Le déficit public 2024 a atteint 6,1% du PIB, alors que la loi de finances prévoyait un déficit de 4,4%. En 2023 déjà, l'écart était important. Face à ce constat, la commission des finances s'est dotée des pouvoirs d'une commission d'enquête, pour rechercher la cause de la variation et des écarts des prévisions fiscales et budgétaires pour les années 2023 et 2024. Ce 21 janvier, les députés auditionnent Pierre Moscovici, Premier président de la Cour des comptes et président du Haut Conseil des finances publiques.
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00:00:00Bonjour et bienvenue sur LCP. Nous sommes, comme toujours, au cœur du travail parlementaire.
00:00:13Ce 21 janvier, un homme important, Pierre Moscovici, est à l'Assemblée nationale.
00:00:18Premier Président de la Cour des comptes et par ailleurs Président du Haut Conseil des finances publiques.
00:00:24Une double casquette qui lui vaut d'être entendue par la commission d'enquête de la commission des finances
00:00:30qui essaye de comprendre les raisons du dérapage du déficit public en 2023 et 2024.
00:00:37Alors comment ? Qui ? Pourquoi en est-on arrivé là ? La représentation nationale veut des réponses.
00:00:44Les aura-t-elle ? Le sujet est explosif. La parole est à Pierre Moscovici.
00:00:50J'ai déjà dit devant vous à maintes reprises que notre mission d'assistance au Parlement était pour moi essentielle
00:00:55parce que nous sommes matière de confiance et une vigilance publique et il est de notre devoir de dire la vérité justement.
00:01:01Et lorsqu'il y a lieu d'alerter l'état de nos finances publiques et alerter, nous l'avons fait, je l'ai fait,
00:01:07de manière répétée tout au long des années 2023 et 2024 que vous examinez.
00:01:12Au cours de ces deux années, j'ai été auditionné par la commission des finances des deux assemblées,
00:01:16à commencer par la vôtre, à de nombreuses reprises, sur tous les avis rendus par le HCFP, d'une part,
00:01:22que ce soit sur les projets de loi de finances, sur le projet de loi de programmation de finances publiques,
00:01:26sur les projets de loi de règlement, sur la trajectoire du programme de stabilité,
00:01:29ainsi que sur le PSMT depuis la réforme des règles européennes, sur les rapports annuels remis par la Cour au Parlement,
00:01:36d'autre part notamment notre rapport annuel sur l'exécution du budget de l'État, le RBDE,
00:01:41ou notre rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques du mois de juin.
00:01:45Et chaque fois, l'enregistrement fait foi devant vous, j'ai exprimé ma préoccupation qui s'émue en franche inquiétude
00:01:53devant la dégradation de nos finances publiques sur ces deux années.
00:01:56En 2025, je suis toujours inquiet et préoccupé, mais je suis aussi et surtout profondément désolé
00:02:02de la situation navrante dans laquelle ces deux dernières années nous ont plongé.
00:02:07Elles ont fait de nous le seul grand pays de l'Union européenne, je dis bien le seul,
00:02:12avoir été incapable d'engager sérieusement la résorption de son déficit et la simple stabilisation de son traitement,
00:02:18alors que tous nos partenaires ont déjà fait une part du chemin.
00:02:22Votre commission a pour objet de rechercher, étudier, comprendre les causes de la dégradation de nos finances publiques
00:02:28par rapport aux prévisions pour les années 2023 et 2024, et donc je vais éclairer certains points par un propos luminaire.
00:02:34Je débuterai par les causes de la dégradation de nos finances publiques en 2023 et 2024
00:02:40et par la question des biais optimistes des prévisions macroéconomiques et de finances publiques du gouvernement.
00:02:47Le déficit prévu pour l'année 2023 était, je le rappelle, de 4,9 points de PIB.
00:02:53Il a finalement atteint 5,5 points de PIB, donc un dérapage de 0,6 points de PIB qui était déjà tout à fait considérable.
00:03:01L'écart est encore plus élevé pour l'année 2024.
00:03:05Le déficit annuel prévu était de 4,4 points de PIB et il devrait se situer à 6,1 points de PIB.
00:03:12Là, c'est un écart inédit. Comment en est-on arrivé à de tels écarts ? C'est l'objet de vos travaux.
00:03:18Certaines mauvaises surprises étaient difficiles à prévoir, incontestablement.
00:03:22D'autres doivent être impérativement explicitées et expliquées, mais il est impossible, je répète impossible,
00:03:29de prétendre en toute conscience que personne ne connaissait la fragilité répétée des prévisions pendant cette période.
00:03:36Le HCFP, en effet, a systématiquement appelé à la prudence, à partir de l'automne 2023, sur de nombreuses hypothèses relatives aux exercices 2023 et 2024.
00:03:47Je vais débuter par l'année 2023. Dans son avis sur le PLF 2023, donc c'est dès 2022, en fait, que nous avons alerté,
00:03:54le Haut conseil estimait que la prévision de croissance du gouvernement à 1 % était, je cite, « un peu élevée ».
00:04:00Dans son avis sur le programme de stabilité 2023-2027, le 25 avril 2023, nous avions estimé que les prévisions de croissance pour 2023-2024
00:04:09n'étaient pas hors d'atteinte, mais semblaient optimistes. Le HCFP a surtout alerté sur le scénario de finances publiques,
00:04:17c'est-à-dire sur le solde public pour l'année 2023. Nous avons été les premiers à dire publiquement et à alerter sur la mauvaise surprise
00:04:25en matière de recettes pour 2023. La première alarme du HCFP date de l'avis du 27 octobre 2023 sur le projet de loi de finances de fin de gestion.
00:04:35Le HCFP a considéré que les cotisations sociales et les prélèvements sociaux prévus apparaissaient un peu trop élevés en raison de la prévision élevée
00:04:44de masse salariale. L'écart entre les prévisions et la réalisation des cotisations sociales pour 2023 a finalement atteint près de 5 milliards d'euros.
00:04:53Une partie de l'écart entre la prévision de déficit pour 2023 et sa réalisation était difficile à prévoir. Je le reconnais.
00:04:59C'est le cas en particulier de l'écart de 4,5 milliards d'euros enregistrés sur l'impôt sur les sociétés – j'y reviendrai –,
00:05:06qui est dû aux derniers racontes versées par les grandes entreprises et de l'écart de 3,7 milliards d'euros sur la TVA.
00:05:13Mais ce n'est pas le cas de la totalité de l'écart qui a été, je le rappelle, massif. En 2023, il y a eu une différence,
00:05:21or effet de changement méthodologique, de 15 milliards de déficit. C'est ça, l'écart entre 4,9 points de PIB et 5,5.
00:05:30L'essentiel de cet écart est dû au prélément obligatoire. L'or moins valu par rapport à la prévision atteint 21 milliards d'euros.
00:05:38Elle excède même le montant de l'écart entre le déficit prévu et réalisé. Ce sont plutôt les dépenses qui se sont,
00:05:44cette année-là, situées un peu en dessous des prévisions. Je résume pour l'année 2023. Après des recettes qui ont été
00:05:51exceptionnellement dynamiques en 2022 et peut-être à ce moment-là dont on n'a pas vu qu'on allait revenir à une normale,
00:05:58la faiblesse des recettes par rapport à la prévision du gouvernement explique l'essentiel de la révision à la hausse du déficit 2023.
00:06:05Et c'est vrai que pendant la crise Covid, on a assisté à un comportement un peu extraordinaire en matière d'élasticité qui ne s'est pas reproduit
00:06:11par la suite, mais qui n'était qu'un retour à une normale. Mais arrêt l'effort d'économie structurelle aurait pu et dû contrebalancer
00:06:19ce manque à gagner. Force est de constater qu'il n'a pas été réalisé. Le gouvernement s'est contenté du repli mécanique des dépenses exceptionnelles
00:06:26sans même les résorber complètement. 2023 a donc été, je dirais, une année blanche sur le front des économies et une année sombre sur celui des recettes,
00:06:36donc des finances publiques. Mais le dérapage ne s'est malheureusement pas arrêté là. Il s'est accéléré. L'exercice 2024, en effet,
00:06:44était autrement plus problématique. Ce fut vraiment – je le redis devant vous – une année noire pour nos finances publiques.
00:06:51Nous avons alerté, dès la présentation du PLF en septembre 2023 – je l'ai fait ici même – sur le caractère optimiste de la quasi-totalité des postes
00:07:00de prévision du gouvernement pour l'année 2024. La prévision de croissance pour 2024 était indéputablement et très significativement trop optimiste,
00:07:09à 1,4 point de PIB, 1,4 %, soit 0,6 point supérieur à celle du consensus des économistes, qui était à l'époque de 0,8, 0,6 point.
00:07:18C'est assez considérable. Tous les organismes de prévision, toutes les organisations internationales avaient alors des prévisions de croissance
00:07:25largement inférieures à celles du gouvernement pour 2024. J'en profite d'ailleurs pour souligner une chose. Je dois le dire au passage.
00:07:33Contrairement à ce qui a été indiqué à plusieurs reprises devant la Commission, y compris par Bruno Le Maire, l'ancien ministre, lors de son audition,
00:07:39le HCFP n'a ni validé les prévisions de croissance du gouvernement pour 2024, ni a fortiori considéré qu'elles étaient plausibles, dans son avis,
00:07:47sur le PLF pour 2024. Je préfère nous citer, pour être précis. Le HCFP a même été plus loin dans son avis en soulignant l'optimisme du gouvernement
00:07:56sur la totalité des postes de demande, consommation, investissement, exportation. Or, la prévision de l'évolution de ces agrégats est cruciale pour prévoir
00:08:05les rentrées fiscales. Donc nous avions clairement alerté sur une prévision exagérément optimiste de croissance.
00:08:12Une prévision macroéconomique trop optimiste engendre mécaniquement des biais sur la prévision du déficit. Le HCFP avait donc alerté sur l'optimisme
00:08:22de la prévision de déficit public pour 2024 dès son avis de septembre 2023 sur le PLF. Vous vous en souvenez certainement, et si ce n'est pas le cas,
00:08:31je vous cite quelques termes de l'avis du 22 septembre 2023 qui étaient on ne peut plus clair sur la question. J'ouvre les guillemets.
00:08:38La prévision de déficit public pour 2024 de 4,4 points de PIB conjugue principalement des hypothèses favorables et paraît optimiste.
00:08:46La prévision de prélèvement obligatoire est tirée vers le haut par la prévision de croissance élevée de l'activité et au-delà par des hypothèses favorables
00:08:53sur le rendement de certains impôts. De plus, les dépenses risquent de s'avérer plus élevées que prévues, notamment s'agissant du coût des dispositifs énergétiques
00:09:01et des dépenses de santé ondables. Selon les dernières prévisions, le déficit de 2024 se trouverait une finée 1,7 points de PIB au-dessus de la prévision du PLF 2024,
00:09:12ce qui est un écart jamais vu dans ma mémoire hors temps de crise. Charles Courson a peut-être une mémoire encore plus longue.
00:09:20Les mauvais résultats de 2023, notamment la faiblesse des prélèvements obligatoires, ont certes projeté une onde défavorable sur l'année 2024.
00:09:28Cela explique une large partie de la dégradation, 0,7 points sur 1,7 pour être précis. Mais il ne faut pas s'y tromper.
00:09:35Le reste, la majeure partie de l'écart entre déficit prévu et réalisé en 2024, est imputable à l'année 2024 elle-même.
00:09:42Les recettes spontanées de prélèvements obligatoires ont été très décevantes, en particulier sur l'impôt sur les sociétés et la TVA.
00:09:49Cela explique la révision du déficit de 2024 pour 0,7 points de PIB. La révision à la baisse de la croissance par rapport à l'optimisme de prévision initiale
00:09:56y contribue pour deux 0,2 points supplémentaires. Et encore, ça a été compensé pour partie à hauteur de 0,2 points de PIB par des hausses d'impôts.
00:10:03Parallèlement, la dynamique des dépenses était très importante. Les dépenses des collectivités ont cru plus nettement que prévues.
00:10:10Elles ont contribué pour 0,3 points à l'écart de prévision, tandis que les dépenses de Sécurité sociale ont dérivé de 0,1 points par rapport à la prévision initiale.
00:10:18Ce dérapage a été un peu atténué par des mesures en gestion sur les dépenses de l'État, c'est-à-dire des annulations et des gels de crédit,
00:10:25mais aussi par un repli de l'inflation plus rapide que prévu. Parallèlement à l'explication de l'écart par rapport à la prévision initiale,
00:10:33c'est peut-être l'analyse de la dégradation de 0,6 points de PIB du déficit en 2024 par rapport à 2023 qui est la plus riche d'enseignements.
00:10:40Elle met en lumière le rôle prépondérant, pour le coup, de la dépense publique hors mesure exceptionnelle.
00:10:46Celle-ci a progressé nettement plus rapidement que la croissance. Elle a contribué à dégrader le solde public de 0,9 points de PIB par rapport à 2023,
00:10:53essentiellement à travers la forte dynamique des dépenses des collectivités, des dépenses de Sécurité sociale,
00:10:59notamment en raison de la revalorisation des retraites sur la base d'une inflation passée élevée.
