Philippe de Villiers passe en revue l'actualité de la semaine dans #FaceAPhilippedeVilliers. Présenté par Eliot Deval
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00:00Il est 19h sur CNews, merci d'être avec nous pour face à Philippe Devilliers, cher Philippe, bonsoir.
00:06Bonsoir Eliott, bonsoir Geoffroy.
00:08Geoffroy Lejeune, bonsoir.
00:09Bonsoir les amis.
00:10C'est le 14 février, c'est la fête des amoureux, la Saint-Valentin, Philippe Devilliers.
00:14Est-ce que vous avez un message pour les amoureux ce vendredi soir ?
00:18Ça s'appelle un démarrage en côte.
00:24Donc, un petit message pour les amoureux.
00:27Pour tous les amoureux de France, il y a un mot de Bucy Rabutin, je crois.
00:37Le temps est à l'amour, ce qui est au feu le vent.
00:44Il atteint le petit, il attise le grand.
00:49On dit tout aux téléspectateurs, en plus de ne pas avoir de fiche,
00:52vous avez une meilleure mémoire que nous deux réunis,
00:55puisqu'avant l'émission, vous m'avez dit, l'année dernière, pour le 14 février,
00:59on avait parlé d'une des plus belles chansons d'amour, si ce n'est la plus belle,
01:02l'hymne à l'amour d'Edith Piaf.
01:04Il y a deux choses qui ne meurent pas dans la vie, c'est l'amour et la mémoire.
01:07Eh bien, écoutez, est-ce que vous avez une seconde chanson d'amour pour les Français ?
01:11Ah !
01:16Il ne me quitte pas de Jacques Brel.
01:19Ah, merveilleux.
01:20Quand il offre des perles de puits, et qu'il a ce mot qui m'a toujours frappé.
01:29Je me souviens, quand j'étais au Liban, ils avaient écrit ça sur les panneaux la nuit,
01:35pour garder l'espoir.
01:37Il est, parait-il, des terres brûlées, donnant plus de blé qu'un meilleur avril.
01:43Et pour l'amoureux de la France que vous êtes,
01:47quelle est la plus belle preuve d'amour qu'on pourrait faire à la France ?
01:50C'est de donner sa vie pour la France.
01:53Donc, tous ceux qui, dans l'histoire de France, ont donné leur vie pour la France,
01:57méritent d'être salués, admirés.
02:01Ce sont des modèles.
02:02J'en citerai deux.
02:04Jeanne d'Arc s'est acceptée d'être brûlée pour la France.
02:11Et puis, le serment de 14.
02:13Qu'est-ce que c'est ?
02:14Les serments de 14, ce sont des jeunes gens qui sont des Syrahs, des Saint-Syriens,
02:19et qui décident de monter en ligne en garances et en casoards et gants blancs.
02:29Donc, ils se destinent eux-mêmes à devenir des cibles.
02:34L'honneur d'être une cible.
02:37Et ils meurent en criant « Vive la France ! »
02:42Le serment de 14.
02:44Voilà pour la plus belle preuve d'amour pour la France.
02:47Vous avez dit que c'est un démarrage en côte, pour filer la métaphore.
02:50Et je sais que vous aimez le vélo.
02:52Vous avez grimpé cette côte comme une durène.
02:54Simplicité absolue pour vous.
02:57Voilà le message pour les amoureux.
02:59On souhaite évidemment une belle fête du 14 février pour tous nos téléspectateurs.
03:04Philippe Devilliers, après ces sourires, retrouvons malheureusement cette actualité dramatique.
03:10Comment ne pas commencer cette émission par le drame qui sidère la France
03:13et la mort de la petite Louise, enfant de 11 ans.
03:16Je voudrais vous faire écouter l'émotion de Naïma Fadel.
03:19Elle a parlé de cette France aujourd'hui où l'insécurité gagne du terrain
03:23et de son angoisse quand une de ses filles est dehors.
03:26Écoutons.
03:28Je ne l'ai jamais fait.
03:30Je ne l'ai jamais fait attracer mes enfants.
03:32J'ai quatre enfants.
03:33J'ai ma gamine de 25 ans, je la trace maintenant.
03:36T'imagines ?
03:38T'imagines ?
03:39Donc venir dire comme ça, d'une manière tout à fait détachée, on ne peut pas être détaché.
03:44Parce qu'aujourd'hui, dans notre pays, on est en insécurité.
03:48On a peur pour nos enfants.
03:50Moi, la petite Louise, ça aurait pu être mon enfant.
03:53Il y a quelques années, quand je l'ai laissé rentrer de l'école, en primaire déjà,
03:57ils allaient à l'école, ils rentraient de l'école.
03:59Là, j'ai une gamine de 25 ans que je géolocalise.
04:02Et elle le sait.
04:04Vous voyez ?
04:05Et je lui dis, tu prends un Uber.
04:07Le soir, quand tu es fini, à 11h, tu prends un Uber.
04:10Et quand tu rentres, tu me le dis.
04:12Et quand je m'endors, je me réveille pour regarder si ma gamine est bien rentrée à la maison.
04:18Voilà la situation dans laquelle on est aujourd'hui.
04:21Donc il faut savoir entendre cette douleur aussi, et notre peur.
04:24Et nos politiques doivent se saisir de tout cela.
04:27Et moi, le docteur Maurice Berger, je travaille avec lui, je le connais bien.
04:31Il me dit qu'il y a des gamins qui, aujourd'hui, tuent à 13 ans, 14 ans,
04:35et qu'on laisse faire.
04:37Ils attaquent les gamins qui ont tué le petit Elias.
04:41Les gamins qui ont tué le petit Elias.
04:43Ils avaient déjà fait des agressions avec violence, extrême violence.
04:47Et là, on leur dit, ce n'est pas grave, tu reviendras.
04:50Mais comment ? Il faut protéger nos enfants, les innocents.
04:53C'est eux qu'il faut protéger en premier.
04:56Et dans la même semaine, Philippe de Villiers, il y a eu ce message bouleversant
05:00justement du petit Elias dont parlait Naïma Mfadel.
05:03Voilà ce qu'ils disent, les parents, un jeune doit pouvoir rentrer chez lui en toute sécurité.
05:08Ne laissons pas des mineurs réitérer librement leurs actions
05:11et mettre en danger notre société.
05:13Sans parler, cette semaine de Grenoble, cette grenade lancée dans un bar.
05:18Est-ce qu'on peut lier cette succession de drames, Philippe de Villiers ?
05:22Que révèle-t-il de l'état de notre pays ?
05:26C'est bouleversant le témoignage de Naïma.
05:30Et le témoignage des parents d'Elias.
05:34C'est lourd à porter, quand on veut regarder la vérité en face.
