Avec Stéphane Blocquaux docteur en Science de l'information et de la communication, Renaud Hetier, professeur en sciences de l'éducation
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00:00Le cybersexe, c'est quoi le cybersexe ? On a entendu le sexe dans tous ses états, 400 000 définitions, c'est quoi le cybersexe ?
00:16Le sexe sur Internet, ce virus qui tue l'enfance, un livre qui vient de paraître exposition Artej par Stéphane Blocco et Renaud Etier.
00:24Un livre vraiment passionnant parce que vous donnez énormément d'informations et puis c'est un vrai problème.
00:30C'est un vrai problème, on en discute depuis déjà des décennies, allez au moins 20 ans.
00:34Et puis en même temps on dit voilà, comment empêcher, parce que le problème n'est pas un problème de liberté, parce qu'on dit oui vous voulez censurer, pas du tout.
00:42Simplement il y a un problème de génération, un problème d'âge, est-ce que l'enfance doit être protégée et comment ?
00:49On a, vous savez, beaucoup parlé de l'éducation sexuelle à l'école avec les nouveaux projets aujourd'hui pour 2025 de la ministre de l'éducation et même avant,
00:57Pape Ndiaye et les prédécesseurs. Et là c'est quand même un phénomène beaucoup plus massif Renaud Etier.
01:05Oui c'est ça, c'est-à-dire que l'éducation comprend l'éducation sexuelle et l'éducation sexuelle est comprise dans l'éducation
01:13et suppose un accompagnement durable et approfondi des enfants.
01:20Oui, alors justement vous êtes professeur en sciences de l'éducation et au fond c'est intéressant parce que ce problème a été posé
01:27et alors on dit, parce qu'on a vu en tout cas à l'école, même presque à partir des maternelles, on commençait à parler d'un certain nombre de postures
01:36que je ne décrireai pas ici mais parce qu'on se dit mais il y a quelque chose d'autre qui est partout, qui est notre ordinateur, qui est internet, etc.
01:46pour le meilleur et peut-être quelquefois pour le moins bon. Comment ça a été vécu ? Il faudrait peut-être faire un tout petit peu d'histoire,
01:54l'apparition de cela et l'apparition effectivement des dérives en même temps.
01:58Oui, alors peut-être Stéphane sera plus à même de répondre à cette question.
02:02Oui, ça fait des années que le problème persiste et ce n'est pas un nouveau phénomène qu'on est venu étudier dans ce livre.
02:08Ce qui est nouveau c'est la manière dont on l'a traité, c'est-à-dire qu'on a à la fois conjugué les compétences et les connaissances des sciences de la communication
02:18et en même temps essayé de les analyser avec le recul philosophique de l'éducation.
02:22Le phénomène, moi je l'ai traité depuis des années, j'ai commencé avec des commissions qui ont démarré avec François Hollande, vous imaginez,
02:28c'était Laurence Rossignol à l'époque.
02:30À l'époque où Hollande était président ?
02:32Oui, c'était Laurence Rossignol qui avait fait une commission passionnante et qui déjà s'inquiétait du sujet.
02:37C'était une des premières à vraiment prendre à bras-le-corps le sujet en disant,
02:40voilà là il y a un problème, ce n'est pas possible que les mineurs se gavent de pornographie,
02:45que ça démarre à l'école primaire, que ça dérape complètement au collège et que ce soit l'explosion au lycée.
02:50Le phénomène était déjà posé.
02:52Alors après il y a eu d'autres commissions, beaucoup, beaucoup, et il aura fallu trois présidents pour que les uns après les autres,
02:58ils tapent sur la table en disant, moi président, ça ne vous rappelle rien, c'est fini, il n'y aura plus de porno à la fin de mon mandat.
03:06C'est ce qu'a déclaré encore Emmanuel Macron en 2022.
03:10Et ce n'est pas fini du tout.
03:11Et ce n'est pas fini du tout.
03:13C'est le moins qu'on puisse dire.
03:14C'est le moins qu'on puisse dire.
03:15Alors justement, parlons de la science d'éducation.
03:20Qu'est-ce qui fait que, si vous voulez, le problème est posé depuis des décennies, enfin quelques décennies.
03:27Qu'est-ce qui fait qu'il y a cette espèce de...
03:30C'est sur le fond sur la pédagogie, sur l'éducation nationale, parce que je vous posais une question très précise par rapport à la science d'éducation,
03:37là ce n'est pas une question de communication.
03:39Quand un pape dit, il faut absolument que, et pourquoi pas, je ne sais pas, l'éducation sexuelle se fasse à l'école,
03:47quand on voit qu'effectivement, vous avez dit, plusieurs personnes essayent de dire, on va arrêter tout cela, mais que rien n'est arrêté,
03:53ça signifie quoi ?
03:55Ça signifie qu'on ne veut pas franchir le cap, on a peur ou quoi ?
03:58Alors il y a un enjeu de santé, on peut dire aujourd'hui,
04:01puisque l'exposition souvent prématurée aux images de l'industrie pornographique
04:08est susceptible de choquer et aussi surtout d'influencer les enfants et les adolescents
04:15dans une direction qui n'est pour le moins pas la plus recommandable.
04:19Donc il y a un enjeu éducatif majeur, mais ce que je voudrais vraiment dire,
04:24c'est que c'est un enjeu d'éducation générale.
04:28Il ne s'agit pas de répondre à ce problème uniquement par ce qu'il serait une éducation sexuelle.
04:34C'est-à-dire qu'en fait, si ça correspond aussi à une éducation affective,
04:38ça correspond à une qualité de relation dans laquelle l'enfant puisse éprouver sa liberté d'expression,
04:47puisse faire reconnaître ses propres émotions, son propre désir,
04:52de manière à ne pas être manipulé.