00:11:04Ainsi, en 2024, bien plus encore qu'en 2023, la dépense publique est apparue hors de contrôle.
00:11:11Ce n'était pas totalement surprenant, comme la Cour et le HCFP l'avaient souligné.
00:11:17Les objectifs de maîtrise de la dépense n'étaient pas documentés – j'y insiste – et ne faisaient l'objet d'aucun mécanisme de régulation contraignant
00:11:25ces distances des collectivités locales. Et dans les auditions que nous avions eues au HCFP, nous l'avions souligné.
00:11:30Représentant le gouvernement, vous écrivez 0,5 points de PIB d'économie, mais il n'y a rien de contraignant, il n'y a pas de mécanisme de régulation.
00:11:37Nous ne croyions pas, en vérité, à ces chiffres dans ces conditions.
00:11:41Cette perte de contrôle de la dépense publique a été presque totalement masquée par le repli des dépenses de soutien énergétique,
00:11:47qui ont contribué à une amélioration du solde de 0,7 points de PIB.
00:11:50Mais il n'empêche qu'en dehors de ça, ce n'est pas bon.
00:11:54Mais nos alertes sur les prévisions élevées macroéconomiques, en dépenses, en recettes, n'ont pas été entendues.
00:12:03Et pourtant, les avis du HCFP sur les PLF n'ont pas été les seules sonnettes d'alarme actionnées.
00:12:09J'ai aussi présenté devant vous tous les travaux de la Cour des comptes sur les finances publiques ces deux dernières années.
00:12:14Tous, je dis bien tous, sans exception, depuis le printemps 2022, signalaient l'ampleur de la dégradation.
00:12:21Tous aussi appelaient une trajectoire de retour sur les 3%, plus réaliste et plus crédible que celle du gouvernement,
00:12:27qui était, selon nous, soutenue par un scénario macroéconomique trop optimiste et donc qui ne pouvait se réaliser.
00:12:36La Cour a aussi systématiquement chiffré des scénarios alternatifs aux scénarios plus réels du gouvernement.
00:12:42Dans les deux dernières éditions du rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, que je suis venu vous présenter ici aussi,
00:12:49nous avons modélisé les trajectoires avec une croissance plus faible que prévue, des dépenses calées sur le rythme tendanciel,
00:12:55un niveau de prélèvement obligatoire constant. Ces différents scénarios aboutissaient tous à la même conclusion.
00:13:02Il n'existait quasiment aucune marge de sécurité. Et le moindre écart aux hypothèses du gouvernement
00:13:08ferait dérailler substantiellement la trajectoire 2023-2027. En particulier, dans le dernier RSPFP, publié en juillet 2024,
00:13:15qui avait été donc préparé de longue date – je ne le cale pas par rapport à la dissolution –,
00:13:21nous examinions trois scénarios alternatifs à la trajectoire du problème de stabilité, qui prévoyaient un déficit de 4,1 points en 2025
00:13:29et un retour sous 3 % en 2027. Ces scénarios retenaient des hypothèses de croissance et de jugement de recettes à partir de 2025
00:13:35moins optimistes que le gouvernement. Et le cumul de ces trois scénarios, qui se contentaient de reproduire les tendances passées –
00:13:41ils n'étaient pas non plus pessimistes – conduisait à un déficit encore supérieur à 5 % en 2025. Il le sera, et s'approchant de 6 % en 2027.
00:13:50Et donc il ne nous paraissait pas réaliste, dans ces conditions, de passer sous 3 % en 2027. Et je l'avais laissé entendre devant vous déjà.
00:13:58Ça m'amène au second point de ma démonstration, qui est que malgré le biais optimiste de ces prévisions, malgré la dégradation du sol public en 2023
00:14:07et dès le début de l'année 2024, le gouvernement a maintenu une trajectoire pluriannuelle caduque, devenue en 2024 peu crédible,
00:14:14peu réaliste et peu cohérente. Pardon, je ne fais que citer des adjectifs du Haut Conseil et de la Cour des comptes.
00:14:20Déjà en avril 2023, dans son avis sur le PESTAB 2023-2027, le HCFP écrivait que la réduction prévue du déficit – j'ouvre encore le guillemet –
00:14:31ne laissait pas de marge suffisante pour maintenir le déficit public sous les trois points de PIB en cas de choc conjoncturel,
00:14:38même d'ampleur relativement modérée, de choc exogène de taux d'intérêt ou de croissance potentielle plus faible que prévu.
00:14:44L'avis soulignait que la réduction visée du ratio dette était, elle aussi, fragile, car elle supposait non seulement que la maîtrise de la dépense publique
00:14:51et l'absence de baisse nette de préalablement obligatoire entre 2024 et 2027 prévue soit mise en œuvre, mais aussi que le système de croissance optimiste
00:14:57retenu par le gouvernement se réalise. Ça faisait beaucoup. Nos prises de position ultérieures se suivent et se ressemblent.
00:15:04Dans le RSPFP, paru en juin 2023, la Cour des comptes souligne que la combinaison d'un scénario optimiste sur le plan économique
00:15:11et d'un objectif exigeant de maîtrise de la dépense rend très incertain le scénario du problème de stabilité d'une dette qui commencera à décroître en 2024,
00:15:22soit quelques mois seulement après la présentation du budget. Vous le savez, le gouvernement a modifié sa prévision de croissance pour 2024
00:15:29de 1,4 à 1 %, je crois, deux mois après que vous ayez voté le budget sur la base de 1,4, et annoncé plusieurs mesures d'économie,
00:15:37dont une analysation de crédit à hauteur de 10 milliards d'euros et une hausse de l'ATI-SFE. Mais ce coup de rabot, qui n'est d'ailleurs jamais une solution pérenne,
00:15:45j'y reviendrai, n'a pas suffi à adresser la trajectoire. En avril 2024, permettez-moi d'insister, pardon de faire un peu greffier de ce que nous avons dit,
00:15:52mais c'est pour étayer, je pense, le fait que des alertes nombreuses avaient été faites. Le PESTAB 2024-2027, présenté par le gouvernement,
00:16:02continuait de prévoir un retour du déficit public sous trois points de PIB en 2027. Là, le Conseil s'est un peu fâché. Et dans son avis paru en avril 2024,
00:16:14il a utilisé des termes très forts et même inédits pour lui, en soulignant que la nouvelle trajectoire du PESTAB manquait de crédibilité.
00:16:22Ça, il avait déjà dit. Mais de cohérence, il ne l'avait jamais dit. De crédibilité, car l'ajustement structurel présenté était considérable sur deux ans
00:16:30et sa documentation était lacunaire. Au Conseil, il pointait à nouveau l'absence de mécanismes contraignants sur la contribution des collectivités,
00:16:39qui dès lors ne nous paraissaient pas réalistes. De cohérence, et ça, c'est important, car la mise en œuvre de l'ajustement prévu aurait pesé au moins
00:16:47un court terme sur la croissance. Si vous faites un prélèvement très important sur la croissance, il est compliqué que celle-ci augmente.
00:16:52Donc les prévisions du gouvernement étaient inexactes, soit sur la croissance, soit sur la réalisation du déficit en 2027. Et ça, c'était – pardon –
00:17:03à peu près imparable. Et je voyais en face de moi des fonctionnaires gênés de nous présenter de telles prévisions dans lesquelles – pardon, je ne veux pas me faire leur porte-parole –
00:17:12ils ne pouvaient pas croire en réalité. Il n'est pas sérieux de transmettre à la Commission européenne des trajectoires pluriannuelles ou sous-jacentes macroéconomiques
00:17:21optimistes et déjà caduques avant même le début de leur mise en œuvre. Il n'est pas sérieux de prendre des engagements sur la maîtrise des dépenses
00:17:29sans se donner les moyens de les tenir. On peut ne pas prendre d'engagement. Mais si on les prend, il faut mettre en face les moyens d'y parvenir.
00:17:38La crédibilité de notre pays exige une approche plus vertueuse, c'est-à-dire plus proche de la vérité.
00:17:44Vous suivez l'audition de Pierre Moscovici sur LCP, le premier président de la Cour des comptes qui juge trop optimiste les prévisions macroéconomiques
00:17:52des gouvernements en place entre 2023 et 2024. Et pour éviter que l'histoire ne se répète, Pierre Moscovici souhaite que le Haut conseil des finances publiques
00:18:03qu'il préside puisse avoir un pouvoir contraignant en matière de prévision. Retour en séance.
00:18:09Il faut aussi impérativement revoir notre façon d'élaborer nos prévisions. Et à cet effet, je vous propose d'élargir le rôle et le mandat du HCFP.
00:18:18Les prévisions sont un exercice difficile. Personne ne le dit. Et il faudra prendre le temps d'interroger la performance de nos mécanismes de prévision de recettes.
00:18:27Là-dessus, je l'avoue, je n'ai pas de réponse convaincante, pas plus que quiconque aujourd'hui. C'est la boîte noire que nous devons ouvrir après deux années d'écart massif.
00:18:36Mais ça n'explique pas tout. L'indépendance des prévisions en France doit être mieux garantie. Il faut les libérer de tout volontarisme excessif du gouvernement,
00:18:47de tout gouvernement. Et j'espère que votre commission d'enquête aboutira aux mêmes conclusions. Il faut rendre à l'administration sa capacité à travailler de façon sereine et objective.
00:18:58Dans l'Union européenne, c'est le rôle des institutions budgétaires indépendantes, donc en France du HCFP, que de garantir la qualité des prévisions
00:19:05et les tenir éloignées de ce que j'appellerais l'hubris du politique. Mais contrairement à ses homologues européens, le HCFP n'a aujourd'hui, il faut le dire,
00:19:13ni tous les moyens, ni tous les outils, ni le mandat adéquat pour mener à bien cette mission. Et nous n'avons que deux solutions sur lesquelles vous m'avez interrogé
00:19:22de manière récurrente. Soit nous qualifions le budget d'insincère, ce qui reviendrait en quelque sorte à utiliser l'arme nucléaire, c'est-à-dire à provoquer
00:19:32de facto le hacotier du PLF. Ou bien nous recourons à une utilisation qualitative d'une sémantique délicate, que vous connaissez bien, sous la forme d'une gradation
00:19:42d'objectifs crédibles, réalistes, plausibles, atteignables, optimistes, élevés, jusqu'à irréalistes et pourquoi pas incohérents. Mais bon, nous le disons.
00:19:54Et ensuite, il ne peut pas se passer grand-chose. Entre le nucléaire et le sémantique, je crois qu'il faut trouver une troisième voie. Cette notion d'insincérité,
00:20:05elle est très difficile à manier. L'insincérité, ça suppose – c'est la définition du Conseil constitutionnel – une volonté de tromper.
00:20:11Et vous conviendrez qu'il est délicat pour le HCFP de juger des intentions du gouvernement dès lors qu'on se trouve dans des cas qui sont limites.
00:20:18C'est le cas de la prison de croissance pour 2024. Et pas flagrant. En revanche, ça montre bien qu'il faut inventer autre chose. Pour ça, je vois – et j'en finis par ça – deux scénarios possibles.
00:20:27Le premier scénario consisterait à confier au HCFP, Institution budgétaire indépendante française, la réalisation des prévisions macroéconomiques et de finances publiques
00:20:38utilisées pour le texte financier. Ce n'est pas absurde. C'est la solution qui est retenue par de nombreux pays. Le cas le plus connu, c'est celui du Royaume-Uni,
00:20:45avec l'Office for Budget Responsibility, l'OBR, qui réalise des prévisions macroéconomiques. Mais c'est aussi le cas en Autriche, en Belgique, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Slovanie, en Finlande.
00:20:57Donc nous serions loin d'être les seuls à le faire. Dans d'autres pays comme l'Italie ou l'Espagne, les homologues du HCFP réalisent leurs propres prévisions économiques
00:21:05en parallèle de celles du gouvernement. En France, je vous le dis avec une certaine solennité, tant que la prévision sera le seul fait de l'administration,
00:21:15elle sera forcément soumise aux arbitrages gouvernementaux. Elle sera donc soumise à une incitation forte à anticiper ces arbitrages du fait de délais très contraints.
00:21:24Il y a donc fort à parier, malheureusement, que si on ne change rien, le risque de recourir à des hypothèses optimistes existera encore à l'avenir.
00:21:32Ce premier scénario de réforme n'est pas, j'en suis conscient, conforme à notre tradition politique et administrative.
00:21:37Il consisterait à soustraire l'exercice de prévision à l'exécutif en le confiant à une institution indépendante, voire même chose pour les prévisions de finances publiques.
00:21:47Un deuxième scénario de réforme, qui est plus compatible avec ce que nous faisons d'habitude, consisterait à renforcer le rôle du HCFP pour le rendre contraignant.
00:21:57Il faudrait à minima élargir et renforcer le mandat du HCFP et son accès à l'information avec un rôle de validation des prévisions macroéconomiques et de finances publiques du gouvernement.
00:22:07Comment est-ce que ça pourrait marcher ? Dans certains pays comme le Portugal, l'institution budgétaire indépendante valide par un avis contraignant les prévisions avant leur transmission au Parlement.
00:22:16Il faudrait selon moi dupliquer ce mécanisme en France. Le HCFP aurait un rôle de validation des prévisions, pas d'exécution de la prévision.
