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Terres de Mission reçoit l'abbé Michel Viot qui présente son dernier livre, co-écrit avec Yohan Picquart : "L'Eglise au risque de la foi" (Via Romana).
Puis, Philippe d'Iribarne, directeur de recherches au CNRS, discute de son dernier livre : "Au-delà des fractures chrétiennes" (Salvator).
Enfin, l'abbé Michel Ouattara, prêtre ivoirien et docteur en droit canonique, évoque sa thèse sur "La basilique" (Cerf).
Transcription
00:00La liberté a tout pris, le compte à arbour est lancé.
00:30La liberté a tout pris, le compte à arbour est lancé.
01:00La liberté a tout pris, le compte à arbour est lancé.
01:11La liberté a tout pris, le compte à arbour est lancé.
01:21Bonjour chers amis téléspectateurs,
01:23et normalement je devrais vous souhaiter aujourd'hui une très belle fête de l'immécaléconception,
01:28mais comme nous sommes le deuxième dimanche de l'Avent,
01:30l'immécaléconception est décalée, si je puis dire.
01:33Au programme aujourd'hui, d'abord bienvenue dans cette émission Terre de Mission,
01:38l'émission religieuse de TV Liberté.
01:41Au programme aujourd'hui, nous allons discuter avec l'abbé Michel Vieux
01:44du dernier ouvrage qu'il vient de publier, l'Église au risque de la foi.
01:48Puis nous parlerons avec le professeur Diri Barne
01:51des fractures contemporaines dans l'Église.
01:54Et enfin, avec l'abbé Michel Boitara, par Skype,
01:57nous allons parler de ce que c'est qu'une basilique
02:00et l'actualité, la situation canonique des basiliques.
02:17Nous retournons sur le plateau de Terre de Mission
02:19et j'ai le plaisir d'accueillir de nouveau l'abbé Michel Vieux.
02:21Bonjour monsieur l'abbé.
02:22Bonjour.
02:23Nous sommes la semaine dernière à la même place
02:25pour parler de l'arrivée au Etat de Notre-Dame.
02:27Aujourd'hui, je voudrais qu'on parle de votre livre,
02:29votre dernier livre, que vous avez publié avec Johan Piccard.
02:33Comme le précédent, celui-ci s'appelle
02:38L'Église au risque de la foi,
02:40le précédent avait été à propos de la crise des abus
02:44et notamment du rapport de la SIAZ.
02:48Et ce nouvel opus touche assez clairement à cette question.
02:54Pourquoi revenir sur le sujet ?
02:56Je reviens sur le sujet parce que, à propos des abus,
03:00on a proposé, la commission a proposé des solutions
03:04qui étaient hors de sa compétence,
03:06c'est-à-dire des solutions doctrinales
03:09qui ne pouvaient absolument pas aller avec la doctrine catholique.
03:16C'est la raison pour laquelle, je dis à notre grand regret,
03:20nous avons dû consacrer une quarantaine de pages
03:23à ce qui était proposé,
03:27en particulier par Mme la Présidente de la COREF,
03:31Véronique Margron.
03:33Mais nous avons eu un peu la stupeur de constater
03:39que ces propositions qui étaient faites suite aux abus,
03:44elles existaient déjà sous la forme d'un livre de Mme Margron,
03:49publié un an avant que nous ayons publié le rapport sauvé.
03:53Alors, vous voyez, on a vraiment l'impression qu'on s'est servi, je maintiens.
03:58Et donc, ça explique aussi l'augmentation des chiffres,
04:01car c'est là-dessus que nous n'étions pas d'accord.
04:03Nous n'avons jamais dit qu'il n'y avait pas eu d'abus.
04:05J'ai lu les témoignages.
04:07Mais cette exagération des chiffres,
04:10c'était destiné finalement à nous faire avaler des réformes
04:17qui étaient en fait des révolutions.
04:19Et qui attendaient à la structure même de l'Église.
04:22Voilà, qui attendaient à la structure même de l'Église,
04:25à la structure hiérarchique,
04:27et qui se servait de l'initiative du Pape sur la synodalité
04:34pour renverser complètement le problème au niveau de la notion hiérarchique.
04:39C'est-à-dire que la synodalité chez les catholiques, c'est tout à fait possible,
04:43mais ce n'est pas dans le même sens que les protestants.