04:54Oui, mais alors, jusqu'à présent, ce qu'on entend, c'est la censure.
05:00Et on dit, voilà, il faut empêcher effectivement, d'ailleurs à juste titre probablement,
05:05pour un certain nombre d'adolescents ou d'enfants.
05:08Mais comment, si vous voulez, comment fait-on ?
05:11Parce que les vœux pieux, on les entend, les souhaits, on les entend.
05:15Mais dans la pratique, on ne voit pas un peu qui contourne et comment.
05:19Alors je pense que les enfants sont pris un peu entre le marteau et l'enclume.
05:22C'est-à-dire qu'il y a une préoccupation éducative qui va faire qu'on va peut-être parfois éviter d'en parler
05:28parce qu'on a peur de devancer la maturation de l'enfant.
05:33Et puis de l'autre côté, Stéphane insiste volontiers sur cette dimension,
05:37les enfants sont surexposés à des choses qui peuvent être très crues, voire barbares.
05:43On nous en parle souvent.
05:45Donc on ne peut pas laisser les choses dans cet état-là.
05:49Et il y a besoin d'anticiper un minimum pour que les enfants soient préparés à ce qu'ils risquent de voir.
05:56Parce que, dans l'état actuel des choses, ils risquent de voir. C'est comme ça.
06:01Donc la question est peut-être moins comment on fait pour complètement arrêter l'accessibilité de ces productions
06:09que comment on prépare les enfants à y faire face le jour où ça va arriver.
06:14Ce qu'il ne faut pas non plus imaginer que parce qu'un enfant va voir un jour une image pornographique,
06:19il va tout à coup basculer dans l'addiction.
06:22Et c'est le problème parce que beaucoup de gens qui sonnent le toxin, si vous voulez,
06:28peut-être exagèrent d'un autre côté, c'est-à-dire que le balancier va trop de l'autre côté.
06:33Mais non, justement, Stéphane Blocco, concrètement, un enfant est soumis à quoi ?
06:40Aujourd'hui, un enfant qui a, allez, 3, 4 ans, 5 ans, un enfant français, moyen,
06:46une famille française moyenne ou autre, il est exposé à quoi ?
06:50C'est-à-dire, quotidiennement, dans le quotidien, ça se passe comment, concrètement ?
06:54Alors, à la maternelle, les risques seront faibles, c'est-à-dire qu'évidemment...
06:58Heureusement !
06:59Évidemment. En fait, le véritable ennemi, et c'est pour ça qu'il ne vous aura pas échappé
07:02que le livre commence par un slogan, nous sommes en guerre.
07:05C'était un petit clin d'œil pour venir...
07:07C'est mon slogan, c'est le slogan de l'émission.
07:10Mais nous sommes en guerre avec quoi ?
07:14Avec le nomadisme numérique juvénile.
07:17L'ennemi, en fait, c'est d'une part, c'est vrai, la cyberpornographie,
07:21mais surtout le vecteur, c'est-à-dire par où ça arrive chez ses collégiens.
07:25On voit que ce n'est pas à la maison, quand on est confortablement installé
07:28à sa tablette ou avec l'ordinateur familial, c'est ce fameux téléphone portable,
07:32ce smartphone, qu'on met dans les mains des très jeunes collégiens,
07:36voire aujourd'hui des CE2, CE1, les fins d'école primaire,
07:40qui sont déjà suréquipés pour beaucoup, et qui va donner cet accès quasi incontrôlable.
07:46Quand je dis quasi incontrôlable, c'est qu'on a tout essayé pour verrouiller, bloquer,
07:50et que pendant des années et des années, j'ai reçu des milliers,
07:54des dizaines de milliers de parents en conférence qui, à chaque fois,
07:57me posent la même question.
07:59Voilà, j'ai acheté un iPhone 14 à mon enfant, je fais comment maintenant
08:04pour qu'il ne fasse quasiment plus rien avec, d'autre que me téléphoner
08:08quand il a raté le bus.
08:10Elle est l'adéquation, en fait.
08:12– Il pense qu'un smartphone, c'est pour téléphoner.
08:15Alors que, aujourd'hui, c'est pour beaucoup d'autres choses.
08:17– C'est le besoin des parents, en tout cas.
08:19– Je comprends.
08:20– C'est ce que les parents demandent.
08:22– Je parle aux communicants, aux sociologues, mais à partir de quand
08:26les parents, en moyenne, il n'y a pas de généralisation,
08:29mais achètent des smartphones, qu'on dit 14 autres,
08:32qui ne c'est pas rien à leurs enfants ?
08:34– Au milieu de primaire, ça commence déjà à s'équiper.
08:38Le CM1, CM2 est déjà, lui, bien impacté.
08:42Et puis, c'est la sixième, parce qu'il y a les transports en commun,
08:45on a peur de…
08:47C'est la peur qui fait acheter ce téléphone.
08:49C'est-à-dire ce smartphone, malheureusement.
08:51– Ah oui, c'est le sentiment d'insécurité, comme dit l'autre.
08:53– Bien sûr, c'est qu'on doit être joignable.
08:57Le lien parent-enfant, il est…
08:59Or, ce n'était pas le cas.
09:01Je ne vais pas faire le « c'était mieux avant ».
09:03Mais quand même, quand mes parents me voyaient partir en mobilette,
09:06ils ne savaient pas si j'allais revenir.
09:08– Ils ne s'inquiétaient pas plus que ça.
09:11– Parce que c'était si grave que ça, en fait.
09:13Et ça, c'est terminé.
09:15Il faut en permanence avoir un lien avec l'enfant.
09:17Mais il a un prix, ce lien.
09:19Il a le prix de l'accessibilité à des choses qui sont quasi…
09:23On ne peut pas verrouiller complètement.
