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Vendredi 13 décembre 2024, LEX INSIDE reçoit Florent Labrugère (Avocat en droit du Travail) , Victor Omnes (Avocat, De Gaulle Fleurance) et Xenia Legendre (Associée, Hogan Lovells)

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00:00Bonjour, je suis ravi de vous retrouver pour un nouveau numéro de Lex Inside,
00:26l'émission qui donne du sens à l'actualité juridique du droit, du droit et encore du droit.
00:31Au programme de ce numéro, on va parler fraude fiscale et quelle utilisation de
00:36l'intelligence artificielle. Ce sera dans quelques instants avec Zeyna Legendre,
00:41avocate associée chez Hogan Lovells. On évoquera ensuite l'accident du travail
00:47survenu en télétravail avec Florent Labrugère, avocat en droits du travail et enfin on évoquera
00:54le marché des droits audiovisuels sportifs avec Victor Omnes, avocat chez De Gaulle Florence.
01:01Voilà pour les titres, Lex Inside, c'est parti !
01:14On commence tout de suite ce Lex Inside, on va parler fraude fiscale,
01:19quelle utilisation de l'intelligence artificielle avec mon invité Zeyna Legendre, associée au
01:25sein du cabinet Hogan Lovells. Zeyna Legendre, bonjour. Bonjour Arnaud. Alors l'évasion fiscale
01:31coûte entre 80 et 100 milliards d'euros à l'État. Depuis quelques années, une dizaine d'années à
01:38peu près, l'État utilise l'intelligence artificielle pour les contrôles fiscaux.
01:44On va voir ensemble de quelle manière. Tout d'abord, comment l'intelligence
01:49artificielle est-elle utilisée par l'administration fiscale ? Alors effectivement le sujet est super
01:55intéressant parce que dans le contexte actuel de la disette budgétaire, on va dire, et du fait
02:03que la France a déjà le niveau des prélèvements le plus élevé en Europe, la lutte contre la fraude
02:08fiscale se présente comme un outil budgétaire très puissant. Vous avez mentionné le chiffre
02:13de 80 à 100, et certains disent 120 milliards de fraude fiscale. Il se trouve qu'en fait, ce n'est
02:20pas vraiment mesuré en France. Donc on ne sait pas quel est le vrai montant. Mais si effectivement
02:25on parle de 80 milliards, ne serait-ce que même de 50 milliards, j'ai envie de dire, c'est très
02:29exactement le trou dans le budget qu'il faut combler. Et donc ça se présente effectivement
02:33comme un outil très intéressant. Et bien évidemment, la lutte contre la fraude fiscale,
02:40c'est également très important pour ce qu'on appelle le consentement à l'impôt, pour la
02:45cohésion sociale, et bien évidemment pour l'efficacité du budget. L'intelligence artificielle,
02:55qu'est-ce qu'il vient faire là-dedans ? C'est un outil de contrôle fiscal qui est apparu il y a
03:00une dizaine d'années, et qui effectivement présente des capacités de la détection, on va dire, des
03:09comportements qui sont en rupture avec la norme, on va dire. Et bien évidemment, tout le monde se
03:15rue dessus en se disant qu'il y a là-dedans un très beau gisement de l'efficacité du contrôle
03:24fiscal. Ceci étant dit, quand on regarde les statistiques, le résultat des contrôles fiscaux
03:30sont à peu près de 15 milliards de recouvrement. C'est un chiffre stable depuis déjà une bonne
03:37quinzaine d'années, on tombe toujours autour de 15 milliards. L'intelligence artificielle est
03:42utilisée depuis, on va dire, 5-6 ans, et elle représente à peu près 2 milliards sur ces 15
03:49milliards, donc à 15% qui sont dus directement à l'intelligence artificielle. Donc il y a quand
03:55même encore énormément de travail qui est fait par les agents inspecteurs sans vraiment se servir
04:02de l'intelligence artificielle. Sachant que l'intelligence artificielle, ce qu'elle apporte,