04:46C'est ça qu'il faut bien comprendre.
04:48Parce que le pouvoir ne vient pas par le bas.
04:50C'est la raison pour laquelle, en 1905,
04:52le Pape n'a pas accepté les associations diocésaines,
04:55les associations cultuelles locales,
04:58mais qu'on a fait des diocésaines en 1905.
05:01Il fallait que l'autorité à l'Église enseignante soit la présidente par structure.
05:05Et que l'Évêque préside l'association diocésaine.
05:08Et qu'on ne mette pas par terre les hiérarchies.
05:10Or, là, on mettait par terre tout de même la hiérarchie,
05:15parce que c'était la base.
05:17Surtout, les femmes.
05:18Comme si la présence des femmes suffisait à arrêter les abus.
05:26Je ne sais pas où vivent ces gens-là,
05:28mais ça fait un moment que je suis dans l'Église.
05:31Les femmes font tout dans l'Église.
05:34Depuis très longtemps.
05:36Bon, depuis plus de 20 ans, 30 ans.
05:39Bon, ça n'a pas empêché qu'il y ait des abus.
05:42– C'est clair.
05:43– Bon, donc c'est pas la question.
05:45Le fait aussi que les prêtres se marient
05:48n'est pas un remède contre la pédophilie.
05:51Je vous l'ai dit, j'ai été pendant 10 ans mené de prison.
05:54J'ai eu des pédophiles en prison.
05:56Et c'était des gens qui étaient ou mariés, ou avec une compagne.
05:59Et leurs victimes étaient les enfants de la compagne,
06:01et je crois même les leurs.
06:03Donc, il ne convient pas de nous raconter cela.
06:05– Bien sûr.
06:06Alors, cela dit, le cœur du sujet de cet ouvrage
06:09n'est pas la crise des abus.
06:11– Non, c'est proposer le risque de la foi, justement.
06:15Le risque de la foi, c'est de revenir à la tradition.
06:19Là, on fait de l'histoire de l'Église,
06:22comme le propose le Saint-Père.
06:25Et puis de puiser justement dans cette tradition
06:29un certain nombre d'éléments
06:31qui peuvent toujours être parlants,
06:33notamment au niveau de la Nouvelle Évangélisation.
06:37Je reprends au fond, nous reprenons avec Anne Piccard,
06:41ce qui avait été le désir de Benoît XVI
06:44pour célébrer l'anniversaire de Vatican II
06:48et l'anniversaire du catéchisme de l'Église catholique
06:52sur la Nouvelle Évangélisation en 2012,
06:54avec son document porte-affilée,
06:56mais qui n'a pas été malheureusement beaucoup suivi.
06:59Je consacre, nous consacrons de longs moments à étudier la messe.
07:05– Qui est quand même le cœur de la vie de l'Église.
07:07– Voilà, parce que je crois qu'il faut être quand même bien conscient
07:10de la pauvreté de l'enseignement sur la messe à l'heure actuelle
07:18et de ce que savent les gens de la messe.
07:20Nous nous en rendons compte, par exemple,
07:23au moment des obsèques ou des services funèbres
07:26où on vous demande une messe sans communion,
07:31où on vous dit à la fin d'une bénédiction
07:34votre messe était très bien,
07:37vous voyez une confusion totale.
07:40Mais c'est de la faute à qui ça ?
07:42C'est de notre faute à nous.
07:43– Oui, c'est l'Église enseignement qui n'a pas fait son boulot.
07:45– Parce que nous disons, c'est pareil,
07:47et puis souvent on rechigne à célébrer la messe
07:50et justement le caractère propitiatoire et sacrificiel de la messe
07:54est quand même mis de côté.
07:56– C'est clair.
07:57– Et ce n'est pas la faute de Vatican II,
07:59c'est parce qu'on a placé les prêtres
08:04dans une sorte de mentalité protestante.
08:08– Oui, d'animation de la communauté.
08:09– Et d'animation de la communauté,
08:10où le prêtre est le président de la communauté,
08:13comme le rappelait l'autre jour dans une émission,
08:15où un pasteur parlait du culte,
08:18et il en parlait très bien d'ailleurs,
08:20c'était tout à fait ça le culte protestant,
08:22mais il agissait au nom de la communauté.
