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Face aux crises mondiales croissantes, Première Urgence Internationale intervient pour soutenir les populations civiles en situation de crise. Cette ONG, active sur 4 continents, mobilise ses compétences en santé, eau, hygiène et moyens de subsistance pour répondre aux besoins des plus vulnérables.

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Transcription
00:00Le grand entretien avec Thierry Morisset qui est fondateur et directeur général de Première Urgence Internationale.
00:12Bonjour Thierry Morisset. Première Urgence Internationale, qu'est-ce que c'est ?
00:16Alors Première Urgence Internationale est une ONG, Organisation Non-Gouvernementale, apolitique, laïque,
00:23qui s'est créée en 2011 mais qui est issue de rapprochement de deux ONG.
00:28Une qui s'est créée en 79 pour l'Afghanistan, qui s'appelle AIDE Médicale Internationale,
00:32et la seconde, Première Urgence, que j'ai co-fondée en 92 pour venir en aide aux personnes assiégées à Sarajevo à l'époque.
00:39Quelle est la mission de cette ONG aujourd'hui ?
00:42Alors aujourd'hui la mission...
00:43L'histoire, vous me l'avez faite déjà rapidement.
00:45Oui.
00:46Donc ça s'est développé, ça a démarré, vous étiez combien au départ ?
00:50Au début on était trois dans une cave.
00:51Oui.
00:52Voilà, on a profité de nos vacances de juillet-août pour essayer d'apporter une aide à Sarajevo
00:58parce que l'un d'entre nous était marié à une Bosniaque, donc on s'est rassemblés, on a bricolé,
01:04et puis ceux qui sont allés à Sarajevo, en fait au retour, alors que ça n'était pas du tout prévu,
01:10ont eu le souhait de recommencer, mais je me suis fait embarquer dans cette aventure.
01:14Et donc ça a grandi considérablement.
01:17Oui, beaucoup grandit, surtout à partir de 2011 parce que le rapprochement des deux organisations
01:22a permis d'adjoindre des compétences.
01:24Première Urgence s'occupait de soutien alimentaire, d'eau, d'assainissement, de reconstruction,
01:30de gestion de camps de réfugiés, alors que l'AIMI, elle s'occupait de santé.
01:34Donc l'association de toutes ces compétences nous permettait dans un second temps,
01:38donc de par la création, de pouvoir fournir aux populations dites vulnérables, dans notre jargon,
01:44l'essentiel des services de secours premiers.
01:47Ça c'est la mission principale aujourd'hui ?
01:49Voilà, et ça demeure la mission principale.
01:51Alors à qui s'adresse cette ONG ?
01:53Alors elle s'adresse donc à des populations vulnérables partout dans le monde.
01:57Aujourd'hui on comptabilise à peu près 300 millions de personnes nécessiteuses et vulnérables,
02:02ce sont les sources des Nations Unies.
02:04Pour ce qui est de Première Urgence, nous intervions nous dans 26 pays,
02:08qui sont situés en Afrique, Moyen-Orient, Asie.
02:12J'en oublie pas.
02:14Et nous soutenons entre 5 et 6 millions de personnes par an,
02:19au travers de nos actions, donc en santé ou assainissement, comme je vous le disais.
02:24Alors comment ça se passe aux interventions ?
02:26Vous intervenez donc, vous avez des bénévoles, des salariés ?
02:30Non, nous n'avons plus de bénévoles.
02:32Nous n'avons que des salariés.
02:34Nous sommes aujourd'hui 3500,
02:36répartis donc dans les 26 pays.
02:40Et les gens qui sont au siège, les personnels du siège, eux ne sont que 140.
02:44L'essentiel de nos salariés sont principalement des salariés nationaux.
02:49Et nous avons 200, 220 expatriés qui viennent sur les missions
02:53pour apporter une expertise et de l'encadrement.
02:56Avec tout ce qui se passe dans le monde,
02:58comment arrivez-vous à gérer toutes ces situations de crise, à être présents ?
03:03D'une part sur les situations de crise du moment,
03:05nous y sommes présents depuis longtemps.
03:07L'Afghanistan c'était 79, par exemple.
03:09Le Liban c'était 96.
03:11Donc quand les crises se sont aggravées, on va dire,
03:14même l'Ukraine, donc 2014,
03:17nos équipes étaient déjà présentes dans le Donbass.
03:19Nous avons été, comme tout le monde, surpris par l'offensive russe,
03:21mais nous avions déjà des équipes.
03:23A la fois expatriées et nationales.
03:25Donc ça nous a permis de changer la qualité de notre soutien,
03:29mais d'être aussi réactifs.
03:31Alors vous avez des équipes dans X pays ?
03:35Dans ces 26 pays.