09:25Il faudrait supprimer, on pourrait y revenir si vous le souhaitez,
09:28la pornographie pour les majeurs, en fait.
09:30Pour éliminer le problème.
09:32Et là, on n'aurait plus de problème.
09:34Si les adultes ne pouvaient plus en voir, les ménages ne pourraient plus en voir.
09:36Mais vous dites bien que ce n'est pas la solution.
09:38– C'est un problème de liberté d'expression, là, quand même.
09:40– Exactement.
09:41C'est ce qu'on renvoie souvent, en disant,
09:43mais alors, il suffirait de le supprimer pour les adultes aussi.
09:45Vous verriez le nombre de messages ou de questions
09:48qu'on a dans le public, parfois, en disant, mais quel est le problème ?
09:52Il suffit de supprimer la pornographie aux adultes.
09:54– Il suffit de supprimer beaucoup de choses, à ce moment-là.
09:56Vous savez, ça ouvre la porte, la boîte de Pampon.
09:58– Nous sommes parfaitement d'accord.
10:00– Pour revenir, justement, à la philosophie de l'éducation.
10:02Est-ce que ça ne pose pas, je reviens à l'insigne Renaud-Ettier,
10:06ça ne pose pas le problème de, qu'est-ce que ça veut dire, l'éducation, aujourd'hui ?
10:10À un moment donné, on parlait d'instruction.
10:12Je veux dire, qui éduque ?
10:14Qui instruit et qui éduque ?
10:16Parce que, est-ce que, dans ce livre, c'est posé ?
10:20C'est-à-dire que, dans cet univers, le cybersexe dont vous parlez,
10:24est-ce qu'il n'y a pas ce problème de l'éducation en tant que tel qui est posé ?
10:28– Oui, alors il y a une controverse, c'est-à-dire que, pour certaines personnes,
10:31l'éducation, c'est l'affaire des familles et pas celle de l'école.
10:35Et c'est ce qui fait que, d'ailleurs, justement,
10:37ces mêmes personnes peuvent se plaindre que l'école s'immisce dans l'éducation sexuelle
10:44qui concerne davantage la sphère de l'intimité, des dimensions personnelles,
10:48des valeurs culturelles qui peuvent être celles de la famille
10:51et pas forcément celles de l'école.
10:53Alors, l'éducation telle qu'il faudrait plutôt l'appréhender,
10:59j'y reviens toujours, c'est quelque chose de plus global.
11:04C'est-à-dire, en fait, pour moi, c'est à peine une éducation,
11:09c'est une qualité relationnelle.
11:11L'idée que je défends, c'est que, quand les enfants peuvent être entourés d'adultes
11:16qui se positionnent à la fois avec un cadre qui donne des limites
11:21et en même temps avec un bon investissement relationnel
11:24où on peut se parler, où on peut jouer ensemble, où on peut travailler ensemble,
11:28ça va permettre à l'enfant de se construire de façon solide.
11:32Et c'est cette solidité-là qui va permettre ensuite de résister à des dégradations,
11:37à des dérives, à des influences diverses.
11:40Ce qu'on sait par la négative,
11:43et le procès de Marzan l'a encore démontré,
11:46c'est que beaucoup de personnes qui sont violentes ou abusives
11:51ont été elles-mêmes violentées ou abusées.
11:55Donc, ça démontre par la négative l'importance des premières expériences.
12:01D'où, protéger les enfants de la pornographie
12:05ne peut se faire autrement qu'en les protégeant d'une manière générale
12:09dès la petite enfance de certains adultes,
12:12de la prédation de certains adultes,
12:15de manière à ce que les enfants soient effectivement
12:18dans la possibilité de mûrir à leur rythme.
12:21Vaste programme, on va en parler après cette petite pause.
12:24Je vous rappelle le 0826 300 300
12:28pour effectivement appeler le cybersexe, ce virus qui tue l'enfance.
12:33Vous voyez, ce n'est pas Covid-19 là pour qui tu l'enfonces.
12:36Ce n'est pas vraiment ça, même si c'est encore controversé.
12:39Mais le cybersexe, ça pose d'autres problèmes.
12:42On en parle tout de suite après cette pause.
12:54Stéphane Blocco, Renaud Etier, le cybersexe, ce virus qui tue l'enfance.
12:58Un livre qui fait polémique, effectivement, le cybersexe.
13:02Comment faire pour le combattre ?
13:06Surtout à l'attention des enfants, sans tomber dans le côté liberticide.
13:10Alors, vous deux, un éducateur, professeur d'éducation, un communicant.
13:16Vous faites beaucoup de conférences, effectivement, à travers la France.
13:19Je voudrais savoir, ça fait quelques années, je crois, que vous faites ça.
13:22Alors, comment vous ressentez cette France que vous côtoyez,
13:27d'ailleurs, qui vous a valu de faire ce livre ?
13:30Encore une fois, je recommande.
13:32Comment les gens réagissent ?
13:34À quel miroir de la France vous avez quand vous faites vos conférences
13:38et avec les questions qu'on vous pose ?
13:40Alors, d'abord, indubitablement, il y a un biais.
13:43C'est-à-dire que les gens qui viennent à la conférence
13:45sont des gens qui accordent suffisamment d'importance à l'éducation de leur enfant
13:49pour y consacrer une soirée.
13:51Bien sûr.
13:52Le risque, c'est qu'on ne touche pas forcément les parents
13:56qui sont peut-être les plus exposés au problème.
13:59C'est vrai.
14:00Nonobstant ce que je viens de dire,
14:02dans les questions et parfois les témoignages,
14:05parce qu'il y a aussi des personnes qui prennent la parole pour témoigner,
14:08on voit se faire jour une certaine diversité.