00:22:25En cas d'optimisme important sur le scénario macroéconomique ou le scénario de finances publiques, le gouvernement serait ainsi forcé de revoir sa copie à la baisse.
00:22:33Une version dégradée de cette réforme, le minimum du minimum à mettre en œuvre selon moi, c'est un mécanisme qu'on appelle en anglais le « comply or explain ».
00:22:42On l'applique ou on explique. Le gouvernement serait alors tenu de rectifier sa prévision suite à l'avis du HCFP lorsque ce dernier la jugerait optimiste,
00:22:52ou à défaut d'expliquer pourquoi il ne modifie pas son scénario. Ce qui est compliqué quand le scénario est fantaisiste tout de même.
00:22:58Cette exigence est le minimum acceptable, d'autant plus qu'il s'agirait seulement de se conformer aux droits européens en vigueur.
00:23:04Tant qu'aucun mécanisme de validation ou même de « comply or explain » n'a été mis en place, le Haut Conseil n'aura le choix qu'entre deux choix insatisfaisants.
00:23:14Soit accepter avec des corrections ou des réserves, mais sans effet réel contraignant, les prévisions émises par le gouvernement au risque qu'elles soient très irréalistes.
00:23:24Soit déclarer le projet de budget insincère et risquer la censure du Conseil constitutionnel, qui n'est pas quand même la meilleure voie.
00:23:32En tout état de cause, et quel que soit le scénario retenu, améliorer l'exercice de prévision nécessite de renforcer le mandat du HCFP.
00:23:40Je rappelle qu'il fait partie en Europe des institutions budgétaires indépendantes dotées du mandat le moins étendu,
00:23:46qu'il doit avoir sa saisine élargie à l'analyse sur la soutenabilité de la dette, mais aussi au PSMT, au rapport d'étape annuelle du PSMT, l'actualisation des prévisions du PLF au printemps.
00:23:56La saisine du HCFP doit également être prévue à mon sens systématiquement au moment du recalibrage du PLF en cas de mesure et en effet significatif sur le solde.
00:24:06C'est le cas maintenant. Nous allons être saisis demain de la nouvelle mouture du PLF 2025 et lors de la mise à jour des hypothèses macroéconomiques et de déficit public pour l'année en cours.
00:24:16Par ailleurs, et c'est là un enjeu crucial pour la qualité de nos avis et donc la transparence du débat démocratique et donc votre information, l'accès du HCFP à l'information doit être considérablement amélioré.
00:24:29D'une part, il est nécessaire de lui transmettre toutes les informations qu'il sollicite, ce qui n'est pas le cas, et que le gouvernement réponde à ses demandes d'informations en dehors des saisines, ce qui n'est pas le cas.
00:24:39Il faudrait donc supprimer l'interdiction d'autosaisine du HCFP. D'autre part, le HCFP doit avoir à sa disposition toute l'information nécessaire lors des saisines,
00:24:48comme il l'a demandé à la première ministre à l'époque, au ministre de l'Économie successif, avec une liste précise des éléments dont il a besoin.
00:24:55Jean-Luc Tavernier, et j'en conclue devant vous, disait, je crois, devant cette commission d'enquête la semaine dernière, qu'il ne fallait pas laisser Bercy trop seul dans l'exercice de prévision
00:25:08et qu'il ne fallait pas lui laisser seul la responsabilité quand on se trompe. Je suis d'accord avec lui. Ce que je vous propose aujourd'hui, c'est une réponse concrète pour y remédier.
00:25:20Le HCFP, institution indépendante, qui n'est pas composée que de magistrats de la Cour des comptes. Ce n'est pas du tout la Cour des comptes. Je la préside.
00:25:28Il y a des magistrats, mais il y a aussi bien d'autres économistes pluralistes. Le HCFP qui vous présente ses avis, qui les adresse à la Commission européenne,
00:25:36qui les communique aux citoyens, peut être et, selon moi, doit être le tiers de confiance qui rendra plus crédible et plus serein l'exercice de prévision.
00:25:45Pierre Moscovici, qui n'a pas de mots très tendres à l'égard du précédent gouvernement, accusé d'avoir laissé filer le déficit en 2023 et 2024.
00:25:55C'est bien normal. Après tout, c'est le rôle de la Cour des comptes de dire la vérité en toute impartialité.
00:26:01Alors, Bruno Le Maire a-t-il ou non menti sur la situation de la France ? La représentation nationale s'interroge.
00:26:09À commencer par le président de la Commission des finances, Éric Coquerel, et les rapporteurs de cette commission d'enquête, Éric Ciotti et Mathieu Lefèvre.
00:26:19Vous avez rappelé des faits. Et je trouve ça positif. Pourquoi ? Parce qu'on a eu pas mal d'auditions précédemment de membres du gouvernement
00:26:29ou de fonctionnaires où l'idée un peu dominante, c'était... Certes, on n'a pas prévu, mais personne n'a fait mieux. Je schématise, mais c'est quand même
00:26:43un petit peu ce qui dominait. Bien. Donc par exemple, on se rappelle dans vos avis que... Là, je parle des membres du gouvernement.
00:26:52Que dans vos scénarios macroéconomiques pour 2023-2024, vous aviez utilisé le mot « plausible », mais on oublie que vous aviez utilisé le mot
00:27:00« néanmoins optimiste ». Donc c'est bien de le rappeler. Et de la même manière, c'est bien de rappeler votre avis sur le PLF 2023.
00:27:06Vous parliez vis-à-vis de la croissance d'hypothèses fragiles un peu élevées. PLF 2024 de même au niveau de la croissance.
00:27:15Et enfin, l'avis sur le PSTAP 2024, où là, vous avez carrément parlé de manque de crédibilité. Donc je trouve effectivement bien de rappeler ces faits.
00:27:23Nous avons été plusieurs aussi à révoquer parce qu'on s'en souvenait et que ça nous avait notamment... C'était ce qui nous avait amené, pour certains ici présents,
00:27:32à interroger les budgets tels que nous étaient présentés fin 2023 sur leur crédibilité. Je voudrais donc savoir en premier lieu si, en tant que compte de votre avis
00:27:44sur le PLF 2023 et 2024, le gouvernement aurait pu réduire l'écart qui nous occupe cet après-midi, quitte même à modifier en cours ses estimations budgétaires
00:27:55pour le débat budgétaire. La croissance en 2023 était très proche de la prévision initiale que vous jugez optimiste. Mais sa composition, vous l'avez dit,
00:28:03bien différente. Et le rendement des recettes, lui, a été bien exagéré. Donc je voudrais savoir si, à votre avis, c'est quelque chose où on aurait pu agir plus rapidement
00:28:12en fonction de ce que vous avez émis ? C'est une première question.
00:28:20Monsieur le Président, d'abord, je voudrais rappeler une chose sous le contrôle de ceux qui sont derrière moi. Le Conseil n'a jamais dit – c'est pour ça que je l'ai précisé en mon intervention –
00:28:29que la prévision de croissance pour 2024 était plausible. Nous ne l'avons pas dit, nous ne l'avons pas pensé.
00:28:35J'ai parlé des scénarios macroéconomiques.
00:28:37Nous nous sommes posés beaucoup de questions, pour dire le vrai. Je ne suis pas là pour trahir les délibérations du HCFP. Il n'y a jamais eu une fuite sur ce qui se passait.
00:28:44Et le secret de ces libérations, le pluralisme, est fondamental. Mais honnêtement, ça nous a posé énormément de questions. Nous sommes vraiment interrogés sur ce que nous devions faire
00:28:51à ce moment-là. Et au cours des presque 5 années où j'ai présidé le HCFP, ça a été sans doute un des moments les plus délicats, avec le PESTAB du printemps dernier.
00:29:00Mais je reviens à votre question. La réponse est oui. Dans son avis sur le PLF 2023, le Conseil estimait que la prévision de croissance au gouvernement était un peu élevée.
00:29:12S'agissant des finances publiques, il estimait que le sol public pour 2023 pouvait être plus dégradé que prévu par le gouvernement.
00:29:18S'agissant du PLF 2024, le Conseil a souligné dans son avis le caractère optimiste des prévisions. Il a souligné le caractère élevé de la prévision de croissance pour 2024,
00:29:27de la totalité des postes de demande, très important pour l'étreinte fiscale. Il a également considéré que la prévision de déficit pour 2024 était optimiste.
00:29:36Donc, pour répondre à votre question, indubitablement, le Conseil a un maintre prise alerté sur le caractère optimiste des prévisions du gouvernement en 2023-2024.
00:29:45Le gouvernement, de facto, n'en a pas tenu compte lors d'examens du PLF 2024. Il a ensuite réagi trop tardivement, à mon sens, en 2024.
00:29:54Et donc, je crois en effet que les choses étaient largement améliorables. Alors, sous quelle forme ? Ce n'est pas à moi de le dire.
00:30:00Mais il est quand même curieux, mesdames et messieurs les députés, que vous ayez voté en décembre de l'année précédente, en 2023, un PLF à 4,4,
00:30:10avec une croissance prévue à 1,4, pour constater deux mois après que le déficit prévu était probablement à 5,1 et que la croissance était réduite à 1 %.
00:30:21Bon, il y avait des choses à faire. Certaines ont été faites. Je parlais d'annulation. Sans doute, si on voulait éviter de se retrouver à 6,1 % à la fin de l'année 2024,
00:30:32fallait-il agir à un autre moment et de façon plus vigoureuse, peut-être à travers des véhicules plus solennels.
00:30:38Je ne suis pas totalement inconscient de la difficulté de la situation politique. Et du fait qu'un PLFR n'était pas forcément aisé à voter,
00:30:47aurait-il dû être présenté ? Ok. Posez la question. On sait y répondre.
00:30:53Merci. Je crois qu'une des hypothèses les plus fragiles, pour reprendre votre terminologie, a été celle sur les collectivités locales dans la loi de programmation des finances publiques.
00:31:01L'été dernier, les ministres de Versy sont effectivement venus nous expliquer que le déficit s'aggravait parce que les collectivités dépensaient trop.
00:31:07Mais la réalité était autre. Pour présenter un objectif de déficit convenable, ils avaient redressé la trajectoire par une baisse irréaliste des dépenses locales,
00:31:15qui n'aurait d'ailleurs pas permis de se rapprocher des objectifs de croissance en 2023 et 2024. Lorsque vous avez dû vous prononcer,
00:31:21avant l'examen de cette loi de programmation, quelle a été votre apprêtation sur cette hypothèse ? C'était les – 0,5, vous, s'il vous plaît.
00:31:30Oui. Alors je disais dans mon propos introductif que la dégradation des déficits publics était en grande partie liée à une perte de contrôle de la dépense publique.
00:31:41Et le PLF pour 2024, reprenant la LPFP adoptée en décembre 2023, retenait pourtant un objectif ambitieux de maîtrise des dépenses de fonctionnement des collectivités locales,
00:31:49entablant sur une diminution de 0,5 point en volume, ce qui impliquait alors une hausse de 2 % en valeur. Les dépenses de fonctionnement des collectivités locales
00:31:57augmenteraient en réalité de 5 % en valeur en 2024, selon les dernières informations comptables, couplées à la dynamique des dépenses d'investissement.
00:32:05Ça conduit à creuser le déficit public – je l'ai dit – de 0,4 point de PIB en 2024, toute chose égale par ailleurs. Le gouvernement avait deux options
00:32:14pour tenir sa cible initiale de déficit. Soit – c'est ce que nous suggérions – retenir un objectif moins ambitieux pour les collectivités et dégager des économies par ailleurs,
00:32:23soit maintenir son objectif et s'assurer de son respect via par exemple un mécanisme contraignant ou une diminution des transferts ou un mécanisme de régulation au type contrat de CAOR.
00:32:33Il était difficile de ne faire ni l'un ni l'autre, en vérité. C'est-à-dire que si vous aviez un objectif très ambitieux, il fallait avoir en face un dispositif contraignant.
00:32:40Je dirais que d'un certain point de vue, oui, économiquement, comptablement, financièrement, on voit une responsabilité des collectivités locales. Mais en réalité,
00:32:48ce n'est pas le cas politiquement, dans la mesure où on leur a demandé de faire un effort un peu comme ça, en quelque sorte. Le dérapage des dépenses des collectivités
00:32:57n'est alors pas totalement étonnant. Et le RSPFP 2024 alertait déjà sur ce point. S'agissant de la suite de trajectoire, aucun champ de l'action publique
00:33:06ne pourra s'exonérer des efforts collectifs. Et quand je parle d'eurovides dépenses, elles doivent concerner les trois types de collectivités.
00:33:13Je pourrais aller plus loin, si vous le souhaitez, sur la question un peu ultérieurement.
00:33:19Je voudrais ensuite vous interroger sur les éléments que le gouvernement vous transmet. L'absence de précision sur des mesures a souvent été mentionnée.
00:33:25Vous avez effectivement évoqué des mesures non documentées, je cite, qui ne permettaient pas de vous prononcer sur le réalisme des trajectoires de dépenses.
00:33:32En d'autres termes, il vous était impossible d'effectuer la mission que la LOLV vous a confiée ou alors de manière le plus parfaite possible.
00:33:41Concrètement, cela signifie-t-il que le gouvernement n'était pas en mesure de vous présenter les économies envisagées ?