03:36Donc qui sont prêtes à intervenir tout le temps.
03:39Il y a des structures dans chaque pays,
03:41et qui sont rattachées au siège ?
03:43Au siège de l'association.
03:45Et donc vous êtes tous les jours à confronter à la difficulté du monde ?
03:50Oui, d'un point de vue très général,
03:53mais ceux qui sont les plus en prise avec les réalités de terrain
03:56sont nos personnels sur place,
03:58et notamment nos personnels nationaux,
04:00qui connaissent bien mieux que les expatriés,
04:03bien mieux que nous,
04:04le terrain nous guide dans la nature de l'aide
04:09qui convient le mieux aux populations que nous ciblons.
04:12Alors comment intervenez-vous dans tous ces pays ?
04:15Votre intervention est axée sur quoi exactement ?
04:18Sur l'aide à la misère, la santé, la sécurité ?
04:23Beaucoup de santé.
04:25C'est aujourd'hui à peu près la moitié de notre volume d'activité relève de la santé.
04:30Après c'est du soutien alimentaire,
04:32c'est de l'eau et de l'assainissement,
04:34dans les camps de réfugiés par exemple.
04:36C'est un soutien psychologique,
04:38on en fait beaucoup en Ukraine.
04:40Ce type d'activité relève de notre palette de savoir-faire
04:44qu'on adapte en fonction des situations que nous rencontrons.
04:47Alors on va voir les chiffres de votre ONG.
04:51C'est une association d'ailleurs.
04:53Une association, oui.
04:54Avec Virginie Mass, et on va se retrouver juste après.
04:57Première urgence internationale est le fruit d'une fusion en 2011
05:01entre deux organisations,
05:03Aide médicale internationale créée en 1979
05:06et Première urgence créée en 1992.
05:10L'ONG travaille aujourd'hui avec 3 007 collaborateurs nationaux,
05:14219 expatriés
05:16et compte 139 personnes salariées au siège de l'organisation France.
05:21Environ 5 millions de personnes sont actuellement soutenues dans le monde
05:25à travers les programmes de Première urgence internationale
05:28et l'ONG intervient dans 25 pays.
05:31Enfin, le budget annuel est de 122 millions d'euros
05:34et 93% de leurs ressources sont dépensées sur le terrain.
05:39Donc on avait vu avec Virginie que les chiffres
05:42et l'ampleur de votre ONG,
05:44donc Première urgence internationale,
05:46avec 3 000 collaborateurs,
05:49ce qui est colossal, un budget de 122 millions.
05:52Qui vous finance ?
05:53Alors ce sont principalement des coopérations d'État
05:57et des agences des Nations Unies.
05:58On travaille, on est financé par le commissariat aux réfugiés,
06:01l'UNICEF, le programme alimentaire mondial, l'OMS,
06:04mais aussi la coopération américaine, suédoise, allemande, anglaise, française.
06:09Et voilà.
06:10Donc on a en gros une cinquantaine de bailleurs institutionnels
06:14qui nous soutiennent chaque année.
06:16Comment avez-vous réussi à faire ça ?
06:18Comment on a réussi à les convaincre ?
06:20Oui, à convaincre les gens de donner, les États de donner de l'argent.
06:23D'une part parce que nous sommes dans des pays
06:26ou dans des zones où peu d'acteurs humanitaires sont présents.
06:29Nous soumettons des projets à ces bailleurs
06:31et si ça correspond à leur souhait technique ou stratégique,
06:37ils financent ou co-financent les projets que nous souhaitons mettre en place.
06:42Mais pour ça, il faut montrer pas de blanche, comme on dit.
06:45Nous sommes l'objet d'un grand nombre d'audits,
06:48de contrôles, de redevabilité.
06:50Je crois que cette année, en 2024,
06:53on a eu à peu près 200-210 audits
06:55de tous ces bailleurs qui sont en charge.
06:57Donc de contrôler le bon usage qui est fait
06:59de leurs fonds qui sont en fait le fonds des taxpayers,
07:02comme les Américains peuvent le dire.
07:04C'est-à-dire qu'ils vérifient votre indépendance ?
07:06Non, ils vérifient l'usage que l'on fait des fonds.
07:09On leur propose un projet, je dis n'importe quoi,
07:12pour exemple de vaccination,
07:14ils vont contrôler qu'effectivement, nous avons vacciné,
07:17comme nous l'avions proposé,
07:18telle catégorie de population dans telle quantité.
07:21Voilà, tout est contrôlé, ce qui est normal.
07:24Ce qu'on propose, et eux financent,
07:27mais ils veulent savoir si vraiment
07:30les fonds qu'ils nous ont alloués ont été bien utilisés.
07:33Thierry Morisset, vous parlez de l'aide des Etats,
07:35est-ce que les entreprises vous aident aussi ?