04:06c'est surtout des orientations pour la programmation des contrôles fiscaux, c'est-à-dire qu'elle est
04:12vraiment très en amont, où elle permet de détecter des comportements déviants, bizarres, on va dire,
04:19tout d'un coup des ruptures, des comportements normaux, et qui du coup doivent alerter les
04:27agents, les inspecteurs, et les inciter à venir faire des contrôles. Concrètement,
04:32quels sont les avantages de l'intelligence artificielle ? Alors quels sont les avantages de
04:36l'intelligence artificielle ? C'est bien évidemment la possibilité de recouper des données, parce que
04:41la DGFIP, donc la Direction Générale des Finances Publiques, elle possède énormément de bases de
04:47données, donc elle a accès bien sûr à FICOBA, donc la base des données bancaires, ensuite elle a
04:52ses propres déclarations fiscales que les gens font, il y a les données du cadastre, il y a les
04:56données douanières, les données sociales, donc si elle peut recouper les données, c'est là qu'elle
05:01peut en grande masse voir justement les tendances et les déviations qui doivent alerter les agents
05:09et inciter les gens à aller voir ce qui se passe sur le terrain. L'exemple le plus dont tout le
05:16monde parle, bien évidemment, c'est l'exemple des piscines où on a recoupé la base des données des
05:22déclarations cadastrales et les images de Google Maps qui montrent les piscines et que les gens
05:29n'ont pas déclaré. Après ce qui est intéressant, c'est qu'il y a un taux d'échec, finalement un
05:35taux d'erreur plutôt, de l'intelligence artificielle, assez important. Moi j'avais vu un chiffre de 80%
05:44et notamment si on prend par exemple ces histoires des bâtiments et des piscines, par exemple
05:51une piscine qui est enterrée, elle est imposable, mais une piscine qui n'est pas enterrée n'est pas
05:56imposable, mais l'image satellite ne voit pas forcément si elle est enterrée ou pas la piscine.
06:00Pareil pour les bâtiments, par exemple il y a des hangars agricoles qui sont
06:06exonérés, mais l'intelligence artificielle va juste voir un bâtiment et donc elle va envoyer,
06:10elle va recouper et ça va inciter un contrôle qui finalement va s'avérer inefficace.
06:18Donc c'est à prendre avec des pincettes l'intelligence artificielle. Quels sont les défis, les limites
06:23justement de l'intelligence artificielle ? Vous venez en décrire certaines, est-ce qu'il y en a d'autres ?
06:27Oui, alors les limites sont de plusieurs ordres. Premièrement, c'est comme toute
06:34intelligence artificielle qui est basée sur le machine learning, on utilise un peu le passé
06:42pour entraîner les algorithmes. Or les contribuables sont plus inventifs que...
06:48Bien sûr.
06:49Et bien évidemment, ils font autre chose, ils changent de comportement, ils suivent d'autres
06:55chemins et donc ça c'est un défi intrinsèque à l'intelligence artificielle qui ne fait que suivre,
07:03n'est-ce pas ? Donc ça c'est la première chose. Le deuxième défi, il est d'ordre beaucoup plus
07:10sérieux, c'est le flicage, bien évidemment. Et là-dessus, heureusement qu'on a la CNIL en France,
07:17c'est la loi sur la protection des données qui existe depuis très longtemps et qui avait
07:23anticipé presque 30 ans en avance ce qui se passe aujourd'hui et qui empêche de rentrer dans la vie
07:33privée des gens, qui empêche de violer leurs droits fondamentaux, notamment la liberté
07:44d'expression, la liberté des opinions politiques, religieuses, etc. Donc c'est bien là le danger,
07:51c'est que finalement le fisc ait la tendance à vouloir aller par exemple regarder ce que vous