14:11Alors, concrètement, c'est quoi cette diversité ?
14:14Alors, d'abord, je commencerai par une petite remarque ironique,
14:17c'est que moi, j'interviens sur l'éducation,
14:19j'ai déjà pu en parler un petit peu ici,
14:22et donc sur l'importance de s'impliquer relationnellement,
14:25de créer un espace de vie commune, etc.
14:28Et, invariablement, la première question,
14:31c'est tourner vers M. Blocco, notamment,
14:34est-ce qu'il n'y aurait pas un dispositif pour couper l'accès ?
14:37Donc, c'est-à-dire...
14:38Ah oui, bien sûr.
14:39Une solution...
14:40Ils veulent ça pour l'ordinateur, ils veulent ça pour le téléphone, etc.
14:43Une solution technique qui permettrait d'éviter d'avoir à éduquer,
14:46en quelque sorte, d'avoir à être présent.
14:48C'est plus facile, c'est plus simple, ce serait plus simple.
14:51C'est plus simple.
14:52Alors, dans les témoignages que nous avons lors de nos conférences,
14:57nous avons des parents qui disent
14:59qu'ils n'ont pas équipé leur enfant avant un certain âge.
15:02Alors, ça, c'est une chose importante,
15:04parce que c'est le principal argument des adolescents que de dire
15:08« je suis le seul de ma classe, je suis la seule de ma classe
15:11à ne pas avoir de smartphone,
15:13et du coup, à ne pas pouvoir communiquer avec les autres,
15:17et puis, du coup, se retrouver exclu ».
15:20Et c'est un argument qui touche forcément les parents,
15:23sachant qu'une grande partie de la socialisation
15:26se fait aujourd'hui par les réseaux sociaux.
15:28Bien sûr.
15:29J'ai fait une enquête dans des maisons de quartier,
15:31il y a deux ans de cela,
15:33et la plupart des adolescents disaient bien
15:35que quand ils sortaient du collège ou du lycée,
15:39ils prenaient le bus pour rentrer chez eux,
15:41et ils entraient en relation avec leurs amis,
15:44c'est-à-dire en allant sur les réseaux.
15:48Et en fait, très peu rencontraient physiquement leurs camarades.
15:53Donc c'est là où c'est difficile de les en priver.
15:56Est-ce qu'il n'y a pas aussi, juste un mot,
15:58pour rebondir ce que vous disiez,
16:00est-ce qu'il n'y a pas aussi que, vous savez,
16:02l'enfer c'est les autres, surtout dans les premières classes,
16:06est-ce qu'ils ne passent pas pour un ringard,
16:08on dit « ah, t'as pas de téléphone, t'es un pauvre type », etc.
16:11Est-ce qu'il n'y a pas ce côté aussi d'ils disent
16:13« regarde, oui, mais on me traite très mal
16:15parce qu'ils ont tous leur portable et moi je n'ai pas ».
16:17C'est ça, c'est la question du mimétisme en fait,
16:20qui peut se jouer sur les vêtements, sur la coupe de cheveux,
16:24et puis maintenant ça se joue avec le smartphone.
16:26Le suivisme, le conformisme, normalement.
16:28C'est ça, mais ça n'a rien de nouveau de ce point de vue-là,
16:30simplement c'est plus cher et c'est plus grave.
16:32Alors, et vous alors, par rapport à justement Stéphane Bloco,
16:38qu'est-ce qu'ils vous disent, qu'est-ce que vous avez entendu ?
16:40Alors, effectivement, on a parlé du blocage,
16:43on a parlé effectivement de quelques enfants qui disent
16:47« moi je n'ai pas de smartphone, mais effectivement,
16:49je vous repose peut-être la même question ».
16:51Et aussi d'autres, qu'est-ce que vous avez entendu dans ce miroir
16:54promené le long d'une route, comme disait Stendhal ?
16:57Des parents en souffrance, des parents pour qui
17:00le premier sujet de discorde s'est devenu cette négociation
17:05avec le temps, le temps connecté en fait.
17:08On voit bien que c'est la guérilla en fait,
17:11guerre de tranchées, guérilla, enfin voilà,
17:13c'est les petits pièges, les petits coups en douce,
17:16on essaie de gratter, voilà.
17:18Alors j'ai une expression, moi je dis que les enfants sont devenus
17:20des mendiants du numérique.
17:22C'est-à-dire que dans mon premier ouvrage,
17:25ce terme-là il apparaît beaucoup,
17:27les mendiants du numérique,
17:29c'est cette idée qu'ils sont en permanence
17:31en train de quémander des petites minutes supplémentaires
17:34de numérique, d'aller chialer, négocier,
17:37c'est effrayant en fait.
17:39Négocier avec qui ?
17:40Négocier avec les parents.
17:41C'est-à-dire que le soir, il faut avoir son petit temps connecté
17:43de plus en plus, et puis la minute,
17:45il y a presque une souffrance, ça relève de la dépendance.
17:48Vous voulez dire encore une minute, donnez-moi encore une minute, c'est ça ?
17:50Une minute, une minute, c'est coupe pas, stop pas, arrête,
17:53je suis avec mon jeu, je peux pas arrêter, c'est impossible,
17:55tu te rends pas compte, je vais être banni,
17:58on sent que ça c'est une véritable souffrance pour l'enfant,
18:01et les parents voient leurs enfants en souffrance,
18:03et le temps, il est devenu ce qu'il est devenu,
18:05c'est-à-dire qu'aujourd'hui on est sur des chiffres délirants,
18:08puisqu'on parle pour les 13-17 ans,
18:10on est de l'ordre de 7 heures, vous imaginez, 7 heures par jour.
18:147 heures par jour.
18:15Pour les 13-17 ans.
18:16Pour les 13-17 ans, on est rendu à 7 heures par jour,
18:18tout écran confondu.