00:33:46Au cours de vos travaux précédents, avez-vous déjà vu refuser vos demandes d'éléments qui vous auraient permis d'apprécier le réalisme des trajectoires ?
00:33:54Monsieur le Président, le HCFP ne dispose pas de toutes les informations nécessaires pour contre-expertiser et formuler des avis pleinement éclairés sur les prévisions du gouvernement.
00:34:07La loi organique prévoit que le gouvernement répond aux demandes d'informations que lui adresse le Conseil dans le cadre de la préparation de ses avis.
00:34:12Les directives européennes mentionnent également un accès adéquat et en temps utile à l'information nécessaire au HCFP, aux institutions budgétaires indépendantes en général pour accomplir ses missions.
00:34:22Mais je dois, devant vous, regretter que ce ne soit pas toujours le cas. Lors de la préparation de l'avis relatif au PLF pour 2025, par exemple, le dernier,
00:34:30le gouvernement de l'époque a répondu à une demande d'informations très tardivement. Il est vrai, circonstance attéduante, que sa formation elle-même avait été tardive
00:34:38et que les conditions d'exercice de son office n'étaient pas simples. Mais il nous indiquait que les informations demandées ne permettraient pas au HCFP de rendre un avis éclairé
00:34:49sur la cohérence de l'article liminaire et le réalisme des prévisions de recettes des penses. Autrement dit, je vous avais dit « circulez, il n'y a rien à voir »,
00:34:55ce que je n'avais pas apprécié beaucoup. J'avais répondu à nouveau au ministres Antoine Armand et Laurent Saint-Martin. Le ministre d'alors avait donc apprécié,
00:35:04à la place du Conseil, la pertinence des informations qu'il est susceptible d'utiliser pour ses avis. À mes yeux, ce n'est pas acceptable.
00:35:12Et nous l'avons mentionné d'ailleurs dans notre avis, nous n'avons pas eu les informations nécessaires pour apprécier une grande partie des prévisions du PSMT.
00:35:20Plus généralement, le Conseil a regretté à plusieurs reprises un manque d'informations, des informations incomplètes de la part du gouvernement dans ses avis.
00:35:30Je citerai le PLFRSS du janvier 2023 ou le PSMT en octobre 2024. Je suis bien entendu favorable à la transmission au HCFP des notes de prévision des services ministériels,
00:35:41mais pas seulement. J'ai écrit à plusieurs reprises à la première ministre, à l'époque Elisabeth Borne, à Bruno Le Maire, à Antoine Armand, lorsqu'ils étaient ministres de l'économie,
00:35:50afin de leur demander la transmission des documents supplémentaires dont le HCFP a besoin pour mener ses analyses. Et je veux dire devant vous qu'il est impératif, à mes yeux,
00:35:58que nous ayons accès, par exemple, à certaines notes d'alerte à l'exercice de prévision en cours d'année, ainsi qu'à la décomposition des agrégats de finances publiques
00:36:05dont nous devons apprécier le réalisme. Il y a une assez longue liste. Je vous fais peut-être l'économie. Maintenant, plus largement, il est indispensable de transmettre au HCFP
00:36:13toutes les informations qu'il sollicite et que le gouvernement réponde à ses demandes d'informations, en dehors même des saisines. Il faut donc supprimer, je le redis,
00:36:21l'interdiction d'autosaisine du HCFP. Tout ce que je vous dis là, et pardon, y compris ce que j'ai dit dans ma démonstration de lumière, ce n'est pas un plaidoyer pro-domo.
00:36:30Le HCFP pourrait être situé ailleurs. Je parle d'une institution budgétaire indépendante. Je pense que, telle qu'il est, il est assez bien positionné, mais ce n'est pas le sujet.
00:36:40Ce que j'essaie de dire, c'est que l'institution budgétaire indépendante française, dont le rôle pourrait être extrêmement positif pour permettre d'améliorer les prévisions,
00:36:50ne travaille pas avec le mandat, les moyens et les informations qui sont nécessaires pour pouvoir exercer sereinement et à votre profit son office.
00:37:00— D'accord. Est-ce que... Juste une question. Ce que vous décrivez là, est-ce que c'est quelque chose qui s'est... Vous avez des points de comparaison vous-même importants,
00:37:08puisque ça fait quand même pas mal d'années que vous êtes là. Est-ce que c'est quelque chose qui se dégrade ou, en réalité, c'est comme ça chaque année pour vous, qui s'est dégradé plutôt ?
00:37:18— Ça s'est dégradé depuis les années 2023-2024, incontestablement. — D'accord.
00:37:23— Tout s'est dégradé à partir de ce moment-là. Les finances publiques, les prévisions de finances publiques et les qualités des informations que nous échangeons,
00:37:29oui, tout s'est dégradé, incontestablement. Il y a cette perte de contrôle que j'évoque. Elle se fait à tous les niveaux, y compris dans l'information qu'on nous donne.
00:37:37Il n'y a pas de problème de mauvaise foi. Il y a une très grande presse de l'administration. Et je pense que cette mise sous pression ou sous tension de l'administration
00:37:45que j'évoquais participe aussi de ça. Je crois franchement – aujourd'hui, je ne veux pas parler à leur place – que les services de Bercy ne travaillent pas dans les meilleures conditions sur ces sujets-là.
00:37:54Ils sont soumis à une pression forte, à un volontarisme excessif. Eux-mêmes l'anticipent ou le dupliquent. Et donc, voilà, c'est toute la chaîne qui ne fonctionne pas comme elle devrait.
00:38:04C'est le sentiment que j'ai pour ma part.
00:38:06– Une quatrième question porte sur les prévisions d'IS d'impôt sur les sociétés. On le sait, la surestimation des recettes de cet impôt explique en partie l'écart.
00:38:13Observé en 2023, la prévision était effectivement très optimiste, notamment à partir du PESTA pour 2023, lorsque le gouvernement a relevé sa prévision de recettes d'impôt sur les sociétés de 12 milliards.
00:38:22Pourtant, dans votre avis, sur ce même PESTA, vous indiquiez que le gouvernement justifie la forte diminution du taux de prélèvement obligatoire à partir de 2023
00:38:30par un net ralentissement de l'impôt sur les sociétés. Je voudrais donc savoir si le gouvernement vous avait communiqué à ce moment
00:38:36la révision à la hausse de prévision d'IS intégrée dans le PESTA. Si oui, une hausse du rendement de l'IS vous paraissait-elle plausible en 2023 ?
00:38:46S'agissant de l'IS, ce qui est incontestable, c'est que certains impôts qui ont une responsabilité importante de ce garde-prévision sont difficiles à prévoir.
00:39:03C'est le cas de l'IS. Nous nous proposons de conduire une étude rétrospective pour mieux comprendre le comportement des entreprises en matière d'ajustement à compte d'impôt sur les sociétés.
00:39:14L'IS est le plus volatile des grands impôts. De ce fait, il est celui qui accuse les plus grands écarts entre prévision et exécution, y compris au stade de la loi de fin de gestion.
00:39:24Sur la période 2014-2023, cet écart était en moyenne de 6,8 milliards et 18,6 % de la prévision d'IS en LFI.
00:39:35Le système de liquidation et de recouvrement de l'IS laisse une assez large part aux entreprises. Il y a quatre comptes obligatoires, mars, juin, septembre et décembre,
00:39:43qui sont établis en fonction de l'impôt dû au titre de l'année précédente. Mais une entreprise a la faculté de réduire le montant de ses accomptes
00:39:50si elle estime qu'il dépasse le montant de son impôt pour l'année en cours. On parle là d'autolimitation.
00:39:55Ce sont des pratiques qui sont assez mal connues, qui sont mal anticipées par l'administration fiscale.
00:40:02Il nous semble possible, à peu de frais, d'engager une étude rétrospective sur les comportements d'accompte des plus grandes entreprises,
00:40:09celle du CAC 40 par exemple, et d'envisager, en cours d'exercice, des contacts informels avec les grandes entreprises pour mieux anticiper
00:40:16leurs prévisions et leurs intentions en la matière. Je disais que, s'agissant de la partie recette, on était incontestablement devant une boîte noire.
00:40:25Il faut améliorer nos capteurs. Quand je parle de nos capteurs, je ne parle pas, pour le coup, du HCFP.
00:40:30Je parle de l'administration fiscale, puisque c'est elle-même qui est le mieux en mesure de mener cette étude.
00:40:35Elle dispose de toutes ces données pour ce faire et de tous les contacts à cet effet.
00:40:39Comme l'a montré le rapport de l'Inspection générale des finances, une partie de l'écart à la prévision aurait pu être évitée par un suivi plus rapproché de la masse salariale.
00:40:46Vous notiez, effectivement, de votre avis sur le PLFG pour 2023 que, je vous cite, la croissance prévue de la masse salariale marchande non agricole plus 6,5 %
00:40:55apparaissait un peu élevée compte tenu du ralentissement au cours de l'été. Considérez-vous que cette alerte était suffisante pour amener le gouvernement
00:41:03à amender sa trajectoire dès l'automne 2023 ?
00:41:07En effet, comme vous le rappelez, M. le Président, à l'occasion du PLFG en octobre 2023, le gouvernement ne révise pas à la baisse sa prévision de masse salariale,
00:41:15malgré les dernières données conjoncturelles, notamment en provenance de l'URSSAF, ce que relève, comme vous le soulignez, le Haut conseil, dans son avis,
00:41:23où la prévision est jugée un peu élevée. Les risques pour les recettes fiscales liées à la masse salariale sont d'ailleurs mentionnés dans cet avis.
00:41:30In fine, la masse salariale ralentit fortement en fin d'année, ne progresse que de 5,3 % en 2023, contre une prévision de 6,5 %,
00:41:38et l'écart de recettes entre prévision pour 2023 dans le PLFG 2024 et réalisation a finalement tout de même atteint près de 5 milliards sur les cotisations sociales.
00:41:47Si le PLFG 2023 ne traite pas par nature des prévisions pour 2024, l'alerte du HCFP sur le ralentissement de la masse salariale en fin d'année 2023
00:41:55vaut également par une sorte d'effet d'acquis pour 2024. La prévision de masse salariale pour 2024 est d'ailleurs révisée par le gouvernement à la baisse,
00:42:03à 2,9 % contre 3,6 % dans le PLF à l'occasion du PESTAB d'avril 2024. L'évaluation de la croissance de masse salariale par le HCFP,
00:42:11lors de son avis relatif au PLFG 2023, aura donc dû conduire, selon moi, le gouvernement à réviser plus rapidement sa prévision de masse salariale
00:42:20pour 2023 et 2024, et donc ses prévisions pour certains prélèvements obligatoires, dont l'assiette est basée au moins en partie sur les revenus salariés,
00:42:28je pense à l'impôt sur le revenu, aux cotisations sociales, aux prélèvements sociaux.
00:42:34Bien. Et là, j'ai une petite question courte supplémentaire liée à votre intervention. Vous avez dit – je vous reprends les termes –
00:42:41que vous avez parlé de la nécessité d'avoir une administration devenant plus sereine, indépendante, éloignée – je cite – de l'hubris politique.
00:42:51Je suppose donc que vous interrogez là la question de la proximité peut-être trop forte entre, à un moment donné, les administrations et le pouvoir politique,
00:43:03peut-être même des allers-retours entre celles-ci. On a eu notamment l'exemple, il y a quelques jours, en auditionnant l'IGF,
00:43:10entre un administrateur intégrant quelque temps après la cabinet d'un ministre. Et donc vous dites du coup « Donnez plus de pouvoir au HCFP ».
00:43:23Alors je vais vous poser un peu une question iconoclaste. Mais si on donne plus de pouvoir à une instance comme le HCFP par rapport à ça,
00:43:31nous prémunis dans le HCFP de son indépendance et son éloignement de l'hubris politique ?
00:43:39Là, on va être ennuyés, c'est-à-dire si tout le monde est suspect. Mais vous avez raison par principe. Je ne visais aucune situation particulière,
00:43:50aucune forme de porosité entre le cabinet et l'administration, aucun cas personnel. C'est pas de ça dont il s'agit.
00:43:56Ce que j'ai essayé de décrire, c'est autre chose que j'ai vécue moi-même. Je trouve que j'ai été haut fonctionnaire, que j'ai été également ministre des Finances.
00:44:02Et quand je parle de l'hubris du politique et de la pression sur l'administration, je sais de quoi je parle. C'est-à-dire qu'in fine, la prévision de croissance
00:44:09est arrêtée par le ministre. Bon. Et oui, elle est préparée par l'administration. Si l'administration se sent sous la pression d'un ministre optimiste
00:44:20ou exagérément volontariste, elle va elle-même anticiper. Il peut arriver que le ministre lui-même en ajoute par rapport à son administration
00:44:29pour valider son volontarisme. Que fait l'administration française ? Elle est extrêmement loyale. Ce n'est pas une question de proximité politique ou autre.
00:44:36Elle applique la décision du politique. Et je pense que c'est ce mécanisme-là qu'on peut retrouver, notamment pour la prévision 2024.
00:44:44Mais je vous rassure, c'est déjà arrivé avant et à d'autres gouvernements. Et c'est une tentation qui peut saisir tout politique.