07:58faites sur les réseaux sociaux. C'est très intrusif. C'est très intrusif, il va rentrer
08:02dans votre vie privée d'une manière très forte, certes pour chercher la fraude, mais on sait
08:10toujours qu'on commence par un petit bout avec des meilleures intentions et qu'à la fin, il va
08:16s'installer un régime de flicage et de tyrannie assez puissant. Donc heureusement, il y a des
08:22gardes fous. Il y a des gardes fous, c'est encadré, les données ne peuvent être utilisées qu'à fin
08:27de contrôle fiscal. En aucune manière, on ne peut garder les données qui se rapportent
08:34à des questions d'opinion, à des questions religieuses, des questions d'orientation sexuelle,
08:40etc. Mais une des craintes notamment exprimées par la CNIL, c'est que les gens se sentant en
08:47insécurité, ils vont aussi commencer à se restreindre eux-mêmes sur les réseaux, sur
08:56leur liberté d'expression, etc. Parce qu'ils vont se dire, bon pour l'instant, certes, ce n'est pas
09:00utilisé mais qui sait ce qui va se passer et puis j'ai pas envie que le fisc commence à savoir ce
09:05que je pense à tel ou tel sujet. Pour finir, quelles sont les perspectives d'évolution de
09:10ces techniques d'enquête, on va dire, à disposition de l'administration fiscale ? Vous avez dit qu'il
09:15y a une marge de progression qui est importante. Comment vous imaginez ce développement de l'IA
09:21pour l'administration fiscale ? Je pense que c'est un outil très puissant. Il faut déjà savoir que
09:25presque 50% de contrôles aujourd'hui font suite au travail de l'intelligence artificielle. Donc ça
09:35va aller de plus en plus dans ce sens-là. Ceci tandis que quand on regarde les chiffres, on voit
09:39qu'il n'y a que 15% finalement des redressements qui sont dus à cela. Donc on voit encore que sur
09:44des sujets très sophistiqués, c'est quand même encore l'humain qui compte le plus. Donc je pense
09:50que l'intelligence artificielle aussi joue un rôle préventif très fort parce que quand on sait
09:55qu'on est regardé, on commence aussi éventuellement à moins frauder ou à faire autre chose. Donc ça
10:02aussi, c'est très important. Donc cet impact sur le comportement des personnes. On va conclure là-dessus.
10:06Merci Xenia Lejean. Je rappelle que vous êtes associée au sein du cabinet Hogan Novels. Merci
10:11beaucoup de m'avoir invitée. Tout de suite, l'émission continue. On va parler de l'accident
10:16du travail survenu en télétravail. On commence tout de suite ce Lex Inside. Que se passe-t-il
10:31quand un salarié se blesse en télétravail ? On en parle tout de suite avec mon invité Florent
10:37Labrugère, avocat en droit du travail. Florent, bonjour. Bonjour Arnaud. Merci pour l'invitation.
10:43Avant de rentrer dans le vif du sujet et de parler de l'accident du travail survenu en
10:49télétravail, un sujet qui s'est beaucoup développé depuis la pandémie avec la croissance du
10:54télétravail, on va revenir aux définitions du télétravail et de l'accident du travail. Pouvez-vous
11:02nous expliquer clairement ces définitions ? Oui, effectivement. Depuis 2020, on a eu, on va dire,
11:08une exposition de recours au télétravail. Et cette notion aujourd'hui, elle est bien définie.
11:13Dans le code du travail notamment. Et le télétravail, c'est tout simplement un mode
11:17de travail qui nécessite finalement, au cours duquel le salarié ne va pas travailler dans les locaux de
11:24l'entreprise, mais va travailler en fait dans un entre-endroit, généralement à son domicile,
11:29avec les moyens de communication qui existent aujourd'hui. Notamment les moyens qui sont mis
11:35en avant et donnés par l'employeur, c'est-à-dire un ordinateur et un téléphone professionnel.