18:19Voilà, c'est des chiffres qui sont revisités.
18:21Aussi bien télé, coordinateur que téléphone.
18:24Tout écran confondu.
18:25Et on est autour de 5 heures par jour sur les 8-12 ans, vous imaginez,
18:31et on a parfois des enfants de 2 ans qui sont à 3 heures d'écran.
18:352 ans ?
18:372 ans, tout à fait.
18:38Donc on est sur des chiffres...
18:40Ça m'a semblé énorme.
18:42Ah non, mais c'est aberrant, c'est stratosphérique.
18:45On n'est pas sur un petit phénomène comme ça,
18:47et à chaque fois on nous dit, oui la télé c'était pareil,
18:49mais non, allez revisiter les chiffres des temps de télé,
18:52même nous, les enfants de la télé, on n'a pas eu cette consommation.
18:55Pourquoi ?
18:56Parce qu'on ne l'avait pas dans le bus,
18:58on ne l'avait pas à la sortie d'école,
18:59on ne l'avait pas à la pause du midi,
19:01on ne l'avait pas...
19:02Il est partout, ce téléphone.
19:04C'est pourquoi il va falloir agir et proposer des solutions.
19:07C'est vraiment, concentrez-vous, c'est le téléphone,
19:10vraiment l'instrument majeur.
19:12C'est ce qui permet d'avoir en permanence un écran sous les yeux.
19:15En permanence.
19:19Oui, c'est-à-dire que ce smartphone,
19:22il est à la fois une prouesse technologique
19:25et en même temps que c'est un petit peu le cheval de Troyes,
19:28parce que c'est ce qui permet d'entrer dans la sphère d'intimité de l'individu,
19:33et est-ce qu'il est raisonnable
19:35qu'un enfant puisse s'isoler dans sa chambre avec un smartphone,
19:39sachant toutes les dérives qui sont permises ?
19:41Ce qu'il faut voir, c'est que nous,
19:43on se concentre sur le problème de la pandographie
19:46qui pose un problème par rapport à la protection de l'enfance,
19:49mais on a des témoignages,
19:51alors ça fait partie des témoignages qu'on a à la fin des conférences,
19:54où des enfants accèdent aussi à des vidéos de barbarie,
19:58voire de barbarie sexuelle d'ailleurs.
20:01Donc c'est vraiment très grave.
20:02Et puis l'histoire avec les terroristes, etc.
20:05C'est ça, les décapitations.
20:07Oui, ils y accèdent, enfin ils peuvent y accéder, oui.
20:10Allez-y, allez-y, j'en prie.
20:13Oui, et donc en fait, c'est pour ça qu'on dénonce ceci
20:17comme un enjeu de santé publique en fait.
20:19C'est pas juste un choix éducatif, c'est plus profond que ça.
20:23Et effectivement, les parents que nous rencontrons doivent se battre.
20:29Alors là, je suis dans une nouvelle enquête avec une professeure de lycée
20:35sur cette question de la liberté des adolescents.
20:41Et il y a tout récemment une jeune étudiante en classe prépa
20:47qui témoignait du fait que ses parents lui avaient donné des limites très fermes.
20:51C'est-à-dire qu'elle avait un smartphone,
20:54mais elle n'avait pas le droit de l'emmener dans sa chambre.
20:56Et visiblement, ça a joué un rôle très positif pour elle
20:59parce que maintenant qu'elle est indépendante,
21:01elle reste assez libre par rapport à son smartphone.
21:06Donc quand on pose des limites, ça permet de construire autre chose
21:09et notamment de s'investir dans ses études et dans la lecture.
21:12C'est quelqu'un qui lit beaucoup.
21:14Le smartphone considéré comme une drogue dure.
21:16Addiction, addiction.
21:18Je crois que nous avons...
21:20Nous avons un auditeur en effet qui nous appelle Danty, mais c'est Luc.
21:23Bonjour Luc.
21:24Bonjour Luc.
21:25Bonjour Luc.
21:26Oui, bonjour.
21:27Bonjour Luc, on vous écoute.
21:29Alors moi je voulais faire justement...
21:32Quand je vous ai entendu parler tout à l'heure de smartphone,
21:37je me posais simplement la question de dire que pourquoi,
21:41alors que nous, moi j'ai 60 ans,
21:44quand j'étais petit, je n'avais pas besoin de tout ça
21:47parce qu'en fin de compte, je ne l'avais pas devant les yeux.
21:49Donc pourquoi aujourd'hui, l'État, les parents,
21:54la téléphonie, ne se mettent pas ensemble
21:57pour justement trouver une solution
21:59pour que les enfants aient un téléphone,
22:02un moyen de communication standard de base
22:05qui leur permette justement de ne faire que...
22:08À quoi sert un téléphone jusqu'à un certain âge
22:12et de pouvoir justement les protéger
22:14parce qu'effectivement, comme le disait l'interlocuteur juste il y a quelques instants,
22:21c'est que moi j'ai vu la différence avec mon petit-fils
22:24qui a 2 ans, qui ne sait pas ce que c'est qu'un appareil électronique.
22:29Et effectivement, je vois par rapport à d'autres enfants du même âge
22:34qu'il n'a pas du tout le même comportement.
22:36Il est plus éveillé, il regarde autour de lui
22:38alors que des enfants qui sont avec un smartphone,
22:42ils ne font que regarder un écran.
22:44Ils ne voient plus ce qu'il y a autour d'eux.
22:46On apporte de l'eau à vous de moulin là, Stéphane Bloco.
22:50Dans le livre, on a fait un carousel.
22:54Dans ce petit carousel, on montre dans les années 90
22:58avec quoi en fait on partait à l'école.
23:00Imaginez une minute la scène.
