait employé le terme de dégrader.
55:33Il y avait un représentant par groupe,
55:36on le voit dans les images.
55:37J'étais ministre des Relations avec le Parlement.
55:40Sur les débats, y compris de...
55:42Est-ce qu'on ferme ? Est-ce qu'on ouvre ?
55:44Ca a été bien quand même qu'on arrive à faire
55:47un peu fonctionner la démocratie,
55:49même si elle était en mode dégradé.
55:51Avec des images hallucinantes.
55:53Une quinzaine de députés dans l'hémicycle.
55:56Ils représentaient l'ensemble de leur groupe.
55:58Ca, c'était très important. Ca n'existe quasiment plus.
56:01C'était la grande fierté de Richard Ferrand qui dit
56:04qu'on a réussi à faire fonctionner coûte que coûte
56:07l'Assemblée nationale.
56:08C'était un moment d'union nationale aussi
56:11parce que l'ensemble des députés a joué le jeu.
56:13Mathilde Panot, vous étiez députée au moment du Covid.
56:16Il fallait, malgré la peur et le stress,
56:19maintenir cet exercice démocratique.
56:21Très rapidement, aucune crise sanitaire,
56:23aucune crise internationale, par ailleurs,
56:26ne peut suspendre la démocratie.
56:28Je pense que c'est vraiment très important.
56:30C'est une des raisons pour lesquelles nous dénoncions.
56:33Le Conseil de défense a pris beaucoup de décisions.
56:36C'est un exercice indispensable.
56:38Oui, absolument. Il ne fallait surtout pas capituler
56:40face au Covid et, d'ailleurs, ça ne nous empêchait pas
56:43de nous voir et de préparer ces questions
56:46à travers des séances de visio.
56:48On a découvert la visio.
56:49On a découvert la visio, mais il faut savoir
56:51que si les députés étaient peu nombreux dans l'hémicycle,
56:55les questions qui étaient posées étaient préparées
56:58et décidées par l'ensemble des membres du groupe.
57:00C'était un exercice différent, mais on a su faire vivre
57:03la démocratie et l'assurance nationale
57:05dans ces périodes compliquées et on peut en être fiers.
57:08Merci à vous d'avoir regardé avec nous
57:11ces 50 ans d'archives.
57:12Merci à celles qui ont fouillé dans ces heures d'antenne,
57:15Chantal Alès à la rédaction en chef,
57:17Maïté Frémont à l'édition,
57:19Samuel Boyer à la production,
57:21toutes les équipes de la chaîne parlementaire.
57:23J'ai le plaisir de vous retrouver, pas dans 50 ans,
57:26tous les mardis et mercredis,
57:28pour les questions gouvernement, puisque c'est sur LCP.

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