11:40Ça, c'est véritablement la définition qui est posée par le code du travail concernant le
11:45télétravail. Et l'accident du travail, là aussi, classiquement, autant défini dans le code de la
11:50sécurité sociale que par la jurisprudence. Pour qu'il y ait un accident du travail, on va dire
11:54qu'il faut trois choses. Premier élément, il faut qu'il y ait un événement brutal et soudain qui
12:00ait entraîné une lésion d'ordre physique ou psychologique à un salarié et donc qu'il soit
12:06survenu au temps et au lieu du travail. Et en fait, pour la jurisprudence, dès lors que l'accident
12:12est survenu au temps et au lieu du travail, il y a une présomption d'imputabilité qui s'applique
12:16et dès lors, en fait, le salarié n'a pas rapporté la preuve d'un lien de causalité entre son accident
12:22et son travail. Alors on va revenir maintenant au sujet du jour. Maintenant qu'on a cette définition
12:29bien en tête, est-ce que l'accident survenu sur le lieu du travail est un accident du travail ?
12:36Alors finalement, ça revient à combiner les deux notions qu'on vient de définir. Et en fait,
12:41il faut savoir qu'aujourd'hui, il y a eu une explosion du recours au télétravail depuis 2020
12:45et qu'il y a vraiment, au niveau de la jurisprudence, il n'y a pas encore de décision de principe qui
12:49encore a été rendue notamment par la Cour de cassation. Mais on commence à avoir de plus en
12:54plus, notamment, de décisions de juridiction du Fonds qui ont été amenées à statuer finalement
12:59sur l'existence d'un accident de travail en télétravail. Et en fait, si on regarde les textes,
13:04finalement, c'est exactement le même régime juridique qui s'applique pour un accident du
13:09travail classique qui est survenu dans les locaux de l'entreprise qu'un accident du travail qui est
13:14survenu sur le lieu de télétravail. Et donc, notamment, finalement, dès lors que l'accident
13:20est survenu sur le lieu de télétravail qui a été déclaré auprès de l'employeur et qu'il est
13:25survenu au cours de l'activité professionnelle du télétravailleur, il va être présumé comme étant
13:31un accident du travail au sens de la législation sur les risques professionnels, donc au sens,
13:35en fait, finalement, de la définition que j'ai donnée, qui est donnée par le Code de la Sécurité
13:39sociale. Alors on va aller un peu plus loin. Quels sont les critères qui permettent de définir qu'un
13:45accident survenu sur le lieu de télétravail est un accident du travail ? Alors, étant donné qu'on
13:52a le même régime juridique, déjà, on va voir un petit peu les critères classiques qu'on retrouve
13:55pour un accident du travail classique qui a lieu dans les locaux de l'entreprise. On va regarder,
13:59notamment, est-ce qu'il y a eu une information immédiate de l'employeur sur la survenance d'un
14:05accident de travail ? Notamment dans la loi, le salarié a un délai de 24 heures pour le déclarer.
14:10On va regarder aussi s'il y a eu une constatation médicale de ces lésions dans un temps proche de
14:16la date de l'accident. Autrement dit, est-ce qu'il est allé voir notamment son médecin traitant le
14:21jour de l'accident ? Et plus particulièrement pour un accident du travail en télétravail,
14:25on va regarder principalement trois éléments. Tout d'abord, si l'accident est bien survenu,
14:30notamment sur le lieu de télétravail qui a été déclaré auprès de l'employeur,
14:34notamment sur le lieu qui figure dans le contrat de travail. On va regarder aussi l'heure à laquelle
14:42il est survenu, notamment s'il est survenu pendant les plages de télétravail. Et dernier élément,
14:48aussi s'il est survenu au cours de l'activité professionnelle du télétravailleur, si ce
14:52dernier notamment n'avait pas interrompu son travail pour un motif d'ordre purement personnel.
14:58Que se passe-t-il si l'accident n'est pas survenu dans les heures de télétravail que vous avez
15:04évoquées ? Justement, si on va dire qu'il est survenu par exemple avant la prise de poste ou à
15:09la fin de la prise de poste, on va considérer que finalement l'accident n'est pas survenu au temps
15:14du travail. Donc finalement, il ne va pas être présumé comme étant d'origine professionnelle
15:19et généralement il ne sera pas reconnu comme étant un accident du travail, tout simplement.