00:44:52Alors elle peut être plus ou moins grande. Il faut la maîtriser. Mais on ne peut pas, je pense, compter sur une autolimitation de l'hubris.
00:44:59Ça, ce serait quand même un peu optimiste, je dirais. Alors quand je reviens au HCFP, le HCFP, qu'est-ce que c'est ?
00:45:07Et je veux me détacher de la situation présente. Le HCFP, c'est une institution budgétaire indépendante au sens des traités européens,
00:45:16qui a été créée par la loi organique, par vous, les parlementaires, alors que j'étais ministre des Finances d'ailleurs, en décembre 2012.
00:45:24Nous avons maintenant une expérience de ce que ça fait depuis une douzaine d'années. Je pense que ça a joué un rôle assez positif,
00:45:30notamment pour limiter, à part dans la période récente, les écarts de prévision excessifs. Et il est bon que l'administration ait un interlocuteur.
00:45:38Mais cet interlocuteur, il est assez platonique. C'est-à-dire qu'il peut donner des avis, mais personne n'est tenu de les suivre.
00:45:43Ou bien il peut évoquer l'insincérité. Mais à ce moment-là, il fout tout en l'air, ce qui n'est pas non plus bon.
00:45:48C'est pour ça que je propose d'inventer cette troisième voie. Qu'est-ce qui fait qu'il va se prémunir de l'hubris du politique ?
00:45:53C'est sa composition même. Il est présidé par le premier président de la Cour des comptes. Il comporte des magistrats de la Cour des comptes,
00:45:59qui sont – pardon – indépendants et impartiaux. Et pour le reste, il comporte des experts qui sont désignés par les présidents des assemblées
00:46:09sur une base qui est extrêmement pluraliste et de compétence. Et ce dont je veux témoigner ici, devant vous, sans faire état encore une fois des délibérations,
00:46:19j'ai constaté – et honnêtement, dans ma vie, je n'ai pas vu ça dans beaucoup d'endroits – qu'en 5 ans, il n'y a jamais eu de fuite qui était due à un membre.
00:46:28Jamais. C'est très rare. J'ai constaté un très grand pluralisme qui aboutissait toujours à des convergences. Dans le HCFP actuel, vous avez un économiste
00:46:41comme Michael Zemmour, qui n'est pas forcément considéré comme tout à fait de droite, juste au titre, et d'autres qui sont beaucoup plus à droite.
00:46:50Tout le monde se rejoint. Il n'y a jamais eu d'absence de consensus depuis 5 ans que je préside le HCFP entre ces membres.
00:46:58Et donc il y a une garantie d'indépendance, une garantie d'impartialité. Il y a un pluralisme. Le positionnement auprès de la Cour des comptes est en principe
00:47:05le garant de cette indépendance. Et oui, je crois pouvoir vous dire que nous sommes totalement prémunis de l'hubris du politique.
00:47:11La Cour des comptes, je peux en témoigner par ailleurs. Ça n'embête pas. Parfois, la politique est totalement indépendante.
00:47:17Et heureusement, c'est ça qui lui permet d'être une institution de la République respectée par les Français. Donc oui, nous sommes à l'écart de ça.
00:47:24Et c'est pour ça que je vous fais cette proposition. Parce que je pense, si je prends un cas concret, si le HCFP avait été amené à dire, par exemple,
00:47:31sur la prévision 2024 – j'y reviens – non, ça ne va pas être 1,4%, c'est 1% max. Et à ce moment-là, soit on l'aurait fait nous-mêmes,
00:47:39soit on aurait dit au gouvernement « Vous exécutez, vous appliquez, vous expliquez ». S'il avait dû expliquer pourquoi c'était 1,4%
00:47:47avec des mécanismes compliqués devant vous, par exemple, ça aurait été un peu difficile. Et là, pour le coup, on aurait pu déboucher sur une conclusion pratique.
00:47:55— Là, je suis persuadé depuis le début de ce que vous dites. C'est-à-dire que vous le dites vous-même. Et puis vous avez l'expérience, en plus, au ministère.
00:48:05Vous dites que, quelque part, cette influence politique, elle est quasiment inévitable, elle est préstructurelle.
00:48:11— Mais pardon, si vous ne voulez pas vous interrompre, M. le Président, mais j'ai vécu de telles situations.
00:48:15— C'est exactement ce que je dis. — J'ai vu des débats au sein de l'exécutif sur le fait de savoir quelle devait être la prévision de croissance.
00:48:21— Voilà. Donc... Non, mais je trouve ça très intéressant, parce que ça infirme certains des propos qu'on a eus ici jusqu'à maintenant en audition.
00:48:27C'est pour ça que je me permets d'auditionner et de pointer l'importance de ce que vous êtes en train de nous dire.
00:48:32Et je pointais le fait qu'effectivement, vous le dites, c'est presque indépendant de la circonstance de tel ou tel pouvoir. C'est comme ça.
00:48:39Mais alors justement, par rapport au sujet qui nous occupe, là, sur l'huile 23-24, à partir du moment où, vous le dites vous-même, l'hubrise politique peut influer,
00:48:47est-ce que vous ne pensez pas que... Puisque c'est notamment les moindres recettes qui expliquent le dérapage, entre autres.
00:48:55Bon. Est-ce que vous ne pensez pas qu'il peut y avoir un aveuglement du politique, notamment sur les effets de sa politique en termes de recettes
00:49:05après 2 années post-COVID, où la croissance était telle, parce qu'on était descendu tellement bas, qu'il y a eu effectivement des recettes très importantes,
00:49:14y compris malgré la baisse des seuils d'impôts ? Est-ce que vous ne croyez pas que ça a pu suffisamment aveugler le politique pour expliquer les chiffres
00:49:22que nous avons eus beaucoup trop optimistes en matière de recettes ?
00:49:26– Il y a deux phénomènes conjoués, peut-être deux phases. Disons que dans les années 2021-2022, pour le coup, pour parler un peu comme dans les termes du monopoli,
00:49:35il y a eu une erreur en faveur de la banque, c'est-à-dire du gouvernement. Dans ces avis-là, je m'en souviens, j'étais déjà là,
00:49:42le Conseil avait estimé que les prévisions de recettes étaient un peu élevées. Un peu élevées. Et en réalité, elles ont été plus favorables encore
00:49:51que ce que nous estimions nous-mêmes. Mais c'était dû à des comportements extrêmement particuliers pendant la crise COVID.
00:49:57Il y a eu un effet, je dirais, sur 2023, qui est un effet d'ajustement, c'est-à-dire qu'on est revenu en réalité à une normale,
00:50:02ce qu'on aurait pu anticiper, mais alors je me garderais là-dessus de donner la moindre leçon, parce que personne ne l'avait vraiment vu en réalité.
00:50:08Mais à partir du moment où en 2023, on était revenu sur une normale, il n'était pas fondé de faire à nouveau des prévisions optimistes en 2024.
00:50:15Et puis, deuxième chose, il y a des phénomènes que je ne saurais pas expliquer, en toute honnêteté, faute de données.
00:50:20C'est pour ça que j'évoquais, par exemple, ma suggestion sur la condoléance. Il faut affiner la machine à prévoir les recettes qui manifestement dysfonctionnent.
00:50:32Et là, nous, ce n'est pas nous qui avons tous les moyens de voir comment ça marche. C'est sans doute les capteurs de l'administration qu'il faut restaurer.
00:50:39Et enfin, les échanges avec nous. Voilà. Donc, il y a eu ces deux phases et ces deux composantes.
00:50:44Merci de votre réponse. J'ai deux dernières petites questions à poser. La première, vous dites qu'il ne faut pas laisser Bercy trop seul.
00:50:52Je cite Jean-Luc Tavernier.
00:50:54Voilà. Là, c'est plutôt dans les propositions. Et du coup, vous citiez Tavernier.
00:50:58Et vous dites du coup « Renfonçons les moyens du HCFP, pourquoi pas ». Est-ce que vous ne croyez pas qu'il faudrait aussi laisser moins seul le Parlement
00:51:05et qu'on ait plus de moyens peut-être dans les missions de contrôle qui, normalement, sont les nôtres ? Voilà. Une question que je voulais vous poser.
00:51:13Je pense que oui. Mais je voudrais dire une chose que je ne cesse de répéter depuis 5 ans. Vous savez, ça fait 5 ans que je suis premier président bientôt.
00:51:20Je suis plus proche de la fin de mon mandat que du début. Et chaque fois que je viens ici, pour ceux qui sont là depuis 5 ans, ils en sont témoins,
00:51:28je dis que le HCFP vous aide. C'est-à-dire que nos travaux, comme ceux de la Cour des comptes, comme le disait Philippe Seguin, qui était mon prédécesseur,
00:51:36nous sommes à équidistance entre le gouvernement et le Parlement. C'est avec grand plaisir que je défère au rapport que vous nous demandez de produire.
00:51:43Et nos magistrats y sont extrêmement attachés. Mais je pense que le HCFP, l'institution budgétaire indépendante, la Cour des comptes, institution indépendante,
00:51:51sont en réalité, de ce point de vue-là, non pas des auxiliaires mais des aides au Parlement. Je pense que plus nous avons de moyens, plus nous avons de faits,
00:52:00plus nous avons de chiffres, plus nous avons d'objectivités, plus nous avons de rôles contraignants, plus ça vous sert en réalité.
00:52:07Donc ce n'est pas contradictoire d'augmenter les moyens propres ou d'évaluation du Parlement. C'est complémentaire.
00:52:13Il y a une dernière question. Évidemment, on fait cette commission d'enquête pour ne pas renouveler les mêmes erreurs. Est-ce que vous croyez qu'on est prémunis de ces erreurs pour 2025 ?
00:52:24Je ne peux pas vous répondre sur 2025 pour une raison simple. C'est que la saisine du HCFP commence demain. Et donc, je crois que c'est demain.
00:52:33Donc nous allons recevoir les chiffres. Nous allons ensuite faire comme nous faisons toujours. Je le signale d'ailleurs par rapport à ce qu'a dit Jean-Luc Tavernier, que je partage largement.
00:52:40C'est que notre méthode – je vous la situe en quelques mots –, c'est d'auditionner un certain nombre d'instituts de conjoncture et de travailler sur le consensus.
00:52:48Nous auditionnons la Banque de France, nous auditionnons l'ISSE, Rexecode et l'OFCE pour prendre des pôles un peu dans ces instituts.
00:52:55Nous avons par ailleurs nos propres études et nos propres capteurs. Nous auditionnons naturellement les administrations, puis nous validons notre avis.
00:53:03Et donc, je vous répondrai là-dessus, M. le Président, dans quelques semaines, quand vous m'inviterez à vous présenter cet avis comme je le fais toujours.
00:53:10Et je vous dirai à ce moment-là si je juge la prévision de croissance élevée, réaliste, optimiste, plausible.
00:53:17Et je vous répondrai de même pour les prévisions de recettes des dépenses. En me plaignant, je n'en suis pas... Je sais déjà de certaines informations lacunaires, puisque nous en demandons plus.
00:53:28— D'accord. Merci. Je passe le relais à Éric Ciotti.
00:53:33— Merci, M. le Président, M. le Premier président, M. le président du Haut conseil des finances publiques.
00:53:40Vous avez eu des mots très forts pour qualifier la situation qui nous mobilise aujourd'hui avec la constitution de cette commission d'enquête.
00:53:51Et si la commission des finances est dotée des prérogatives d'une commission d'enquête, c'est qu'en effet, nous sommes face à une situation grave.
00:54:00Et vous l'avez confirmé, et ça change, je le dis, des auditions que nous avons tenues pour l'instant.
00:54:07Nous avons auditionné pour la plupart des responsables, des hauts responsables administratifs de Bercy dont vous avez qualifié le rôle de dépendance vis-à-vis de l'exécutif, notamment dans les prévisions.
00:54:24Nous avons auditionné des ministres ou des anciens ministres.
00:54:30Ces mots, je les reprends. Vous avez parlé de situation navrante.
00:54:37Vous avez évoqué l'hypothèse de déclarer le projet de loi de finances pour 2024 insincère.
00:54:46Vous parlez, je crois, d'armes atomiques qui auraient conduit sans doute à la censure totale du PLF par le conseil constitutionnel.
00:54:54Pourquoi vous n'avez pas, alors que la tonalité globale de votre propos conduit à qualifier ce budget comme insincère,
00:55:04donc pourquoi vous n'avez pas utilisé cette prérogative et, finalement, quels sont les responsables de cette situation ?
00:55:15Votre propos liminaire répond à beaucoup des questions qu'on aurait pu vous poser, donc je serai bref dans ces questions,
00:55:25mais vous avez indiqué tout à l'heure, et je l'ai relevé, que Bruno Le Maire, lorsque nous l'avons auditionné,
00:55:33a évoqué que la prévision de croissance pour 2024 avait été confirmée par le Haut conseil.
00:55:39Vous avez dit que c'était totalement faux, donc est-ce que le ministre de l'Économie nous a menti devant la commission d'enquête ?
00:55:47Pourquoi est-ce qu'il y a eu des dissimulations volontaires, selon vous ? Vous avez évoqué des pressions sur les services,
00:55:56ce sont des mots extrêmement graves, donc comment vous qualifiez cette situation et la teneur des propos qui ont été tenus ici,
00:56:05mais plus encore qui ont présidé à la rédaction et à la présentation de ce budget qui, en tous points, apparaît insincère ?