05:42Alors, moi quand j'écoute Naïma, je me dis,
05:47voilà, dans le filigrane de son propos,
05:54et de ses angoisses, il y a deux questions.
05:59En fait, il y a une question qui concerne la société
06:02qui est en train de foutre le camp par le fond,
06:04et une question qui touche l'état,
06:07qui ne fait plus face à ses missions pour lesquelles il a été inventé.
06:13Donc la situation, elle est gravissime.
06:16En quelques mots,
06:19la question de la société,
06:23regardez ce qui s'est passé cette semaine.
06:26Sauf erreur de ma part.
06:29Les parents du petit Elias ont eu le courage de prendre la plume
06:34pour rectifier une dépêche de l'AFP.
06:38C'est-à-dire que toute la presse française savait
06:42que le petit Elias a été massacré à la machette.
06:46Mais la presse française, la presse française officielle,
06:49la plus officielle,
06:52a choisi le mensonge par omission.
06:57L'AFP n'a rien dit.
07:00L'AFP a dit qu'il a été poignardé.
07:02Non, il a été tué à la machette.
07:06Et pourquoi la presse officielle n'a rien dit ?
07:10Parce que la machette, ça a un sens précis.
07:13C'est la tropicalisation de la France.
07:18Et en fait, ce que je voudrais dire sur la société telle que je la vois aujourd'hui
07:23et telle que moi je l'ai connue quand j'étais petit.
07:28Une société de voisinage
07:31où on était libre d'aller et de venir.
07:34Ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.
07:37Cette société-là, elle glisse vers la barbarie.
07:43La barbarie, c'est quoi ?
07:47C'est la violence et l'amnésie.
07:51C'est un composé décomposé de violence et d'amnésie.
07:57C'est le contraire de la civilisation.
07:59J'ai dit déjà ici, et je répète, la civilisation.
08:02Je pense que tous les sociologues et tous les philosophes sont d'accord là-dessus.
08:07Une civilisation, c'est un état social dans lequel celui qui vient au monde
08:11s'aperçoit très vite que ce qu'il compte apporter de plus subtil et de plus polissé
08:16est très inférieur à ce qu'il trouve en arrivant.
08:21De subtilité et de bonne polisse.
08:25De mœurs polissées.
08:27Dans un pays qui est quand même l'inventeur de la courtoisie,
08:31comme le dit l'historien Charles St-Jobas.
08:34Or là, écoutez les mots.
08:37Récoutez les mots de cette semaine que j'ai entendu comme vous.
08:40D'abord, Owen, un prénom.
08:44Un prénom de série américaine.
08:47Ensuite, jeux vidéo.
08:49C'est l'Amérique du virtuel qui vient chez nous.
08:52Et de la violence.
08:54Ensuite, grenade à Grenoble.
09:00Une grenade, c'est le Salvador.
09:02Ensuite, la machette, c'est les tropiques.
09:05C'est qu'on n'est plus en France.
09:07Il n'y a plus rien de français dans tout ça.
09:09Dans cette violence.
09:11Ça veut dire qu'on est dans la société de la déliaison.
09:14On n'est plus en société.
09:15On est en dissociété.
09:16Les liens sociaux sont distendus.
09:18Il n'y a plus de voisinage autre que numérique.
09:22On est des solidaires solitaires.
09:24Chacun vit comme un individu.
09:26Un individu global, à la Macron.
09:30Pour sauver la planète.
09:32Mais on ne sauve pas son voisin.
09:34On ne le voit même plus.
09:36On ne le voit même plus vivre.
09:37On ne le voit même plus mourir.
09:40Quant à l'État.
09:44L'État régalien, en fait,
09:48s'est déchargé du régalien sur le citoyen.
09:52C'est ça qui s'est passé depuis dix ans.
09:55Je regardais l'émission qui nous a précédés,
09:58avec notre ami Thierry Cabane.
10:01De quoi parlaient les interlocuteurs ?
10:04Ils parlaient de la vidéosurveillance.
10:06Et on voyait le ministre en campagne,
10:09le ministre de l'Intérieur,
10:12qui parlait de la vidéosurveillance.
10:15Avec le maire Piolle.
10:20Et je me disais, voilà, ça y est.
10:22On a capitulé.
10:23En fait, on est en aval.
10:25Je vais essayer d'expliquer pourquoi.
10:28Donc l'État a fait le constat de son impuissance.
10:32Non possumus, comme on disait chez les anciens.
10:34Je ne peux plus rien pour vous.
10:36Devant Orange Mécanique,
10:39le régalien évolue avec ce qu'ils appellent
10:42au ministère de l'Intérieur.
10:45C'est né au moment de Crépole.
10:47Un narratif officiel.
10:49Il y a besoin d'un récit officiel, d'un narratif.
10:52Ça pue le mensonge.
10:54Ça sointe le mensonge.
10:55Le narratif officiel.
10:57Et la ligne de fuite du narratif officiel,
11:00c'est le fameux concept de Macron,
11:04funambule de la sémantique.
11:08La société de vigilance.
11:10Nous sommes entrés dans la société de vigilance.
11:13Qu'est-ce que ça veut dire, la société de vigilance ?
11:15C'est subtil.
11:16Ça veut dire, moi, l'État, je ne peux plus rien pour vous.
11:20Je vous demande simplement de faire attention,
11:22d'être vigilant.
11:24Donc faites attention.
11:26Quand vous marchez, vous choisissez vos horaires.
11:29On va peut-être faire des chemins sécurisés.
11:34C'est-à-dire que petit à petit,
11:35la liberté d'aller et de venir est balisée de partout.
11:40Et surtout, c'est à chaque citoyen
11:44d'assumer lui-même le régalien de son autoprotection.
11:53Donc en fait, l'État se décharge sur lui
11:55et il prend cette charge.
11:57Il devient un peu régalien
12:00à chaque moment de sa vie pour ne pas mourir.
12:03Pour dire les choses avec une image,
12:05vous avez les fichiers S,
12:08de plus en plus nombreux, qui sont en liberté,
12:11et les non-fichiers S, c'est-à-dire vous et moi,
12:13qui sont en semi-liberté.
12:16Et alors, ce qui marche bien en France,
12:19ce qui marche le mieux en France avec les fruits et légumes,
12:22parce qu'on en mange toujours malgré tout,
12:24c'est Digicode, les portiques, la géolocalisation,
12:30les sociétés privées de surveillance, de sécurité.
12:35Et vers quoi va-t-on ?
12:37On va vers l'étape ultime.
12:39On a connu le confinement sanitaire.
12:42On va connaître le confinement sécuritaire.
12:48Qu'est-ce que ça veut dire ?