15:23Alors concrètement, pour bien comprendre, est-ce que vous pouvez nous donner des exemples concrets
15:27d'accidents du travail survenus en télétravail ? Alors bien sûr, on va prendre un cas d'école,
15:32typiquement une chute d'un salarié qui survient à son domicile. Si on revient pour un accident du
15:38travail classique, la chute qui survient dans les locaux d'entreprise, si elle est survenue au temps
15:43et au lieu du télétravail, c'est présumé comme étant un accident. On va avoir exactement quasiment
15:48le même raisonnement sur le lieu de télétravail, c'est-à-dire qu'on va regarder notamment,
15:52est-ce que la chute par exemple d'un salarié à son domicile est survenue pendant les plages
15:56horaires de télétravail et également au cours de son activité professionnelle. Comme j'ai indiqué,
16:01on a maintenant quelques décisions finalement de cour d'appel et typiquement pour la chute
16:06d'un salarié à son domicile, par exemple la cour d'appel d'Amiens avait jugé que la chute qui
16:11était intervenue quelques minutes juste après la fin de la journée de travail, finalement l'accident
16:17n'était pas intervenu pendant le temps de travail, donc on n'avait pas été amené à reconnaître un
16:21accident de travail. Donc c'est très strict. Voilà, c'est vraiment, on va regarder finalement
16:25l'heure à laquelle l'accident est survenu et de la même manière, hypothèse inverse, on avait un
16:31accident finalement qui était intervenu pendant les plages horaires de télétravail et là, la même
16:36cour d'appel, elle a reconnu cette fois-ci l'existence d'un accident de travail. Autre
16:40hypothèse particulière aussi, c'était un salarié qui avait commencé sa journée de télétravail sauf
16:46qu'il avait entendu en fait depuis son domicile la survenance d'un accident dans la rue, donc il
16:50avait interrompu son travail, il était sorti de son domicile pour voir finalement ce qui se
16:56passait et en fait quand il était dehors, donc sur la voie publique, il a lui-même été victime d'un
17:00accident. Donc c'est posé la question finalement de savoir si on était en présence d'un accident du
17:05travail ou pas. Là, on était bien dans les plages horaires de télétravail, sauf que autant la CPM
17:09que les juges du fonds, ils ont considéré que le salarié avait interrompu sa mission et que
17:14au moment de son accident, d'une part, il n'était plus sur son lieu de télétravail habituel, même
17:18s'il était à quelques mètres finalement, il était sur la voie publique et deuxièmement, il avait
17:22interrompu sa mission pour des motifs d'ordre non professionnel. Donc là aussi, l'accident finalement
17:28n'a pas été reconnu comme étant d'origine professionnelle. Ce qui veut dire qu'il faut
17:32véritablement un lien entre le travail effectué et l'accident quand il se produit. Effectivement,
17:40c'est-à-dire qu'il faut vraiment que le salarié soit sous l'autorité de son employeur. Après,
17:45s'il fait une chute, par exemple, lorsqu'il va chercher un café parce qu'il quitte son bureau,
17:49là on va considérer par contre que c'est un accident du travail parce que c'est quand même
17:53en lien avec l'activité professionnelle qui n'a pas été interrompue. Pour finir, quelles sont les
17:58obligations de l'employeur en matière d'évaluation des risques pour les télétravailleurs ? Alors,
18:04à l'instar de tout autre salarié, finalement l'employeur va avoir quasiment les mêmes
18:08obligations. Notamment, il va peser sur l'employeur une obligation de sécurité. Il va notamment
18:14devoir finalement évaluer les risques auxquels peuvent être soumis les télétravailleurs. On
18:18peut dire qu'il y en a deux grands types. D'une part, lorsque le télétravail va être mis en place,
18:23il va devoir vérifier notamment la conformité du domicile du salarié, par exemple, notamment par
18:29rapport aux installations électriques, s'il n'y a aucun danger qui pourrait être encouru par le
18:33salarié. Et deuxième risque majeur, c'est surtout le risque d'isolement puisque le télétravailleur
18:38n'est pas sur son lieu de travail. Il faut lui permettre qu'il ait des contacts réguliers,
18:41autant avec sa hiérarchie qu'avec ses collègues de travail. Et que si finalement, il n'y a pas
18:45cette obligation de prévention qui est respectée par l'employeur, et bien derrière, ça peut amener
18:50justement à la survenance d'un accident de travail, voire même à ce que l'employeur
18:53voit sa responsabilité engagée au titre d'un accident. On va conclure là-dessus. Merci
18:59Florent Labrugère. Je rappelle que vous êtes avocat en droit du travail. C'est ça, exactement.