00:56:16M. le président Ciotti, je suis assez attaché à la précision des mots, et je n'évoque pas la dépendance de l'administration,
00:56:26j'évoque sa loyauté. Je ne suis pas le seul ancien ministre de Bercy dans la salle. Nous avons une administration des finances qui est formidable,
00:56:33dans toutes ses composantes, mais on la place parfois dans une situation inconfortable quand le politique lui demande de faire des exercices
00:56:41qui ne sont – je vais citer le cas du Pestab 2024 – vraiment pas cohérents. Et l'administration savait évidemment qu'on ne pouvait pas avoir
00:56:49à la fois 40 à 50 milliards d'efforts par an et 1,7 à 1,8 % de croissance dans les années pour arriver à 3 %. Je ne vais pas faire insulte à leur intelligence
00:56:59en pensant qu'ils l'ignoraient, ils le savaient. Donc ce n'est pas une question de dépendance, c'est une question de loyauté.
00:57:06C'est très important de raisonner comme ça parce que l'administration, elle a son indépendance, elle donne toujours des avis. Les notes du Trésor qu'on vous a présentées
00:57:17disent toujours au ministre quelle est la réalité de la situation. Après, c'est à lui de l'évaluer. Deuxièmement, je n'ai pas parlé de pression au pluriel.
00:57:25Je n'ai parlé d'une pression. Ce n'est pas la même chose. C'est-à-dire que travailler sous tension, travailler sous pression, les fonctionnaires que vous avez interrogés
00:57:31sont des gens qui ne comptent pas leurs heures. Si vous voulez à Bercy, les lumières sont encore, dans certaines directions, allumées à 23 heures. Mais ils travaillent parfois sous pression.
00:57:40Ils travaillent sous pression du temps, sous pression de la volonté politique. C'est incontestable aussi. Je n'ai pas parlé de pression qui s'exerce au sens pervers du terme
00:57:48ou au sens désagréable. Enfin, je ne vise personne. Je ne suis pas là pour régler des comptes ou pour cibler des personnes. Je suis pour réfléchir sur des processus
00:57:56et essayer de les améliorer. Je tiens à faire ces précisions-là parce qu'il n'y a pas de règlement de compte possible, ni pour moi, ni, me semble-t-il, pour votre commission d'enquête.
00:58:06Mais vous serez juge vous-même de ce que vous conclurez. Alors après, sur le principe de sincérité. Le principe de sincérité, il a été énoncé par le Conseil constitutionnel en 1993.
00:58:16Il est consacré par la LOLF. Il a pris le pas sur les autres principes canoniques du droit budgétaire. Et il n'a encore jamais servi de fondement à une décision de censure
00:58:28d'un texte financier par le Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel en donne une définition précise. C'est l'intention de tromper.
00:58:34C'est l'impact sur l'équilibre général. Il exige une double condition, la sincérité des textes financiers et des prévisions qu'ils comportent.
00:58:40La sincérité, dit-il, se caractérise par l'absence d'intention de fausser les grandes lignes de l'équipe qu'elle détermine.
00:58:46Et la forme même des textes financiers emporte une sorte de tout-ou-rien qui rend difficile la censure d'une inscription budgétaire en particulier.
00:58:54Alors bon, le mandat du Haut conseil est un peu différent. On parle plutôt de cohérence et de réalisme. Au fond, notre mandat porte sur trois objets.
00:59:04Les prévisions macroéconomiques, les articles liminaires dont nous apprécions la cohérence, les prisons de recettes et de dépenses.
00:59:10Nous sommes chargés d'apprécier le réalisme. Et en pratique, c'est aussi cette qualité, le réalisme que nous cherchons dans le scénario macroéconomique.
00:59:17Alors c'est vrai que le Conseil a évité de se référer à des règles ou des principes issus d'autres textes que son propre texte constitutif.
00:59:25C'est un dialogue que j'ai pu avoir avec le président du Conseil constitutionnel. D'ailleurs, nous nous parlons, comme c'est normal,
00:59:31non pas sur des situations mais sur des principes entre responsables d'institutions de la République.
00:59:40Et donc nous avons choisi jusqu'à présent toute une gradation sémantique que j'ai mentionnée dans mon introduction. Donc je vous fais l'économie.
00:59:47Une gradation dont vous estimez vous-même, quand je viens devant vous, qu'elle est subtile mais qui présente l'avantage de positionner l'appréciation
00:59:54du réalisme de chaque texte financier sur une échelle de gravité. Quand nous disons que c'est incohérent et irréaliste ou peu crédible, c'est pas bon en général.
01:00:03Mais selon nous – et nous avons eu ce débat, c'est vrai, je ne veux pas citer telle ou telle occurrence – il n'appartient pas au HCFP de s'exprimer
01:00:11directement sur la sincérité ou l'insincérité des prévisions de textes financiers. S'il advenait que nous tombions sur une prévision manifestement erronée,
01:00:19fantaisiste ou animée par l'intention de tromper, c'est une question de gradation. Nous le dirions et nous n'hésiterions pas.
01:00:26Mais quand nous sommes dans des ordres de grandeur qui nous paraissent excessifs sans pour autant être mus par cette intention de tromper, nous n'avons pas à le faire.
01:00:34Ce qui fait que je vais taire encore une fois les débats que nous avons entre nous. Nous nous sommes posés la question à telle ou telle occasion.
01:00:40Nous avons toujours tranché de ne pas parler d'insincérité. Chaque fois que cette question m'a été posée devant cette commission, j'ai répondu la même chose.
01:00:47Je répondrai toujours la même chose. Je n'aime pas cette notion. Je n'aime pas que le Conseil ait à l'utiliser.
01:00:53Mais je trouve que, par ailleurs, l'arsenal dont il dispose est trop faible. C'est pour ça que je vous propose, entre l'ordre nucléaire de l'inconstitutionnalité
01:01:01et de l'insincérité et la sémantique platonique, de créer quelque chose de plus effectif qui soit un mécanisme de validation au moins,
01:01:10sinon d'élaboration des prévisions macroéconomiques par le HCFP à votre bénéfice.
01:01:16Vous l'avez compris, il y a encore des zones d'ombre dans l'enchaînement des faits qui ont conduit au dérapage des finances publiques en 2023 et en 2024
01:01:24et valu à la France d'être placée sous la surveillance étroite de la Commission européenne de Bruxelles.
01:01:30Place tout de suite aux questions. Elles sont nombreuses, incisives parfois au vitriol.
01:01:35Dans l'ordre d'importance numérique des groupes politiques de l'Assemblée nationale, la parole est au Rassemblement national.
01:01:42Quand on lit les rapports publics annuels de la Cour des comptes, c'est très clair.
01:01:45Le fil rouge des analyses des budgets, c'est évidemment la non-maîtrise des dépenses publiques.
01:01:50Il y a deux périodes. Il y a une période dans le vocabulaire utilisé de 2017 à 2020, la crise Covid.
01:01:59Il y a un regret sur le manque d'économie structurelle, le slash de réformes structurelles, de maîtrise du dépense public.
01:02:07Ce n'est pas la crise Covid, c'est peut-être votre arrivée au pouvoir.
01:02:11Il y a un nouveau lexique qui est utilisé, c'est sur la sélectivité des dépenses publiques.
01:02:19À partir du rapport 2022-2023-2024, il y a le terme de sélectivité des dépenses publiques qui revient régulièrement.
01:02:25Ce n'est pas une critique, c'est que j'ai vu la différence sémantique.
01:02:28Peut-être est-ce que ça vient de votre analyse à vous ou pas, vous nous le direz.
01:02:31Moi, je n'ai pas d'avis. On a juste remarqué avec le groupe cette différence.
01:02:35C'est ma première question. On a beaucoup parlé de la capacité à prévoir les modèles,
01:02:40les données qu'il faudrait rajouter, les autorités de ci ou de ça.
01:02:44Moi, je trouve au contraire que tout est là.
01:02:46Je n'ai aucune critique à faire à vos institutions ou aux institutions que vous représentez.
01:02:49Tout est là. C'est aux parlementaires d'assumer leurs responsabilités.
01:02:52Ma première question, c'est celle-là.
01:02:54Sans doute avez-vous écouté les auditions au Sénat et celles que nous avons faites.
01:02:58On a l'impression que la non-maîtrise des dépenses publiques n'est aucunement responsable du dérapage budgétaire.
01:03:05Alors que moi, ça me semble une évidence. Je voulais avoir votre avis là-dessus.
01:03:10Je vous ai interrompu parce que vous n'avez pas mon arrivée au pouvoir.
01:03:14Je n'ai pas l'impression d'être arrivé au pouvoir.
01:03:17J'ai été au pouvoir quand j'étais ministre.
01:03:20Mais là, je suis juste président de la Cour des comptes. Je suis à la tête d'une institution.
01:03:24Donc, mon arrivée à la présidence de la Cour des comptes, c'est pour ça que je ne suis pas au pouvoir depuis bien longtemps.
01:03:31Mais président de la Cour des comptes, je le suis bientôt depuis cinq ans, en effet.
01:03:34Il se trouve que je suis arrivé, en effet, à la tête de la Cour des comptes,
01:03:40exactement le lendemain de la sortie du premier confinement, le 3 juin 2020.
01:03:49Et que nous sortions d'une période très particulière dans laquelle des centaines de milliers,
01:03:55plus de 150 000 de nos concitoyens ont perdu la vie.
01:03:58Et c'est ce qu'on appelle quoi qu'il en coûte.
01:04:00Et c'est vrai que la Cour des comptes, à l'époque, a un peu changé son regard.
01:04:03Nous n'avons pas condamné en quoi que ce soit le quoi qu'il en coûte.
01:04:06Quand il s'agit de sauver des vies, de sauver des boîtes, de sauver un système social,
01:04:10il faut bien le gérer, mais on ne compte pas.
01:04:14On ne va pas, en tout cas, compter a priori.
01:04:16Il eût été absurde, à ce moment-là, de porter un jugement difficile sur la dépense publique.
01:04:22Par ailleurs, j'avoue que l'idée que la Cour des comptes serait vue par les concitoyens
01:04:28comme étant hostile à la dépense publique ou étant je ne sais quelle partisane systématique de l'austérité
01:04:34me paraissait relativement absurde parce que le problème n'était plus là.
01:04:37Le problème, et effectivement j'assume d'avoir changé un peu de sémantique
01:04:42ou d'avoir fait changer de sémantique, c'était la qualité de la dépense publique.
01:04:46Je maintiens pour ma part que quand on a 53,8% en 2019, 57% aujourd'hui de dépense publique dans le PIB,
01:04:55sans pour autant qu'il y ait une amélioration fondamentale du service public qui soit perçue par nos concitoyens
01:05:01et d'ailleurs qui soit objectivement mesurée, pensons au classement PISA,
01:05:06il y a un certain nombre d'indicateurs d'une autre nature,
01:05:10nous avons un problème de qualité de la dépense publique.
01:05:12Et donc effectivement j'ai souhaité, la Cour des comptes est dans ce mouvement,
01:05:16que nous regardions davantage la qualité de la dépense publique, sa performance en efficience
01:05:21parce que je suis persuadé qu'on peut réduire la dépense publique sans dégrader le service public,
01:05:28voire en améliorant sa performance et sans abîmer le modèle social, voire en le confortant.
01:05:33Et quand je parle, j'ai fait dans mon introduction une revue de dépenses systématique, c'est à ça que je pense.
01:05:39Je pense qu'il faut vraiment maintenant aller regarder de près, soulever le capot des politiques publiques,
01:05:45puisqu'on va trouver un certain nombre de choses qui sont obsolètes, on va trouver des choses qui sont inefficaces,
01:05:51on va trouver des choses qui sont inefficientes.
01:05:53Je vous invite à regarder le petit rapport, parce qu'il est petit pour une fois,
01:05:56que nous avons fait sur les dépenses exceptionnelles de sortie de crise.
01:06:00C'est drôle parce qu'on a quand même proposé plusieurs milliards d'économies sur un périmètre assez petit.
01:06:06Alors, je n'ai vu aucune réaction.
01:06:08Non, mais aucune réaction au sens de...
01:06:11Je n'ai pas vu une profession qui disait c'est scandaleux, des associations qui disaient c'est épouvantable.
01:06:16On m'a proposé un certain nombre qui sont de relativement bon sens.
01:06:19C'est à supposer qu'elles pourraient être relativement indolores et qu'elles ne sont pas stupides.
01:06:23Je vais citer la principale sur l'apprentissage.
01:06:26Certaines mesures sont envisagées.
01:06:27Nous, nous avons dit, franchement, avoir des apprentis qui sont dans l'enseignement supérieur,
01:06:32ce n'est pas eux qui sont au débat de plus cinq ou six.
01:06:34On en a à croire des comptes, tenez.
01:06:36Ce n'est pas eux qui sont problématiques sur le marché de l'emploi.
01:06:39L'apprentissage en Allemagne, il y en a beaucoup et ce n'est pas ça.
01:06:42Donc si on recentre, si on recible l'apprentissage sur ces bénéficiaires d'aujourd'hui
01:06:48avec la situation du marché de l'emploi qui est meilleure, c'est quand même une bonne chose.