23:02Vous imaginez l'enfant qui part à l'école
23:05et puis qui tout d'un coup dit
23:06maman, maman, je vais prendre le téléphone.
23:08Le téléphone, mais ça aurait été tellement surprenant,
23:10ce n'était pas possible puisque déjà il y avait un fil.
23:12Admettons, on met le téléphone.
23:14Maman, maman, je vais prendre le caméscope de papa.
23:17Vous imaginez un enfant qui serait parti avec un caméscope à l'école.
23:20C'était impensable en 90.
23:22Allez, on continue.
23:23L'appareil photo réflexe, c'est parti.
23:25On met tout ça dans le cartable.
23:26La Game Boy, allez c'est parti.
23:28Qui aurait pensé donner une Game Boy ?
23:30La télévision, allez hop, la télévision
23:33puisque un abonnement Netflix, n'importe quel podcast, streaming,
23:36c'est parti.
23:37Un studio complet de télévision.
23:39Qu'on peut avoir sur son portable.
23:41Bien sûr.
23:42L'enfant, il est en sixième, cinquième
23:44et il a l'ensemble de cette puissance de feu d'adulte
23:47concentré dans un petit écran comme ça, dans les mains.
23:51On a mis dans les mains d'enfants des outils d'adulte
23:54et du contenu d'adulte pour revenir à la cybersexualité.
23:58C'est tout le problème du rapport à la technique.
24:00Et le contenu d'adulte.
24:02On aurait eu la même chose à notre âge,
24:04mais c'est tellement tentant.
24:05C'est quelques lettres, vous appuyez sur entrée
24:07et vous êtes devant de la pornographie.
24:09C'est tellement tentant.
24:10Bien sûr que c'est tentant.
24:12Je crois que nous avons...
24:13Oui, nous allons avoir Michael, je pense, mais...
24:16Oui, pour compléter, sans doute,
24:18par rapport à cette question de l'auditeur,
24:21il faut sans doute considérer que c'est un vrai problème politique.
24:25C'est-à-dire où il s'agit qu'une autorité
24:27prenne une décision pour l'usage du public
24:31et dans une démocratie.
24:33Or, malheureusement, la politique
24:35est bien à la remorque aujourd'hui de l'économie.
24:38C'est un marché, un marché considérable.
24:40Si on vend des smartphones aux enfants,
24:42on vend du coup beaucoup plus de smartphones, déjà.
24:45S'il y a un smartphone par membre de la famille...
24:47Il faut étendre le marché, quoi.
24:49Et ensuite, on forme des sensibilités.
24:52C'est comme pour la malbouffe,
24:54on forme des sensibilités,
24:56c'est-à-dire que les enfants sont habitués à ceci
24:58et ça devient les consommateurs de demain.
25:00Donc, c'est coup double pour le marché.
25:02C'est clair, il ne faut pas oublier l'économie.
25:04Je crois que nous avons un auditeur.
25:06Oui, nous avons Michael, en effet.
25:07Bonjour, Michael.
25:08Bonjour, Michael.
25:09Bonjour.
25:10Oui, on vous écoute, Michael.
25:13On vous écoute.
25:14Oui, je ne me permets pas de vous appeler.
25:16J'étais en train d'écouter attentivement votre sujet,
25:19en fait, sur le numérique
25:21et en particulier les smartphones, en fait, auprès des enfants.
25:23Oui.
25:24Et c'est vrai que c'est...
25:26Alors, j'entendais encore, il y a encore quelques secondes,
25:28la personne qui disait que c'est au rôle des politiques,
25:31en fait, de s'occuper de ça.
25:32Mais en fait, c'est surtout les parents, en fait,
25:34qu'il faut rééduquer, et non pas les enfants.
25:37Mais c'est le principal, c'est les parents, effectivement.
25:39Nous, en tant que parents, en fait,
25:41on a toujours été contre les smartphones.
25:43J'ai bien dit les smartphones, hein,
25:45jusqu'à l'entrée au lycée pour nos enfants.
25:47Oui.
25:48Mais pas contre les téléphones.
25:49C'est-à-dire qu'on leur proposait à chaque fois
25:51un téléphone à clapper, à touche, ce genre de choses,
25:53si on voulait être joignable,
25:55si on voulait téléphoner,
25:56parce que c'est ça, l'idée, au départ,
25:57c'est de pouvoir téléphoner.
25:58Oui.
25:59Bon, ils refusaient tous à chaque fois,
26:00à part un, mais sinon, ils ont refusé.
26:03Mais sinon, en fait, il n'y avait pas de...
26:05Quand j'entendais la frustration des enfants,
26:07en fait, les parents, en fait,
26:08sont tellement, en fait, dans la protection
26:10et l'ultra-protection des enfants,
26:12qu'en fait, on est prêts, en fait,
26:15les parents sont prêts à faire...
26:17à sacrifier, en fait, des choses,
26:19à mettre leurs idées, en fait,
26:21de côté pour...
26:23en se disant, ben, c'est pas grave,
26:24au moins, je peux l'appeler
26:25ou je peux le contacter.
26:26Mais oui, c'est ça, oui.
26:27Mais moi, je trouve ça terrible,
26:29parce qu'effectivement, les dégâts
26:30de ce qu'on met sur Internet,
26:31et nous, on parle beaucoup avec nos enfants,
26:33c'est-à-dire qu'on leur explique,
26:34clairement, dès petits,
26:35on parlait d'éducation sexuelle,
26:36on parle beaucoup en ce moment
26:37avec ce qui les débat
26:38sur l'éducation sexuelle à l'école,
26:39ce genre de choses.
