• il y a 1 heure
Avant d’être photographe, il a été coiffeur, une expérience qui l’a façonné, notamment sur son rapport à l’image. Aujourd'hui, il a shooté Angelina Jolie, Pharrell, Zidane, Lana Del Rey...

On a passé la journée avec le photographe et directeur artistique Mathieu Cesar, qui vient tout juste de sortir un livre, "Chroniques Terriennes" aux éditions delpire & co, qui rend hommage à ceux qu’il a pu photographier.
Transcription
00:00La photo, si je ne la fais pas en deux minutes et je te dis ça même pour des grosses pubs
00:06que j'ai faites, c'est un clic et c'est la première en général qui est la meilleure.
00:10Le plus important, c'est la discussion que tu vas avoir avec la personne avant et c'est
00:14vrai que du coup, quand on se voit, quand on est au moment du clic, il y a une confiance
00:18qui s'est instaurée entre les deux et ça, c'est 90 % du travail.
00:24Je reçois des messages toute la journée sur Instagram ou autre, quel objectif tu utilises,
00:30quel appareil tu utilises, on s'en fout.
00:32L'important, c'est si tu prends des portraits, quelle relation tu vas instaurer avec la personne
00:39en face.
00:40Et puis de toute façon, rien ne peut remplacer un moment qu'on passe avec quelqu'un.
00:43Moi, c'est la seule chose qui m'intéresse sur un shooting, c'est très peu la photo.
00:47C'est le moment, est-ce qu'on va passer un beau moment, est-ce que je vais en apprendre
00:52quelque chose, est-ce que la personne va repartir avec autre chose ?
00:55On est où là ? On est dans la tour Montparnasse, infernale.
01:00On est là parce que tu viens dans mon bureau.
01:04Si on fait le pont entre la coiffure et la photographie, elle passe entre deux par la
01:12vidéo.
01:13J'avais fait un petit clip, un court métrage sur mon frère qui était à l'époque danseur
01:20à l'Opéra de Paris.
01:21Et cette opportunité, elle s'est faite dans ce salon.
01:23Il y avait une cliente qui s'appelait Célia, qui travaillait pour les cinémas MK2.
01:28Et moi, je lui faisais ses shampoings à cette cliente, je lui faisais peut-être même
01:33pas ses brushings, mais je m'entendais très bien avec.
01:35Et un jour, je lui ai dit, tiens, regarde, je fais un petit film comme ça pour rigoler
01:39sur mon frère.
01:40Et dis-moi ce que tu en penses.
01:43Et puis elle m'a rappelé, elle m'a dit, écoute, je l'ai montré à mon patron.
01:47Ils m'ont dit, on adore le film, on te le rachète, on va le diffuser dans tous nos cinémas.
01:51Et ça a été un peu le début, parce que grâce à ça, j'ai eu un agent qui m'a
01:57représenté.
01:58Et je me suis rendu compte à l'époque que je n'arrivais pas à retranscrire ce que
02:05j'avais en tête avec la qualité au niveau que je me mettais.
02:10Et je me suis rendu compte que la photographie m'offrirait ça.
02:14Pendant un an, j'ai contacté toutes les agences de mannequins de Paris en leur demandant
02:21s'ils pouvaient me confier des modèles pour m'entraîner ou faire des images.
02:27Et route, c'est un an, j'ai eu la chance de faire une expo qui était dans la cour
02:34du Palais Royal.
02:35Alors ici, on est chez Coiffeurs, rue Montorgueil, avec Eric, qui a été mon premier et seul
02:43employeur de ma vie.
02:44Pas mal !
02:45Au collège, je n'étais pas un mauvais élève et c'est ça que des fois je me dis
02:48en France, il y a des trucs un peu… j'avais décidé que je n'irais pas au lycée.
02:52Et j'avais le choix entre la voie de garage, mécano, peintre, mais ça c'était déjà
03:01ma passion.
03:02Donc je n'avais pas le besoin ni l'envie de faire ça de ma vie, ou la restauration
03:09ou la coiffure.
03:10Et je me suis dit, la coiffure, ça doit être sympa.
03:13Je venais de Picardie, de la baie de Somme, et ma maman qui avait une boutique de livres
03:18avait une de ses employées et sa fille travaillait dans ce salon.
03:23Donc elle m'a dit, mon fils, si tu deviens coiffeur, tu vas aller à Paris dans le meilleur
03:29salon de coiffure.
03:30Et c'est comme ça que je suis arrivé ici.
03:32Et je me souviens, j'avais 15 ans et demi.
03:37Moi ce que je retiens, c'est que tu n'as pas choisi la coiffure en dépit de mauvaises
03:42notes, ou tu avais un parcours scolaire normal, mais tu voulais une indépendance, bouger,
03:49monter sur Paris, comme on dit, ce que je retiens.
03:52Et moi je me suis un peu reconnu là-dedans parce que je viens d'Alsace.
03:55Et donc je me suis dit, tiens, ce jeune qui vient de province, il veut monter à Paris,
03:58il veut de l'indépendance, il est tout jeune, mineur, et tu viens toujours te faire coiffer
04:02ici.
04:03C'est ça qui est drôle.
04:04Je viens toujours me faire coiffer ici.
04:05Et pourquoi tu viens te faire coiffer ici ?
04:06Parce que je me sors de la maison.
04:07Je sais pas si cet endroit, c'était une ancienne banque ou un truc d'assurance, mais c'est
04:13assez marrant.
04:14Parce que d'ici, tu as l'impression que tu peux contrôler un peu la ville comme ça.
04:20Quand on me demande ce que je fais dans la ville, je mets toujours un petit temps à
04:24répondre parce que, donc je dis photographe, et en même temps la photographie, c'est tellement
04:31peu comparé à Vesemaine, à ce que ça représente.
04:34Moi, ce qui m'intéresse, c'est de faire de la poésie, de multiplier les choses sur
04:48plusieurs formats, sur des trucs durs, concrets.
04:52Ça peut être dessiner une caravane, dessiner une voiture.
04:57J'ai de plus en plus l'envie de sortir des bouquins.
05:03Je crois que je vais en faire de plus en plus et je vais me forcer même à en faire parce
05:07qu'avoir un livre dans les mains, tourner les pages et les voir imprimés, c'est quand
05:12même un autre délire.
05:14Voilà, c'est la direction artistique en général qui m'intéresse le plus.
05:19Et puis, c'est surtout de ne pas se brider à rien.
05:22Moi, quand j'ai commencé, je savais, je n'ai jamais su que j'allais être photographe,
05:28je n'ai jamais su ce que j'allais faire et je ne sais toujours pas ce que je vais faire.
05:32Je n'ai pas de plan de carrière, zéro.

Recommandations