19:04Tout de suite, on continue l'émission. On va parler marché des droits audiovisuels sportifs.
19:17On poursuit l'émission. On va parler du marché des droits audiovisuels sportifs avec mon invité
19:26Victor Omnes, avocat chez De Gaulle Florence. Victor Omnes, bonjour. Bonjour. Le marché des
19:32droits audiovisuels sportifs prend de l'ampleur. Il y a de plus en plus de concurrence. C'est un
19:38secteur économique en pleine croissance. On va en parler en détail ensemble. Pour comprendre
19:43l'ampleur du phénomène, quelle part représentent les droits télé dans le financement du sport en
19:49France ? Une part importante. Déjà, de quoi parle-t-on ? On parle évidemment de la vente par
19:54les organisateurs des compétitions sportives, de leurs droits de diffusion sur ces compétitions
19:59qu'elles organisent à des chaînes de télé et plus récemment à des plateformes de streaming,
20:04les plateformes over-the-top comme par exemple Dazone ou encore Prime Vidéo qui a acquis il y a
20:10deux ans les droits de diffusion de Roland Garros. Pourquoi ce marché est important ? Parce
20:15qu'effectivement, il contribue à financer le sport français dans son ensemble. Premièrement,
20:20un financement bien sûr du sport professionnel puisqu'on estime par exemple pour le cas du
20:25football qu'environ 30% du budget annuel des clubs est justement issu de la session et des
20:30revenus de la session des droits du visuel sportif et également le sport dans son ensemble,
20:36l'écosystème du sport grâce notamment à la taxe buffée qui est un mécanisme de solidarité et au
20:41terme desquels 5% des revenus générés par la session de ces droits du visuel sportif sont
20:46redistribués aux sports amateurs dans son ensemble. C'est important aussi pour le développement du
20:50sport amateur ? Exactement, voilà, l'enjeu est d'importance puisque justement il contribue à
20:56grande hauteur au financement du sport dans son ensemble, du sport français bien sûr. Alors c'est
21:00un marché qui attise les convoitises, vous avez cité une grande plateforme, il y en a d'autres,
21:05quelles sont les tendances de l'évolution de ce marché ? Alors chez De Gaulle, on a justement
21:10publié récemment en septembre 2024 une analyse justement de ces tendances et on remarque notamment
21:16pour les sports les plus populaires en France et donc celles qui attirent le plus de revenus qui
21:20sont le rugby et le football, une tendance effectivement à la croissance, en tout cas à la
21:25hausse, notamment pour le rugby. On remarque une croissance constante due notamment à la poursuite
21:32du partenariat avec Canal+, qui continue à investir dans ce sport, un sport qui attire
21:36d'ailleurs de plus en plus de téléspectateurs et donc ce partenariat a été prolongé en 2024
21:42jusqu'à 2032. Pour le football c'est un peu différent puisqu'en fait on est passé d'une
21:47croissance exponentielle de la valeur des droits entre la fin des années 90 et le milieu des années
21:532010, puisqu'on est passé de 100 millions d'euros par an à 726 en 2016. Une belle croissance. Une
22:00belle croissance bien sûr mais à la suite de cette croissance exponentielle, on remarque depuis lors
22:06une triple baisse qui s'explique par plusieurs motifs évidemment mais le premier c'est bien sûr
22:12la fin du partenariat avec Canal+, qui ne souhaite plus investir. Un diffuseur officiel pendant de
22:17nombreuses années. Absolument et qui pour diverses raisons a choisi de ne plus investir dans le