08:24– Mais ce n'est pas le culte catholique,
08:25le culte catholique il agit aussi, en même temps,
08:28il agit au nom de Dieu.
08:29– Mais au nom du Christ, voilà,
08:31et c'est ça, le prêtre qui agit,
08:36en lui est place du Christ tête, c'est fondamental.
08:41– Bien sûr.
08:42– Et donc, d'expliquer ce que c'est que la messe
08:45me paraît fondamental, le baptême aussi,
08:48et alors là, j'ai expliqué aussi l'ancien rite,
08:53et l'intérêt de l'ancien rite sur le plan pédagogique.
08:59– Oui, bien sûr.
09:00– Je conseillerais même d'ailleurs de le dire en français,
09:03pour qu'on puisse vraiment le comprendre,
09:07et ce rite du baptême, pour les adultes,
09:12comme pour les enfants, est tout de même beaucoup plus parlant.
09:16Un seul exemple, parce que le temps est bref, les exorcismes.
09:20– Bien sûr.
09:21– Nous vivons dans un monde qui baigne dans l'espèce d'occultisme,
09:24de goût pour le gothique, le diable, etc.
09:29Bon, il me paraît important que les exorcismes
09:34retrouvent vraiment leur place dans la liturgie du baptême.
09:38– Bien sûr.
09:39– Alors, comprenons-nous bien, ils y sont à la liturgie moderne.
09:43– Oui, bien sûr, ils sont discrets.
09:44– Mais ils sont trop discrets, et ils n'ont pas cette forme impératise
09:49qu'ils doivent avoir pour frapper.
09:53– Merci beaucoup, M. Lavey.
09:54Donc, je rappelle père Michel Viau, Johann Piccard,
09:57L'Église au risque de la foi.
09:58Il y a une très belle préface du cardinal Muller, d'ailleurs.
10:01C'est paru chez Via Romana, et c'est un livre qui coûte 19 euros.
10:04Merci, M. Lavey.
10:05– Merci.
10:06– Bien, nous revenons sur le plateau de Terre d'émission.
10:19J'ai le plaisir d'accueillir le professeur Philippe Girival.
10:21Bonjour, professeur.
10:22– Bonjour, monsieur.
10:23– Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation.
10:25Vous venez de publier, au-delà des fractures chrétiennes,
10:28alors juste un petit mot de présentation.
10:30Vous vous compléterez éventuellement, mais vous êtes sociologue.
10:34Vous avez écrit plusieurs ouvrages sur ce thème-là, sur le travail,
10:38sur l'islamophobie, qui est un sujet intéressant par ailleurs.
10:44Et là, vous parlez d'au-delà des fractures chrétiennes,
10:47et c'est pour ça que je voulais vous recevoir ici.
10:49C'était en substance, je déflore évidemment un peu le sujet,
10:54mais l'idée c'est, plus on va vers le communisme,
10:57moins on est capable de discuter entre catholiques.
10:59J'exagère à peine l'idée générale.
11:02Est-ce que vous pourriez un peu dire,
11:04pourquoi est-ce que vous avez eu l'idée d'écrire ce livre ?
11:08– Je ne sais pas s'il a un lien avec le communisme.
11:12Au départ, j'ai été très choqué, je dois dire,
11:16par la virulence des attaques réciproques entre catholiques,
11:22à une époque quand même où le monde catholique n'est pas dans un état…
11:27– Pas vraiment en situation de domination.
11:29– Et on pourrait penser que… voilà.
11:32Et le petit élément déclencheur, je dois dire,
11:36a été une tribune publiée dans Le Monde,
11:40sur le fait que je crois, aux dernières élections présidentielles,
11:4440% des catholiques ont voté pour des partis souverainistes.
11:49– D'accord.
11:50– Et l'auteur de la tribune déclarait que pour lui,
11:55c'était bien plus grave que la perte globale
11:59de crédit de l'Église et du christianisme.
12:02– D'accord.
12:03– Que c'était une perversion radicale du christianisme.
12:07– Le message avant Jésus.
12:08– Christian Delorme, enfin, dont il est une figure… voilà.
12:13Alors, j'ai trouvé ça, je dois dire, quand même un peu…
12:17voilà, enfin, on peut ne pas être du tout d'accord.
12:19– Bien sûr, bien sûr.