12:49Ça veut dire qu'on va vers la tentation mérovingienne,
12:56la reféodalisation de la France.
13:00Les historiens savent ce qu'a été la fin de l'Empire carolingien.
13:06On a vu apparaître les douves,
13:10les échauguettes, le tour de garde,
13:14la main en visière pour voir les bandes
13:18qui mettent le feu aux récoltes.
13:20Et nous, on a quoi ?
13:22On a les Digicodes, qui sont en fait les nouveaux remparts.
13:25On a les drones, qui sont les futurs donjons.
13:29Si vous transposez, vous n'êtes pas très loin du principe
13:32des suzerainetés protectrices et des vassalités à l'abri des forteresses.
13:37Et donc, en fait, la France est en train d'abandonner son pacte fondateur.
13:46Du temps de Clovis jusqu'à Clovis, il y avait la feida.
13:49Jusqu'à Clovis, il y avait la tribu qui pouvait se faire justice.
13:54Donc, la vengeance privée.
13:57Et l'État moderne, avec surtout Saint-Louis qui a supprimé
14:04les justices seigneuriales et féodales,
14:08l'État moderne, il a dit aux citoyens
14:11« Bon, vous abandonnez votre droit personnel de vous venger,
14:15c'est moi qui vais vous venger.
14:18Et vous abandonnez votre droit de vous protéger vous-même.
14:23On va vous protéger, moi je vais vous protéger. »
14:26À partir du moment où l'État est défaillant dans sa mission
14:30de sécurité, de protection et de justice, ce qui est le cas aujourd'hui,
14:36ce qu'on peut craindre, c'est les rondes, les milices,
14:42le néo-féodal, le retour à la tentation néo-vingienne.
14:50Philippe de Villiers, voilà plus d'un an et demi que nous faisons cette émission.
14:54Depuis le début, régulièrement, vous avez parlé de la nécessité avec la Russie
14:58de dialoguer pour mettre fin à cette guerre en Ukraine.
15:01On va parler d'un autre sujet à présent.
15:03Éviter le camouflet d'une Europe qui n'est pas assise à la table des négociations.
15:07Cette semaine, un échange téléphonique nous donne raison,
15:11pour la première fois depuis février 2022,
15:13le président américain a donc échangé avec le président russe.
15:18Je vous propose d'écouter Donald Trump.
15:21Nous avons eu un grand appel. Il a duré longtemps, plus d'une heure ce matin.
15:29J'ai également eu un très bon appel avec le président Zelensky après cela.
15:34Je pense que nous sommes sur la voie de la paix.
15:37Je pense que le président Poutine et le président Zelensky veulent la paix.
15:41Moi, je veux la paix. Je veux simplement que les gens cessent de se faire tuer.
15:47Geoffroy Lejeune.
15:48En quoi selon vous, Philippe, cet échange entre Donald Trump et Vladimir Poutine est-il un tournant majeur ?
15:54C'est un tournant majeur, je crois, dans la guerre en Ukraine.
16:02Mais c'est plus que ça.
16:05C'est un tournant majeur sur le plan géostratégique pour l'Europe.
16:15Alors, pour l'Ukraine, ça veut dire qu'enfin, on nous dit la vérité entre les lignes.
16:26Mais Trump, Poutine, à travers ce coup de fil, nous disent la vérité qu'on nous a cachée depuis trois ans.
16:32Puisque depuis trois ans, on nous dit ça y est, on va gagner.
16:35L'Ukraine va gagner, l'Europe, etc.
16:38Quand on est informé, comme c'est mon cas, on rigole.
16:42Je ne suis pas sérieux.
16:44Bon, voilà.
16:45Donc, l'Ukraine est défaite militairement.
16:50Et donc, ce que proposent Trump et Poutine, c'est d'arrêter les frais pour les deux belligérants.
16:59Ça paraît sage.
17:01Deuxièmement, l'Ukraine est amputée.
17:06Elle est amputée durablement, puisqu'ils se sont mis d'accord, dans leur coup de téléphone,
17:11pour qu'on ne revienne pas à la carte d'avant 2014.
17:15Ça veut dire qu'en fait, ce qui est perdu est perdu.
17:18Les provinces perdues ne reviendront pas à l'Ukraine.
17:22La Crimée, de toute façon, elle a toujours été russe.
17:26Et le Donbass, c'est fini.
17:28Il restera russe.
17:31Et la troisième décision importante, c'est que Trump ne veut pas,
17:38Biden non plus d'ailleurs, son prédécesseur,
17:41l'Amérique ne veut pas que l'Ukraine entre dans l'OTAN.
17:46Et donc, Trump dit aux Européens, si vous voulez protéger l'Ukraine, faites-le vous-même,
17:53avec vos troupes, avec votre armée.
17:58Voilà pour l'Ukraine.
18:00Maintenant pour l'Europe.
18:02C'est très simple.
18:04La défaite de l'Ukraine est la défaite de l'Europe.
18:07C'est clair.
18:12Et l'Europe, elle va payer.
18:15Je m'entretenais au téléphone hier avec mon ami Pierre Lelouch,
18:19qui est un excellent connaisseur, qui a fait un livre remarquable sur cette question de l'Ukraine.
18:23Remarquable.
18:24Et qui me disait, 700 milliards, ça va nous coûter l'Europe.
18:28On va payer.
18:30Vous imaginez l'agriculture, vous imaginez avec quel argent on va payer pour relever les ruines.
18:37Ce n'est pas les Américains qui vont payer.
18:39Les Américains, ils vont partir.
18:41Ce n'est plus leur problème.
18:43Et ce n'est pas les Russes non plus qui vont payer.
18:46Alors moi, je voudrais dire quelque chose que je n'ai jamais dit jusqu'à présent,
18:54mais il est temps de le dire, puisque je vois que les deux chefs s'accordent entre eux.
18:58Poutine, Trump.
19:02Il y avait un homme qui s'appelait Brzezinski,
19:06qui était un Polonais devenu Américain,
19:09qui était un grand géostratège,
19:12et qui a écrit un livre qui s'appelait Le Grand Échiquier,
19:15et qui disait, nous l'Amérique, pour qu'on soit une grande puissance,
19:19il faut couper l'Europe en deux.
19:21Il ne faut pas que l'Europe s'entende avec les Russes.
19:27Et il a bien réussi.
19:31Seulement aujourd'hui, Trump dit,
19:33moi je veux m'entendre avec les Russes pour affaiblir la Chine.
19:41Et donc la doctrine Brzezinski est aujourd'hui périmée.
19:47La diplomatie américaine a changé.
19:52Et ensuite, la chose que je voulais dire,
19:56c'est que moi j'ai eu l'occasion de rencontrer les plus hautes personnalités
20:04qui connaissent cette histoire, et qui m'ont dit ceci.