07:37Oui absolument, nous avons des partenaires entreprises
07:40qui peuvent soit abonder ce qu'on a appelé, nous,
07:43un fonds d'urgence,
07:45donner de l'argent à ce fonds qui nous permet
07:48de répondre quasiment en temps réel
07:52à une urgence que nous n'aurions pas vu venir.
07:55Et puis aussi, il y a des entreprises avec lesquelles
07:57on loue des partenariats de compétences.
08:00Je prends pour exemple la société ESRI,
08:04qui est, je crois, le leader mondial de la cartographie,
08:07qui nous a beaucoup aidé, notamment en Ukraine,
08:10pour cartographer à la fois les endroits où nous travaillons,
08:13les déplacements des populations,
08:15et également d'un point de vue sécuritaire,
08:17nous aider à prendre les chemins les moins exposés
08:20aux conflits.
08:23Je pense que toute entreprise a nécessairement
08:26des compétences qui peuvent s'appliquer à l'humanitaire,
08:29donc c'est du pro bono, c'est du bénévolat de leur part,
08:32et ça nous est extrêmement profitable,
08:34parce qu'on n'a pas les moyens, nécessairement,
08:36de se payer des compétences,
08:39à ce point technique,
08:41qui se trouvent dans l'entreprise,
08:43et donc je crois que les partenariats entreprises
08:45sont vraiment quelque chose qui nous est utile,
08:48et qui nous serait encore plus utile.
08:50– Est-ce que les particuliers peuvent vous aider aussi ?
08:52– Les particuliers aussi, oui, nous faisons des appels de fond,
08:54principalement sur les crises importantes ou connues,
08:57aujourd'hui, dans celles qui font la une des journaux,
09:01il y a toujours l'Ukraine, Gaza et le Liban,
09:06où nous sommes présents de longue date.
09:08– Et Gaza aussi.
09:10– Je ne vous cache pas qu'il est très difficile aujourd'hui
09:12de travailler dans Gaza,
09:14même si nos équipes sont toujours sur place,
09:16nous avons de grandes difficultés
09:18à approvisionner ces équipes,
09:20de par les blocages qui sont faits à l'entrée.
09:23– Comment vous faites ?
09:24– On négocie, c'est pas facile,
09:27et puis à force de négocier,
09:29on arrive à atteindre notre but,
09:32mais c'est difficile.
09:33– Quelles sont vos priorités ?
09:35– Les priorités,
09:37pour moi c'est la sécurité de mes équipes,
09:40c'est de pouvoir conserver ce qu'on appelle,
09:42dans notre jargon, l'espace humanitaire,
09:45c'est-à-dire pouvoir accéder aux populations vulnérables,
09:48et depuis 4-5 dernières années,
09:50j'avoue que cette préservation de l'espace humanitaire
09:53est de plus en plus difficile,
09:55pour des raisons sécuritaires,
09:57notamment liées à des conflits
09:59ou à des guerres de haute intensité,
10:01l'Ukraine par exemple,
10:03et puis aussi parce que dans certains pays,
10:06certaines zones de ces pays sont sous contrôle
10:09de groupes radicaux islamistes
10:12qui nous interdisent l'accès,
10:14alors qu'un grand nombre de populations
10:17y vivent dans un grand élément
10:19et que nous ne pouvons donc pas aider.
10:21– Les collaborateurs qui s'engagent avec vous
10:23ont un idéal, j'imagine ?
10:25– Oui, alors ceux qui…
10:26– Ce n'est pas uniquement chercher du boulot ?
10:28– Non, et puis en tous les cas,
10:30ce n'est pas pour l'argent,
10:31même s'ils sont salariés,
10:32on est sur un niveau de rémunération
10:34qui est comme une mesure avec celui d'entreprise,
10:36pour autant, on a besoin des compétences
10:38que l'on retrouve dans plein d'entreprises,
10:42c'est comme une grosse PME,
10:44nous avons aussi besoin de comptables,
10:46nous avons besoin de ressources de DRH,
10:49et puis des compétences plus spécifiques
10:52qui sont liées à une approche plus opérationnelle
10:54et donc de connaissances humanitaires de terrain.
10:57– Quels sont vos objectifs à courir moyen terme ?
11:00– Moyen terme, c'est pouvoir satisfaire
11:02encore plus de populations,
11:04mais pour ça, il faut que l'espace humanitaire
11:07soit préservé, et puis il nous faut des fonds,
11:10or la tendance qui se généralise en ce moment
11:14est plutôt à la baisse des moyens financiers
11:16pour la mise en œuvre des projets militaires,
11:18alors que les besoins ne cessent de croître.
11:20– Merci beaucoup.

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