12:20– On peut ne pas être du tout d'accord.
12:21Mais de là à dire cela, et au même époque,
12:25on avait les propos du carnéal Sarah,
12:27quand même un peu durs, disons, dans l'autre sens,
12:31et j'ai voulu chercher à comprendre.
12:34J'ai cherché à comprendre, ça c'était donc il y a deux bonnes années,
12:38et je me suis donc plongé à la fois dans ces propos,
12:45disons combatifs, mais pas essentiellement là-dessus.
12:49Il me semble, au fond, qu'à partir de là,
12:51à partir de ce thème, si vous voulez,
12:53les points les plus essentiels sont, je dirais,
12:58dans un premier temps, les difficultés du magistère.
13:01J'ai été frappé, si vous voulez,
13:03en me replonchant dans toute la littérature,
13:06disons, les encycliques, etc.,
13:08par quand même la difficulté du magistère
13:11à se situer sur une série de questions, disons, difficiles.
13:15Et puis, encore plus fondamentalement,
13:19au fond, la question, qu'est-ce que ça veut dire d'être chrétien ?
13:23Et il me semble, si vous voulez,
13:25qu'au fond, ces conflits, ces hésitations,
13:30sont liés au fait que ce n'est pas si clair que ça,
13:33ce que ça veut dire d'être chrétien,
13:35et que du coup, voilà, j'ai essayé de comprendre,
13:42au fond, à travers cette confrontation,
13:47si vous voulez, entre le message du Christ,
13:51l'Évangile et le monde tel qu'il est actuellement,
13:54c'est-à-dire la société post-moderne, etc.,
13:57au fond, en quoi ils étaient,
14:01pouvaient se retrouver à certains égards,
14:04l'un pouvait exercer une certaine séduction,
14:07la post-modernité sur les chrétiens,
14:10et en même temps, en quoi ils étaient vraiment très profondément différents.
14:13Je crois que c'est de saisir cet ensemble
14:17de proximité et de différence
14:20qui a été un peu le cœur de mon travail.
14:22– D'accord, et alors,
14:24comment est-ce que vous synthétiseriez cette idée ?
14:28Est-ce qu'il y a la place pour une existence,
14:33j'allais dire sereine,
14:35alors évidemment, ça sera toujours un peu avec conflits,
14:37mais disons, est-ce qu'il y a la place
14:41pour l'affirmation tranquille du message évangélique
14:44dans la société post-moderne ?
14:46Où est-ce que ce message évangélique est condamné
14:50à être soit un message parmi dix mille autres,
14:54soit quelque chose d'autoritaire qui n'est plus audible aujourd'hui ?
14:58– C'est un peu, si vous voulez, un signe de contradiction.
15:01Au fond, c'est le cœur de la post-modernité.
15:06C'est, au fond, de dire que toutes les différences
15:11entre les états de vie, les cultures, les religions,
15:15les nations, etc., n'ont pas plus de sens
15:18et pas plus de portée que ce qu'était,
15:21cher Abelay, la différence entre les gros boussiens
15:24et les petits boussiens.
15:26Du coup, et que de affirmer,
15:29alors chacun peut très très bien affirmer
15:31qu'il aime bien ce qu'il fait,
15:33que les chrétiens s'affirment qu'on aime bien être chrétien,
15:35que les musulmans aiment bien être chrétien,
15:37les juifs, les bouddhistes, les chamanistes ou n'importe qui,
15:41mais de commencer à dire, quand même,
15:43qu'on apporte quelque chose.
15:45– Qu'on pense que ça a quelque chose à voir avec la vérité.
15:47– Voilà, voilà, cette notion de vérité, si vous voulez,
15:51et de dire non, il ne doit pas y avoir d'affirmation de vérité,
15:55il y a du dialogue, si vous voulez.
15:57On doit dialoguer entre pairs, entre gens
16:01partie du fait que ce que tu dis vaut autant que ce que je dis.
16:07Et réciproquement, on est vertiginaires.
16:11Alors à partir de là, en même temps, il faut bien voir,
16:15si vous voulez, que la post-modernité est en crise.
16:17– Oui, c'est clair.