22:23football français, préférant d'autres championnats, préférant également d'autres sports, on a parlé
22:28du rugby à l'instant, et également par une certaine difficulté financière des principaux
22:32concurrents de Canal+, sur ce marché, qui sont Bein Sport, bien sûr Altis qui avait pendant un
22:38certain temps investi avec RMC Sport dans ces droits là, et bien en étant en difficulté financière
22:44évidemment ils ont une moindre tendance à investir des sommes conséquentes et donc la finalité de ça
22:50et la fin de ça c'est justement cette triple baisse marquée en 2024 par l'attribution des droits à
22:56Dazone et Bein Sport pour seulement 500 millions d'euros. Seulement 500 millions d'euros puisque
23:00c'est environ 50% inférieur à ce qui avait été attendu par les dirigeants de la ligue de football
23:05professionnel. Alors on sait en plus que pour le football il y a eu l'affaire Mediapro, il y a eu
23:09un certain nombre de difficultés pour les opérateurs pour essayer d'avoir une offre et de
23:14satisfaire justement cette offre devant les téléspectateurs et de fournir des services de
23:22qualité. Absolument, Mediapro évidemment est une affaire cardinale de ce secteur puisque
23:28Mediapro donc était un diffuseur espagnol qui avait acquis les droits de la ligue 1 contre 800
23:32millions d'euros par an, qui était une somme astronomique et surtout une somme record.
23:35Finalement au bout de quelques mois fait défaut, c'est à dire qu'il n'est plus en capacité de
23:39payer et cela évidemment a créé des remous considérables dans ce marché et pour le secteur
23:43du sport en son ensemble. Notons en plus que de cette défaillance sur la crise de covid qui a
23:48entraîné l'arrêt du championnat de ligue 1 a évidemment mis en péril le financement du sport
23:54professionnel, du football en premier lieu, mais comme on l'a expliqué tout à l'heure,
23:57également de l'intégralité de l'écosystème du sport. Alors on a vu les enjeux économiques,
24:02voyons maintenant les aspects juridiques. Quel est le cadre juridique de ce marché ? Alors le
24:07cadre juridique, il faut noter que ce marché est fortement encadré par les législateurs. Les
24:12règles sont prévues dans le code du sport. Il y a trois catégories ou trois régimes importants
24:17je dirais pour ce marché. C'est premièrement le fondement du droit de propriété que détiennent
24:22les organisateurs des manifestations sportives, principalement les fédérations. Donc ce droit
24:27de propriété qui est consacré par le code du sport. Ensuite dans un second temps, c'est les
24:32mécanismes légaux pour protéger justement ce droit de propriété, notamment le dispositif de
24:38lutte contre le streaming illégal. Et dans un troisième temps, c'est le troisième régime
24:42juridique important, c'est évidemment l'immixion du droit de la concurrence et des règles de
24:48concurrence dans justement ce marché des droits individuels sportifs. Alors vous avez évoqué le
24:53streaming illégal qui s'est développé notamment face à la hausse des coûts d'abonnement, beaucoup
24:59de piratages qui se sont développés. Comment les opérateurs luttent-ils contre le streaming
25:08illégal ? Quelles sont les principales mesures mises en oeuvre ? Alors vous avez raison, le phénomène
25:14global est très important. On estime le manque à gagner pour justement le sport français à
25:19290 millions d'euros, ce qui est considérable, représente environ 15% du marché global.