20:09Vous verrez que les historiens diront ce que je vais vous dire maintenant.
20:13Les responsabilités sont partagées,
20:15mais il ne faut pas oublier quand même ce qui s'est passé.
20:18Quand il y a eu la chute du mur de Berlin,
20:23la Russie a demandé aux Américains de ne pas étendre l'OTAN,
20:31au-delà des nouveaux pays de l'Est, la Pologne, etc.
20:36Et la Russie a dit, si jamais vous étendez un jour votre volonté,
20:41de faire entrer dans l'OTAN l'Ukraine,
20:45de détacher l'Ukraine de la Russie, de la zone d'influence de la Russie,
20:50alors vous aurez la guerre.
20:55Et moi, Poutine me l'a dit à moi, il y a longtemps.
20:59Donc en fait, il y a eu une erreur d'appréciation très grave des Anglo-Saxons.
21:05Et nous, qu'est-ce qu'on a fait ?
21:06Comme d'habitude, on a suivi les Anglo-Saxons.
21:08On s'est lancé à corps perdu dans cette guerre qui n'est pas la nôtre,
21:12cette guerre entre deux peuples slaves,
21:15en ignorant d'ailleurs au passage qu'ils ont une histoire commune.
21:19Le baptême de la Russie, c'est Karzenes, c'est en Crimée,
21:26et c'est Fkiev, c'est en Ukraine.
21:29Donc il faut comprendre que l'histoire est plus complexe qu'on ne l'a dit.
21:34Et moi, ce soir, je pense à Akron, je pense à Scholz,
21:40je pense à tous ces chefs d'État qui ont fait payer à leur peuple
21:45le prix d'une guerre inutile.
21:48Ils sont responsables, devant l'histoire, d'une grave défaite, d'un grave échec.
21:54Et je vais vous dire quelque chose, Éliott, Geoffroy,
21:58ce soir, l'Europe, l'Europe, l'Europe,
22:03l'Europe est sortie de l'histoire.
22:08On continuera de parler de l'Europe dans un instant,
22:11et de cette idée d'une Europe de la défense.
22:15Ça rejoint la thématique que nous traitions à l'instant.
22:19La publicité, on revient dans quelques secondes.
22:24De retour pour la suite, de face à Philippe de Villiers,
22:28toujours avec Philippe, bien sûr, et Geoffroy Lejeune.
22:29Philippe de Villiers, j'ai reçu énormément de messages
22:32dans la première partie de l'émission.
22:34On est revenu, pour les téléspectateurs qui nous rejoignent,
22:36sur ces drames qui s'enchaînent,
22:38que ce soit Elias, la petite Louise, 11 ans,
22:41ou la situation à Grenoble.
22:43On se posait la question de cette succession de drames.
22:47Est-ce qu'on peut les lier ?
22:49Et que révèle-t-il de l'État de notre pays ?
22:51Vous avez dressé un constat extrêmement lourd,
22:53d'une faillite de l'État qui n'arrive plus à protéger ses citoyens,
22:55et d'un politique qui pense à cette société de vigilance
23:00imaginée par Emmanuel Macron.
23:03J'ai oublié de vous poser la question,
23:05j'y ai pensé pendant la publicité.
23:07Vous avez dressé ce constat d'une société en voie de féodalisation.
23:10L'autre question que je devais vous poser,
23:12c'est que faire, à ce moment-là ?
23:14Alors, la réponse est simple.
23:18Premièrement, rétablir les frontières, au grand tabou.
23:22Vous remarquerez qu'aucun des ministres, fut-il si audacieux,
23:28ne parle des frontières.
23:30Tant qu'il n'y aura pas de frontières, ce n'est pas la peine.
23:34Donc, on rétablit les frontières.
23:36Ça veut dire qu'on sort de Schengen,
23:38ça veut dire qu'on a un problème avec l'Europe, etc.
23:40Il faut assumer.
23:42Deuxièmement,
23:44il faut renverser la doctrine de la justice
23:48de l'excuse absolutoire.
23:52Pour remettre au cœur de la justice,
23:55la victime.
23:57Et non pas le délinquant, le coupable.
24:02Ça paraît secondaire,
24:06c'est fondamental.
24:09Et je fais partie des gens qui n'ont jamais apprécié Badinter.
24:13Parce qu'en fait, Badinter, c'est un groupe de gens
24:15qui n'ont jamais apprécié Badinter.
24:17Parce qu'en fait, Badinter, c'est un grand démagogue.
24:20Quand on a supprimé la peine de mort,
24:22on n'a pas supprimé la perpète
24:25pour les parents d'Elias
24:27et les parents de Louis.
24:30Et troisièmement,
24:32l'école.
24:34C'est pas avec Born qu'on va s'en sortir.
24:37Il faut,
24:41quitte à ce que
24:45on ait face à nous une grève durable
24:49de l'éducation nationale,
24:52il faut que l'école
24:55soit l'école des mœurs.
24:57Parce que moi, je me souviens d'un mot de Solzhenitsyn
25:00que j'ai cité à la salle Gaveau
25:02avec nos amis du Figaro, mardi soir.
25:06Que je salue d'ailleurs tous les gens qui étaient là au passage.
25:10– Salle complète, pleine, les trois étages remplis.
25:13– Et j'ai cité Solzhenitsyn
25:16avec Vincent Trémolet de Villers
25:18qui disait,
25:20quand un pays n'a plus de mœurs,
25:23il fait des lois.
25:25Comment on peut retrouver des mœurs ?
25:28C'est-à-dire redevenir des voisins
25:30par l'école.
25:32Comment on peut,
25:34à l'école,
25:36enseigner les mœurs ?
25:38Pour enseigner les mœurs,
25:40il faut enseigner la mémoire commune
25:43et des rêves en commun.
25:45L'art de vivre,
25:47pour qu'on ait la même manière
25:49de regarder le monde et d'habiter le monde.
25:52Et enfin, une langue qui ne soit pas une langue massacrée,
25:55la langue française
25:57qui inscrit dans le temps
26:02un romanesque
26:04qui vient embraser le roman de nos vies.
26:07Et donc en fait, si on remet de l'amour à l'école,
26:11c'est-à-dire que si on dit aux petits français
26:14on va faire de vous des amoureux de la France,
26:16ils n'auront plus envie de tuer.
26:18Même ceux qui viennent de l'extérieur
26:21et dont on fera peut-être
26:23des français de désir.
26:25Et il y a une preuve de tout ça.