16:19– Que finalement cette croyance qui a émergé
16:23après la seconde guerre mondiale,
16:25qu'on allait construire un monde nouveau,
16:29avec un homme nouveau qui aurait dépassé tous les antagonismes,
16:33justement des nations, des cultures, des religions, etc.,
16:37auquel on a cru, et l'Église a cru,
16:41j'ai été frappé en relisant le Diomètre Spèce,
16:45par le parfum, disons, d'optimisme.
16:49– D'optimisme, et de messianisme quasiment.
16:51– Oui, que les sociétés se rapprochaient,
16:55que les religions entraient en dialogue, etc.
16:57Et quand on voit, si vous voulez…
16:59– Et quand on lit ça 40 ans plus tard, ou 50 ans plus tard,
17:01c'est vrai que ça paraît très étrange.
17:03– Voilà, c'est un peu terrible.
17:05Et on voit bien, si vous voulez, à travers les processus politiques,
17:09ne serait-ce l'évolution des institutions européennes,
17:13l'évolution de Trump, etc.,
17:15au fond, tout c'est que ce projet est en crise.
17:19Et que donc, il me semble qu'il y a une place,
17:23enfin, que la question se pose, quand un ancien monde
17:27un peu disparaît, tel est le nouveau monde qui va apparaître.
17:31Donc ça, vous connaissez le fameux propos de Gramsci,
17:35l'ancien monde des plus, le nouveau monde pas encore,
17:37et entre les deux surgissent des monstres.
17:39Et que donc, la question, c'est, qu'est-ce qui va ressortir de ça,
17:45et qu'est-ce qu'on peut proposer ?
17:47Parce qu'au fond, à la fin du communisme,
17:49on avait sur étagère le modèle libéral.
17:53Et au fond, la fin du communisme a été…
17:55– Tout le monde l'a utilisé à fond.
17:57– Tout le monde l'a utilisé à fond.
17:59Mais là, on n'a plus grand-chose sur étagère.
18:03Et on voit bien que, dans les projets qui se présentent en alternatif,
18:09le projet Trump, le projet Mélanie, le projet Orban,
18:15le projet Le Pen, etc.,
18:17ce ne sont pas vraiment les mêmes projets en ce qui concerne,
18:23disons, la gestion de la cité.
18:25On est quand même beaucoup dans des conflits autour de la gestion de la cité.
18:29Alors qui, bien sûr, ont des implications spirituelles
18:33sur la vision du Christ, l'image de Dieu, même, etc.
18:37La liturgie, enfin, tout est lié.
18:41Mais il semble-t-il que cette innovation qu'il y a eue
18:45après la fin de la secondaire mondiale,
18:49auquel il y a un grand potentiel de séduction dans le monde chrétien,
18:57et qui arrive, il me semble, à son crépuscule,
19:01c'est autour, quand même, de la cité.
19:05Et du coup, ce qui me paraît très, très fondamental,
19:09c'est quels sont les rapports entre le spirituel et le temporel.
19:13La question, Peggy a beaucoup abordé ça,
19:21et qui, à mon sens, reste en problème depuis 2000 ans.
19:27On a eu, si vous voulez, toute l'époque dans laquelle
19:31le pape a prétendu régenter l'Empereur.
19:35Mais tout en prétendant régenter l'Empereur,
19:37il admettait que la gestion de la cité...
19:41– Lui échappait l'argent.
19:43– Non, ou demandait des accommodements avec les préceptes évangéliques
19:49tout à fait significatifs.
19:51Même Thomas d'Aquin, enfin, voilà,
19:53on voit toute la théorie de la juste guerre, etc.
19:57était vraiment, bon, pas évangélique.
19:59Donc, il était dans cette vision à la fois.
20:01Donc, le pape dit à l'Empereur ce qu'il doit faire,
20:03mais en étant conscient des problèmes que rencontre l'Empereur.
20:06Alors ensuite, on est passé à une deuxième période
20:10dans laquelle, il me semble, nous sommes un peu...
20:12Alors là, le pape n'a plus rien à dire à l'Empereur.
20:14– Oui, c'est ça.
20:16– Le prince, disons, se décide.
20:18Et l'Église, donc, plutôt, dit aux citoyens ce qu'ils doivent faire.
20:24Et comment, pour qui, qui ils doivent soutenir,
20:26pour qui ils doivent voter, quels règles, etc.