26:41Nous, la parole, en fait,
26:43de la création, de la procréation,
26:45ce genre de choses,
26:46on en parle déjà très tôt,
26:47déjà dès la primaire,
26:48enfin, suivant comment les sujets arrivent
26:50avec les enfants et tout,
26:51mais la parole est très importante.
26:53Et le problème des outils informatiques,
26:55Internet, etc.,
26:56coupe, en fait, dans la vie de famille.
26:58En fait, moi, je vois, autour de moi,
27:00les familles qui sont coupées,
27:02chacun dans son coin, sur son fauteuil,
27:04dans sa chambre, il peut isoler, etc.
27:07Il n'y a plus de lien familial.
27:08Et nous, ça a été avec ma femme, en fait,
27:10quelque chose de très important,
27:11de mettre la famille au cœur de l'entreprise.
27:14— Oui, mais ce que vous dites, Michael,
27:16en fait, c'est un problème général,
27:18mais je crois que le problème des parents,
27:19c'est fondamental, quoi,
27:20encore plus que l'école.
27:21Je veux dire que c'est vraiment fondamental,
27:24parce que si vous voulez, en fait, là,
27:26et vous le savez très bien,
27:27on a tous, quand on a un train,
27:29quand on a un restaurant, etc.,
27:30la moitié des gens sont en train,
27:32même en mangeant,
27:33sont en train de regarder leur iPhone, quoi.
27:35Je parle de là.
27:36On va au-delà de la cybersexualité, etc.,
27:38mais c'est hallucinant.
27:40Et en train, et dans le métro,
27:42et un peu partout.
27:43Donc, si vous voulez,
27:44est-ce qu'il n'y a pas là un vrai problème,
27:46qui est, pour revenir au sujet de votre livre,
27:49qui est, au fond, comment faire,
27:53parce qu'on a parlé d'interdiction,
27:56mais est-ce qu'il n'y a pas aussi
27:57une question d'éducation des parents, justement,
27:59et une question, on revient au sujet
28:01de l'éducation sexuelle à l'école ou ailleurs,
28:04c'est qu'au fond, vous posez le problème,
28:06philosophique et autre, de la permissivité.
28:09Jusqu'où on va ?
28:10C'est-à-dire qu'on est en démocratie,
28:12on n'a pas envie d'être dans une dictature
28:14où c'est très bien,
28:15voilà, on vous dit ça, vous avez le droit d'écouter,
28:17ça, vous n'avez pas le droit de faire.
28:18Comment arriver à un équilibre
28:20dans cette balance très compliquée
28:22entre, justement, vous savez,
28:24on disait qu'il y a la différence entre démocratie et dictature,
28:27c'est, voilà, l'un ferme ta gueule
28:30et l'autre, tu fais ce que tu veux,
28:32enfin bon, voilà.
28:34Moi, je sens pas, pour prendre l'analogie des scooters,
28:36je sens pas les enfants de 13 ans
28:40en souffrance et sous dictature
28:42parce qu'on leur dit qu'ils n'auront pas un scooter
28:44avant 14 ans.
28:45Juste, on a établi que le risque physique
28:48de maturité pour conduire un scooter,
28:50c'était bien à 14 ans.
28:52D'ailleurs, on a changé les lois,
28:53puisque au départ, les trottinettes électriques,
28:55c'était 12 ans,
28:56et on a décidé de les passer à 14 ans.
28:58Donc, vous voyez, on peut ré-étudier,
28:59venir sur un avantage acquis
29:01et dire à un moment, voilà.
29:02Maintenant, la vraie problématique,
29:04c'est, est-ce qu'on est prêt à faire ça
29:06pour un risque psychique ?
29:08C'est-à-dire qu'autant on protège nos enfants,
29:10et Renaud pourra certainement en dire un mot
29:12sur les risques physiques,
29:14on les a su protéger.
29:16Mais autant on veut savoir où ils sont.
29:17Mais autant on veut savoir où ils sont,
29:18mais après, par contre,
29:19on leur donne un engin qui permet en deux clics
29:20d'atteindre de la barbarie sexuelle.
29:22Il faut prendre la mesure,
29:24et c'est ce que le livre fait,
29:25prendre la mesure de ce qu'il voit.
29:27On n'est plus dans la pornographie des années 80,
29:29où il y avait une sorte de nonchalance,
29:32de bonhomie,
29:33même si ça restait du porno.
29:34Non, non, mais c'est vrai,
29:35mais ça n'a rien à voir.
29:36Là, on est sur des scènes,
29:38c'est d'une brutalité rare,
29:39c'est de la torture.
29:40Mais d'une mécanique totale.
29:41C'est de la torture.
29:42C'est de la torture,
29:43et c'est du gros plan, du zoom.
29:45On a éradiqué toute forme de...
29:48Il n'y a même plus d'histoire,
29:50il n'y a rien.
29:51Il n'y a plus de scénario,
29:52il n'y a plus rien.
29:53C'est vraiment des scènes qui s'enchaînent,
29:55les unes après les autres,
29:56avec des gros plans.
29:57Et ça donne effectivement une image
29:58de la sexualité ou des relations
29:59qui est peut-être un peu sommaire.
30:01C'est le moins que l'on puisse dire.
30:02Des humanisés,
30:03des incarnés bestiales.
30:06Mais qui peut tout à fait convenir à des adultes,
30:10qui ont envie de le regarder,
30:12qui assument ce qu'ils regardent.
30:13Là, on est en train de parler d'enfants.
30:15Et puis le problème,
30:16on voit ce qu'on appelle les tournantes
30:18dans un certain nombre de cités, etc.
30:20C'est les 12-13 ans qui sont là,
30:21les 13-14 ans.
30:22Après, il y a des choses qui sont illégales
30:24et des choses qui sont tournées
30:25dans des conditions légales
30:26et d'autres qui sont tournées
30:27dans des conditions qui...