01:06:52Il y a un certain nombre de dépenses culturelles.
01:06:54On sait qu'on ne va pas leur montrer qu'elles ne sont pas bonnes.
01:06:57Est-ce que c'est vraiment utile d'encourager les véhicules lourds
01:06:59quand on est dans une phase de décarbonation, etc.
01:07:02Donc je pense qu'on peut tout à fait aller dans ce sens-là.
01:07:05Nous ne disons pas tout.
01:07:06Je pense qu'il faut systématiser la démarche de manière très, très importante.
01:07:10C'est le sens de ce que je suggère.
01:07:13Voilà, Monsieur le député, l'évolution que prend l'institution.
01:07:18Plus d'évaluation de politique publique, plus d'évaluation de la qualité des dépenses publiques
01:07:22en lien d'ailleurs avec les assemblées qui nous ont demandé des rapports
01:07:26qui sont extrêmement intéressants et que nous faisons, encore une fois, avec grand plaisir.
01:07:34Merci pour votre réponse.
01:07:35Je me permets de la reformuler parce que c'est sans doute moi qui n'ai pas été clair
01:07:38et je le dis sans ironie.
01:07:40En fait, ma question, c'était, au-delà justement de ce changement de vocabulaire,
01:07:43en fait, c'est toujours le même rapport.
01:07:45Les éléments des rapports entre 2017 et 2024, en fait, sont redondants.
01:07:49Enfin, pas redondants, ce se répète.
01:07:51Chaque année, le rapport dit, quoi que soit la conjoncture,
01:07:54il n'y a pas d'économie structurelle sous diverses formes, avec divers vocabulaires.
01:07:57Mais en fait, ça revient toujours.
01:07:58Et je reporte ma question.
01:07:59Quand on a fait des auditions ici ou celles du Sénat,
01:08:02la question d'acter que ce serait un problème de dérapage des recettes,
01:08:06bon, moi, je ne sais pas du tout où on analyse.
01:08:08Et quand je lis les rapports de la Cour des comptes,
01:08:10j'ai l'impression que ce n'est pas du tout celles des rapports annoncés de la Cour des comptes.
01:08:13La Cour des comptes dit, il n'y a pas de réforme structurelle,
01:08:15ni en 2017, ni en 2018, ni en 2019, ni en 2020.
01:08:18On oublie 2021, c'est le Covid.
01:08:202022, reparti, toujours pas de réforme structurelle,
01:08:22toujours pas de maîtrise des dépenses.
01:08:24Et je reviendrai par ma dernière question ensuite.
01:08:26Mais c'était ça ma question, c'est, vos rapports sont clairs,
01:08:28mais il n'y a aucun effet.
01:08:29Alors, est-ce que vous avez vu des économies structurelles
01:08:32sous ces sept dernières années qui permettaient le redressement durable des comptes publics ?
01:08:35Alors, vous êtes finalement peut-être un meilleur lecteur des rapports de la Cour des comptes que moi-même.
01:08:41Donc, je ne vais pas citer les rapports des années 2017, 2018, 2019, 2020.
01:08:45Je n'étais pas président de la Cour des comptes.
01:08:47Je ne doute pas qu'ils aient été passionnants et de qualité.
01:08:51Je le sais, bien sûr.
01:08:53Mais, en effet, ce que j'ai dit sur 2023-2025, je l'ai cité dans l'introduction,
01:08:56c'est qu'il n'y avait pas eu, hors de la réforme des retraites,
01:08:59de réforme structurelle, qui débouchait sur des dépenses.
01:09:02Oui, je l'ai dit, je le maintiens.
01:09:04Je ne dirai pas non plus qu'on trouve tout dans nos rapports.
01:09:06Je pense qu'il faut aller dans une démarche qui soit beaucoup plus collective,
01:09:08beaucoup plus partagée, beaucoup plus prononcée,
01:09:10de revue de dépense systématique.
01:09:12Mais qu'on a là, collectivement, des gisements tout à fait considérables.
01:09:18Je reprends après, plus tard.
01:09:20Éric Weorst.
01:09:22Merci, M. le Président.
01:09:24Oui, le premier Président de la Cour des comptes a raison, évidemment.
01:09:26D'abord, le problème est bien dans la dépense publique,
01:09:29le niveau de la dépense publique.
01:09:30Chacun le dit, le redit.
01:09:32En général, quand on arrive au gouvernement et qu'on se dit
01:09:34qu'il faut baisser la dépense publique,
01:09:36on dit qu'il faut prendre les rapports de la Cour des comptes
01:09:38et puis prendre ce qu'il y a de meilleur dans les rapports de la Cour des comptes
01:09:41et l'appliquer.
01:09:43Et puis, après, on ferme les rapports de la Cour des comptes
01:09:45parce que, pour appliquer tout ça, il faut un peu de continuité
01:09:47et il faut beaucoup de courage.
01:09:49C'est sans doute ce qui manque.
01:09:51Et on est tous d'accord ici pour dire qu'il y a probablement
01:09:53trop de dépenses publiques, on ne sera jamais d'accord
01:09:55sur la dépense publique qu'il faut réviser.
01:09:57Et donc, il faut que le gouvernement prenne ses responsabilités
01:10:00et doit le faire aujourd'hui.
01:10:02Les dérapages dus aux collectivités locales ou à la sécurité sociale,
01:10:07ils sont très difficiles à piloter.
01:10:09Le dérapage...
01:10:11Il n'y a pas de pilote dans l'avion de la dépense
01:10:13des collectivités locales.
01:10:15Je parle de la dépense générale,
01:10:17il n'y a pas de telle et telle collectivité elle-même
01:10:19qui pilote sa propre dépense.
01:10:21Mais il n'y a pas de pilote,
01:10:23parce qu'il n'y a pas d'organisme global, régulateur,
01:10:26il n'y a pas d'autorité là-dessus.
01:10:28Les contrats de Cahors n'ont pas...
01:10:30ont fait florès et, en tout cas,
01:10:32n'ont pas pu déboucher.
01:10:34Et c'est vrai pour la sécurité sociale,
01:10:36qui sont essentiellement des dépenses, à un moment donné, de guichet.
01:10:38On n'arrête pas de soigner, on continue...
01:10:40Tout ça rend les choses assez complexes.
01:10:43Quant au modèle de recettes,
01:10:46je pense qu'il faudra, M. le Président,
01:10:48qu'il y ait un 58.2,
01:10:50au fond, peut-être, un travail de la course,
01:10:52s'il n'a pas été déjà fait, sur les modèles,
01:10:54à la fois en recettes et en dépenses,
01:10:56pour essayer de regarder ce qu'il y a à l'intérieur.
01:10:59C'est assez opaque pour tout le monde.
01:11:01On se le fait expliquer, mais après on oublie.
01:11:03Tout ça varie et doit varier.
01:11:06Est-ce qu'aujourd'hui, on dispose de modèles
01:11:08à peu près compétitifs avec ce qui se passe dans d'autres pays ?
01:11:10Je note d'ailleurs que d'autres pays
01:11:12ont connu aussi des difficultés de prévision.
01:11:14C'est vrai pour l'Allemagne, pour l'Italie,
01:11:16pour plein de pays qui ont connu
01:11:18de grandes difficultés de prévision.
01:11:20Plus le monde est incertain, plus c'est compliqué de prévoir.
01:11:23Je pense que dans cette affaire,
01:11:25le rôle du HEC, du Haut Conseil aux Finances Publiques,
01:11:29est évidemment très important.
01:11:31Vous l'avez dit, peut-être que dans nos conclusions,
01:11:34il faudra indiquer qu'il faut confier
01:11:37les missions qu'ont d'autres organismes
01:11:40de la même nature dans les pays d'Europe
01:11:43comme le HEC FP d'aujourd'hui.
01:11:45Je pense que ça n'a pas été fait
01:11:47et ça pourrait sans doute être fait.
01:11:49Je pense aussi, M. le Président,
01:11:51qu'au fond, tous les acteurs sont un peu responsables
01:11:53dans cette affaire à partir du moment
01:11:55où il n'y a pas eu l'intention de tromper.
01:11:57Je note que personne ne dit nulle part
01:11:59qu'il y a eu l'intention de tromper.
01:12:01Il faut rectifier les erreurs.
01:12:03Le Parlement doit jouer ce rôle.
01:12:05Il faut que nous nous regardions nous-mêmes
01:12:07avec un esprit critique.
01:12:09Nous contrôlons l'action du gouvernement.
01:12:11C'est ce qui empêche cette commission
01:12:13de contrôler au fur et à mesure du temps
01:12:15les prévisions de recettes de Bercy.
01:12:17Rien. Il faut juste qu'on puisse l'organiser,
01:12:19qu'on puisse l'institutionnaliser.
01:12:21Voilà quelques propositions.
01:12:25Ma réponse sera d'autant plus brève.
01:12:27Je suis largement d'accord
01:12:29avec ce que vous venez de dire, M. le député.
01:12:31C'est vrai qu'il n'y a pas de pilote
01:12:33dans le contrôle de la dépense
01:12:35des collectivités locales.
01:12:37Mais néanmoins, j'ai dit qu'il fallait
01:12:39arranger un dialogue qui permette
01:12:41de trouver une pente qui soit évaluée
01:12:43de façon réaliste. Vous ne l'avez pas développée,
01:12:45mais il me semble qu'il y a tout de même
01:12:47des pilotes dans le cockpit
01:12:49de la dépense sociale.
01:12:53Vous allez voir que nous allons faire
01:12:55une revue de dépense que nous allons rendre publique
01:12:57sur l'assurance-maladie.
01:12:59J'ai fait quelques auditions.
01:13:01Je crois sincèrement que si politiquement
01:13:03on confiait à la CNAM
01:13:05une fonction un peu plus vigoureuse
01:13:07avec des dépenses,
01:13:09on pourrait faire des choses
01:13:11sans pour autant, là encore,
01:13:13abîmer nos hôpitaux. Au contraire, il y a
01:13:15certains points sur lesquels il faut investir,
01:13:17d'autres sur lesquels on peut quand même économiser.
01:13:19Pour ce qui est des modèles, je prends note,
01:13:21mais j'attends votre commande, M. le Président,
01:13:23dans 58 heures. Sinon, nous pouvons nous-mêmes
01:13:25le faire d'initiative. Enfin, peut-être
01:13:27sur le HCFP, je me permettrais
01:13:31de vous transmettre un petit papier
01:13:33un peu précis sur les suggestions
01:13:35que nous faisons.
01:13:37Je suis embarrassé
01:13:39parce que je plaide pro domo,
01:13:41mais il s'appelle le HCFP,
01:13:43il est placé là où il est,
01:13:45mais c'est en réalité une institution budgétaire indépendante.
01:13:47C'est l'institution budgétaire indépendante française
01:13:49qui doit jouer ce rôle d'interface,
01:13:51de tiers de confiance, de validateur
01:13:53au service
01:13:55du citoyen, sous
01:13:57le contrôle du Parlement.
01:13:59Ça vous aiderait sans doute à travailler
01:14:01encore mieux dans cet exercice.
01:14:03Si nous pouvions avoir une fonction continue,
01:14:05si nous avions un droit d'autosaisine,
01:14:07et si nous avions un mandat
01:14:09des moyens
01:14:11et un rôle plus important.
01:14:13Merci. Aurélien Lecoq pour la France Swiss.
01:14:23Merci, M. le Président, et merci
01:14:25pour la clarté de vos propos et de votre propos
01:14:27introductifs. Je voudrais revenir dans un
01:14:29premier temps rapidement sur
01:14:31la question de la transparence et des informations
01:14:33à disposition, justement, de la Cour du Compte
01:14:35et du HCFP.
01:14:37Vous avez indiqué, je crois, au Sénat
01:14:39en avril 2024, n'avoir reçu
01:14:41qu'en mars la connaissance de la note
01:14:43du Trésor du 7 décembre 2023,
01:14:45qui était une alerte auprès du gouvernement.
01:14:47Je voudrais savoir comment vous analysez
01:14:49le fait d'avoir reçu cette note aussi tard,
01:14:51comment vous expliquez de ne l'avoir reçue qu'à ce moment-là.
01:14:53Et j'ajouterais,
01:14:55à quel moment avez-vous eu connaissance
01:14:57de la note du 16 février,
01:14:59qui, elle, de nouveau, est une alerte
01:15:01sur l'aggravation du déficit,
01:15:03puisqu'elle tape sur un déficit de 5,7,
01:15:05là où le gouvernement parle encore, deux jours
01:15:07après cette note du 16 février,
01:15:09d'un déficit à 4,4.
01:15:13Réponse claire,
01:15:15une question claire.
01:15:17Oui, nous n'avons pas disposé d'informations
01:15:19dont nous aurions dû disposer.
01:15:21Comme chaque année, la Cour a instruit
01:15:23en fin d'année 2023 et dans le premier jour de 2024
01:15:25qu'il devait devenir le chapitre
01:15:27de finances publiques du rapport annuel
01:15:29publié le 12 mars 2024.