26:27Ils l'ont fait sous la Troisième République,
26:29les hussards noirs de la République,
26:31relisez Peggy,
26:33ils l'ont fait, les hussards noirs de la République,
26:35ils ont mis une blouse, on les appelait les hussards noirs
26:37parce que c'était des soldats,
26:38des soldats de la pensée française.
26:40C'est la phrase de De Gaulle que vous connaissez
26:43et que j'ai souvent citée.
26:45À chaque fois que la France était au bord de l'abîme,
26:48elle s'est accrochée à deux moules qui n'ont pas vacillé,
26:50le tronçon de l'épée et la pensée française.
26:53Le tronçon de l'épée, c'est une justice forte,
26:57une justice impitoyable
26:59et la pensée française,
27:01c'est l'amour de la France transmis à ses enfants.
27:04Dans un instant, on reparlera ensemble
27:06de l'Europe de la Défense
27:08si cette Europe de la Défense est un danger
27:10pour la souveraineté de la défense française,
27:13de l'armée française bien sûr.
27:15Mais vous étiez en train de parler de la France,
27:17de l'amour de la France
27:19et ça rejoint l'une des thématiques qu'on devait trotter
27:21qui est l'identité nationale.
27:23Et pourquoi je vous dis ça ?
27:25Parce qu'en vous écoutant,
27:27j'entends le Philippe de Villiers
27:29que j'ai entendu en creusant dans les archives
27:32il y a 30 ans quasiment, jour pour jour.
27:35On est en mars 1992,
27:36vous êtes l'invité d'une émission
27:38qui s'appelle Le Point sur la Table.
27:40Vous êtes face à Harlène Désir
27:42qui est le président à l'époque de SOS Racisme
27:45et l'émission avait une thématique,
27:48l'identité française est-elle en danger ?
27:51C'est un débat qui dure une heure et demie
27:54donc on l'a évidemment scindé
27:56en prenant quelques parties,
27:58on ne pouvait pas tout prendre.
28:00D'abord, la première question c'est
28:02qu'est-ce qu'être français ?
28:04Je vous propose d'écouter le Philippe de Villiers
28:06qui dans la forme ni le fond n'a pas vraiment changé.
28:10Être français, c'est pas simplement
28:13et c'est sans doute le cœur de notre débat
28:16un tampon de sous-préfecture
28:18et il me paraît impossible qu'on puisse continuer
28:21dans certains cas à être français,
28:23à devenir français sans le savoir et sans le vouloir.
28:25D'abord, être français c'est faire alliance
28:28avec un héritage spirituel
28:30dans lequel on puisse démoder.
28:32On fait alliance avec cet héritage
28:34soit par fait d'hérédité,
28:36je suis français par filiation
28:38parce que mes parents sont français,
28:40soit par un acte de la volonté
28:42mais pas comme un porteur de part d'une société anonyme
28:45mais plutôt comme Edgar Morin qui dit
28:47et c'est magnifique, il dit
28:49j'ai pleuré à Alésia, j'ai aimé ses héros,
28:51j'ai admiré ses victoires.
28:53Je suis devenu français par un processus d'identification.
28:56Deuxièmement, être français
28:58c'est parler français,
29:00c'est penser en français
29:02et puis enfin être français
29:04c'est important.
29:06C'est aussi important, c'est même plus important
29:08parfois selon les moments
29:10quand la France est menacée,
29:12ce qu'on appelle alors la patrie.
29:14La France est une idée morale,
29:16une idée nécessaire à la civilisation.
29:18Arlène Désir vous répond.
29:20Qu'est-ce qu'être français selon Arlène Désir ?
29:23Et ensuite on vous écoutera
29:25puisque vous allez inverser en quelque sorte
29:27l'idéologie, la pensée de M. Arlène Désir.
29:31L'identité de la France est-elle en danger ?
29:34Cette question et sa formulation,
29:37la façon dont elle est véhiculée
29:39par un certain nombre de gens,
29:41son contenu, ce qu'elle sous-entend
29:43relève aujourd'hui de l'utilisation d'une peur
29:46et d'un fantasme.
29:48Être français c'est adhérer à un contrat,
29:50un contrat qui implique des devoirs et des droits.
29:52C'est être un peu l'héritier
29:54de ces valeurs qui depuis la Révolution française
29:56ont fait le tour du monde.
29:58Ces valeurs qui sont celles de la République.
30:00Philippe de Villiers n'a pas parlé de la République
30:02et je trouve ça assez singulier
30:04parce que c'est la République
30:06garante des libertés avec la laïcité,
30:08garante de l'égalité avec la citoyenneté,
30:10l'abolition des privilèges
30:12depuis la Révolution française,
30:14garante de la fraternité avec l'égalité sociale,
30:16la protection sociale.
30:18Alors moi je vais vous dire quelque chose,
30:20je ne fais pas commencer la France en 1981
30:22comme Jacques Lang
30:24quand on passe de l'ombre à la lumière.
30:26Pas non plus en 1789.
30:30Et je considère que les valeurs républicaines
30:32qui faisaient dire à Péguy
30:34la mystique c'est quand on meurt pour la République,
30:37la politique c'est quand on en vit.
30:39C'est une phrase profonde,
30:41superbe et d'actualité.
30:43Et bien ces valeurs républicaines
30:45ce sont les valeurs de la France.
30:47Il y a eu des césures, il y a eu des fractures
30:49mais finalement on les retrouve ces valeurs de la France.
30:51Les valeurs de la res publica, de la chose publique.
30:53J'ai regardé moi le, entre guillemets,
30:55le catéchisme de Jules Ferry
30:57et il dit quatre choses,
30:59il dit respect des familles,
31:01la famille, on n'en parle plus aujourd'hui.
31:03J'espère que ce soir on va en parler
31:05à propos de la démographie
31:07parce que l'identité française elle est menacée
31:09parce que la France ne fait plus d'enfants.
31:11Et je ne vois pas comment on pourrait résoudre
31:13les problèmes de l'immigration s'il n'y a plus d'enfants français
31:15car ce sont les enfants français
31:17qui intègrent, qui assimilent
31:19les petits enfants étrangers.
31:21– On y vient en menace, d'ailleurs enchaînez
31:23si vous le souhaitez sur les menaces.
31:25– Troisièmement, toujours Jules Ferry,
31:27les valeurs républicaines enseignées
31:29dans l'instruction publique à l'école.
31:31C'est-à-dire les valeurs de France,
31:33ça il y était très attaché.
31:35Et enfin la vénération,
31:37ce qu'il appelait la vénération des symboles
31:39c'est-à-dire la Marseillaise, le drapeau et les modèles.
31:41Et puis enfin les valeurs morales.
31:43Il y a des lexicologues, des spécialistes des mots
31:46qui ont étudié les lettres envoyées
31:48par les soldats de 14-18
31:50à toute leur famille en France
31:52pendant la guerre de 14-18
31:54et c'est tout à fait fascinant.