20:30Avec un problème, c'est que finalement,
20:32l'Église, d'autrefois, était quand même consciente
20:36des problèmes de ce bas monde, parce qu'elle les traitait.
20:40Autant, la nouvelle est plus loin des problèmes de ce bas monde.
20:44– Spécialement des problèmes nationaux, en fait.
20:46– Oui, en fait, tous les problèmes nationaux.
20:48– Parce qu'elle parle beaucoup des droits de l'homme,
20:50mais elle parle très peu de...
20:52– Tout à fait, voilà, tout à fait.
20:54Et on retrouve un peu, il me semble, ce que disait Tocqueville
20:56au moment de la Révolution française,
20:58c'est qu'au fond, les intellectuels sont très forts.
21:00Pour construire des grands projets merveilleux, etc.
21:06– Très séduisants.
21:08– Et séduisants, des utopies.
21:10– Mais très loin de la réalité.
21:12– Mais quand il s'agit de gérer ce bas monde, voilà.
21:16Autre élément, c'est pour moi important,
21:18là, pour le coup, l'Évangile est dans le monde réel.
21:24– Oui. – Et dans le monde réel.
21:26On ne voit pas d'illusion.
21:28Pas d'illusion, si vous voulez.
21:30Je ne sais pas, quand Pierre dit,
21:32moi, moi, je te serai de César,
21:34tu lui réponds, non, tu m'auras trahi.
21:36– Tu m'auras trahi.
21:38– Ou aussi bien, quand on lui pose la question,
21:46faut-il payer l'impôt à César,
21:48il remet dans la réalité.
21:50Montrons la pièce.
21:52– Montrons la pièce.
21:54– Ou quand on le critique pour avoir guéri le jour du sabbat,
22:00on lui dit, mais qu'est-ce que vous faites
22:02si un de vos bêtes tombe dans un puits ?
22:04Et donc, il y a, il me semble,
22:06c'est que le message, si vous voulez, évangélique,
22:12est vraiment très très très adapté,
22:14si je peux employer ce terme,
22:18à une époque de crise
22:20où on redécouvre la pesanteur du monde
22:24et le fait qu'il ne s'agit pas de cultiver des illusions consolantes,
22:30mais de gérer le monde,
22:34de se jolter du moins mal qu'on peut
22:38avec les humains comme ils sont,
22:42ce qui n'est pas…
22:44– Pas toujours facile à gérer.
22:46– C'est-à-dire que Dieu, à une époque, avait dit qu'il avait fait
22:50une grande erreur dans sa vie qui était de créer des hommes,
22:52et qu'il avait fallu, à l'époque de Noé,
22:58donc le thème peut-être plus fondamental, disons,
23:06en partant par les fractures, c'est au même fond,
23:10qu'est-ce que c'est, si vous voulez,
23:12que dans cette période où on découvre
23:14l'illusion consolante d'une nouvelle humanité et d'un homme nouveau
23:18qui allait se réconcilier, dépasser ses affrontements,
23:24qu'on ne peut plus y croire.
23:26– Oui, c'est ça.
23:28– Et qu'est-ce qu'on fait ?
23:30On peut pas rentrer dans les rapports cyniques,
23:34– Absolument.
23:36– Qu'on garde de l'idéal.
23:38Enfin, je crois que c'est un peu ça.
23:40– Merci beaucoup.
23:42– Au-delà des fractures chrétiennes, c'est paru chez Salvatore,
23:44et c'est un livre très stimulant, chers amis téléspectateurs,
23:48y compris les choses, parce qu'il est normal de tiquer sur tel ou tel passage,
23:54mais je pense que justement cet au-delà des fractures chrétiennes est fondamental,
24:00et il faut que nous soyons capables de parler rationnellement,
24:02y compris avec des gens avec lesquels on ne partage pas la même vision
24:06de la gestion de la cité, typiquement.
24:08Merci, cher professeur.
24:10– Merci.
24:12– Générique
24:14
24:23Nous revenons sur le plateau de Terre de Mission,
24:25et j'ai le plaisir d'accueillir, mais par Skype, l'abbé Michel Ouattara.
24:28Bonjour monsieur l'abbé.
24:30– Bonjour.
24:32– Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation.