01:15:31La note trésor budget,
01:15:33datée du 7 décembre 2023, désormais fameuse,
01:15:35n'a pas été communiquée à cette occasion,
01:15:37alors qu'elle annonçait que le déficit public
01:15:39pourrait s'établir à 5,2 % du PIB.
01:15:41Et elle montre bien
01:15:43que début décembre 2023,
01:15:45l'administration ne croyait pas
01:15:47à 4,9 % de déficit.
01:15:49L'instruction du chapitre de finances publiques du RPA
01:15:51s'est terminée le 14 décembre 2023.
01:15:53Le rapport a été envoyé à la contradiction le 18 décembre.
01:15:55Parallèlement, un questionnaire d'actualisation
01:15:57a été envoyé le 19 décembre.
01:15:59Une audition avec la directrice du budget s'est tenue
01:16:01sans réponse écrite le 11 janvier.
01:16:03Puis une réponse écrite de la Direction générale
01:16:05du Trésor et de l'ADB est parvenue à la Cour le 24 janvier.
01:16:07Avec les aimants d'actualisation
01:16:09demandés le 19 décembre.
01:16:11La réponse écrite de l'administration,
01:16:13date du 24 janvier, ne mentionnait pas
01:16:15la dégradation du déficit public,
01:16:17mais n'affirmait pas non plus que celui-ci serait
01:16:19de 4,9 points, comme prévu par la loi
01:16:21de fin de gestion. La réponse du ministre
01:16:23évitait de donner les chiffres
01:16:25de déficit public en 2023
01:16:27et en 2024. Il m'apparaît donc
01:16:29oui là, nettement,
01:16:31que l'administration n'a pas été
01:16:33transparente avec la Cour
01:16:35sur la période décembre-mars.
01:16:37Nous avons tiré les conséquences cette année
01:16:39en demandant fermement qu'un tel épisode
01:16:41ne se reproduise pas. Je le dis avec prudence
01:16:43à ce stade, il me semble que
01:16:45les équipes en charge des travaux sur
01:16:47les finances publiques, le président
01:16:49est derrière moi, ainsi que le président
01:16:51de la section ont bénéficié de davantage
01:16:53de transparence cette
01:16:55année, mais il faudrait que ce soit
01:16:57quand même tout à fait systématique
01:16:59cela. Il ne faut pas que cette
01:17:01situation se reproduise en quoi
01:17:03que ce soit. D'ailleurs, je vous
01:17:05informe d'une modification
01:17:07dans nos calendriers, monsieur le président,
01:17:09je ne sais pas si vous avez déjà été informé, qui est
01:17:11que nous avons décidé cette
01:17:13année de dissocier
01:17:15le chapitre introductif
01:17:17du rapport annuel, du rapport annuel
01:17:19lui-même, et qu'il sera publié plus tôt
01:17:23avant la fin du mois de février,
01:17:25le rapport public annuel étant remis un peu plus tard.
01:17:27Le rapport public annuel sera donc désormais un rapport thématique
01:17:29et nous ferons un rapport, un chapitre sur les
01:17:31finances publiques en janvier-février,
01:17:33ce qui me paraît être un nouveau rendez-vous
01:17:35utile pour aussi le
01:17:37contrôle parlementaire continu sur ces
01:17:39questions.
01:17:41Mais du coup,
01:17:43ce manque de transparence a aussi concerné
01:17:45la note du 16 février ?
01:17:49Oui.
01:17:53Merci.
01:17:55D'accord.
01:17:57Non, mais parce que la note du 16 février a aussi
01:17:59son importance, parce qu'elle est produite
01:18:01deux jours avant la réitération
01:18:03par le ministre de l'objectif
01:18:05de déficit
01:18:07publiquement.
01:18:09En réalité, c'est un peu embêtant, parce que nous ne l'avons
01:18:11pas eue, mais nous la connaissions.
01:18:13Celle-là, elle a fuité assez largement.
01:18:15Mais elle n'avait pas de
01:18:17statut officiel.
01:18:21Une autre question,
01:18:23c'est compte tenu de l'évocation
01:18:25de ces deux notes et des alertes
01:18:27que vous avez reprises dans la temporalité
01:18:29au début de
01:18:31votre expression, notamment
01:18:33vous redisiez qu'il y avait eu une alerte de la Cour des comptes
01:18:35ou du HCFP dès le 27 septembre
01:18:372023 sur des
01:18:39hypothèses qui paraissaient
01:18:41ou des prévisions qui paraissaient trop
01:18:43optimistes. Est-ce que
01:18:45pour vous, on peut considérer qu'au moment
01:18:47du PLF 2024,
01:18:49le gouvernement dispose
01:18:51de suffisamment
01:18:53d'informations pour considérer
01:18:55que ces hypothèses
01:18:57ne sont pas les plus probables et que du coup,
01:18:59ces prévisions de déficit
01:19:01ne sont pas les bonnes ? Il avait
01:19:03la possibilité de juger
01:19:05que ce n'était pas cela qu'il fallait faire.
01:19:09Je vais le dire différemment, et comme je le dis moi-même.
01:19:11Incontestablement, la prévision de
01:19:131,4% pour le PLF 2024 est
01:19:15exagèrement optimiste et
01:19:17tout à fait volontariste, puisque le
01:19:19consensus des économistes s'établit à 0,8%.
01:19:21Et quand nous avons des échanges avec l'administration,
01:19:23naturellement, nous le lui disons.
01:19:25Nous échangeons aussi avec des instituts de prévision
01:19:27qui nous le disent aussi.
01:19:29Donc voilà, c'est un choix qui a été fait.
01:19:31Je n'ai pas à commenter.
01:19:35C'est un choix
01:19:37qui a été fait et qui du coup,
01:19:39nous, nous permet en tout cas
01:19:41de remettre en cause sa sincérité,
01:19:43puisque contrairement à ce qu'affirment
01:19:45les ministres disant qu'en fait,
01:19:47il n'y avait pas d'informations à leur disposition,
01:19:49vous nous dites bien qu'il y a un nombre
01:19:51important d'informations qui étaient quand même
01:19:53à leur disposition. J'ajoute une dernière question,
01:19:55c'est est-ce que
01:19:57vous êtes en capacité d'avoir
01:19:59une évaluation sur l'impact
01:20:01sur la croissance en cours d'année 2024
01:20:03des
01:20:05différentes coupes budgétaires,
01:20:07soit les 16 milliards
01:20:09inclus dans le PLF ou les 10 milliards
01:20:11de coupes supplémentaires, voire les 16 milliards
01:20:13gelés en cours d'année et 7 milliards
01:20:15annulés finalement en fin d'année ?
01:20:17Alors, sur le
01:20:19premier point, je vais quand même y revenir parce que sur
01:20:21l'affaire de la socialité, je ne veux pas me laisser entraîner sur un terrain
01:20:23où je ne veux pas aller.
01:20:25Le fait qu'on
01:20:27aurait pu choisir un autre
01:20:29chiffre de croissance et qu'elle était volontariste
01:20:31ne veut pas dire qu'il y a eu une intention de tromper.
01:20:33Il y a eu un optimisme ou un volontarisme
01:20:35excessif. C'est comme ça que je le formule.
01:20:37Je souhaite que ce soit dit ainsi.
01:20:39Ne pas laisser d'ambiguïté sur le sujet.
01:20:41Après, c'est plutôt l'INSEE
01:20:43qui peut mesurer en cours d'année
01:20:45les impacts sur la croissance
01:20:47et on le voit à travers
01:20:49la série
01:20:51des taux de croissance
01:20:53trimestriels qui sont publiés ensuite.
01:20:55J'ai entendu dans votre propos
01:20:57liminaire la distinction
01:20:59que vous faites entre l'insincérité
01:21:01qui suppose une volonté
01:21:03manifeste de tricher et la notion
01:21:05de responsabilité. Mais est-ce que
01:21:07dans la notion de responsabilité, si on va plus
01:21:09loin, on ne bascule pas
01:21:11dans l'irresponsabilité. Donc, vous
01:21:13souhaitez, si j'ai bien compris, que
01:21:15les prévisions, qu'elles soient macroéconomiques
01:21:17ou autres, ne soient
01:21:19plus confiées à la seule administration.
01:21:21Et vous êtes
01:21:23candidat naturel,
01:21:25je m'exprime comme ça,
01:21:27au Conseil des Finances Publiques
01:21:29pour justement apporter cet éclairage.
01:21:31Alors, j'ai deux questions
01:21:33sur ce sujet, parce que ça pose
01:21:35une réelle dimension.
01:21:37La première, c'est à quel
01:21:39coût cela pourrait se faire,
01:21:41parce que je n'imagine pas que ce soit
01:21:43à coût constant, puisqu'il va falloir que
01:21:45vous renforciez vos équipes. Voilà.
01:21:47Donc, ça, c'est la première question.
01:21:49Et la deuxième question, elle est beaucoup plus générale,
01:21:51mais puisque vous êtes dans le sujet
01:21:53de prévisions d'avenir,
01:21:55quelle serait,
01:21:57à votre avis, compte tenu du contexte
01:21:59aujourd'hui, on va tester
01:22:01votre capacité à une réponse
01:22:03concrète,
01:22:05les perspectives en matière d'évolution
01:22:07des taux d'intérêt, si nous
01:22:09ne revenons pas à un
01:22:11projet de loi de finances à 5-4. C'est un peu plus
01:22:13large que le seul champ de notre...
01:22:15Mais c'est un peu pour tester votre capacité
01:22:17à nous donner une vision
01:22:19d'avenir. Voilà.
01:22:21Nos capacités sont, je crois,
01:22:23assez convenables,
01:22:25mais, encore une fois, je ne veux pas
01:22:27me prononcer sur 2025,
01:22:29puisque j'attends la saisine demain
01:22:31et que je reviendrai devant vous, mais vous pourrez me reposer
01:22:33la question.
01:22:35Moi, je ne peux
01:22:37pas, pour le coup,
01:22:39me contenter d'informations,
01:22:41de oui-dire, etc.
01:22:43J'attends de voir les choses de façon très précise,
01:22:45ce qu'on nous transmet, et je vous promets
01:22:47que je vous répondrai de façon très concrète dans très peu de semaines
01:22:49quand on aura examiné de près
01:22:51le projet tel qui nous a été déposé.
01:22:53Alors, ensuite, sur la
01:22:55première question,
01:22:57non, on ne peut pas... Alors, pourquoi est-ce que je
01:22:59pense que l'HCFP est candidaturel ?
01:23:01Pas parce qu'il est à la Cour des Comptes, pas parce que je le préside.
01:23:03Encore une fois, j'insiste devant vous
01:23:05sur un point.
01:23:07L'HCFP n'est pas une annexe
01:23:09de la Cour des Comptes.
01:23:11Le HCFP
01:23:13est logé près de la Cour des Comptes pour une question
01:23:15de crédibilité, mais c'est avant tout
01:23:17un organisme indépendant de l'analyse économique,
01:23:19avec un secrétariat permanent
01:23:21très limité.
01:23:23Combien de TP aujourd'hui ?
01:23:25Bon,
01:23:27ce que je crois,
01:23:29c'est qu'il faudrait augmenter
01:23:31les moyens.
01:23:33Que faut-il pour que ça marche ?
01:23:35Un, il faut qu'on ait plus d'informations.
01:23:37Il faut qu'on ait un peu plus de temps pour examiner
01:23:39les choses. Franchement, 5-7 jours, c'est
01:23:41beaucoup trop court.
01:23:43Il faut ensuite qu'on ait
01:23:45une équipe économique renforcée.
01:23:47Ce n'est pas la même chose dans l'hypothèse où on nous confie
01:23:49les prévisions ou on nous confie la validation.
01:23:51Si on nous confie les prévisions,
01:23:53de facto, il faudrait transférer
01:23:55une partie, une quarantaine de fonctionnaires,
01:23:57je pense,
01:23:59qui sont aujourd'hui
01:24:01à la direction de Gérard Lutrézor.
01:24:03Et sinon, il faudrait une vingtaine d'économistes
01:24:05indépendants, donc
01:24:07augmenter nos moyens d'une douzaine
01:24:09de TP. Je pense qu'honnêtement, pour avoir
01:24:11des prévisions de meilleure qualité,
01:24:13ce n'est pas
01:24:15exagéré. D'ailleurs, on pourrait très bien les prélever
01:24:17ailleurs. Je pense que
01:24:19assez naturellement, on pourrait trouver ces
01:24:21TP transférés au Conseil
01:24:23de finances publique. Donc, plus de temps,
01:24:25un mandat élargi, plus d'informations
01:24:27et une augmentation très limitée
01:24:29de nos moyens. Et puis, pour votre autre question,
01:24:31je vous promets que j'y répondrai
01:24:33une fois que j'ai les chiffres en rigueur.
01:24:35Bien.
01:24:39Les moments forts de l'audition
01:24:41de Pierre Moscovici, premier président
01:24:43de la Cour des comptes, entendu par
01:24:45la commission d'enquête de
01:24:47l'Assemblée nationale, qui tente de faire
01:24:49la lumière sur le dérapage du
01:24:51déficit public en 2023
01:24:53et en 2024. Vous pouvez
01:24:55revoir cette séance en intégralité sur
01:24:57lcp.fr. On se retrouve
01:24:59très bientôt pour d'autres moments parlementaires.
01:25:01Ciao, ciao.