31:56Ils ont découvert qu'il y avait un seul mot
31:58qui revenait, qui dominait tous les autres.
32:00Les mobilisés de 14-18,
32:02les soldats français, les poilus
32:04qui étaient dans la tranchée,
32:06quelle que soit l'école,
32:08école catholique ou école publique,
32:10prononçaient le même mot.
32:12Papa, maman, je fais mon devoir.
32:14Mon fils, tu fais ton devoir.
32:16C'est cette notion de devoir
32:18qui réconciliait tous les Français.
32:20C'est-à-dire qu'il y avait une morale publique commune,
32:22il y avait une morale privée commune.
32:24Et bien ces valeurs-là, ce sont les valeurs de la France,
32:26de toute la France, de Jaurès, de Barès,
32:27de la gauche, de la droite.
32:29Et elles sont au-dessus de nous, ces valeurs.
32:31Et c'est pourquoi la France est un acte d'amour
32:33et c'est pourquoi la France a été inventée par la charité.
32:3730 ans plus tard, vous dites quoi
32:39au Philippe de Villiers de 1992 ?
32:42Il est bon le petit.
32:46Mais vous savez qu'en fait,
32:48dans l'esprit public à l'époque,
32:51c'est Harlem Désir qui a gagné.
32:54Pourquoi ? Parce qu'à l'époque
32:55et encore récemment,
32:57Harlem Désir,
32:59c'est le saint laïc,
33:01SOS racisme,
33:03le vivre ensemble,
33:05faire venir les migrants,
33:07faire une nouvelle France,
33:09établir cette France sur la table rase
33:12et surtout, surtout,
33:15tourner le dos
33:18à cette idée que la France
33:20c'est comme une famille, un drame moral
33:22et qu'on ne choisit pas
33:24dans la longue histoire d'un pays,
33:27le patrimoine des souvenirs qu'on embrasse,
33:29comme on choisirait
33:32de trier la mojette
33:34dans les fermes jadis.
33:36On prend tout.
33:38Il y a un mot de Péguy,
33:40la République, notre royaume de France.
33:42Et ces gens-là,
33:44SOS racisme,
33:46la petite main jaune,
33:48ils avaient une idée en tête,
33:50c'est complexer,
33:51humilier
33:57et mettre hors de la société
34:00en les frappant de ce racisme
34:02des gens comme moi.
34:04Ils ont réussi.
34:06C'est-à-dire que la morale publique,
34:08c'était plus de frontières,
34:10la France doit s'ouvrir au monde
34:14pour qu'elle devienne
34:16un pays convivial
34:18et qu'on la refonde
34:19sur les valeurs de la République.
34:21Or, qu'est-ce qu'ils ont fait à ce moment-là,
34:23en 1992 ?
34:25Ce débat,
34:27on est en mars, c'est ça ?
34:29– Oui, exactement.
34:31– Et en septembre, il y a quoi ?
34:33– L'Astriche.
34:35– Le référendum sur l'Astriche.
34:37C'est-à-dire que Harlem Désir,
34:39pendant qu'il amuse la galerie
34:41avec Anne Sinclair,
34:43qui est de mèche avec lui,
34:45qui sont deux contre moi,
34:47et bien qu'est-ce qu'il fait ?
34:49– Le traité de Mastriche.
34:51– Et le traité de Mastriche, c'est quoi ?
34:53On liquide la République.
34:55En fait, la République,
34:57ils l'ont liquidée, ces gens-là.
34:59Donc il vient m'expliquer
35:01que moi je ne suis pas vraiment républicain
35:03parce que je fais partir la France
35:05du baptême de Clovis,
35:07donc ça ce n'est pas très républicain,
35:09c'est-à-dire qu'en fait,
35:11il y a mille ans avant,
35:13on n'a pas le droit d'en parler,
35:15toute demeure divisée contre elle-même,
35:17mais pendant ce temps-là,
35:19et là je fais du chèvènement en ce moment,
35:21parce qu'on était d'accord là-dessus,
35:23chèvènement, il dit, moi je ne veux pas
35:25qu'on liquide la République,
35:27je suis d'accord avec Villiers,
35:29les derniers républicains,
35:31ceux de la Respublica, c'est nous.
35:33– Et rapidement, 30 ans plus tard,
35:35est-ce qu'il faut un nouveau débat
35:37sur l'identité nationale, Philippe de Villiers ?
35:39– Alors ces caractéristiques,
35:41Nicolas Sarkozy avait lancé un débat
35:43sur l'identité nationale,
35:45à l'époque c'était courageux,
35:46la gauche n'a pas voulu apporter sa part,
35:49mais c'est symptomatique qu'aujourd'hui,
35:53on s'interroge sur ce qu'on est.
35:57Un débat sur l'identité nationale,
36:00ça veut dire, est-ce qu'on va faire un débat,
36:02pour savoir qui est Geoffroy Lejeune,
36:04un débat, qui suis-je, d'où je viens ?
36:07Quand on débat sur soi-même,
36:11sur sa propre identité,
36:13c'est qu'on ne sait plus d'où on vient,
36:14et en réalité, il y a deux manières
36:18de regarder la France.
36:20Le débat avec Harlem Désir est tout à fait symptomatique,
36:26soit on part de la table rase,
36:31et on fait une société d'individus,
36:35l'individu global, remplaçable, substituable,
36:39la société économétrique,
36:41c'est ce que fait Macron, la Macronie,
36:44soit on prend toute l'histoire de France,
36:48on prend toute la mémoire commune,
36:51on prend notre art de vivre,
36:53et là, on bute sur des difficultés, pourquoi ?
36:56Parce que la Mélenchonnie, la Macronie,
36:59ils ne veulent pas entendre parler de la France d'avant 89.
37:02Ensuite, l'art de vivre,
37:05ils ne veulent pas qu'on dise ce que je vais vous dire maintenant,
37:08c'est que la France, c'est un art de vivre,
37:11la matrice chrétienne,
37:14en France, on a des clochers, pas des minarets,
37:18en France, on ne pratique pas la charia,
37:20en France, on serre la main des femmes,
37:22on ne les frappe pas, on les emmène au café,
37:24on ne les voile pas,
37:26en France, on n'égorge pas les animaux sans les étourdir,
37:29en France, on ne mange pas halal,
37:33en France, on est en France,
37:35c'est ça l'art de vivre à la française,
37:37non à l'Islamistan, non au Wauquistan.