30:28Sauf qu'elles se confondent sur l'écran.
30:30C'est bien le problème.
30:31C'est que malheureusement,
30:32on a deux types de pornographie.
30:33Celle qui est établie dans des endroits
30:35dans la vallée de San Fernando, etc.
30:37Aux Etats-Unis.
30:38Tout ça avec des studios.
30:39Puis il y a de la pornographie
30:41qui relève en tout cas d'interventions...
30:46C'est clair.
30:47Plus musclées que ça.
30:48C'est vrai.
30:49Tout à fait.
30:50Et Stéphane a introduit une distinction
30:53qui est particulièrement précieuse
30:55entre les enjeux physiques
30:56et les enjeux psychiques.
30:57Donc effectivement,
30:58on est dans une société
30:59très angoissée, sécuritaire,
31:01où on va veiller à la sécurité physique
31:04mais où on laisse passer
31:05des risques psychiques importants.
31:07Et je voudrais dire un mot en particulier
31:09de ce risque psychique.
31:11C'est en fait que nous sommes
31:13dans l'évitement de la frustration.
31:16Et c'est ce qui conduit
31:17un certain nombre de parents
31:18d'un certain point de vue
31:19à se démettre
31:20de leurs responsabilités éducatives
31:22avec l'idée que l'enfant
31:24ne doit pas être frustré.
31:26Mais y a-t-il une éducation possible
31:28sans expérience de la frustration ?
31:30Alors évidemment,
31:31il ne s'agit pas d'être sadique
31:32et de priver comme ça arbitrairement l'enfant
31:36de choses qui sont importantes pour lui.
31:38Mais de marquer les limites
31:39à l'intérieur desquelles
31:41l'enfant va pouvoir se construire,
31:43s'ennuyer, être créatif.
31:46Et puis, cette histoire de la frustration,
31:48on la retrouve évidemment dans la sexualité.
31:51C'est-à-dire que la frustration,
31:53c'est aussi ce qui va permettre
31:54au désir de mûrir.
31:56Alors que dans la pornographie,
31:58il n'y a pas d'expérience de la frustration
32:00puisqu'on est immédiatement
32:01en relation avec l'objet.
32:03Dans le corps du sujet,
32:04si je peux me permettre,
32:06c'est vraiment tout le problème.
32:08C'est qu'on a fait l'enfant roi.
32:10Et toute la pédagogie éducationnelle,
32:12c'est l'enfant roi.
32:13Donc il n'est pas question
32:14de te priver de quoi que ce soit.
32:16C'est ça.
32:17Et d'un autre côté,
32:18il y a le signe de la violence.
32:19Mais en fait, il faut le dire,
32:21le problème c'est
32:22combien de familles
32:23ne sont plus des familles.
32:25Après, on va peut-être pleurer
32:27ou chouiner là-dessus,
32:28mais ce n'est pas le problème.
32:29On va tout de suite prendre une petite pause
32:31et on se retrouve avec vous.
32:34Et pour ne pas que l'enfance
32:35soit dans tous ces états,
32:37lisez le livre de Stéphane Blocco
32:39et Renaud Etier,
32:40« Le cybersexe, ce virus qui tue l'enfance »
32:42chez Arteges, aux éditions Arteges.
32:45Juste en une minute,
32:46vous seriez ministre de l'éducation
32:48ou ministre, je ne sais pas,
32:50vous savez, il va y avoir probablement
32:51un remaniement,
32:52sinon un changement de gouvernement.
32:53Donc à mon avis,
32:55il faut y aller là.
32:57C'est votre rôle maintenant.
32:59Stéphane Blocco, ministre de la communication,
33:01va s'occuper de lui.
33:02Qu'est-ce que vous feriez en premier
33:03dans cette histoire
33:04pour protéger l'enfance ?
33:06En une minute, légiférer.
33:07C'est-à-dire calquer ce qu'on a fait
33:09pour les risques de la route
33:11avec cette analogie
33:12que j'ai tenue avec le scooter.
33:14Simplement expliquer
33:15que quand un parent arrivera
33:16avec son enfant dans une boutique,
33:18quel que soit l'opérateur,
33:20on lui dit,
33:21les smartphones pour cet enfant de 12 ans,
33:23ce n'est pas possible.
33:24Par contre, il y a toute une gamme
33:25de téléphones, les voici.
33:26C'est ce qu'a témoigné l'auditeur.
33:29C'est la différence entre smartphone et téléphone.
33:30Bien sûr.
33:31Le smartphone, il permet
33:32le monde entier,
33:33y compris la pornographie,
33:34avec des blocages
33:35qui sont d'une rare complexité
33:37à mettre en œuvre
33:38et qui sont contournables.
33:39Bien sûr.
33:40Le téléphone classique,
33:41le dom-phone,
33:42le téléphone idiot, lui,
33:43c'est un outil de sécurité
33:44qui fait partie
33:45de notre vie contemporaine
33:46et qui ne nous pose pas
33:47de problème à l'écran.
33:48En tout cas.
33:49Juste trois mots.
33:50Je pense qu'on ne peut pas
33:51éduquer les parents
33:52à proprement parler
33:53parce que l'éducation
33:54suppose une prise en charge
33:56d'une personne
33:57qui n'est pas encore responsable.
33:59Mais on peut informer
34:00et former davantage.
34:02De la même manière
34:03qu'on accompagne les gens
34:04quand ils vont avoir un enfant
34:06pour les questions de santé
34:08avec un carnet, etc.
34:09Là, il faut vraiment
34:10les informer
34:11et les former.
34:12Les dangers du numérique,
34:14notamment en matière
34:15d'accès à la pornographie.
34:16Voilà.
34:17C'est aussi notre métier
34:18face à ceux qui déforment
34:19un fort monde.