24:35Vous êtes prêtre ivoirien,
24:37vous venez de soutenir une thèse en droits et en droits canoniques
24:41sur la basilique, ce que c'est qu'une basilique,
24:45et qui vient d'être publiée au Cerf,
24:49un pavé assez impressionnant,
24:53mais qui est vraiment passionnant, chers amis téléspectateurs,
24:56je ne saurais trop vous conseiller de le lire.
25:00Alors cher père, est-ce que vous pourriez nous dire d'abord
25:04ce que c'est qu'une basilique ?
25:06– La basilique de Parcours, la recherche que j'ai pu faire,
25:10c'est un édifice, un signe,
25:13qui est le fruit, le produit de l'histoire,
25:18l'histoire qui accompagne l'essor du christianisme.
25:25Édifice païen devenu chrétien,
25:29l'Église l'a accueilli au cours du temps et de son histoire,
25:33c'est l'a approprié.
25:35Aujourd'hui, la basilique est devenue un édifice primordial,
25:40et il n'y a plus de référence pour l'Église.
25:44– D'accord, donc à l'origine, pardon de vous couper,
25:46à l'origine, les basiliques, c'est des édifices païens
25:48qui ont été récupérés par le christianisme ?
25:51– Exactement. – D'accord.
25:53– C'est pour cela que je dis que c'est le fruit,
25:55c'est un produit de l'histoire.
25:57L'Église, comme vous le savez, elle a été persécutée au départ.
26:01– Bien sûr.
26:02– Quand elle a eu le droit de citer, avec l'ère Constantinienne,
26:07elle a pu avoir la possibilité de pouvoir célébrer son culte publiquement.
26:13Du coup, elle est passée des églises domus,
26:18c'est-à-dire ses églises familiales, pour pouvoir se trouver publiquement.
26:22– D'accord.
26:23– Pour se trouver publiquement, il y a eu une notion de nombre
26:29pour pouvoir trouver des lieux appropriés,
26:31pour pouvoir adéquat pour les grands rassemblements,
26:35il fallait donc des espaces.
26:37Ce qui fait que cet édifice a été proposé à l'Église,
26:40l'Église l'a accueilli, mais elle se l'est approprié.
26:43Autrement dit, elle a interprété l'édifice en fonction de ses critères.
26:49– D'accord.
26:50– L'édifice païen, au départ, c'était un lieu public.
26:53– Et alors, quelle était la première basilique reconnue par l'Église,
26:56intégrée par l'Église ?
26:58– C'est justement celle que nous appellons aujourd'hui la Basilique du Latrin.
27:03– D'accord.
27:04– On regarde et on voit qu'il y a un processus d'appropriation.
27:09Il n'y a donc pas eu, je reviens sur quelques éléments,
27:12mais c'est l'espace vraiment qui a intéressé l'Église.
27:15– D'accord.
27:16– Donc païen, c'était un lieu où on pourrait parler de salle polyvalente aujourd'hui,
27:21en tout cas, espace où on célébrait les marchés,
27:24où on pouvait rendre la justice,
27:26où on pouvait tenir des réunions publiques dont l'Église s'est appropriée.
27:30Et c'est celle-là que le premier pape a reçue de Constantin
27:33et puis par la suite, il y a eu Saint-Pierre du Vatican,
27:36par la suite, il y a eu Saint-Paul-Orlé-Mure,
27:39par la suite, il y a eu Sainte-Marie-Majeure, comme tout ça.
27:42– Oui, toutes les grandes basiliques, quand même.
27:45– Voilà.
27:46– Et quand on dit basilique, ça fait référence à l'Empereur ?
27:50– Les trois premières font référence à l'Empereur,
27:53mais la quatrième, ça dit Sainte-Marie-Majeure,
27:56avec le développement de Rome où la papauté a pris son essor.
27:59– D'accord.
28:00– Les papes sont devenus très importants,
28:02donc ils ont pris le relais de l'Empereur en édition de la basilique Sainte-Marie-Majeure.
28:07– D'accord.
28:08Et alors, aujourd'hui, il y a des basiliques en dehors de Rome, on est d'accord ?
28:12– Bien sûr.
28:13– Et comment est-ce qu'on crée une basilique ?
28:16Le diocèse de Paris a par exemple la basilique de Montmartre.
28:19Comment est-ce que Montmartre est devenue une basilique ?
28:22– Ça, c'est l'époque récente de mon parcours.