37:39Et enfin, la langue française,
37:42elle est massacrée tous les jours,
37:44pauvre académie française qui fait ce qu'elle peut
37:47pour garder la langue, conservatoire de la langue,
37:49mais la langue, on ne la parle plus
37:52telle qu'on la parlait il y a encore 20 ans,
37:55voilà, et c'est tout ça qu'il faut prendre en compte,
37:58et malheureusement, il n'y a plus en France aujourd'hui,
38:02dans la classe politique,
38:04sauf exception,
38:06sauf exception,
38:07des gens qui osent aller au-delà des mesures réglementaires
38:12à prendre pour sauver le pays.
38:14Non, il faut savoir
38:16si on peut retrouver en France aujourd'hui
38:20une âme commune.
38:22Philippe de Villiers, en 92,
38:24vous avez cité deux temps majeurs,
38:26mars 92, donc ce débat,
38:28septembre 1992, le traité de Maastricht,
38:31vous avez oublié un moment majeur,
38:33août 1992, vous vous souvenez ?
38:36C'était ma naissance.
38:40L'Europe de la Défense, Philippe de Villiers.
38:43Philippe de Villiers, parlons de l'Europe de la Défense,
38:45les dirigeants de l'Union Européenne
38:47se sont retrouvés à Bruxelles la semaine dernière
38:49afin d'élaborer une stratégie en matière de défense européenne
38:52et de son financement.
38:54Je propose aux téléspectateurs de lire
38:56cette tribune de Nicolas Baverez,
38:58le fantôme de la communauté européenne de la défense.
39:01Geoffroy Lejeune.
39:03C'est un projet qu'on connaît depuis longtemps,
39:05parce qu'il a été beaucoup agité.
39:07Comment vous analysez cette volonté
39:09de faire une communauté européenne de défense
39:11et est-ce que vous pensez qu'il faut faire une croix,
39:13après tout, sur notre indépendance nationale ?
39:15Alors justement,
39:17par rapport à ce que je dis sur l'Ukraine,
39:19vous allez faire le lien.
39:21De tous les pays européens,
39:23la France est le seul
39:25à disposer de trois atouts,
39:27l'arme nucléaire,
39:29un siège de membre permanent au Conseil de sécurité
39:32et une industrie de défense
39:35indépendante des Etats-Unis.
39:37Or, cette singularité,
39:39dont la France s'est dotée,
39:41est remise en cause.
39:43Elle lui permet
39:45l'autonomie stratégique.
39:47Or, cette autonomie stratégique
39:49est remise en cause par Berlin et par Bruxelles,
39:51qui veulent, en fait,
39:53ressusciter la CED,
39:56la Communauté européenne de défense,
39:58qui a été proposée
40:00et rejetée en 1954.
40:03De quoi s'agit-il ?
40:05La CED,
40:07c'était quoi ?
40:09C'était un projet d'armée européenne
40:11avec des institutions supranationales
40:13aux ordres d'un commandement intégré,
40:15lui-même aux ordres des Etats-Unis.
40:17C'est ce qui a fait que De Gaulle a dit non.
40:20Les armes de la France
40:22doivent être fabriquées en France,
40:24il dit.
40:26Et donc, il est sorti du commandement intégré.
40:28Là, c'est quoi,
40:30ce projet ?
40:32Il repose sur trois éléments.
40:33Un emprunt européen,
40:35le sceau hamiltonien, comme on dit aux Etats-Unis,
40:37c'est-à-dire, en fait,
40:39un emprunt hamiltonien
40:41pour faire une armée unique,
40:43une armée européenne unique.
40:45Je ne cite pas souvent mon frère,
40:47le chef d'état-major des armées,
40:49mais là, je vais le citer.
40:51Il dit, moi, je ne crois pas
40:53à une armée européenne unique
40:55parce que, pour un soldat,
40:57il faut envisager de mourir pour sa patrie
40:59et on ne meurt pas
41:01pour un peuple qui n'existe pas.
41:03C'est un emprunt européen.
41:05Ensuite,
41:07il y a surtout
41:09quelque chose qui est prévu dans les programmes,
41:11un grade d'oradium.
41:1335%
41:15des programmes
41:17peuvent être confiés
41:19à des technologies
41:21extra-européennes.
41:23C'est là qu'est tout le nœud du problème,
41:25ça veut dire aux Etats-Unis.
41:27Récemment,
41:29il y a un missile qui s'appelle le missile météore
41:31qui n'a pas pu être exporté.
41:33Il a été bloqué
41:35parce qu'il y avait 1%
41:37de technologies américaines.
41:39En d'autres termes,
41:41ce plan pour une soi-disant Europe
41:43de la défense autonome,
41:45c'est un plan qui permet
41:47à l'industrie
41:49américaine,
41:51à chaque fois qu'il y a 35%
41:53des équipements
41:55avec des technologies américaines,
41:57de tout bloquer,
41:59de tout tenir,
42:01c'est-à-dire la conception
42:03de l'agriculture française.
42:05Je vous l'ai dit ce soir.
42:07Avec la PAC,
42:09on devait soi-disant
42:11sauver l'agriculture française.
42:13Qu'est-ce qu'on a fait, en fait ?
42:15Qu'est-ce qu'a fait l'Europe ?
42:17Elle a livré
42:19notre agriculture au marché mondial.
42:21Et
42:23elle a
42:25été chercher son alimentation
42:27sur le marché mondial.
42:29Et l'agriculture française
42:31est en train de mourir.
42:33C'est la même chose pour l'automobile
42:35qui est en train de mourir,
42:37en tout cas qui se porte très mal.
42:39Et maintenant on va faire pareil avec la défense.
42:41Alors moi je dis de grâce,
42:43levez-vous,
42:45je dis ça à tous nos concitoyens,
42:47on a une industrie de défense
42:49qui est regardée
42:51avec jalousie par nos voisins
42:53et avec admiration par le monde entier,
42:55il ne nous reste plus grand-chose,
42:57il nous reste ça, c'est notre diamant.
42:59Philippe de Villiers,
43:01il nous reste exactement 9 minutes.
43:03Il y a un dilemme,
43:05Cornélien,
43:07soit nous gardons l'Apologue
43:09pour la semaine prochaine
43:11et nous poursuivons les thématiques
43:13qu'on devait traiter,
43:15soit nous partons tout de suite sur l'Apologue.
43:17Puisque cette émission était absolument passionnante,
43:19je vous laisse le choix.
43:21Allons-y.
43:23L'Apologue ou les autres questions ?
43:25On garde l'Apologue pour la semaine prochaine ?
43:27Non, c'est bon,
43:29qu'est-ce que vous voulez me poser comme question ?
43:31Si il me permet, je pense qu'on aura une émeute
43:33qui a toujours la tradition.
43:35Vous avez raison, Geoffroy Lejeune, finalement...