25:24Le législateur, pour tenter d'endiguer ce phénomène, a institué un dispositif légal ad hoc pour
25:30justement l'endiguer. Alors comment ça fonctionne ? Le détenteur des droits ou le diffuseur
25:36va saisir en urgence le président du tribunal judiciaire pour que ce dernier prononce une
25:41ordonnance pour bloquer justement les sites pirates qui auraient été identifiés. Parce qu'en effet le
25:45préjudice, la problématique, c'est que finalement, si vous voulez, l'événement sportif est diffusé
25:50en direct. Dès lors, le préjudice est immédiat et surtout il devient irréparable à la fin de la
25:55rencontre ou à la fin de l'événement. Par conséquent, il faut donc bloquer le plus vite possible ces
25:58sites illégaux. Et dans un second temps, on a un phénomène qu'on appelle les sites miroirs. En
26:03fait, les pirates vont créer et dupliquer à l'infini, en utilisant des adresses IP distinctes,
26:09justement ce canal de diffusion illégal. Et donc du coup, pour tenter finalement de contourner en
26:14fait les mesures de blocage. Et donc le dispositif légal pour tenter d'endiguer ce deuxième phénomène,
26:18si vous voulez, va en fait permettre au diffuseur ou au détenteur des droits d'aller directement
26:22devant l'ARCOM. L'ARCOM qui est donc l'autorité de régulation en charge de cette problématique,
26:27sans avoir à repasser par la case tribunale, pour justement bloquer ou déférencer les sites qui
26:32n'auraient pas été identifiés dans un premier temps. D'accord. Et aujourd'hui ça marche ces
26:35techniques ? Est-ce qu'on arrive à bloquer les sites assez rapidement ? Tout est relatif. Premièrement,
26:43l'ARCOM se félicite et c'est plutôt globalement un succès. Elle estime en 2024 que 5000 noms de
26:49domaines auraient été bloqués grâce à ce dispositif. Donc c'est quand même un relatif
26:52succès. Mais bon, le phénomène n'est pas endigué. Comme on atteste, la dernière rencontre,
26:57un peu la rencontre, on va dire vitrine du championnat de France de football, le match
27:00au MPSG, qui aura été regardé par 55% des téléspectateurs en utilisant des contenus pirates.
27:06D'accord, donc ça laisse une marge de manœuvre encore. Exactement. Pour arriver vraiment à
27:10contenir ce piratage. Le problème est toujours d'actualité, il n'a pas été tout à fait endigué.
27:14Pour terminer, en quelques mots, on l'a dit, c'est un marché très concurrentiel. Comment le droit de
27:21la concurrence encadre-t-il ce marché ? Alors, le droit de la concurrence encadre ce marché,
27:26tout simplement parce que, comme on l'a expliqué un peu, l'organisateur de manifestations sportives
27:31vend de manière centralisée le championnat dans son intégralité. Dès lors, ça pose un problème
27:35en droit de la concurrence, c'est-à-dire un risque, mais évidemment un monopole, dans lequel se
27:39retrouve l'organisateur de la manifestation sportive en amont, mais également en aval,
27:44puisqu'il va allouer à un diffuseur potentiellement l'exclusivité des droits. Donc des problèmes de
27:49concurrence. Cependant, l'autorité de la conscience a validé cette vente centralisée au motif qu'il
27:56permettait des externalités positives, à la condition bien sûr de respecter un certain nombre
28:01de garde-fous, notamment l'organisation d'un appel d'offres à chaque attribution des droits. Eh bien,
28:07cela fonctionne, c'est assez bien encadré. On note cependant une problématique, c'est qu'une fois,
28:14la loi ne prévoit pas le cas où l'appel d'offres est non concluant. Si l'appel d'offres n'est pas
28:20concluant, le détenteur des droits peut négocier de gré à gré, et ça a conduit par le passé à un
28:26certain nombre de contentions, notamment récemment la contention entre Canal+, et la Ligue de
28:29Football Professionnel. On va conclure là-dessus. Je vous remercie Victor Romnez, je rappelle que
28:34vous êtes avocat chez De Gaulle Florence. Merci beaucoup. C'est le moment de conclure l'émission.
28:38Merci à toutes et à tous pour votre fidélité. Restez curieux et informés. À très bientôt sur
28:43Be Smart For Change.

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