28:25On peut relever quatre périodes avec les différentes réformes majeures de l'Église.
28:32L'époque carolingienne avec sa réforme, l'époque grégorienne avec sa réforme,
28:36l'époque trésentienne avec sa réforme.
28:39Et donc, toutes ces réformes-là ont été des lieux,
28:42des occasions de diffuser l'édifice basilical.
28:45– D'accord.
28:46– Comme j'avais commencé à le dire,
28:48lorsque l'Église a récupéré la première basilique,
28:51pour manifester son lien et sa communion avec Rome,
28:56toutes les autres églises venaient à Rome pour prendre un lien sur ces basiliques.
29:02– D'accord.
29:03– Pour ceux qui connaissent un peu l'histoire,
29:05quand vous partez dans la basilique de Sainte-Denis,
29:09quand vous rentrez dans le souterrain,
29:11vous retrouvez pratiquement la même configuration que Saint-Pierre de Rome.
29:15– D'accord.
29:16– Par exemple.
29:17– À Sainte-Denis ?
29:18– Chaque période a été un lieu de manifestation d'une communion avec Rome
29:24en recoupant, au sens médiéval du terme,
29:27en reproduisant pour ainsi dire quelques copies de Rome.
29:31– D'accord.
29:32Parce qu'il n'y a que Rome qui puisse dire que telle église devient une basilique ?
29:38– Oui, avec le temps, c'est ainsi que c'est devenu.
29:41– D'accord.
29:42– Si bien que, jusqu'au pape Pius VII par exemple,
29:46pour être basilique, il fallait retenir la dimension architecturale.
29:51– D'accord.
29:52– Mais avec le pape Pius VII, la basilique a pris une dimension juridique.
29:57C'est ce que j'ai essayé de montrer dans mon travail.
29:59– D'accord.
30:00– Comme vous avez évoqué tout à l'heure, Montmartre,
30:03Notre-Dame qui a l'actualité est très importante dans l'évolution.
30:07– Bien sûr.
30:08– Parce que c'est un parti, vous le savez certainement,
30:11Notre-Dame de Paris c'est aussi une basilique.
30:14Et c'est la première basilique érigée au sens moderne de terme,
30:18c'est-à-dire où ce n'est plus la dimension architecturale qui est déterminante,
30:24mais beaucoup plus ce que j'ai qualifié d'opportunité pastorale.
30:29– D'accord.
30:31– Ce qui concerne par exemple Notre-Dame de Paris,
30:35donc l'opportunité pastorale, vous connaissez un peu.
30:37– Oui, bien sûr.
30:39– Voilà, donc avec la tension qu'il y avait,
30:43donc c'était l'occasion de faire baisser les tensions
30:46et de favoriser le démarrage de la religion,
30:49pour pas entrer dans les détails.
30:51Mais pour revenir à Montmartre,
30:53Montmartre ça fait partie des éléments que j'ai retenus dans le travail.
30:57L'un des angles que j'ai retenus c'est de voir comment l'édifice religieux,
31:01en l'occurrence la basilique, est interface entre l'Église et l'État.
31:05– Oui.
31:06– Donc si on s'arrête quelque peu sur Montmartre,
31:08vous connaissez les circonstances de sa construction.
31:11– Bien sûr.
31:12– Il y avait la tension à Rome, mais il y avait aussi une tension à Paris.
31:16Mais n'empêche qu'il y a eu une collaboration entre les deux.
31:22Il y a eu une collaboration entre l'autorité publique,
31:26l'autorité civile et l'Église pour pouvoir édifier cet édifice de Montmartre.
31:31– D'accord.
31:32– Sur l'initiative de l'Association de l'Église, vous le savez.
31:34– Merci beaucoup cher M. Labbé.
31:36Donc Michel Ouattara, la basilique, s'est parue aux éditions du Cerf.
31:40C'est un livre absolument passionnant.
31:42Normalement les thèses de droit canonique ne sont pas forcément passionnantes,
31:45mais ça c'est réellement passionnant.
31:47Merci M. Labbé.
31:49Nous, chers amis téléspectateurs, la semaine prochaine
31:52ce sera Jean-Pierre Mojande qui animera Terre de Mission.
31:54Nous nous retrouvons quant à nous dans trois semaines
31:56et d'ici là, que Dieu nous garde.

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