43:37Je n'ai pas envie de me faire engueuler toute la soirée, moi.
43:39C'est le chef qui décide.
43:41Pour votre Apologue, Philippe de Villiers,
43:43vous souhaitez nous plonger au début du XVIIIe siècle
43:45et nous parler d'un hiver historique
43:48où la France s'est mise à frissonner.
43:52Racontez-nous.
43:54Quand je suis arrivé tout à l'heure,
43:56je vous ai dit,
43:58vous étiez encapuchonnés, moi aussi,
44:00il fait froid.
44:01Il y a un moment de refroidissement climatique
44:04qui était imprévu.
44:08Alors, je vais vous raconter une histoire qui est incroyable.
44:12Voilà.
44:16La France va mal,
44:18il y a des malheurs qui s'abattent sur le royaume.
44:22Le roi vieillissant,
44:26c'est un vieillard,
44:29il a la goutte,
44:31les jambes roides
44:34et il porte le deuil
44:38d'un grand serviteur
44:40qui vient de disparaître.
44:44Il a perdu, comme il dit,
44:48un homme très affectionné à l'État et à sa personne.
44:53L'expression est de lui.
44:56Il s'agit du maréchal de Vauban,
44:58le commissaire général de fortification,
45:02qui laisse derrière lui la ceinture de fer du précaré.
45:07Mais il y a un autre malheur
45:09qui survient,
45:11inattendu, en février 1709,
45:14c'est pour ça que j'en parle aujourd'hui,
45:16on est raccord.
45:19Et ce malheur, c'est qu'il y a une coulée glaçante
45:23qui frappe toute l'Europe.
45:24Les glaciers alpins
45:26avancent inexorablement.
45:30On parle du petit âge glaciaire
45:33et dans la mémoire collective des Français,
45:36cet hiver-là
45:38a tellement frappé les imaginations
45:41qu'il restera comme le grand hiver.
45:47Le peuple français
45:50et sa famille
45:53est saisi par le froid
45:56et menacé par la famine.
46:00À Paris,
46:03la température
46:05voisine autour de
46:07moins 20, moins 30 degrés,
46:10au-dessous de zéro.
46:15À la cour,
46:17le froid glaciaire
46:19pénètre dans toutes les pièces.
46:23À seulement traverser
46:26une antichambre,
46:28le vin gèle
46:30sur le plateau.
46:32Les élixirs les plus forts
46:35et les liqueurs les plus spiritueuses
46:38font exploser les bouteilles
46:40qui les contiennent
46:42dans les armoires des chambres à feu.
46:45Dans les ports, la mer gèle.
46:49Et le long des côtes,
46:52j'ai vérifié au Sable d'Olonne,
46:55les eaux sont prises
46:58au point qu'elles portent des charrois
47:03qui y voiturent
47:07de très lourds fardeaux.
47:09Les fleuves et les rivières sont gelées.
47:13Sur la Seine, sur le Rhône,
47:16circulent des charrettes
47:19qui glissent comme des traîneaux sur la neige.
47:22Dans les campagnes,
47:25c'est la désolation et la disette.
47:28On mange du pain d'avoine.
47:33L'eau gèle dans les maisons,
47:37le vin gèle dans les barriques.
47:40On ne peut plus dire la messe,
47:42le vin gèle dans les calices.
47:45Et au bord des routes,
47:47les perderies sont gelées.
47:49En Anjou, tout près de chez moi,
47:50que se passe-t-il ?
47:53Le froid est si intense
47:56qu'on voit tomber la crête des volailles.
47:59Et dans le midi, nous rapporte-t-on,
48:03les oliviers se fendent
48:06et ne donneront plus jamais de fruits.
48:09Alors, le vieux monarque,
48:12cherchant à partager le malheur de son peuple,
48:15décide d'envoyer à la monnaie
48:18pour qu'il soit entièrement fondu
48:22son service d'or,
48:24les assiettes, les plats, les sablières.
48:26Et il invite
48:28tous les gens de la cour
48:30à faire de même avec leur vaisselle d'argent
48:32auprès de leur fève du roi.
48:35C'est symbolique.
48:38Cher Éliott, cher Geoffroy,
48:42vous me regardez
48:43avec une interrogation dans les yeux.
48:46Pourquoi il nous raconte tout ça ?
48:48Tout est dans la fin.
48:51Parce que derrière tout apologue,
48:54il y a une leçon.
48:56Vous le savez.
48:58Et quelle est donc la leçon de cet apologue ?
49:02Cette leçon, je l'ai trouvée dans un livre
49:05admirable,
49:07puissant,
49:09difficile à lire,
49:10d'un académicien qui s'appelle Emmanuel Leroy Ladurie,
49:14un grand historien.
49:16C'est l'histoire du climat
49:19en Europe depuis l'an 1000.
49:23Alors on voit
49:25les glaciers qui avancent,
49:27qui reculent.
49:29C'est compliqué.
49:31Ça va, ça vient.
49:33Et
49:35ce qui m'intéressait, c'est de savoir comment le peuple
49:38français,
49:40dans quelle psychologie il était,
49:43en 1709,
49:45au moment du grand hiver.
49:47Et on trouve la réponse chez Leroy Ladurie.
49:50En fait, les Français,
49:52les contemporains du grand siècle,
49:56pensaient
49:58que la nature
50:00obéissait à des cycles
50:02et que la main de l'homme
50:05était marginale.
50:07Moi-même,
50:09quand j'étais président du conseil général de la Vendée, j'ai étudié
50:12l'histoire du climat depuis le Moyen-Âge,
50:15dans mon département,
50:17et j'ai découvert qu'il y avait un port à Luçon,
50:20inimaginable,
50:22et que la mer venait jusqu'à Maizé,
50:25l'abbaye de Maizé.
50:27Donc c'est en fait un quart de la Vendée, sans parler de l'île de Bois.
50:31Donc, c'est un quart de la Vendée qui était sous l'eau,
50:34puis l'eau s'est retirée.
50:36Ainsi va la vie, ainsi va le climat, ainsi va l'histoire.
50:41Il est vrai que
50:43au grand siècle,
50:45les gens
50:47cherchaient plutôt
50:49à sauver leur âme
50:51qu'à sauver la planète.
50:54L'apologue
50:56de Philippe de Villiers, votre apologue.
50:58Merci beaucoup, Philippe de Villiers.
51:00J'ai quasiment envie de prendre une écharpe quand même,
51:01après ce grand hiver de 1709.
51:05Merci Geoffroy Lejeune.
51:07On se retrouve évidemment la semaine prochaine à la même heure,
51:09et dans un instant,
51:11c'est l'heure des pros.
51:13Ça va être chaud, l'heure des pros 2.
51:15A tout de suite.